Description et impact des différentes chirurgies digestives

La tolérance digestive

La notion de “tolérance digestive” ou “intolérance digestive” est utilisée depuis longtemps dans la littérature sans pour autant avoir été clairement définie. Une étude effectuée en 2015 (18) a investigué les différents symptômes et signes cliniques utilisés pour caractériser une mauvaise tolérance digestive suite à une nutrition entérale dans un contexte de soins intensifs. Les auteurs se sont arrêtés sur les symptômes suivants: absence de bruits intestinaux à l’auscultation, vomissements ou régurgitations, diarrhées considérées dès trois selles liquides par jour, distension abdominale et un important volume de résidus gastriques (plus de 500ml/24h). Certains scientifiques définissent la tolérance digestive comme l’incapacité à consommer une quantité d’énergie suffisante (18).

Une autre étude indique que chaque chirurgie digestive s’accompagne d’une perturbation de la motilité gastro-intestinale qui se traduit par un transit ralenti et une stase. Les symptômes associés à ce trouble de la tolérance digestive sont les nausées, les vomissements, les ballonnements, un retard du passage des premières flatulences et/ou des premières selles et l’incapacité à consommer et tolérer une alimentation solide (19). Malgré certaines similitudes, tous ces exemples illustrent le caractère hétérogène de la définition. L’absence de consensus amène les professionnels de la santé ou les scientifiques à définir eux-mêmes leurs critères d’évaluation de la tolérance digestive. Une chirurgie digestive est souvent la conséquence d’une pathologie digestive. Les troubles de la digestion occasionnés par ces maladies peuvent être nommés de la façon suivante: malabsorption impliquant une mauvaise assimilation des aliments et diminuant leur disponibilité pour l’organisme (20). Ce trouble digestif entraîne des symptômes à court terme tels que diarrhées, ballonnements ou flatulences.

La malabsorption peut se prolonger dans le temps, selon l’importance de l’organe qui a été réséqué. Les symptômes à long terme peuvent se traduire par une perte pondérale et aggraver les risques de dénutrition (20). L’origine des symptômes et signes cliniques observés pour mesurer la tolérance digestive après une réalimentation orale dans la phase post-opératoire d’une chirurgie digestive est donc difficile à identifier. Elle peut être due à un trouble de la tolérance elle-même mais aussi à une dysfonction du système digestif ou encore à l’expression de la maladie du patient (18). Les réponses immunitaires et inflammatoires provoquées par le stress métabolique d’une chirurgie digestive s’accompagnent de la sécrétion d’une hormone hypothalamique. Elle est appelée “peptide hypothalamique de libération de corticotrophine” (21). Elle interagit avec les composants anti-inflammatoires et perturbe la fonction intestinale. La difficulté d’établir une définition commune repose sur le fait que la tolérance digestive est elle-même d’origine multifactorielle. La prise en charge péri-opératoire et l’acte chirurgical lui-même ont une influence sur la capacité à tolérer une alimentation solide après une chirurgie digestive. L’incidence des nausées et vomissements peut atteindre 40% lors d’une intervention dans la partie haute de l’abdomen ou 30% après une colectomie par laparotomie (22). Les substances utilisées pour l’anesthésie ou l’analgésie des patients peuvent également améliorer ou péjorer les signes cliniques et symptômes de tolérance digestive post-chirurgie digestive. Eviter les principes actifs à base de morphine et privilégier la voie d’administration péridurale pourraient diminuer l’incidence des nausées et des vomissements (22).

opératoire. Il fait partie des signes cliniques mesurés dans la phase post-opératoire et son étiologie est d’origine diverse comme le souligne une étude menée en 2015 (42). L’âge, le sexe masculin, une hypoalbuminémie pré-opératoire, l’utilisation d’opioïdes, des antécédents de chirurgies abdominales, des comorbidités vasculaires ou pulmonaires, une chirurgie effectuée dans l’urgence ou de longue durée, les pertes sanguines, une surcharge hydrique ou sodique sont autant de facteurs qui peuvent provoquer un iléus paralytique (21). Sa localisation est également un critère qui influence la durée nécessaire à la résolution de l’iléus post-opératoire. Au niveau de l’intestin grêle il peut se résoudre en 24 heures contre 48 à 72 heures s’il est situé au niveau du côlon (22). Nous l’avons déjà souligné, aucune définition commune n’est établie au niveau clinique concernant la tolérance digestive. C’est dans la langue française que nous pouvons trouver les premiers éléments d’interprétation de cette notion. La définition médicale du mot “tolérance” est la suivante: “Absence de réaction immunitaire à certains antigènes, résultant d’un état de paralysie immunitaire constitutif ou induit par un premier contact avec l’antigène” ou “Propriété que possède l’organisme de supporter des doses d’une substance donnée sans manifester de signes d’intoxication” (23). La définition biologique du mot “digestion” est: “Fonction chimique des cellules vivantes, des animaux et des plantes, consistant à fragmenter les grosses molécules des aliments en petites molécules solubles dans l’eau, transportables dans le sang ou les sèves et à partir desquelles seront édifiées par assimilation les structures organiques ou accumulées des réserves” (24). Nous retenons principalement de ces deux définitions issues du dictionnaire français Larousse que la tolérance digestive peut s’interpréter comme une « absence de réaction » lors du processus de digestion.

