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Microbiologie
La majorité des infections était des pneumopathies ou des bactériémies. Tous les prélèvements bactériologiques, virologiques et fongiques, ont été récupérés auprès des laboratoires rattachés à l’institut.
Documentation bactérienne
La pneumonie bactérienne documentée a été diagnostiquée sur la base d’infiltrats pulmonaires radiologiques et d’une culture bactérienne quantitative sur les examens cytobactériologiques des crachats, les aspirations bronchiques ou encore, sur les lavages broncho-alvéolaires. Ceux-ci ont été quantifiés, et les tests d’identification et de sensibilité ont été effectués selon des méthodes standard.
Les bactériémies dues à des staphylocoques à coagulase négative et à d’autres contaminants hématologiques communs connus présents que sur une seule hémoculture, ont été exclues.
La présence d’une colonisation rectale n’a pas été retenue, sauf si des symptômes de colites y étaient associés.
Documentation virale
Les prélèvements virologiques faisaient intervenir des techniques de PCR en temps réel. Ces derniers proviennent d’échantillons sanguins, pleuraux, bronchiques, nasaux, de liquides céphalo-rachidiens, ou encore d’urines. D’autres, sont le résultat de biopsies d’organes (pulmonaire, hépatique, colique…). Les prélèvements viraux réalisés en service, durant le mois précédant l’hospitalisation en réanimation, ont été pris en compte. Sauf si un nouveau prélèvement viral a pu montrer une négativation de celui-ci.
Les réactivations étaient définies comme une positivité des PCR sanguines virales. Ils étaient ou pas associées à une réplication virale dans certains organes cibles.
Les maladies virales étaient le résultat de l’association d’une positivité d’une PCR sanguine ou sur site, avec des signes cliniques pouvant être imputés à cette réplication virale.
Une pneumopathie virale était l’association d’une PCR positive sur un prélèvement pulmonaire (aspiration bronchique, LBA…), ou nasopharyngée à la présence de signes clinico-radiologique de pneumopathie infectieuse.
Le diagnostic de méningo-encéphalite n’a été posé que dans le cas où il était retrouvé une réplication virale dans le liquide céphalo-rachidien. Une myocardite, une hépatite, ou une colite, était l’association d’une réplication virale sanguine à un tableau clinico-biologique en faveur d’une myocardite, d’une hépatite, ou d’une colite. Les diagnostics de gastrites et certaines colites étaient le résultat d’une réactivation virale sur des biopsies lors d’endoscopie digestive. Une atteinte cutanée (exanthème, ou éruption vésiculaire…) associée à une réplication virale sur des prélèvements cutanée ou sanguin, était considérée comme une affection topique de cause virale.
Description du processus de détermination de la charge virale
Elle faisait intervenir : le Light Cycler 480 II (Roche) : système de PCR en temps réel ; et le MagNA Pure Compact (Roche) : il s’agissait d’un extracteur permettant d’automatiser l’extraction des acides nucléiques (8 extractions en 30 minutes) en utilisant la technologie des billes magnétiques à partir de tout type de matériel (sang, liquides biologiques divers…). Les réactifs se présentaient sous la forme de cartouches préremplies prêtes à l’emploi et le MagNA Pure Compact assurait une traçabilité complète des échantillons et des réactifs.
Les trousses de quantification CMV, HSV1, HSV2, HHV6, VZV (Biomerieux-Argene™) étaient des kits commerciaux contenant l’ensemble des réactifs nécessaire à l’amplification par PCR temps réel d’une région cible de ces différents virus. L’amplification était réalisée au moyen de la technique des sondes d’hydrolyse 5’ nucléase TaqMan. Les mélanges d’amplification étaient prêts à l’emploi, et contenaient les amorces, les dNTPs, le tampon d’amplification, la Taq Polymérase et les sondes « cible » ainsi que les amorces spécifiques du contrôle interne (IC2) introduits dès l’extraction. La trousse permettait de quantifier le génome du CMV, HSV1, HSV2, HHV6, VZV dans le sang total, le plasma, le sérum, les LCR, les LBA, les urines…
Généralement le sang total analysé était prélevé sur tube EDTA. Une gamme composée de 4 points (QS1, QS2, QS3 et QS4) compris entre 5 000 et 5 copies/μl d’ADN standard permettait de tracer une courbe standard, à partir de laquelle les échantillons testés étaient quantifiés. Le point QS3 (50 copies/μl d’ADN standard) passé lors de chaque série permettait de réajuster la courbe standard externe réalisée au préalable à partir des 4 points de gamme fournis. Par ailleurs, un contrôle d’extraction et d’inhibition (IC2) était inclus dans la trousse. Il permettait de vérifier, dès l’étape de lyse que chaque échantillon était extrait correctement et ne contenait pas d’inhibiteur. Pour les prélèvements tels que les aspirations bronchiques ou LBA, une fluidification préalable a été nécessaire. Lors d’un prélèvement tissulaire, une digestion préalable des tissus a été réalisée. Pour ces derniers, seule une valeur qualitative a été donnée, en raison de la difficulté de peser la biopsie analysée.
Les virémies ont été exprimées en copies par millilitre de prélèvement. Pour le CMV : la limite de détection du test est de 50 copies / ml. Pour l’HHV6, l’HSV et le VZV : la limite de détection du test était de 100 copies / ml (ce qui correspond à une charge virale > 2 log10 copies / ml). Pour le EBV : un seuil était de 197 copies / ml.
Analyses statistiques
Les variables quantitatives ont été rapportées en tant que nombre (pourcentage) et les variables continues en tant que médiane (intervalle interquartile, IQR). Les variables quantitatives ont été comparées entre les survivants et les personnes décédées, à l’hôpital et à un an en utilisant le test du chi 2 ou le test exact de Fisher selon le cas. Pour comparer les variables continues entre les survivants et les décédés, nous avons utilisé le test U non-paramétrique de Mann-Whitney. Les facteurs jugés significatifs dans les analyses univariées ont été sélectionnés pour une régression logistique binaire multivariée avec une sélection rétrospective progressive. Des courbes de Kaplan-Meier ont été réalisées. Les valeurs de p inférieurs à 0,05 ont été considérées comme significatives. Tous les tests étaient bilatéraux. Les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel SSPS.
Caractéristiques de la population
Un total de 364 patients a été inclus dans l’analyse finale. Parmi les exclus, cinq étaient des patients d’unité de soins continus, 24 étaient une seconde hospitalisation, deux étaient une surveillance post-opératoire d’une chirurgie réglée, et un patient a été exclu par manque de données. Deux patients n’étaient finalement pas porteurs de pathologies hématologiques.
Les caractéristiques de la population étudiée ont été résumées dans le Tableau 1.
L’âge médian était de 60 ans [49-67]. Soixante pourcents d’entre eux étaient du sexe masculin (n=214). Le score de Charlson était de 4 [3-6] en médiane. La majorité avait un diagnostic de LAM (33%) ou de lymphome non-hodgkinien (29%). La pathologie hématologique était au stade de rémission pour 91 patients (25%), de diagnostic et en progression pour respectivement, 116 (32%) et 131 (36%) des patients. Seul un tiers (28%) des patients ont eu une allogreffe (n=101), dans un délai de 2 mois en médiane (62 jours [13-244]) avant leur admission en réanimation. Moins de 14% d’entre eux avait un antécédent de GVH (n=49).
A leur admission en réanimation, 190 patients était aplasique (52%). Avec un score de SOFA de 8 [6-10] en médiane dont la défaillance la plus fréquente était la thrombopénie (60%), et un score d’IGSII de 48 [39-59]. Les principaux motifs d’hospitalisation en réanimation étaient une détresse respiratoire aiguë pour 141 patients (39%) ou un état de choc septique pour 93 patients (25,5%). La durée médiane de séjour en réanimation était de 7 jours [4-14] et de 30 jours [18-45] pour la durée à l’hôpital. Un délai de 5 jours [0-16] était retrouvé entre le début de leur hospitalisation et l’admission en réanimation. Pendant leur séjour en réanimation, 229 (63%) d’entre eux ont nécessité un support ventilatoire et 161 (44%) une ventilation mécanique invasive. Un traitement vasopresseurs a été nécessaire chez 197 patients (54%) et une suppléance rénale a été posée chez 82 patients (23%).
Documentation microbiologique
Une étiologie infectieuse a été retrouvée pour 286 patients (80%). La cause bactérienne a été imputée dans 169 cas (59%). Une origine fongique a été mise en cause dans 23% des cas (n=67), dont la plupart (53%) était des aspergilloses invasives (n=36). Une documentation virale a été retrouvée chez 137 patients (38%). Et pour 125 d’entre eux (34,3% de la population étudiée), il s’agissait d’un Herpesviridae. Une réactivation herpétique était présente dans 115 cas (71%). Et un diagnostic de « maladie virale », dans 101 cas (62%).
La pneumopathie infectieuse diagnostiquée chez 176 patients, était la principale cause de leurs sepsis (62% des sepsis). D’origine bactérienne pour 85 patients (48% des pneumopathies infectieuses) et d’origine virale chez 48 patients (27%). Une cause fongique a été retrouvée chez 29% d’entre eux (aspergillose pulmonaire, pneumocystose pulmonaire, et candidose invasive pour, respectivement, 32, 17 et 1 patients). Nous avons retrouvé une toxoplasmose pulmonaire chez un seul patient. Les co-infections étaient présentes dans 52 pneumopathies infectieuses (30%) : vingt-et-un patients (12%) avaient une documentation bactérienne et virale, dix-sept (10%) une documentation bactérienne et fongique et, quatorze (8%) avaient une documentation virale et fongique. Vingt-et-un patients (5,6%) avaient uniquement une documentation virale. Deux cas de grippe sur huit ont été documentés chez des patients porteurs de l’HSV au niveau pulmonaire. A l’inverse, deux cas de VRS positif sur les six diagnostiqués, ont été retrouvés chez des patients ayant une réplication d’HHV6 au niveau pulmonaire. Un taux de surinfection bactérienne a été de 80% et de 40% pour, respectivement, le VRS et la grippe. Les pneumopathies non documentées étaient de l’ordre de 20% (n=36).
Documentation virologique
Dans le cadre des Herpès virus, l’HHV6 était le virus le plus détecté. En effet, il a été retrouvé pour 65 patients (18%). Puis, l’HSV et le CMV pour 41 et 38 patients (11 et 10%) ; l’EBV chez 24 des patients (6,6%) ; et le VZV n’était retrouvé chez seulement 3 patients. Un total de 101 maladies herpétiques a été diagnostiqué chez 78 patients (21%). Et, 64 pneumopathies virales chez 48 patients (13%). Sept patients ont eu une méningo-encéphalite virale ; huit une colite virale ; sept une myocardite virale ; cinq une hépatite virale ; et une affection topique était retrouvée chez 8 patients. Deux cas de gastrites virales ont été décrits. Deux patients ayant des symptômes d’encéphalite, n’avaient pas d’HHV6 retrouvé au niveau du LCR alors que dans le sang oui ; et un pour le CMV. La charge virale sanguine d’HHV6, retrouvé chez les patients présentant une encéphalite avec une positivité du LCR, n’était pas plus élevée que chez ceux ne l’ayant pas.
Un patient avait une réactivation dans le nasopharynx pour l’HHV6 et un pour le CMV avec une PCR dans le LBA et le sang négative, sans symptômes pulmonaires, ils ont été considérés comme une réactivation virale simple. Trois patients étaient positifs à l’HHV6 dans le LBA mais pas dans le sang, ils ont été considérés comme une pneumopathie car ils présentaient des signes cliniques de pneumopathie.
Parmi les patients revenus positifs à l’HHV6 (n = 66), la moitié était porteuse d’allogreffe (n = 33). Contre 23% d’allogreffés chez les patients sans documentation à l’HHV6.
Analyse univariée
En analyse univariée, l’IGS II, l’antécédent de GVH, le nombre de ligne de chimiothérapie plus élevé, l’allogreffe, la présence d’une corticothérapie, et un score SOFA élevé, étaient, significativement, associés à une mortalité plus élevée, à l’hôpital et à 1 an. Bien que ne permettant pas d’influencer la mortalité à court terme, le score Charlson était en revanche significativement plus élevé dans le groupe décès à 1 an (p=0,023).
Nous n’avons pas retrouvé de différence significative entre les différents types d’HM sur la mortalité à l’hôpital (p=0,25) et à 1 an (p=0,10). Le statut en progression était associé de manière significative à la mortalité au sein de l’hôpital (p=0,024) mais ne l’était plus sur la mortalité à 1 an (p=0,067). Un HM au diagnostic était à l’inverse un état protecteur durant ce séjour à l’hôpital.
Le statut aplasique à l’admission ainsi que sa durée n’était pas un facteur de risque de mortalité dans cette étude (respectivement p=0,22 et p=0,054).
Les patients entrant pour une DRA étaient plus à risque de décès, que ce soit à l’hôpital (p=0,019) ou à 1 an (p=0,005). Alors qu’une admission pour une induction de chimiothérapie était à l’inverse un facteur protecteur de la mortalité au sein de l’hôpital (p=0,003). Mais cet effet se perdait au cours de l’année (p=0,30).
L’ensemble des dysfonctions (hormis la dysfonction rénale) était associé à une plus grande mortalité à court terme (p<0,002). Mais seules les DRA et les états de choc (septique et/ou cardiaque) étaient un facteur de mauvais pronostic sur le long terme (p<0,00001 et 0,041). De même, la nécessité et une durée prolongée d’un support aminergique, d’une dialyse ou d’une ventilation mécanique invasive ou non invasive, étaient significativement associées à la mortalité au sein de l’hôpital et à 1 an (p<0,0001).
Bien que la présence d’un sepsis fût associée de manière significative à la mortalité à court ou à long terme (p<0,0001), une documentation bactérienne de celui-ci, ne l’était pas (p=0,35). Néanmoins, une documentation bactérienne retrouvant un BGN de type non fermentant (pyocyanique, acinetobacter, ou stenotrophomonas) était un facteur de mortalité à l’hôpital (p=0,017) et à un an (p=0,003). Seule l’aspergillose, parmi les affections fongiques, était associée de manière significative à la mortalité hospitalière et à long terme (p<0,0001). La présence d’une candidémie, n’avait d’impact significatif que sur la mortalité à long terme (p=0,046).
La présence et le nombre plus élevé de virus herpétiques étaient des facteurs de mauvais pronostic à l’hôpital (p<0,0001) et à 1 an (p=0,002). En analyse univariée, nous avons retrouvé associé à la mortalité hospitalière : la documentation à HHV6 (que ce soit une simple réactivation sanguine ou une maladie ; p<0,0001) ; la documentation, la maladie et la réactivation à CMV (p=0,023 et 0,041) ; et enfin la présence d’EBV ou une réactivation sanguine d’EBV (p=0,041 et 0,007). La pneumopathie à CMV et les autres documentations virologiques étaient non-significative (p>0,05). A 1 an, en analyse univariée, la présence d’HHV6 ou de CMV étaient associés de manière significative à la mortalité (respectivement, p=0,004 et 0,031). Nous n’avons pas retrouvé d’impact sur la mortalité sur le long terme pour les autres virus du groupe herpès.
Un traitement de prophylaxie virale, ainsi qu’un taux d’albuminémie élevé, étaient, quant à eux, des facteurs associés à une meilleure survie hospitalière (p=0,0001), avec la persistance de l’association pour le taux d’albuminémie sur la survie à 1 an (p<0,0001). L’utilisation d’antiviraux à visée curative ou prophylactique n’avaient pas d’impact significatif à 1 an (p=0,068). Leurs durées d’utilisation n’étaient pas non plus associées à la mortalité (p=0,18).
Analyse multivariée
Après régression logistique en analyse multivariée, les facteurs prédictifs indépendamment associé à la mortalité hospitalière (Tableau 8) étaient la détection d’une aspergillose invasive (OR à 4,87 [1,93-12,29] ; p=0,001), et la réactivation sanguine d’HHV6 (Figure 5) ou d’EBV (respectivement OR à 2,35 [1,03-5,34] ; p=0,042 et OR à 3,33 [1,14–9,79] ; p=0,028). L’utilisation de corticoïdes, le score IGS II, le nombre de lignes de chimiothérapie, le choc septique et un rapport Pa02/FiO2 inférieur à 200 à l’admission (score SOFA respiratoire > 2), sont aussi des marqueurs indépendamment associés à la mortalité hospitalière. Nous avons noté, par ailleurs, que la présence d’un sepsis avec une documentation bactérienne, ou l’utilisation d’un traitement antiviral prophylactique étaient des facteurs associés à une survie hospitalière plus élevée (respectivement OR à 0,50 [0,29–0,87] ; p=0,014 et OR à 0,41 [0,18-0,95] ; p=0,037), mais leurs effets protecteurs n’étaient plus retrouvés à 1 an (Figure 2).
De la même manière, les facteurs les plus importants associés à une mortalité à un an (Tableau 9 – Figure 3), étaient la présence d’une aspergillose invasive (OR à 7,68 [2,03-29,01] ; p=0,003), le recours à une ventilation mécanique invasive (OR à 4,50 [2,58-7,84] (p<0,0001)), à un traitement de suppléance rénal (OR à 2,38 [1,19-4,78] (p=0,015), et la documentation d’un sepsis à BGN non fermentant (OR à 2,68 [1,07-6,72] ; p=0,036). La GVH était associée à un taux de mortalité 2,59 plus important à 1 an (IQR [1,11-6,05] ; p=0,002). Sur le versant viral, le diagnostic d’une pneumopathie à HHV6 était associé de manière majeure, à la mortalité à 1 an dans l’analyse multivariée (OR à 6,87 [1,09-43,30] ; p=0,040) (Figure 4).
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Table des matières
MATERIEL ET METHODES
Les patients
Collecte de données
Microbiologie
Documentation bactérienne
Documentation virale
Description du processus de détermination de la charge virale
Analyses statistiques
RESULTATS
Caractéristiques de la population
Documentation microbiologique
Documentation virologique
Mortalité
Analyse univariée
Analyse multivariée
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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