Description de la Typologie spatio-temporelle des Culicoides en France métropolitaine
Introduction
Décrit en Afrique du Sud depuis plus de 100 ans (Henning. 1956), l’arbovirus de la fièvre catarrhale ovine (FCO) a connu une expansion récente de sa distribution et de ses vecteurs potentiels en Europe. Détectée pour la première fois en Corse en 2000 (Annon 2000j cité dans Mellor et al. 2008), l’émergence de cette maladie d’origine tropicale en France continentale est avérée depuis l’épidémie de 2006. La FCO, maladie à transmission vectorielle, se traduit par des symptômes très diversifiés, particulièrement critiques sur les ovins. La crise sanitaire européenne a causé de très importantes pertes économiques, notamment une baisse des échanges commerciaux d’animaux dus à des précautions sanitaires. Finalement, son potentiel de diffusion et l’extension de sa distribution à conduit au classement de la FCO par l’Organisation mondiale de la santé animale en liste « maladie à notifier ». (OIE, 2006).
Le virus est transmis par des moucherons hématophages du genre Culicoides (Diptera, Ceratopogonidae, Du Toit, 1944) dont seulement quelques dizaines d’espèces sont des vecteurs potentiels (Meiswinkel et al. 2004). Cette progression en Europe est très probablement attribuable à un changement de vecteurs vers les Culicoides du groupe obsoletus/scoticus (Meiswinkel et al 2008, Mellor et Wittmann, 2002). D’autres espèces pourraient être impliquées, C.dewulfi (Carpenter et al. 2006) ou encore C.chiopterus et le groupe C.pulicaris (Meiswinkel et al. 2008). Ces espèces potentiellement vectrices étaient présentes en Europe bien avant les épizooties de FCO, ce qui suggère que des changements environnementaux ont permis à ces espèces d’être de nouveaux vecteurs (Purse et al. 2008). Cette situation est peut-être liée aux changements climatiques (Mellor et Wittmann, 2002 ; Guis, 2011). Il y a un manque flagrant de données notamment du fait de l’impossibilité actuelle de son élevage en laboratoire. De façon générale les connaissances actuelles citées sont bien souvent des extrapolations d’informations fragmentaires ou issues d’autres groupes d’insectes à la biologie probablement proche (Culex par exemple). La caractérisation des dynamiques conditionnant la distribution des espèces potentiellement vectrices est donc un sujet d’étude d’importance, notamment afin de déterminer les potentiels de diffusion des maladies émergentes liées aux Culicoides.
Suivi vectoriel : En 2000, après la description de la FCO en Corse, un premier réseau de pièges est implanté pour suivre la progression du vecteur sur l’île (C.imicola est le vecteur principal confirmé, Mellor et al. 2008), bientôt suivi par une extension sur le pourtour méditerranéen et dans le Pays Basque, les principaux fronts d’entrée des vecteurs du Sud en France continentale. En 2006, l’épizootie démarre au nord de la France (depuis Maastricht OIE, 2006) et se propage rapidement vers le sud, une nouvelle série de pièges est installée sur la frontière Nord-Nord Est. Finalement en 2009, l’ensemble du territoire national est couvert par un ou deux pièges par département.
La mise en place définitive du protocole depuis 2009 a permis de collecter plusieurs millions de Culicoides de plus de 70 espèces sur trois années, ce qui représente une base de données inestimable pour la compréhension des dynamiques des communautés d’espèces en France. La description et l’analyse des dynamiques spatio-temporelles des vecteurs sont indispensables à la mise en place de moyens de contrôle efficaces et d’analyse de leur efficacité. Actuellement, peu d’information sur l’écologie et la distribution des espèces en France est disponible.
L’objectif est donc de déterminer sur la base des données récoltées en 2010 la typologie spatio-temporelle des communautés d’espèces de Culicoïdes de la France continentale. Nous rechercherons à décrire des patrons de distribution spatiale en France métropolitaine et la stabilité de ces structures au cours de l’année.
Matériel et Méthodes
Données disponibles : Depuis 2009, 171 sites d’études sont dispersés sur l’ensemble des départements français métropolitains et la Corse (un à deux pièges par départements) à proximité d’exploitations ovines, bovines, équines ou mixtes (pièges à l’extérieur ou l’intérieur des étables). Des pièges attractifs lumineux de type OVI sont installés une nuit par semaine de novembre à avril et une nuit par mois pendant la période principale d’activité des Culicoïdes (mai à octobre). Les pièges sont récoltés au petit matin, triés puis identifiés à l’espèce (les espèces C.obsoletus et C.scoticus sont rassemblées dans un complexe d’espèce du fait de leur proximité morphologique et de l’absence de méthode PCR efficace). Le jeu de données utilisé est composé sur l’année 2010 des abondances de 65 espèces de Culicoïdes pour 1.309.845 individus femelles identifiés. Les données d’abondances analysées sont les maxima pour chaque mois d’échantillonnage. L’utilisation des maxima est justifiée par le nombre important d’abondances nulles et de données manquantes, limitant l’utilisation de moyennes. Les données des mois de janvier, février, mars et décembre ne sont pas utilisées, du fait de l’activité très faible enregistrée et du nombre important d’abondances nulles (20.700 individus pour les quatre mois cumulés, soit 0,016% de l’abondance annuelle 2010). Du fait d’événements inhérents à l’échantillonnage de terrain (absence de relevé, perturbations du piège, etc.), plusieurs dates sont manquantes pour certains pièges. Les pièges avec un échantillonnage répété sur sept mois minimum (sur 8 mois d’échantillonnage) sont conservés (144 pièges sur 171). Lorsqu’un mois est manquant, les données sont imputées par la moyenne du mois précédent et du suivant sur le même piège (25 lignes imputées sur 1152).
Analyse triadique partielle (ATP) et Analyse factorielle de Foucart (AFC de Foucart) : La structuration de la base de données et la recherche d’une description de la typologie spatiale et temporelle sont particulièrement adaptées aux analyses multi-tableaux (ou cubiques). L’ATP (Thioulouse et Chessel, 1987 ; Blanc et al., 1998) et l’AFC de Foucart (1978, 1983) sont utilisées sur huit tableaux de mois (avril à novembre). Les données utilisées pour la formation des tableaux sont les maxima d’abondances de femelles par mois et par piège. Seules les espèces présentes sur au moins 11 sites (10% de l’échantillonnage) et d’une abondance supérieure à 0.05% de l’abondance totale annuelle sont conservées pour la formation des k-tableaux (soit 17 espèces représentant 94,5% de l’abondance totale annuelle). L’ATP et l’AFC de Foucart permettent d’obtenir une structure moyenne de compromis dans le temps (tableau moyen sur l’année, figure 1). Une analyse d’inertie standard sur le compromis et une analyse de sa stabilité (projection des analyses séparées de chacun des tableaux sur l’espace de compromis) sont ensuite effectuées. L’ATP, selon le principe d’Escouffier (1982), crée une matrice de corrélation vectorielle entre les tableaux qui permet d’obtenir les pondérations qui seront attribuées à chacun d’eux pour construire le compromis. L’AFC de Foucart effectue une moyenne des tableaux puisque les dimensions entre les tableaux sont, de par la caractéristique de la distance du Chi2, différentes. Le double centrage et réduction des données par la distance du Chi2 impose en effet une pondération très différente entre les tableaux. Les principales espèces identifiées dans les projections des compromis (Cosinus carrés les plus importants) sont sélectionnées pour l’analyse détaillée des communautés d’espèces.
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Table des matières
Introduction
Matériel et Méthodes
Résultats
Discussion
Bibliographie
Annexes
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