Evolution des pratiques

Les prises en charge post-opératoires traditionnelles varient selon trois axes principaux: période de jeûne, maintien de la SNG (Sonde Naso-Gastrique) d’aspiration ou alimentation liquide dans les premiers jours après une opération. Une phase de jeûne est parfois préconisée à la suite d’une chirurgie gastro-intestinale. Les raisons qui motivent cette prescription sont la prévention des nausées et vomissements en phase post-opératoire et la protection des anastomoses créées durant l’intervention. L’objectif est de permettre au patient de cicatriser avant de subir le travail métabolique provoqué par l’ingestion de nourriture solide (26). Toutefois, il s’agit d’un facteur de risque supplémentaire de dénutrition chez les patients opérés de la sphère digestive. Une autre méthode est appliquée en vue de traiter l’iléus réflexe post-opératoire: la pose d’une SNG d’aspiration en péri-opératoire. Cette sonde permet une décompression intestinale et est également appelée SNG de décompression. Son utilisation vise la prévention d’une dilatation gastrique et la diminution des tensions sur les anastomoses intestinales réduisant ainsi le risque de rupture des sutures (3). C’est en 1921 que la SNG d’aspiration commence à être utilisée.

En 1926, la distension abdominale post-chirurgicale est expliquée par une ingestion d’air qui peut être évitée grâce à la SNG. Dans les années 1930 les prises en charge incluant les SNG d’aspiration après une chirurgie gastrique ou abdominale deviennent populaires. Ce n’est qu’en 1963 que cette conviction est ébranlée lorsqu’il est établi que l’utilisation systématique des sondes est inutile et surtout accompagnée d’effets indésirables (27). Cette évidence est encore d’actualité. Aujourd’hui, les programmes de réhabilitation tels que ERAS® visent à réduire le stress métabolique induit par les chirurgies, à favoriser l’anabolisme et ainsi optimiser la récupération du patient (28). Cela passe, entre autres, par la suppression d’une SNG de décompression dans la prise en charge péri-opératoire. Certains protocoles traditionnels prescrivent une alimentation liquide pour les premiers repas après une chirurgie digestive. Il s’agit d’une méthode fondée principalement sur la croyance que les liquides sont plus facilement tolérés en présence d’un iléus réflexe post-opératoire (8). En 1979, les premiers essais cliniques randomisés démontrant les bénéfices d’une réalimentation orale précoce après une chirurgie digestive sont publiés. Les sujets de recherche concernent initialement l’alimentation jéjunale dans les 24 heures après une chirurgie abdominale. Une bonne tolérance, une meilleure récupération métabolique et une durée d’hospitalisation raccourcie sont observées. D’autres études randomisées ont suivi et des modifications dans les prises en charge traditionnelles ont été entreprises (4). Depuis le milieu des années 1990, les méthodes évoluent. Au niveau de la nutrition, l’introduction de l’alimentation est de plus en plus précoce et les voies orales ou entérales sont privilégiées aux parentérales (29).

Situation actuelle

Dans la plupart des établissements hospitaliers, des protocoles internes de réalimentation post-opératoires sont mis en place. La nutrition est un axe indispensable de la prise en charge dans plusieurs affections digestives. C’est notamment le cas pour les suites de chirurgies gastriques ou lors d’un syndrome de l’intestin grêle court. Pour d’autres pathologies telles que les troubles fonctionnels intestinaux, la constipation ou la dyspepsie, les patients suivent très souvent un régime alimentaire particulier. La nature de la plupart de ces régimes a un fondement empirique basé sur l’expérience. Appliqués sur le long terme, ils augmentent les risques de carences nutritionnelles pour le patient (30). Ce risque s’explique par l’éviction d’un certain nombre d’aliments. Par exemple, une alimentation sans graisses strictes qui élimine les sources alimentaires principales de lipides, comporte le risque d’une carence en acides gras essentiels. Bien que leur prescription soit de moins en moins fréquente depuis vingt ans, les régimes en milieu hospitalier peuvent être anorexigènes et hypocaloriques (31). Pour le patient, cela implique une aggravation de son inappétence, la diminution des apports alimentaires et une couverture inadéquate de ses besoins nutritionnels.

