Détermination de l’incertitude-type composée

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L’AFM métrologique du LNE, un instrument de référence

Le mAFM du LNE doit-être caractérisé le plus exhaustivement possible afin de déli-vrer un certificat d’étalonnage fiable. Il doit être conçu et exploité de manière à ce que nos mesures soient rattachées au Système international d’unités (SI) établi par le Bureau International des Poids et Mesures (BIPM) [18]. Pour comprendre son fonctionnement, nous allons d’abord décrire la base d’un microscope à force atomique.
L’AFM
Les microscopes en champ proche, ou microscopes à sonde locale (SPM : Scanning Probe Microscope) inventés dans les années 1980, sont une branche de microscopie qui image des surfaces à l’aide d’une sonde physique qui analyse l’échantillon. Une boucle d’asservissement (contrôle de rétroaction) est ajoutée permettant de réguler la distance entre l’échantillon et la sonde. Le premier SPM a été le « topografiner » de Russell Young et al. en 1972 [19], prédécesseur du célèbre STM de Binnig et Rohrer mis en place en 1981 avec l’invention du microscope à effet tunnel (STM : Scanning Tunneling Microscope) [20]. Avec l’apparition du microscope à force atomique (AFM : Atomic Force Microscope) [21], les SPM ont ouvert une fenêtre sur le nanomonde avec des applications en imagerie, en métrologie et en nano-manipulation. Ce qui fait de l’AFM un avantage parmi les SPM est qu’il peut être utilisé dans différents environnements conducteurs ou non conducteurs, allant de l’air ambiant au vide, aux hautes et basses températures, et en milieu liquide pour l’examen des structures biologiques.
Le fonctionnement de l’AFM est principalement lié aux forces exercées par les atomes qui constituent l’extrémité de la sonde sur les atomes de l’échantillon. La sonde est caractérisée par une pointe constituée généralement de dioxyde de silicium ou de nitrure de silicium avec un apex (rayon de courbure) de l’ordre du nanomètre. Ce rayon de courbure a pour but de limiter le nombre d’atomes en interaction avec l’échantillon. La pointe est elle même reliée à un levier (cantilever) possédant diverses géométries avec pour raideur K. Ainsi le levier aura pour rôle de traduire les forces exercées par l’extrémité de la pointe sur l’échantillon à travers sa déflection liée aux forces attractives ou répulsives. En effet, le champ de forces émis par deux atomes va faire que les atomes se repoussent ou s’attirent selon leur distance. La force exercée par ces deux atomes est représentée par l’énergie en fonction de leur distance à travers le potentiel de Lennard-Jones [22], ainsi la pointe aura tendance à être attirée par l’échantillon à une certaine distance, ou à être repoussée (figure 1.6). Cette zone de répulsion est liée au principe de Pauli [23] et la zone d’attraction est liée notamment aux forces de van der Waals [24].
Afin de récupérer l’amplitude de déflexion du levier, un système de détection est utilisé généralement par le biais de la technique du levier optique (figure 1.7) [25, 26]. Une diode laser va émettre un faisceau sur le dessus du levier, puis une fois réfléchi il sera réceptionné sur un récepteur photodiode quatre quadrants en détectant l’intensité émise par le faisceau sur chaque quadrant. La photodiode va ainsi analyser le déplacement du faisceau afin de détecter les variations de déflexion du levier et convertir ce mouvement en signal électrique (signal de détection).
Lorsque la déflexion du levier a été détectée, un système d’actionneurs piézoélec-triques Z va permettre de monter ou baisser l’échantillon afin de retrouver la flexion du levier à son état initial. Ainsi nous avons mesuré la hauteur d’un premier pixel de l’image. Afin de mesurer la déflexion du levier sur chaque point (pixel) d’une zone de l’échantillon, deux autres actionneurs pièzoélectriques XY vont être mis en place pour effectuer un balayage sur toute la surface. Ainsi, sous l’action de tensions appliquées aux électrodes des actionneurs piézoélectriques, des déplacements à l’échelle nanométrique vont pouvoir être effectués dans les trois directions de l’espace.
