Description et analyse des expériences vécues par les personnes transgenres lors de l’accueil en orthophonie

Malgré une plus grande exposition médiatique, les transidentités demeurent peu connues et incomprises. Les personnes trans peuvent être rejetées par la société française (à l’école, au travail, dans l’espace public ou dans le cercle familial), comme on peut l’observer au travers de « violences symboliques, verbales, physiques envers les personnes trans » (Espineira, 2018) regroupées sous le terme de transphobie . Cette transphobie se retrouve aussi dans le milieu de la santé où les personnes trans sont notamment victimes de discriminations (Alessandrin, 2020).

Parmi les nombreux professionnels de santé que les personnes trans peuvent être amenées à consulter, les orthophonistes ont un rôle important pour celles qui désirent modifier leur voix. Cependant, il n’existe aucune donnée sur la façon dont ces personnes vivent les soins orthophoniques. Nous nous interrogerons donc sur le ressenti des personnes trans entrées dans un parcours orthophonique, et plus particulièrement lors de l’accueil (prise de contact téléphonique et cinq premiers rendez-vous en présentiel, bilan initial compris), qui est un moment crucial pour l’instauration de la relation thérapeutique, et de ce fait, pour l’ensemble du suivi. En effet, selon Despland et al. (2000), la relation (ou alliance) thérapeutique qui se crée au début est particulièrement importante sur les résultats de la prise en soins. Dans la mesure où des personnes trans sont victimes de transphobie dans le milieu médical (2% des cas de transphobie en France selon SOShomophobie, 2020) pouvant engendrer chez elles une vision pessimiste des professionnels de santé, nous pouvons émettre l’hypothèse que le ressenti des personnes trans vis-à-vis de leurs expériences lors de l’accueil en orthophonie est plutôt négatif, du fait d’actes perçus comme transphobes.

Les transidentités

Que sont les transidentités ?

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS, 2018), « le mot « genre » sert à évoquer les rôles qui sont déterminés socialement, les comportements, les activités et les attributs qu’une société considère comme appropriés pour les hommes et les femmes ». L’identité de genre d’une personne renvoie au genre auquel cette personne s’identifie, et non pas à son sexe de naissance. Le préfixe latin « trans » signifie « au-delà », exprime l’idée de changement, de traversée (Dictionnaire Larousse, consulté le 27 octobre 2020). Selon l’association Chrysalide (2019), les transidentités se définissent comme les identités des personnes dont le genre social, psychologique et l’anatomie ne s’accordent pas selon les normes culturelles.

Pour Genres Pluriels (2017), « est transgenre toute personne qui, questionnant et/ou ne s’identifiant pas complètement aux rôles sociaux habituellement associés au genre qui lui a été assigné à la naissance, se définit comme tel.le ». Par ailleurs, les termes de « transsexuels » et de « transsexualisme » sont des termes aujourd’hui désuets et inusités en raison de leur signification négative à l’égard des personnes transgenres. Ces termes créent notamment une confusion entre préférences sexuelles et identité de genre et de sexe (Genres Pluriels, 2017). C’est pour cela que nous utiliserons plutôt les termes de transidentité et personne trans ou transgenre dans ce mémoire.

Bref historique des transidentités 

La reconnaissance sociale des transidentités est à la fois très ancienne et mondiale, bien que très différente selon les pays. En effet, que ce soit en Thaïlande, aux Philippines, au Japon ou même en Italie, les personnes trans ont une place à part entière dans ces sociétés, et ceci depuis plusieurs siècles pour certaines d’entre elles. (Boulay, 2018) De plus, dans ces cultures l’identification de genre n’est pas forcément médicalisée (Giami, 2012). Cependant, dans d’autres parties du monde, les personnes trans expriment le besoin de faire correspondre leur sexe anatomique au genre dans lequel elles se reconnaissent. Ainsi en Allemagne, les progrès médicaux et chirurgicaux permettent en 1930, à Félix Abraham, de réaliser la première vaginoplastie (Alessandrin, s.d.). Toutefois, les transidentités se voient peu à peu pathologisées au cours du XXème siècle et les chirurgies de réassignation sexuelle deviennent accessibles uniquement grâce à un diagnostic psychiatrique et à un changement d’état civil (Alessandrin, s.d.).