Dans le contexte des chirurgies digestives où le catabolisme est important, le risque de dénutrition est particulièrement élevé. Une chirurgie digestive est considérée comme une agression pour l’organisme. Elle implique des réactions du système nerveux, hormonal et immunitaire par la production de cytokines. Ces réponses physiologiques provoquent une augmentation du catabolisme protéique et énergétique accroissant les risques de perte de poids et de fonte musculaire (30). Éviter l’aggravation ou l’apparition d’une dénutrition dans la phase post-opératoire est l’une des raisons principales qui explique l’importance d’une prise en charge nutritionnelle adaptée (30). La dénutrition se déclare lorsque les apports en nutriments deviennent inférieurs aux besoins du patient. C’est un état qui favorise l’altération de la composition corporelle et des fonctions de l’organisme. La prévalence de la dénutrition dès l’admission en milieu hospitalier est estimée entre 30 à 50% (32). Les personnes âgées sont les plus concernées. Optimiser la récupération et le pronostic post-opératoire est le deuxième facteur qui rend indispensable une prise en charge nutritionnelle adéquate (30). Cela permet également d’agir en faveur d’une diminution des coûts de la santé.

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Table des matières

1. Remerciements
2. Résumé
3. Introduction
4. Cadre de référence
4.1 La tolérance digestive
4.2 Les réalimentations post-opératoires
4.2.1 Evolution des pratiques
4.2.2 Situation actuelle
4.2.3 Le programme ERAS®
4.3 Evolution de la chirurgie digestive
4.4 Description et impact des différentes chirurgies digestives
4.4.1 Chirurgie de l’estomac : gastrectomie partielle et totale
4.4.2 Chirurgie de l’intestin grêle : résection courte ou étendue
4.4.3 Chirurgie du côlon : hémicolectomie ou colectomie totale
4.5 Intérêt pour la profession de diététicien
5. Question de recherche
6. Objectifs
7. Méthode
7.1 Stratégie de recherche documentaire
7.1.1 Bases de données
7.1.2 Mots-clés
7.2 Sélection des articles
7.2.1 Critères d’inclusion
7.2.2 Critères d’exclusion
7.2.3 Sélection sur titre et abstract
7.2.4 Sélection sur l’article complet
7.2.5 Sélection finale
7.3 Extraction des données
7.3.1 Grilles descriptives et Grille de qualité
7.3.2 Tableau d’extraction des données
7.3.3 Moyens de communication
7.4 Avis d’experts
8. Résultats
8.1 Description des études
8.2 Critère de jugement principal : la tolérance digestive
8.2.1 Définitions
8.2.2 Tolérance digestive : Analyse en fonction du mode de réalimentation
8.3 Chirurgies
8.3.1 Types d’intervention
8.3.2 Localisations
8.4 Réalimentations orales post-opératoires
8.4.1 Réalimentations traditionnelles
8.4.2 Réalimentations précoces
8.4.3 Réalimentation liquide VS solide
8.5 Anesthésie et analgésie
8.6 Sonde nasogastrique de décompression
8.7 Entretiens et avis d’experts
8.7.1 Fréquence des chirurgies digestives
8.7.2 Utilisation des protocoles de réalimentation
8.7.3 Objectifs des protocoles de réalimentation
8.7.4 Appréciation des protocoles de réalimentation et modifications souhaitées
8.7.5 Évaluation de la tolérance digestive
8.7.6 Définitions de la tolérance digestive
9. Discussion
9.1 Caractéristiques des articles sélectionnés
9.2 Tolérance digestive
9.2.1 Une définition hétérogène de la tolérance digestive
9.2.2 Réalimentations orales post-opératoires
9.2.3 Chirurgies digestives
9.3 Avis d’experts VS littérature scientifique
9.3.1 Mesure et évaluation de la tolérance digestive
9.3.2 Protocoles de soins nutritionnels pour la phase post-opératoire et objectifs visés
9.3.3 Types et catégories de chirurgies viscérales prises en charge
9.4 Forces, limites et biais
9.4.1 Forces
9.4.2 Limites et biais
9.5 Perspectives
10. Conclusion
11. Références bibliographiques
12. Annexes

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