Description, taxinomie et histoire évolutive de l’olivier

L’olivier sauvage

Description, taxinomie et histoire évolutive de l’olivier 

L’olivier Olea europaea L. appartient à la famille des Oleaceae. C’est un complexe spécifique formé de 6 sous-espèces (Green & Wickens, 1989 ; Vargas et al., 2001 ; Médail et al., 2001 ; Green, 2002). Olea europaea subsp europaea correspond à l’olivier méditerranéen. O. e. subsp. maroccana ((Greut. & Burd.) Vargas et al.) une endémique du sud-ouest du Maroc. O. e. laperrinei ((Batt & Trab) Ciferri) présente dans les montagnes du Sahara (les massifs du Hoggar dans le sud d’Algérie, et l’est du Sahel). O. e. cerasiformis ((Webb & Berth) Kunkel and Sunding) endémique de l’ile de Madère. O. e. guanchica (Vargas et al.) endémiques des iles Canaries. O. e. cuspidata ((Wall.) Ciferri) distribuée depuis le Sud de l’Afrique jusqu’en Chine. Ces sous-espèces sont diploïdes, à l’exception de maroccana et cerasiformis qui sont polyploïdes (6x et 4x respectivement). La classification taxinomique du complexe d’olivier est relativement supportée par les données génétiques (Rubio de Casas et al., 2006 ; Besnard et al., 2007), et chaque sous-espèce porte des lignées/sous lignées spécifiques, avec plusieurs lignées/sous-lignées partagées entre les sous espèces diploïde (Besnard et al., 2013a, Figure 1).

L’olivier méditerranéen O. e. europaea L. distingue en deux variétés botaniques : O. e. subsp. europaea var. europaea qui regroupe les formes cultivées et O. e. subsp. europaea var. sylvestris qui regroupe les formes sauvages et spontanées habituellement nommés oléastres (Green, 2002). C’est une espèce thermophile (Rivas-Martinez and Gandullo, 1987 ; Carrion et al., 2010), pérenne, à feuillage persistant avec une longue longévité (Lewington et Parker, 1999 ; Arnan et al., 2012) et à pollinisation anémophile et allogame. Son système d’autoincompatibilité serait de type gamétophytique (Cuevas & Polito, 1997), et il existe des cas de stérilité mâle (Villemur et al., 1984). La dispersion de ses fruits est essentiellement assurée par les oiseaux (Spennemann and Allen, 2000 ; Alcántara and Rey, 2003), mais l’Homme a également contribué à sa dissémination/diffusion. L’oléastre et l’olivier cultivé sont diploïdes et ont le même nombre de chromosomes (2n=2x=46) (Contento et al., 2002), et ils sont interfertiles (Besnard et al., 2000). Au niveau phénotypique, l’oléastre semble se différencier par rapport à l’olivier cultivé par des fruits plus petits, mais ce critère n’est pas tout à fait optimal car pas inclusif (Terral et al., 2004a ; Belaj et al., 2011), et un stade de juvénilité plus long (Pritsa et al., 2003). Une troisième forme d’olivier peut être reconnue est représentée par l’olivier féral, qui désigne des oliviers ensauvagés dans des vergers abandonnées ou issues de graines d’olivier sauvage ou cultivées disséminées par les oiseaux. L’olivier féral peut être trouvé aussi bien dans les agroécosystèmes que dans les milieux naturels, et la distinction de l’olivier sauvage n’est possible qu’avec les marqueurs génétiques, même si la morphométrie géométrique offre des éléments d’identification intéressants (Newton et al., 2014 ; Bourgeon et al., 2017). L’oléastre (O. e. subsp. europaea var. sylvestris) représente une composante essentielle de la végétation méditerranéenne. Son aire de distribution actuelle chevauche celle de l’olivier cultivée (var. europaea). Il est particulièrement adapté au climat méditerranéen caractérisé par des fluctuations thermiques et hydriques stressantes pour les végétaux, lors de la période estivale. Dans plusieurs zones semi-arides méditerranéennes comme dans le sud d’Espagne et en Afrique du nord, notamment au Maroc, les oléastres peuvent être rencontrés sur les rives des cours d’eau temporaires, ce qui offre aux arbres des conditions écologiques atypiques avec un apport d’eau leur permettant de se développer au printemps d’une manière optimale.

