Contexte de la haute dynamique
L’imagerie haute dynamique s’applique à la détection de structures de faible intensité dans l’environnement d’un objet stellaire très lumineux. Il peut s’agir de systèmes binaires ou multiples à fort contraste, comme de disques circumstellaires, ou de compagnons planétaires. La dernière catégorie est sans aucun doute le moteur le plus dynamique, qui pousse toujours en avant de nombreux projets instrumentaux. Pourtant, dans ce domaine, l’imagerie directe semble encore à la traîne, derrière les méthodes de détection indirecte qui, comme nous le verrons dans cette partie, sont les plus prolifiques en matière de détection de systèmes exoplanétaires. Combiner haute résolution angulaire et haute dynamique est en effet un défi difficile à relever, et constitue la problématique de la technique du réarrangement de pupille, au cœur de cette thèse.
Détection des systèmes exoplanétaires par détection indirecte
Parmi les exoplanètes dont la détection est confirmée à ce jour, soit quasiment un millier d’objets , la plupart ont été détectées par des méthodes indirectes que sont principalement la vélocimétrie radiale, qui permit la découverte de la première exoplanète orbitant autour d’une étoile de la séquence principale, 51 Peg (Mayor & Queloz, 1995; Marcy & Butler, 1995), et la méthode des transits. Les relevés effectués par ces deux méthodes ne cessent de croître et de gagner en précision, conduisant régulièrement à de nouvelles détections. Une autre technique indirecte que nous ne détaillerons pas ici, moins prolifique mais qui contribue tout de même significativement au nombre de détections de compagnons planétaires est la méthode exploitant le phénomène de lentille gravitationnelle (par exemple, Abe et al., 2004; Beaulieu et al., 2006). Quant à la méthode astrométrique, elle reste encore très marginale, car plus appropriée pour détecter des objets plus massifs d’un système binaire par exemple. Une seule exoplanète détectée par cette méthode est recensée à ce jour dans le catalogue en ligne (Bennett et al., 2008).
Détection par vélocimétrie radiale
La méthode de vélocimétrie radiale est la plus efficace à ce jour pour détecter les exoplanètes. Elle consiste à détecter la variation de longueur d’onde des raies du spectres due à l’effet Doppler, ce qui donne accès à la vitesse radiale de l’étoile suivant la ligne de visée et permet de caractériser le mouvement réflexe de l’étoile induit par la rotation d’un second corps. Plus la précision sur la mesure de vitesse radiale est grande, plus la sensibilité aux objets de faible masse est grande. Le spectrographe ELODIE, qui était installé au télescope de 1,93 m de l’Observatoire de Haute Provence de 1994 à 2006, permettait d’atteindre une précision de l’ordre de 6-10 m/s, avec une résolution de 42 000 (Baranne et al., 1996). À ce niveau de précision, il permit la découverte de 51 Peg (Mayor & Queloz, 1995), planète massive orbitant près de son étoile hôte (Jupiter chaud). La découverte fut immédiatement confirmée par des chercheurs de Berkeley, qui utilisèrent le spectrographe Hamilton de l’Observatoire Lick (Marcy & Butler, 1995). À ce jour, le spectrographe le plus précis est HARPS, High Accuracy Radial velocity Planet Searcher, installé sur un télescope de 3,6 m de l’ESO et permet d’accéder à une précision inférieure au m/s pour une résolution spectrale de 115 000 (Pepe et al., 2000; Mayor et al., 2003). La détection de nouvelles exoplanètes est ainsi régulièrement rapportée (par exemple Delfosse et al., 2013; Bonfils et al., 2013, pour les articles les plus récents) depuis sa mise en fonction en 2003. Le succès de cette méthode est tel que sa réplique HARPS-N est maintenant en service au Telescopio Nazionale Galileo (TNG, Cosentino et al., 2012). Pour détecter des planètes toujours plus légères, typiquement d’une masse terrestre, le degré de précision requis est de l’ordre de la dizaine de centimètres par seconde. Cela correspond à un niveau de signal où de nombreux signaux parasites doivent alors être minutieusement modélisés et pris en compte dans l’ajustement des données. Ainsi, Dumusque et al. (2012) ont rapporté la détection d’une planète de masse minimale de l’ordre de la masse de la Terre orbitant en 3,3 jours autour de l’étoile α Centauri B, la plus proche du système solaire. Il a fallu pour cela mener une réduction des données prenant en compte les signaux parasites induits par l’activité stellaire (modes d’oscillation, granulation, rotation de cellules à la surface de l’étoile, cycle magnétique). À noter que ces signaux constituent une probable source de limitation en détection des signaux les plus faibles, car de longues périodes d’acquisition sont requises pour augmenter le rapport signal-sur-bruit et pouvoir faire ressortir le faible signal d’une potentielle planète de masse terrestre (α Centauri B fut par exemple observée régulièrement sur quatre ans, de 2008 à 2011).
Détection par transit
La méthode des transits constitue la deuxième source abondante en détections d’exoplanètes. Elle consiste à mesurer la variation du flux d’une étoile, qui diminue lorsqu’une planète transite devant elle. Peu efficace avant les années 1990, les développements de cette méthode se sont intensifiés après la découverte de 51 Peg par vitesse radiale, jusqu’à concerner près d’une vingtaine de projets en 2003 (Horne, 2003). La première détection par transit fut celle du Jupiter chaud orbitant autour de HD 209458 (Charbonneau et al., 2000; Henry et al., 2000), qui avait d’abord été détecté par vélocimétrie radiale. Depuis, de nombreux projets, du sol comme de l’espace, s’appuient sur cette technique photométrique. Les projets au sol dont notamment HATNet (Hungarian Automated Telescope Network, Bakos et al., 2004), WASP (Wide Angle Search for Planets, Pollacco et al., 2006) et récemment HATSouth (Bakos et al., 2013), sont généralement constitués de plusieurs caméras grand champ (que l’on trouve dans le commerce, ce qui limite considérablement les frais de développement) couplés à de petits télescopes robotisés (de l’ordre de la dizaine de centimètres de diamètre), permettant d’observer un grand nombre d’étoiles brillantes simultanément. De tels dispositifs présentent l’avantage de fournir de nombreuses nuits d’observation, paramètre essentiel pour le suivi des observations.
Les projets spatiaux ont débuté avec la mission CoRoT (Convection, Rotation et Transits planétaires, Baglin et al., 2006) initiée par le CNES et principalement conçu au départ pour des études d’astérosismologie. Les observations de CoRoT ont conduit à près d’une trentaine de découvertes de planètes confirmées (par exemple Léger et al., 2009; Almenara et al., 2013) et plusieurs centaines de candidates. Après avoir été exploité pendant 6 ans, soit deux fois plus longtemps que ce qui était prévu initialement, CoRoT a été mis hors service à la suite d’impacts de particules cosmiques en 2012, interrompant alors la communication et le transfert de données. La mission Kepler de la NASA est la seconde mission spatiale centrée sur les relevés photométriques de centaines de milliers d’étoiles, dont le but est de pouvoir tirer des conclusions statistiques concernant la fréquence des planètes de masse terrestre (Borucki et al., 2010). Lancée en 2009, les observations Kepler recensent à ce jour environ 150 détections d’exoplanètes confirmées et plus de 3 500 candidates . Le terme « candidat » tient compte du fait que certains signaux correspondent potentiellement à une exoplanète, mais ils n’ont pas encore été confirmés par des mesures de vitesse radiale depuis le sol. En effet, la notion de probabilité de faux signal positif est essentielle pour ce genre de relevés car il faut prendre en compte qu’un signal de transit seul peut éventuellement s’interpréter comme le signal provenant d’une binaire à éclipse avec deux étoiles de séquence principale. On peut également confondre un signal provenant d’une planète géante dans une configuration où seule l’éclipse secondaire est visible (la planète passe derrière l’étoile) avec un signal de planète de masse terrestre qui passerait devant l’étoile (Brown, 2003; Morton & Johnson, 2011; Fressin et al., 2013; Santerne et al., 2013).
La technique n’en reste pas moins efficace, et de nombreux projets spatiaux à venir s’appuient sur cette méthode de détection : PLATO (PLAnetary Transits and Oscillations of stars Catala, 2009), CHEOPS (CHaracterizing ExOPlanet Satellite Broeg et al., 2013), EChO (Exoplanet Characterization Observatory Tinetti et al., 2012).
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Table des matières
1 Introduction
1.1 Contexte de la haute dynamique
1.1.1 Détection des systèmes exoplanétaires par détection indirecte
1.1.2 Détection par imagerie directe haute dynamique
1.2 Le réarrangement de pupille fibré
1.2.1 Diffraction et interférométrie
1.2.2 Masquage et réarrangement de pupille
1.2.3 Observables interférométriques et dynamique
1.3 Un nouveau chapitre pour FIRST
1.3.1 Historique FIRST
1.3.2 Ma contribution et les objectifs de ma thèse
2 De FIRST-9…
2.1 FIRST-9, un prototype de laboratoire
2.1.1 Mise en œuvre
2.1.2 Vers le démonstrateur
2.2 Première lumière à l’Observatoire Lick
2.2.1 L’installation au foyer du télescope Shane de l’Observatoire Lick
2.2.2 Les observations
2.2.3 Les résultats de première lumière
2.3 Sensibilité et stabilité
2.3.1 Transmission optique théorique
2.3.2 Efficacité théorique d’injection dans les fibres
2.3.3 Mesure de l’efficacité de transmission à partir des données
2.3.4 Les joies du foyer Cassegrain
2.4 Conclusion
3 … à FIRST-18
3.1 Conception optique et mécanique
3.1.1 Une recombinaison dédoublée et compactée
3.1.2 Conception mécanique
3.1.3 Réglages et optimisations
3.2 Nouvelle configuration pour la pupille d’entrée
3.2.1 Une contrainte pour l’étalonnage
3.2.2 Optimisation de la couverture du plan (u,v)
3.2.3 Les fibres de compensation
3.3 Conclusion
4 Réduction des données FIRST
4.1 Prétraitement et étalonnage
4.1.1 Prétraitement des images
4.1.2 Étalonnages
4.2 Estimation des termes de cohérence
4.2.1 Méthodes de réduction de données interférométriques
4.2.2 Un problème linéaire
4.2.3 Étalonnage de la matrice P2V M
4.3 Estimation des clôtures de phase
4.3.1 Estimateur de bispectre
4.3.2 Étalonnage des clôtures de phase
4.3.3 Les biais de clôture dans les données FIRST
4.4 Conclusion
5 Caractérisation de systèmes binaires
6 Conclusion