Afin de maintenir la flexion du levier à un état de consigne à chaque point de l’échan-tillon, un asservissement électronique contrôle la distance entre la pointe et l’échantillon en agissant sur l’actionneur piézoélectrique suivant l’axe Z. Il s’agit généralement d’un contrôleur PID (Proportionnel, Intégral et Dérivé) [27]. Le contrôleur d’asservissement est donc utilisé pour maintenir une consigne constante (amplitude d’oscillation A0, fré-quence d’oscillation f0 ou raideur du cantilever k0, etc.). L’electronique de commande PID détecte cette interaction en exploitant le signal sortant de la photodiode (signal de détection). La comparaison du signal traité, sortant de la photodiode, à une valeur de consigne, permet d’obtenir une régulation pointe/surface en agissant sur l’actionneur suivant l’axe Z. En combinant le balayage de la surface en X et Y avec la régulation en distance de l’axe Z nous obtenons une image grâce aux positions XYZ de chaque point mesuré.
Plusieurs modes sont utilisés selon la consigne utilisée pour réguler la hauteur Z de la pointe par rapport à l’échantillon. Les trois modes généralement les plus utilisés sont :
— Le mode contact : la pointe est rapprochée sur l’échantillon jusqu’à obtenir un levier statique avec une déflexion dans la zone répulsive. Lors du balayage de la surface en XY, à partir de la déflexion du levier en chaque point de l’image, le contrôle d’asservissement fonctionne en mesurant la force entre la surface et la pointe (par le biais de la position du faisceau sur la photodiode), puis en commandant le piézoélectrique le long de l’axe Z qui établit la position relative de la pointe et la surface en maintenant des forces entre eux à un niveau de consigne spécifié par l’utilisateur (généralement de l’ordre de 10−8 N).
— Le mode non contact : appelé FM-AFM (FM : modulation de fréquence) ou NC-AFM (NC : non contact). Ce mode s’effectue dans le vide et dans la zone attractive. Le levier est oscillé par le biais d’un diapason piézoélectrique afin de maintenir son oscillation à sa fréquence propre [28, 29]. Durant le balayage XY, lorsque la pointe est au contact d’un relief, la constante de raideur du levier est modifiée et par conséquence ça fréquence propre aussi. Ensuite le piézo-actionneur Z éloigne ou rapproche la pointe de la surface afin de retrouver la fréquence propre de consigne.
— Le mode tapping : appelé AM-AFM (AM : modulation d’amplitude). Ce mode s’effectue dans la zone attractive et répulsive. Le levier est oscillé à sa fréquence propre, cependant c’est l’amplitude d’oscillation qui va être prise comme consigne. La pointe est maintenue à une distance de l’ordre de la valeur moyenne de l’amplitude d’oscillation. Le contrôle d’asservissement mesure l’amplitude de l’oscillation lors du balayage de la pointe sur la surface de l’échantillon. Puis il commande le piezo-actionneur Z pour maintenir le levier à sa consigne d’amplitude d’oscillation. C’est le mode utilisé dans nos travaux afin d’éviter les frottements latéraux de la pointe durant le balayage et ainsi de mieux préserver les étalons et la pointe.
Le développement de l’AFM ouvre des perspectives d’applications considérables. Les mesures couvrent la résolution atomique [30], l’échelle du nanomètre jusqu’au micro-mètre. Il est possible d’analyser tout type de matériaux (durs, mous, biologiques, etc.) aussi bien à l’air ambiant, sous vide ou en milieu liquide. C’est pour ces raisons que l’AFM a su conquérir, avec en parallèle l’utilisation du microscope électronique à ba-layage (SEM : Scanning Electron Microscope), une place essentielle pour la pratique de la métrologie dimensionnelle à l’échelle nanométrique où chaque matériau présente ses propres défis métrologiques.