Les feuilles d’olivier sont de type sclérophylle, simples, allongées, et présentent un pétiole court et une nervure principale bien visible (Figure 2). Elles sont couvertes d’une couche dense de trichomes sur la face abaxiale (dorsale) protégeant les stomates (Bacellar et al., 2004). Le bois d’olivier sauvage et d’olivier cultivé possèdent une structure anatomique tridimensionnelle identique. Sur le plan transversal, l’olivier présente un bois à pores diffus possédant des vaisseaux solitaires ou groupés par 2 à 5-7 en files radiales. Les rayons ligneux sont hétérogènes de type uni- ou bisériés, le dernier cas étant le plus fréquent. Le bois présente par ailleurs un parenchyme paratrachéal (englobant les vaisseaux) et des limites de cernes souvent difficile à distinguer sauf au niveau des branches jeunes dont la circonférence est encore circulaire. Sur le plan longitudinal (tangentiel et radial), les rayons ligneux bisériés apparaissent hétérogènes, composés de cellules isodiamétriques dressées et couchées. Les rayons unisériés sont plus courts et composés uniquement de cellules dressées. Les éléments de vaisseaux sont à perforations terminales simples. La caractérisation morphologique et morphométrique des endocarpes (noyaux), à travers des approches d’analyse de taille et de forme (morphométrie géométrique), montre que l’oléastre se distingue des formes domestiques (variétés) par des différences de forme (morphométrie géométrique) (Terral et al., 2004a). L’oléastre possède des noyaux plutôt circulaires alors que les noyaux de formes domestiques possèdent des formes extrêmement variées. La sous-espèce endémique Olea e. subsp. maroccana présente des similarités morphologiques avec les sous-espèces d’olivier de la région macaronésienne (cerasiformis et guanchica, Médail et al., 2001 ; Vargas et al., 2001), et d’un point de vue génétique il est plus proche de la sous-espèce cerasiformis (Besnard et al., 2007 ; GarciaVerdugo et al., 2010), mais présente des similarités de traits foliaires avec les sous espèces laperrinei et europaea (Garcia Verdugo et al., 2010).

L’histoire évolutive et la structure biogéographique moderne du complexe Olea europaea L. est probablement liée aux changements tectoniques et climatiques durant les débuts du Cénozoïque. Les données paléobotaniques attestent l’occurrence du genre Olea en Europe vers la fin de l’Oligocène-Miocène (de Saporta, 1873). Ce taxon apparait comme un élément essentiel de la végétation méditerranéenne dès le début du Miocène (Suc et al., 1984 ; Palamarev, 1989). A l’ouest du bassin méditerranéen archaïque, la crise messinienne de salinité (-5.59 – -5.33 Millions d’année) a induit une disparition des espèces subtropicales et l’installation des essences méditerranéennes thermophiles et xérophytes, expliquant ainsi l’installation du genre Olea au nord d’Afrique, au sud de l’Europe et enfin dans les îles de la Macaronésie. L’installation graduelle du climat méditerranéen durant le Pliocène a favorisé l’émergence des essences thermophiles et xérophiles (Suc et al., 1984). Les données phylogénétiques supportent également ce scénario et suggèrent l’existence d’un ancêtre commun des six sous-espèces durant la fin du Miocène et début de Pliocène, il y a 4 à 8 millions d’années (Besnard et al., 2009). Les flux de gènes limité entre le nord d’Afrique et l’Afrique tropical, à cause de l’aridification du Sahara dès la fin du Miocène, ont probablement contribué à une divergence entre les sous-espèces d’olivier, notamment pour la sous-espèce cuspidata (Besnard et al., 2009). La polyploïdie des sous-espèces guanchica et maroccana a probablement joué un rôle significatif dans leur colonisation de nouveaux habitats bien localisés. La structure génétique et biogéographique des populations d’olivier sauvage est le résultat de processus d’expansion et de régression de leur aire, en réponse aux changements des conditions climatiques et les flux de gènes limités à cause des barrières géographiques et de l’isolement géographique.

Les relations phylogénétiques entre les sous-espèces d’O. europaea basées sur le polymorphisme de l’ADN chloroplastiques mettent en évidence l’existence de deux lignées ou groupes majeurs (Besnard et al., 2007). Une lignée cp-I qui regroupe les populations de la sous espèce cuspidata du sud d’Asie, l’est et sud d’Afrique, et une deuxième lignée cp-II qui regroupe les populations des cinq autres sous espèces, avec des populations de cuspidata du sud-est de l’Egypte. Toutefois, la lignée cp-I est représentée par trois sous-lignées : A (sud d’Afrique et Afrique tropical) ; C1 (est d’Afrique et sud-est d’Asie) ; et C2 (ouest de l’Arabie et l’est d’Afrique). La lignée cp II regroupe quatre sous-lignées M (Sud du Maroc et la Macaronésie) ; E1 (Méditerranée et Sahara Africain) ; E2 et E3 (ouest de la méditerranée, Besnard et al., 2002, 2007).