Contexte actuel en France 

Évolutions ces dernières années 

Sur le plan juridique 

Le 6 août 2012, la loi relative au harcèlement sexuel va renforcer la protection juridique des personnes transgenres dans l’article 225-1 du Code Pénal. Selon cet article, constitue une discrimination « toute distinction opérée entre les personnes physiques notamment à raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre » (SOShomophobie, 2016). Par la suite, la loi du 18 novembre 2016, dans laquelle « toute personne majeure ou mineure émancipée qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes de l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification » (Article 61-5 du Code Civil, 2016), permet l’exclusion d’un refus de changement de la mention de sexe à l’état civil justifié uniquement par le fait de ne pas avoir subi de traitements médicaux, d’opération chirurgicale ou de stérilisation (Bosqué, 2020). De même, selon le DILCRAH (2019), cette loi permet à présent le changement de prénom, même sans transition physique (à condition de présenter un document démontrant l’intérêt légitime de la demande) .

Sur le plan médical

A l’origine, les nosologies donnaient une vision de la transsexualité relevant de la perversion. Le transsexualisme a longtemps été pathologisé, permettant ainsi sa prise en charge médico-chirurgicale. Seulement, cette catégorisation crée une stigmatisation des personnes trans qui sont alors vues comme des personnes « hors-normes » (Klein-Dallant, 2019).

En France, le 8 février 2010, le décret n° 2010-125 supprime les termes « -troubles précoces de l’identité de genre » d’un article du code de la Sécurité Sociale relatif aux « affections psychiatriques de longue durée » (Légifrance, s.d.). Ainsi, les transidentités sont retirées de la liste des maladies mentales. (Bosqué, 2019). Le remboursement des soins entre dans la catégorie ALD « hors liste » (Boulay, 2018) et la Sécurité Sociale prend en charge 100% des soins. L’ALD n’est pas obligatoire pour se faire rembourser les soins (ils peuvent être remboursés de façon classique) mais demander l’ALD équivaut à une reconnaissance du mal-être des personnes trans et est donc demandée par une majorité d’entre elles.

Les systèmes de classifications internationaux DSM et CIM ont été également actualisés :
● en 2013, le DSM V remplace « trouble de l’identité de genre » par « dysphorie de genre » (American Psychiatric Association, 2013)
● en 2019, la CIM 11 déplace « l’incongruence de genre » du chapitre consacré aux maladies mentales dans un autre chapitre consacré à la santé sexuelle (OMS, 2018).

Selon le site Information Transgenre (s.d.), certains activistes, comme Genres Pluriels, veulent la suppression totale de diagnostic dans les classifications. D’autres, comme la WPATH , pensent au contraire que laisser les classifications telles quelles permet que les soins restent toujours bien remboursés.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. PARTIE THEORIQUE
1. INTRODUCTION
2. LES TRANSIDENTITES
2.1 Que sont les transidentités ?
2.2 Bref historique des transidentités
3. CONTEXTE ACTUEL EN FRANCE
3.1 Évolutions ces dernières années
3.2 Parcours des personnes trans
3.3 Représentations sociétales des transidentités et transphobie
4. CHAMP D’INTERVENTION ORTHOPHONIQUE DANS LE DOMAINE DE LA TRANSITION VOCALE
4.1 De plus en plus de demandes
4.2 Importance de la voix dans la transition
4.3 Rôle et place de l’orthophoniste dans la prise en soins
5. IMPORTANCE DE L’ACCUEIL POUR LA MISE EN PLACE DE L’ALLIANCE THERAPEUTIQUE
5.1 Dans la patientèle générale et chez les personnes LGBTQI+
5.2 Impact de la transphobie sur la relation thérapeutique
5.3 Impact de la transphobie sur le psychisme de la personne trans
6. POSITION DU PROBLEME ET HYPOTHESES
II. METHODE
1. POPULATION
2. MATERIEL
2.1 Choix de l’outil d’investigation
2.2 Conception du questionnaire
2.3 Types de questions
2.4 Pré-test
3. PROTOCOLE DE L’ENQUETE
4. MODE DE TRAITEMENT DES DONNEES
III. RESULTATS
1. DONNEES DESCRIPTIVES
1.1 Caractéristiques de l’échantillon
1.2 Choix de l’orthophoniste
1.3 Niveaux de besoins et de connaissances en lien avec la transidentité
1.4 Ressenti « global » de l’accueil en orthophonie
1.5 Ressenti dit « transphobe » lors de l’accueil en orthophonie
1.6 Réponses des participant.e.s concernant l’alliance thérapeutique avec l’orthophoniste
1.7 Réponses des participant.e.s concernant le retentissement psychologique de la prise en soin orthophonique
1.8 Fin de prise en soin orthophonique
2. DONNEES INFERENTIELLES
2.1 Satisfaction de l’accueil en orthophonie
2.2 Lien entre crainte avant l’accueil en orthophonie des personnes trans et freins préalables subis lors de leur parcours
IV. DISCUSSION
1. RESULTATS PRINCIPAUX
2.INTERPRETATION DES RESULTATS
3. LIMITES DE L’ETUDE
V. CONCLUSION

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