La solution à la traçabilité des SPM proposée par les laboratoires nationaux de mé-trologie a été de développer des instruments métrologiques basés sur le principe de l’AFM en ajoutant des capteurs de position XYZ étalonnés (généralement des interféromètres [31]). Ainsi, un AFM métrologique est un instrument avec une très grande précision pour les mesures dimensionnelles où l’intégration des interféromètres permet à la traçabilité de l’instrument, d’être directement reliée à l’unité de longueur du SI. Des AFM métrolo-giques (mAFM) ont été développés dans différents laboratoires nationaux de métrologie à travers le monde au cours des 20 dernières années [30, 32–45].
Les laboratoires vont adopter différentes approches pour concevoir un AFM métro-logique. Il peut être construit à partir d’un AFM commercial modifié pour lequel la fonction métrologique est ajoutée. C’est le cas par exemple pour certains laboratoires tels que le NPL (Royaume-Uni [46]), le KAIST (Corée [47]), le METAS (Suisse [39]), le DFM (Danemark [17]), la PTB (Allemagne [48]), le NIM (Chine [41]) et le CMS (Corée [49]). L’inconvénient de cette solution est que les performances dépendent fortement de l’AFM commercial allant parfois à l’encontre des considérations métrologiques souhai-tées. Mais l’avantage de cette solution est de réduire sensiblement le coût et le temps de développement puisque seule l’intégration des fonctions métrologiques est nécessaire, telles que l’intégration de capteurs de position étalonnés, qui sont soit des interféromètres soit des capteurs capacitifs. L’avantage du capteur capacitif est qu’il permet d’obtenir une meilleur linéarité sur les mesure de distance à l’échelle du nanomètre (contrairement aux effets des non-linéarités perçus par les interféromètres présentés au chapitre 4.2.8). Mais le capteur capacitif n’est pas directement traçable au mètre SI, il nécessite donc d’être caractérisé et étalonné périodiquement. Les capteurs capacitifs sont utilisés par exemple par les laboratoires tels que l’INRIM (Italie [37]), le NIST (USA [50]), le DFM (Danemark [17]), le METAS (Suisse [39]), le CMS (Corée [49]) et le KAIST (Corée [47]).
La conception de l’instrument peut être complète. Dans ce cas, tous les composants de l’AFM métrologique sont développés. le coût et le temps de développement sont généralement plus importants. Cependant, ils offrent une liberté totale de conception permettant ainsi une meilleure optimisation des fonctions métrologiques. En effet, les grandeurs d’influence peuvent alors être traitées avec une attention particulière afin de minimiser leur impact dans le bilan d’incertitude de l’AFM métrologique.
AFM métrologique du LNE
Généralement, pour être directement liés à la traçabilité de l’unité du mètre SI, trois interféromètres sont intégrés et alignés suivant les axes X, Y et Z afin de contrôler le balayage XY et la hauteur Z de la pointe par rapport à l’échantillon. Néanmoins, dans notre cas, l’AFM métrologique du LNE utilise une configuration originale (figure 1.8(a)) où quatre interféromètres différentiels double passage contrôlent en temps réel la position relative de la pointe par rapport à l’échantillon. Ils ne sont pas alignés mais inclinés par rapport aux axes X, Y et Z, placés dans un plan horizontal au-dessous de la platine de translation et symétriques en conformité avec le reste de l’instrument. Les interféromètres sont des sources lasers hélium-néon étalonnées en fréquence [51] pour être directement traçables au mètre SI. Dans cette configuration originale, les quatre interféromètres sont inclinés de 35◦ sur le plan XY et répartis à 90◦ autour de l’axe Z. Ils sont situés à chaque coin d’une base de pyramide carrée, répartis symétriquement autour de la pointe centrée à l’origine du système de coordonnées XY Z. Pour mesurer les déplacements XY du balayage et la hauteur Z de la pointe par rapport à l’échantillon, les interféromètres sont pointés en direction des miroirs polis sur les deux prismes, le prisme de référence et le prisme mobile (figure 1.8(b)). En raison de la géométrie du système, les deux prismes ont la forme d’une pyramide inversée tronquée à quatre faces avec un angle au sommet de 55◦.

Interféromètre de Michelson

L’interférométrie est une méthode de mesure utilisant le phénomène d’interférence des ondes lumineuses propagées dans un laser. Elle étudie le changement d’interférence des ondes lors d’un déplacement. La mesure de ce déplacement est largement utilisée pour le contrôle mécanique des mouvements dans l’usinage de précision et l’étalonnage tel que dans notre cas. La technique repose sur l’utilisation de deux faisceaux lumineux, plus particulièrement avec un même faisceau divisé en deux, et d’un motif d’interférence formé par la superposition de ces deux faisceaux. Nous pouvons ainsi détecter des chan-gements sur le motif d’interférence lorsque l’un des chemins optiques des deux faisceaux lumineux est modifié. En effet, la superposition des deux ondes peut soit se construire, soit se détruire selon leur phase. Afin de générer un motif d’interférence avec une grande précision (franges distinctes), il est très important d’avoir une seule source de longueur d’onde très stable qui a été préalablement étalonnée dans des conditions extrêmement bien maitrisées.
C’est Albert A. Michelson qui démontre l’utilisation des principes de l’interférence de la lumière comme outil de mesure en développant les premiers interféromètres. A l’heure actuelle, les principes fondamentaux de l’interférométrie de Michelson restent les mêmes, seules les technologies ont été développées afin d’améliorer la précision et la qualité des mesures. Il existe donc différentes configurations d’interféromètres basées sur le principe de Michelson.
Pour illustrer ce principe fondamental, un interféromètre de Michelson se compose d’un séparateur de faisceau (un miroir demi-argenté), de deux miroirs et d’un détecteur de frange [53] (figure 1.10). Les deux miroirs sont des rétro-réflecteurs, c’est à dire des prismes qui réfléchissent le faisceau incident dans la direction parallèle à la direction d’où il provient. L’un des rétro-réflecteurs est le miroir de référence qui est immobile, l’autre rétro-réflecteur est le miroir mobile (miroir de mesure) dont la distance varie par rapport au séparateur de faisceau.
Lorsque le faisceau laser passe à travers le séparateur de faisceau, il est scindé en deux faisceaux (bras de référence et bras de mesure) ayant chacun un chemin optique différent. l’un part en direction du miroir de référence (rétro-réflecteur immobile) et l’autre part vers le miroir de mesure (rétro-réflecteur mobile). L’utilisation des miroirs assure que les faisceaux de référence et de mesure soient parallèles lorsqu’ils retournent au séparateur de faisceau afin qu’ils soient recombinés. Les deux faisceaux recombinés atteignent ensuite le détecteur de frange où leur signal interfère l’un avec l’autre de manière constructive ou destructive. Au cours de l’interférence constructive, les deux faisceaux sont en phase et les sommets des deux faisceaux se renforcent mutuellement, ce qui donne une frange brillante. Alors que pendant l’interférence destructrice les faisceaux sont déphasés, les sommets d’un des faisceaux annulent les creux du second et provoquent une frange foncée.