Relation sauvage/cultivé 

L’olivier est considéré comme l’un des premiers arbres cultivés par l’Homme dans le bassin méditerranéen (Zohary & Spiegel-Roy, 1975). L’émergence de la forme cultivée de l’olivier est liée aux anciennes civilisations du Proche Orient (région du Levant) (Loumou & Giourga, 2003 ; Kaniewski et al., 2012 ; Zohary et al., 2012). Toutefois, ses origines et l’histoire de sa domestication depuis les formes sauvages restent un sujet de débat. L’accumulation des données paléobotaniques, archéologiques, historiques, et les données moléculaires ont permis une réévaluation des questions liées aux origines et l’histoire biogéographique de l’oléastre et des formes cultivées de l’olivier (Terral et al., 2004a,b ; Carrion et al., 2010 ; Kaniewski et al., 2012 ; Besnard et al., 2013a ; Diéz et al., 2015 ; Rugini et al., 2016). Ces travaux ont soutenu l’idée d’une domestication multi-locale : un centre primaire de domestication au Levant et des centres secondaires du fait de la mise en contact de formes domestiquées introduites mises en contact avec des formes sauvages locales. La paléoécologie (Pons & Quézel, 1985 ; Carrión et al., 1985 ; 2010 ; Figueiral et Terral, 2002) a prouvé l’existence de l’oléastre en Méditerranée aussi bien à l’est et qu’à l’ouest depuis au moins les dernières glaciations (26 000 – 19 000 BP). Son exploitation par l’Homme n’aurait débuté que depuis le Paléolithique supérieur à l’est (Kislev et al., 1992 ; Terral et al., 2004b ; Carrión et al., 2010 ; Kaniewski et al., 2012 ; Zohary et al., 2012) et à l’ouest (Figueiral et Terral, 2002). A l’est de l’Espagne et dans le sud de France, des études anthracologiques, éco anatomiques et morphométriques (Terral & Arnold-Simard, 1996 ; Terral, 1997a,b, 2000 ; Terral et al., 2004a,b) ont montré l’utilisation de l’oléastre dès le Néolithique (8000 – 6000 BP) et attestent de l’existence d’évènements mineurs de domestication à l’Age du Bronze (3500 – 3000 BP), indépendants du foyer proche-oriental et du processus de diffusion est-ouest ultérieur.

Les analyses du polymorphisme de l’ADN nucléaire et chloroplastique des oléastres ont révélé l’existence de deux pools génétiques hautement différentiés, l’un à l’est et l’autre à l’ouest du bassin méditerranéen (Lumaret et al., 2004 ; Khadari, 2005 ; Breton et al., 2006 ; Besnard et al., 2001a, b, 2013b ; Diez et al., 2015). A l’est, les populations d’oléastres sont caractérisées par la lignée maternelle E1, alors que à l’ouest deux lignées maternelles sont présentes (E2 et E3) (Besnard et al., 2013a). Une quatrième lignée (M) a été reconnue pour la sous espèce endémique de la région Sud-Ouest du Maroc : O. e. subsp. maroccana (Besnard et al., 2007). Les analyses morphométriques menées sur les contours de noyaux d’olives archéologiques comparés aux analyses de noyaux de populations sauvages modernes, de variétés cultivées et de formes férales (Newton et al., 2006, 2014 ; Terral et al., 2004a ; Bourgeon et al., 2017) ont montré une nette discrimination entre les oliviers de populations sauvages par rapport aux cultivars et aux formes férales (+90% de discrimination). Toutefois, en dépit de l’hypothèse proposée par les premiers travaux (Terral et al., 2004a) et des données génétiques mettant en évidence une structuration est – ouest (Besnard et al., 2013a), les noyaux d’olivier sauvage se caractérisent en fait par un morphotype convergent, tendant vers la rotondité. Les analyses phylogénétiques ont montré l’existence d’une zone de contact entre les populations d’oléastres de l’est et de l’ouest dans la région du Péloponnèse (Besnard et al., 2013a, b). Cependant, chez l’olivier cultivé une seule lignée maternelle E1, originelle de l’est, est très largement majoritaire (90%) (Besnard et al., 2011, 2013 ; Haouane et al., 2011). Les trois lignées se seraient diversifiées bien avant la dernière période glaciaire, durant la fin du Pliocène et début de Pléistocène (Besnard et al., 2013b). Ce patron géographique de différentiation des oléastres, a été observé chez Laurus nobilis et Myrtus communis dans la Méditerranée (Rodríguez-Sánchez et al., 2009 ; Migliore et al., 2012), ce qui suggère que les changements climatiques durant la fin du Pliocène et Pléistocène ont eu des effets similaires sur les taxons méditerranéens.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1
Trait-based plant ecology a flawed tool in climate studies?
The leaf traits of wild olive that pattern with climate are not those routinely measured
CHAPITRE 2
Resisting to aridity and aridification: adaptation of sap conduction performance in Olea europaea L. in a heterogeneous and changing environment
CHAPITRE 3
Understanding the impact of ongoing global changes on the olive tree (Olea europaea L.): focus on the variation of functional traits along environmental gradients in Morocco
SYNTHÈSE ET DISCUSSION GÉNÉRALE
CONCLUSION GÉNÉRALE
PERSPECTIVES
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *