Les métabolites secondaires forment une famille de composés extrêmement variés sur le plan structural avec des milliers de molécules d’origine marine ou terrestre isolées, incorporant plusieurs centaines de squelettes carbonées et jouant un rôle essentiellement écologique. L’impact des métabolites secondaires au niveau des interactions entre l’organisme et le biotope est souvent dû à leur forte activité contre les agents pathogènes ou leur toxicité contre les prédateurs [1] [2] [3]. Cette activité biologique est à l’origine de l’extraordinaire développement de la chimie des produits naturels et d’origine marine en particulier. En effet l’étude de ces produits naturels a conduit à l’isolement et à l’identification de plusieurs molécules possédant une activité thérapeutique notable dont les almazoles C et D. Ces deux composés ont été isolés par NDIAYE et coll. (1994) [4]. Des études fluorimétriques récentes ont été menées par MBOW et coll. (2014- 2015) [5]et ont conduit à des résultats très intéressants qui constituent notre socle de recherche. En effet, l’activité antibactérienne et les propriétés fluorescentes de ces composés qui représentent les premiers membres d’une nouvelle classe d’alcaloïdes indoliques, justifient une étude approfondie allant dans le sens de la détermination de leurs propriétés physico chimiques. Le moment dipolaire constitue un indicateur essentiel pour la détermination structurale mais aussi pour la réactivité des composés chimiques en général. La méthode que nous allons utiliser dans ce mémoire est la méthode solvatochromique basée sur les spectres d’absorption et d’émission des molécules dans différents solvants.
PRESENTATION DES ALMAZOLES C ET D
Les almazoles C et D sont des composés organiques caractérisées par la présence du très rare oxazole 2,5-disubstitué par C5’ à un noyau indole et par C2’ à un groupement N,N-dimethylphénylalanine. Ils sont aussi caractérisés par leur activité antibactérienne et leurs propriétés fluorescentes [5].
ALMAZOLE C
L’almazole C est un métabolite secondaire isolé à partir d’une algue Haraldiophyllum sp récoltée à Dakar au Sénégal. Sa formule brute est de C21H21N3O, sa masse molaire 331 g.mol-1, et sa densité 0,73. Sur le plan biogénétique, l’almazole C peut être issu d’une condensation entre une partie du tryptophane et une autre dérivée de la N,N-dimethylphénylalanine [5].
ALMAZOLE D
L’almazole D, tout comme l’almazole C, est un métabolite secondaire isolé à partir d’une algue Haraldiophyllum sp récoltée à Dakar au Sénégal. Il a pour formule brute C22H21N2O3. Sa masse molaire est de 375 g.mol-1 et sa densité égale à 0,78. L’évaluation de l’activité biologique indique que l’almazole D est le premier composé de la famille des almazoles doté d’une activité antibactérienne.
Il présente une forte activité antibactérienne contre les germes de Gram-négatif tels que Serratia marcescens et Salmonellatyphi XLD [6].
EXTRACTION ET ISOLEMENT
A partir d’une algue du nom de Haraldiophyllum sp qui se présente sous forme d’un tapis formé d’enchevêtrement de petites unités de forme arrondie avec un diamètre d’un (1) cm environ [7] récoltée en marée basse sur les roches des Almadies situées près de Dakar (Sénégal), NDIAYE et coll. (1994) [4] ont pu isoler et identifier quinze (15) métabolites secondaires dont huit (8) qui sont nouveaux et certains comme les almazoles C et D présentent de nouveaux squelettes [4, 6, 8-9]. Après récolte, l’algue est mise automatiquement dans de l’éthanol pour une homogénéisation de trois (3) mois puis filtrée, ce qui a permis de récupérer l’extrait éthanolique et 203 g de résidu sec. Après évaporation de l’alcool, le résidu repris avec un peu d’eau est extrait à l’hexane puis à l’acétate d’éthyle. Le résidu issu de l’acétate d’éthyle (1,5 g) a été soumis à un flash chromatographie en phase normale (Si60, 75 µm) avec un gradient d’élution (fractions de 40 mL). Celle-ci démarre avec un mélange hexane/acétate d’éthyle (95 : 5) et sera poursuivie jusqu’à une 18iéme fraction en faisant varier la proportion de l’hexane.
Les différentes fractions sont ensuite analysées par CCM (Si60 ou RP18). Les fractions présentant des spots similaires ont été réunis puis le solvant évaporé. Les différents produits ont été ensuite séparés et purifiés par chromatographie liquide hautement performance (CLPH). Le résidu issu des fractions 21 à 23 a été soumis à une autre flash chromatographie (Si60) avec gradient d’élution en démarrant avec le mélange hexane/acétate d’éthyle comme solvant d’élution. Puis 17 fractions de 40 mL ont été récupérées par une variation de 5% de la proportion de l’hexane et soumises à une analyse par CCM et les fractions présentant des spots similaires ont été réunies et le solvant évaporé. Le résidu issu de la fraction 6 à 9 de cette « flash » chromatographie, soumis à une CLPH dans les mêmes conditions que pour les fractions 17 à 20 a conduit à l’almazole C.