Traçabilité de la chaîne métrologique du mAFM du LNE

Les travaux réalisés par Younes Boukellal sur le mAFM ont permis de limiter consi-dérablement le nombre de composants rentrant en jeu dans la chaîne métrologique du mAFM [52]. Cette chaîne métrologique est le chemin conceptuel englobant toutes les parties physiques, les capteurs et les contrôleurs qui fournissent une référence pour la détermination de la position de la pointe par rapport à l’échantillon [69]. La dissociation de la chaîne métrologique avec le reste de l’instrument (appelé chaîne structurelle) se fait essentiellement grâce aux posages isostatiques. Ce posage permet la répétabilité et la précision d’une position unique d’un objet à travers six points de contact (assemblage trois V) afin d’éviter toute propagation de bruits externes sur cet objet [70, 71].
L’assemblage du prisme de référence sur sa structure porteuse permet de rendre le prisme de référence fixe (figure 1.13(a)). Cet assemblage en posage isostatique permet de dissocier le prisme de référence au reste des éléments du mAFM. Ainsi, les contraintes extérieures transmises dans la chaîne structurale (vibration, dilatation, etc.) ne se pro-pagent pas dans le prisme. La pointe du mAFM, qui permet de sonder l’échantillon, est liée directement au prisme de référence, d’où la nécessité d’éviter tout bruit extérieur qui engendrerait des déformations sur le prisme. Le prisme mobile (ou de mesure) supporte l’échantillon, il est assemblé à la platine de translation afin de déplacer le prisme en XY pour le balayage de l’échantillon et en Z pour réguler la hauteur de l’échantillon à la pointe selon la consigne prédéfinie. Son posage isostatique sur la platine de translation permet aussi de le dissocier de la chaîne structurale du mAFM et d’éviter tout bruit extérieur. Les deux prismes sont constitués de Zerodur [72]. Ce matériau a été privilégié pour son faible coefficient de dilatation thermique. Tous les miroirs sont coplanaires et interceptent les faisceaux laser de leur interféromètre respectif pour mesurer le déplace-ment relatif entre le prisme mobile et le prisme de référence. La coplanarité des miroirs permet de garder le chemin optique des faisceaux de référence et de mesure de la même longueur afin d’éviter les erreurs de bras mort (détaillées dans le chapitre III).
Figure 1.13 – (a) Vue CAO du posage isostatique des deux prismes. Les billes sont encastrées sur leur « V » respectif (flèche). Le prisme du bas (prisme mobile) est posé sur la platine de translation afin de déplacer le prisme en XY pour le balayage de l’échantillon et en Z pour réguler la hauteur. Le prisme du haut (prisme de référence) est lié à la structure porteuse du prisme pour le rendre immobile. Ce posage isostatique permet de dissocier les deux prismes de la chaîne structurale constiuée par le reste des composants de l’AFM métrologique. (b) Coupe CAO du châssis en aluminium du mAFM qui supporte les quatre interféromètres. Toute la chaîne structurale à l’exception du châssis a été cachée.
Concernant les quatre interféromètres, ils sont montés sur des supports en aluminium et plaqués sur le châssis par le biais d’aimants (figure 1.13(b)). Ainsi, les interféromètres sont soutenus et peuvent être déplacés aisément pour aligner au préalable les faisceaux vers les miroirs des prismes. Une fois réglés, les interféromètres sont bridés mécaniquement au châssis. Le châssis en aluminium du mAFM est conçu de manière à minimiser les bruits extérieurs sur la chaîne métrologique. Cependant, les effets thermiques sur le châssis devront tout de même être pris en compte pour la quantification de l’incertitude de mesure. La disposition des interféromètres inclinés de 35◦ et situés à chaque coin d’une base de pyramide carrée, permet de répartir symétriquement autour du châssis les sources de chaleur induites par les interféromètres. Ainsi, le centre thermique est donc confondu à l’axe vertical qui passe par la pointe du mAFM (centrée en 0 du re-père XY Z). Dans cette configuration particulièrement originale du mAFM, les positions XY Z sont obtenues par des combinaisons linéaires de chaque mesure interférométriques (I1, I2, I3, I4 calculées à partir de 1.3) selon les équations suivantes : X I1−I2−I3+I4.

Evaluation de l’incertitude de mesure d’un instrument

Une méthode très pratique pour déterminer l’incertitude de mesure est décrite dans « Le Guide pour l’expression de l’incertitude de mesure (GUM) » [74]. Elle est basée sur la détermination d’une grandeur de sortie (par exemple les erreurs de position XY Z délivrées par un instrument) en fonction des grandeurs d’entrée qui représentent les différentes sources d’incertitudes dans le processus de mesure (par exemple les variations de température, les désalignements des interféromètres, etc.). Cette méthode est très bien adaptée pour des mesures relativement simples [38, 42, 75].
La grande majorité des sources d’erreur évaluées dans la littérature sont estimées à l’aide de formules mathématiques. Les sources d’erreurs (grandeurs d’entrée) sont souvent choisies arbitrairement en supposant que tel paramètre aurait peut-être une in-fluence sur le système de mesure de l’instrument. En grande partie, les sources d’erreurs sur les interféromètres se résument par la longueur d’onde des interféromètres, l’incerti-tude liée à l’équation pour calculer l’indice de l’air, les non-linéarités des interféromètres, le niveau de bruit interférometrique, les bras morts et des dérives. Concernant la géomé-trie du système, les paramètres qui reviennent constamment sont les erreurs d’Abbe, les erreurs de cosinus et les dilatations. Ces paramètres sont évalués en utilisant le principe de la propagation des incertitudes (GUM). Le modèle de mesure utilisé est relativement simple où les grandeurs d’entrée sont simplement additionnées ou multipliées les unes après les autres : Y =f(X1, X2, X3, X4, · · · ) (1.5)
Ainsi les sensibilités peuvent soit être simplifiées en prenant la valeur de 1, soit leurs valeurs peuvent être proportionnelles à une composante, telles qu’à une distance (platine de translation, hauteur d’un l’échantillon), au temps ou à la température, etc.
Avec Y la grandeur de sortie, Xi les grandeurs d’entrée et f le modèle mathématique. Ces grandeurs d’entrée prennent souvent la forme d’équation simple afin de propager aisément les incertitudes. Par exemple les dilatations peuvent être caractérisées par : Xi = L × α × T (1.6)

Incertitude de mesure

Calcul du résultat de mesure

Nous prendrons dans un premier temps l’exemple de la hauteur d’un point de l’échan-tillon que nous souhaitons mesurer à l’aide de l’AFM métrologique. Cette hauteur Z est appelée le mesurande, il est la grandeur particulière que nous cherchons à mesurer. Nous procédons donc à un mesurage qui consiste à déterminer la valeur de ce mesurande par le biais de l’AFM métrologique en réalisant une multitude de mesures sur ce même point de l’échantillon, le résultat de ce mesurage est donc déterminé sur la base d’une série de i observations. Ainsi, les valeurs Zi trouvées sur ces observations répétées vont fluctuer autour d’une moyenne sous l’influence de grandeurs ayant un impact sur le résultat de mesure de la hauteur de référence Zr (figure 2.1). Durant une série de mesures où Z est la moyenne de la série d’observation des valeurs Zi, nous avons dans cet exemple trois types d’erreur. L’une est définie par l’erreur de mesure qui est la différence entre la valeur mesurée Zi et la valeur de référence Zr. La deuxième est l’erreur aléatoire (com-posante aléatoire) durant les mesures répétées qui varie de façon imprévisible autour de Z, elle est représentative de la fidélité des mesures. La dernière est l’erreur systématique (composante systématique) qui demeure constante entre Zr et Z ou peut varier de façon prévisible, elle est représentative de la justesse des mesures.
Ainsi notre mesurande Z va être caractérisé par la moyenne des i mesures répétées et des erreurs autour de cette moyenne. Cependant, dans cet exemple, nous pouvons constater que le mesurande Z ne coïncide pas avec la valeur de référence Zr. Pour ré-duire les erreurs, deux règles sont appliquées et constituent la base de la démarche du métrologue qui cherche à donner la meilleure estimation possible du mesurande. La pre-mière diminue les erreurs aléatoires en augmentant le nombre i d’observations où chaque mesure est indépendante pour ainsi faire converger la moyenne. La deuxième diminue les erreurs systématiques en appliquant des corrections. L’application de corrections est l’opération la plus difficile pour le métrologue, elle va requérir de sa part un sens aigu de l’analyse, une grande connaissance du procédé de mesure et des principes physiques. Il s’agit d’être capable de comprendre le processus de mesure de façon à identifier tous les facteurs qui peuvent influencer le résultat, puis seront appliquées les corrections né-cessaires qui permettront de compenser ces erreurs présumées. Le métrologue va donc s’intéresser au processus qui conduit à l’obtention d’un résultat de mesure. Dans ce processus vont intervenir : les opérateurs, les instruments utilisés, les étalons qui ont servi de référence, la méthode de mesure, le mode opératoire utilisé, la mesure de l’en-vironnement tels que la pression, la température et l’hygrométrie, l’objet mesuré, etc. Le métrologue va donc identifier tous les facteurs qui influencent le résultat de mesure (sources d’erreurs) en dressant une liste aussi exhaustive que possible afin de pouvoir les caractériser, les maitriser et diminuer leurs effets. Il est supposé que le résultat d’un mesurage a été corrigé pour tous les effets systématiques reconnus comme significatifs et que tous les efforts pour leur identification ont été faits. Le processus de mesure est donc une description détaillée d’un mesurage conformément à un ou plusieurs principes de mesure et à une méthode de mesure donnée, fondée sur un modèle de mesure et incluant tout calcul destiné à obtenir un résultat de mesure. Une méthode dite des 5 M peut être réalisée (figure 2.2) afin de répertorier toutes les sources sujettes à engendrer une incertitude sur le mesurande.
Par conséquent, le mesurande Z, pris dans l’exemple précédent, n’est pas mesuré directement mais il est déterminé à partir de N autres grandeurs d’entrée X1, X2, …, Xn à travers une fonctionnelle f : Z = f(X1, X2, …, Xn). (2.1)
Ces grandeurs d’entrée X1, X2, …, Xn représentent toutes les informations nécessaires pour calculer le résultat. Certaines grandeurs d’entrée peuvent elles-mêmes dépendre d’autres grandeurs (covariance, interaction, etc.) ainsi que d’autres corrections pour les effets systématiques. La fonction f n’exprime pas simplement une loi physique, mais un modèle mathématique qui est le processus de mesure qui doit contenir toutes les grandeurs d’entrée qui contribuent significativement à l’incertitude du résultat final.

Détermination de l’incertitude-type composée

Pour illustrer les notions d’incertitude-type composée, un exemple sera pris dans le cas où deux grandeurs d’entrées X1 et X2 sont liées par une fonctionnelle f : Y = f(X1, X2). (2.8)
Le mesurande Y est donc défini par deux grandeurs d’entrée X1 et X2 où chaque écart ΔX1 et ΔX2 autour de leur moyenne E(X1) et E(X2) va induire un écart ΔY sur le mesurande Y à travers la fonctionnelle f (figure 2.4). Ces écarts représentent l’erreur aléatoire entre la moyenne que nous espérons obtenir et la variable aléatoire mesurée. Ces écarts vont être calculés grâce à l’utilisation des dérivées fonctionnelles. Lorsque ΔX1 et ΔX2 sont suffisamment petits, l’écart ΔY sur le mesurande peut se limiter à l’ordre 1 du développement de Taylor : ΔY ≈ ∂f ΔX1 + ∂f ΔX2. (2.9) Cette équation est appelée formule de propagation des erreurs. Les dérivées partielles vont ainsi définir les coefficients de sensibilité c1 et c2 sur les écarts des erreurs ΔX1 et ΔX2. A titre d’exemple, nous souhaitons mesurer le volume d’un cylindre, le mesurande V ol est défini par les grandeurs d’entrée du rayon R et de la hauteur du cylindre h à travers la fonctionnelle f : V ol = f(R, h) = πR2h. (2.10).

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Table des matières

I Introduction à l’AFM métrologique du LNE 
1 Introduction à l’AFM métrologique du LNE 
1.1 La pyramide de traçabilité
1.1.1 L’étalon de transfert
1.1.2 L’AFM métrologique du LNE, un instrument de référence
1.1.3 Interféromètre de Michelson
1.1.4 Le mètre SI
1.2 Traçabilité de la chaîne métrologique du mAFM du LNE
1.3 Evaluation de l’incertitude de mesure d’un instrument
II Statistiques pour la métrologie 
2 Statistiques pour la métrologie 
2.1 Incertitude de mesure
2.1.1 Calcul du résultat de mesure
2.1.2 Evaluation des incertitudes-types
2.1.3 Détermination de l’incertitude-type composée
2.1.4 Incertitude élargie
2.2 La méthode de Monte Carlo
2.3 Outils pour le calcul de sensibilité
2.3.1 Le plan de Morris
2.3.2 Les indices de sensibilité
2.3.3 Les indices de Sobol
III Modélisation de l’AFM virtuel 
3 Modélisation de l’AFM virtuel 
3.1 Etapes de modélisation de la chaîne métrologique
3.1.1 Formalisme de coordonnées homogènes
3.1.2 Les miroirs
3.1.3 Les prismes
3.1.4 Les interféromètres
3.1.5 Système de coordonnées
3.2 Analyse statistique à travers le modèle
3.2.1 Scénario 1 – Erreur de position XYZ
3.2.2 Scénario 2 – Pas et hauteur de marche d’un étalon
3.2.3 Scénario 3 – Distribution en taille de nanoparticules
3.3 Mise en oeuvre de la simulation Monte Carlo
IV Evaluation des sources d’erreur 
4 Evaluation des sources d’erreur 
4.1 Temps de mesure et gammes de déplacements
4.2 Composantes des interféromètres
4.2.1 Longueur d’onde des faisceaux sous vide
4.2.2 Correction d’Edlen
4.2.3 Dérive des paramètres d’environnement
4.2.4 Etalonnage des capteurs d’environnement
4.2.5 Erreurs de bras mort
4.2.6 Limite de la correction du bras mort
4.2.7 Limite de résolution des cartes de comptage
4.2.8 Non-linéarités des interféromètres
4.2.9 Dérives des interféromètres
4.2.10 Dérive des positions XYZ
4.2.11 Niveau de bruit des interféromètres
4.2.12 Largeur des faisceaux
4.3 Composantes géométrique
4.3.1 Dimension du prisme
4.3.2 Forme et défauts des miroirs
4.3.3 Rugosité des miroirs
4.3.4 Rotations parasites
4.3.5 Erreur d’Abbe
4.3.6 Erreur de cosinus
4.3.7 Erreur de posage des prismes
4.3.8 Défaut d’orthogonalité
4.3.9 Dilatation des prismes
4.3.10 Dilatation de l’échantillon
4.3.11 Le porte-échantillon
4.3.12 Dilatation du châssis
4.3.13 Flexion du berceau
4.3.14 Interprétation de toutes les dilatations avec le modèle
4.3.15 Déformation du prisme sous l’action des aimants
4.4 Application informatique
4.4.1 Incertitude du modèle
4.4.2 Incertitude des logiciels
4.5 Bilan des paramètres
V Résultats de l’évaluation de l’incertitude de mesure 
5 Résultats de l’évaluation de l’incertitude de mesure 
5.1 Scénario 1 : évaluation de l’incertitude de mise en position de l’instrument
5.1.1 Incertitude de mesure de l’instrument (MCM)
5.1.2 Sensibilité des composantes (Morris et Sobol)
5.1.3 Résultats avec un second lot de tolérances des grandeurs d’entrée
5.1.4 Discussion
5.2 Scénario 2 : évaluation de l’incertitude sur le pas et la hauteur de marche d’un réseau étalon
5.2.1 Modélisation d’un réseau étalon
5.2.2 Incertitude de mesure sur le réseau étalon (MCM)
5.2.3 Discussion
5.3 Scénario 3 : évaluation de l’incertitude sur une distribution en taille de nanoparticules de référence
5.3.1 Modélisation d’un échantillon de nanoparticules
5.3.2 Incertitude de mesure sur l’échantillon de nanoparticules (MCM)
5.3.3 Discussion
Conclusion générale 

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