Une deuxième récolte de l’algue Haraldiophyllum sp a été faite toujours aux Almadies. Apres séchage (310 g), on extrait à froid avec le méthanol pendant 15 jours, puis après filtration et évaporation du solvant le résidu repris avec 200 mL d’eau est extrait à l’acétate d’éthyle. Apres évaporation du solvant, le résidu (4,12 g) est soumis à une flash chromatographie (Si60, 220 µm) avec gradient d’élution (fraction de 40 mL). Celle-ci démarre avec le mélange hexane/acétate d’éthyle et sera poursuivi jusqu’à la 20ième fraction, en faisant varier la proportion de l’hexane de 5%. L’élution est maintenue avec l’acétate d’éthyle seul jusqu’à la 30éme fraction, ensuite on passe à des mélanges méthanol/acétate d’éthyle. Les différentes fractions ont été analysées par CCM (Si60 ou RP-18). Les fractions 62-78 très fluorescentes après exposition sous la lampe UV (365 nm) sont réunies puis le solvant évaporé. Le résidu (144 mg) est soumis à une flash chromatographie RP-18 sans gradient d’élution (CH3CN/H2O). Les fractions 1a et 2a issues de cette flash chromatographie sont réunies puis le solvant évaporé, le résidu soumis à une HPLC RP- 18(CH3CN/H2O) conduit à l’almazole D.
La grande partie de l’almazole D a été isolée de la phase aqueuse. Ainsi après évaporation complète de l’eau, le résidu est repris avec un minimum de méthanol. Le surnageant a été récupéré puis le solvant évaporé. Le résidu ainsi obtenu est soumis à un flash chromatographie RP-18 avec gradient d’élution CH3CN/H2O (0 :100) sur la fraction 1, et au niveau des fractions de 2 à 17 on fait varier pour chaque fraction de 40 mL, la proportion de CH3CN de 2,5%, puis on élue jusqu’à la fraction 27 avec CH3CN seule. Après analyse des fractions par CCM, nous remarquons qu’à partir de la fraction quinze (15) seul l’almazole D sort de la colonne à l’état pur (475 mg avec un rendement total = 0,21%). Compte tenu de sa grande polarité, l’almazole D a été isolé séparément des autres et sa grande partie a été isolée de la phase aqueuse.
INSTRUMENTATION
Les spectres d’émission ont été enregistrés à l’aide d’un Spectrofluorimètre model LS55 Perkin Elmer et piloté par un logiciel FLWinlab relié et piloté par un logiciel LCWin-25.
PRODUITS ET SOLVANTS UTILISES
L’hydroxyde de sodium (99%), l’acide chlorhydrique (37% et 1,2), le cyclohexane le DMF et l’acétonitrile proviennent de chez Sigma Aldrich et l’éthanol (98%) utilisé provient de Prolabo (France). Tous les solvants sont de qualité analytique.
INFORMATIONS SUR L’UTILITE DES MOMENTS DIPOLAIRES
La détermination du moment dipolaire à l’état excité des molécules excitées électroniquement est utile pour la conception des matériaux non linéaires et permet de juger du site d’attaques électrophiles et nucléophiles dans certaines réactions photochimiques. Pour ce fait, diverses techniques peuvent être utilisées pour estimer les moments dipolaires à l’état fondamental d’un système chimique comme la polarisation électrique de la fluorescence, le dichroïsme électrique ou conductivité à micro-ondes et les méthodes solvatochromiques qui font l’objet de ce mémoire. En effet, l’excitation d’une molécule par un photon peut provoquer un transfert de charges conduisant à des changements de conformation dans l’état excité, ce qui se traduit par une augmentation ou une diminution du moment dipolaire de l’état excité par rapport à l’état fondamental. Cette différence de valeurs du moment dipolaire à l’état excité et à l’état fondamental indique un transfert de charge intramoléculaire d’après une étude menée sur la 2- aminobenzimidazole [10]. La dépendance des spectres d’absorption et des maxima de bande de fluorescence par rapport aux solvants est utilisée pour estimer les moments dipolaires à l’état excité de différentes molécules. Les moments dipolaires de l’état excité et de l’état fondamental d’une molécule peuvent être déterminés au moyen des méthodes de déplacement solvatochromique de Bilot-Kawski basées sur les paramètres de polarité du solvant [11]. Le moment dipolaire d’une molécule est un paramètre physique très important en raison des informations qu’il fournit sur le changement de la distribution électronique et le changement électronique pendant l’excitation .
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Table des matières
INTRODUCTION
I. PARTIE BIBLIOGRAPHIQUE
I-1. PRESENTATION DES ALMAZOLES C ET D
I-1-1. ALMAZOLE C
I-1-2. ALMAZOLE D
I-2. EXTRACTION ET ISOLEMENT
II. PARTIE EXPERIMENTALE
II-1. INSTRUMENTATION
II-2. PRODUITS ET SOLVANTS UTILISES
II-3. METHODES DE CALCUL DES MOMENTS DIPOLAIRES
III. RESULTATS ET DISCUSSION
III-1. INFORMATIONS SUR L’UTILITE DES MOMENTS DIPOLAIRES
III-2. L’EFFET DE SOLVANT SUR LES SPECTRES D’ABSORPTION ET D’EMISSION
III-3. DETERMINATION EXPERIMENTALE DU MOMENT DIPOLAIRE A L’ETAT FONDAMENTAL ET AU PREMIER ETAT EXCITE SINGULET DES ALMAZOLES
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE