Description botanique de la plante d’Hibiscus sabdariffa L.
Hibiscus sabdariffa L. est une plante herbacée annuelle appartenant à la famille des Malvaceae. Elle est largement distribuée dans les zones tropicales et subtropicales et est connue sous divers noms en français : oseille de Guinée, oseille rouge, thé rose d’Abyssinie, karkadé ou carcadé, roselle ou bissap. Au Burkina Faso, cette plante est abusivement appelée oseille en français. En mooré on l’appelle bidgo (singulier) ou bito (pluriel) et en dioula dâ ou dâkumu (Abu-Tarboush et al., 1997 ; Morton, 1987; Nacoulma-Ouédraogo, 1996). Hibiscus sabdariffa est également présent dans d’autres pays tels que l’Inde, la Malaisie, la Thaïlande, l’Arabie Saoudite, le Nigeria, la Tanzanie, la Jamaique, etc où il est connu sous diverses appellations (Endrias, 2006). Plus de 500 espèces d’Hibiscus sont connues dans le monde. La majorité des variétés sont utilisées comme plantes ornementales à l’exception de l’espèce H. sabdariffa dont deux variétés ont été identifiées : Hibiscus sabdariffa variété altissima et H. sabdariffa variété sabdariffa L. (Kerharo et Adams 1974; Morton, 1987). McClintock (2004) a distingué ces deux variétés d’H. sabdariffa en variété blanche et variété rouge.
Hibiscus sabdariffa L. est décrit comme une plante qui peut atteindre 1 à 2 m de haut et plus suivant les types de l’espèce et les modes de culture (Photo 1a). Sa tige robuste est verte ou rouge, glabre ou hispide selon les variétés. Elle porte des feuilles alternes dont le limbe présente un polymorphisme relatif ; il est généralement trilobé et denté. Les fleurs (Photo 1b), réparties le long de la tige ont de 7 à 10 cm de diamètre ; elles sont axillaires de couleur jaune-crème possédant une corolle à cinq pétales et un calice (photo 1c) à cinq sépales qui prennent la couleur de la tige.
A maturité, le fruit capsulaire entouré par le calice persistant devenu charnu, renferme des graines à deux cotylédons limitées par un tégument pectinocellulosique résistant (Fortin et al., 1997 ; Kerharo et Adams, 1974). Les graines sont ovoïdes et de teinte brune (Photo 1d). A partir d’un échantillon de 1000 graines, il a été mesuré que la graine d’ H. sabdariffa avait un diamètre moyen principal de 5,6 mm, un diamètre intermédiaire de 5,2 mm et minimal de 2,8 mm (Omobuwajo et al., 2000).
Au Burkina Faso la plante d’H. sabdariffa est communément cultivée en bordure des champs de brousse et dans les champs autour des habitations. Elle est également exploitée en culture maraîchère. Les variétés blanche et rouge sont les plus emblavées et leur culture est essentiellement réalisée pour la fourniture de légumescondiments.
Hibiscus sabdariffa est emblavé en cultures pluviales et de contre saison. L’utilisation de ses graines dans la préparation du Bikalga constitue un grand avantage en termes de disponibilité de la matière première. Ses graines sont plus disponibles que celles du néré (Parkia biglobosa). Ces dernières étant des produits de cueillette, il se pose de plus en plus un problème de disponibilité déterminé par divers facteurs dont le vieillissement des arbres producteurs, qui en plus ont un long cycle de développement (Ferre et Muchnik, 1992).
Composition et principales utilisations
Composition biochimique
Composition des graines
Les graines d’H. sabdariffa sont protégées par un tégument pectino-cellulosique épais limitant les échanges. Cela explique en partie leur faible teneur en eau (7- 12%). Elles sont principalement constituées de protéines (22-33%), de lipides (20%) et de 25-30% de glucides (El-Adawy et Khalil, 1994; Hainida et al., 2008; Parkouda et al., 2008). La teneur en protéine des graines d’H. sabdariffa est très proche de celles de l’okra (Hibiscus esculentus) et de l’huile de coton (Gossypium sp) selon Çaliçir et al. (2005). Elles constituent donc une source potentielle de protéines pour l’alimentation humaine. La concentration totale en acides aminés essentiels de la référence protéique de la FAO est de 36 g 100 g-1, alors qu’elle est de 39,5 g 100 g 1 de protéine pour les graines d’oseille. Les acides aminés essentiels et majoritaires des graines sont les acides glutamique, aspartique, la phenylalanine, la leucine et l’arginine (Al-Wandawi et al., 1984; El-adawy et Khalil, 1994; Hainida et al., 2008). Selon le modèle de référence de la FAO (FAO/WHO, 1991) et la plupart des auteurs (Al-Wandawi et al., 1984; El-Adawy et al., 1994; Pu, 1996; Hainida et al., 2008), les acides aminés limitant seraient la valine, l’isoleucine, la méthionine et le tryptophane, tandis que tous les acides aminés soufrés ne le seraient pas. La teneur en lysine des graines est identique à celle de la protéine de référence de la FAO. Ces protéines pourraient donc être utilisées pour équilibrer les régimes alimentaires pauvres en lysine comme ceux basés sur le maïs (Nanaman, 1998; Nanaman et al., 1999). C’est le cas du tô de maïs qui constitue l’aliment de base de certaines régions du Burkina (Nanama, 1998). Avec une teneur moyenne de 20%, la graine d’H. sabdariffa présente une richesse en huile proche de celles d’autres graines comme celles de la tomate (Lazos et al., 1998) ou celles des graines de baobab (Diop et al., 2005). En plus donc de leur bonne valeur protéique, ces graines représentent une source potentielle de lipides pour l’alimentation humaine (Pu, 1996). L’huile brute des graines contient plus de 70% d’acides gras insaturés. L’acide linoléique est le plus abondant (39%) suivi de l’acide oléique à une concentration de 31%. L’acide palmitique (21%) et l’acide stéarique (6%) sont les acides gras saturés les plus abondants. Les propriétés physico-chimiques de l’huile brute révèlent que l’huile a un indice de saponification élevé mais un indice d’iode faible (Abu-Tarboush et al., 1997; Mohamed et al., 2007). L’huile des graines d’oseille a une teneur importante en tocophérol (2000 mg/kg en moyenne) comprenant la gamma-tocopherol (74,5%), l’alpha-tocophérol (25%) et le delta-tocophérol (0,5%) et constitue ainsi une bonne source d’antioxydants liposolubles (Mohamed et al., 2007).
Les graines d’H. sabdariffa ont des teneurs moyennes en glucides de 30%. Pu les a estimés entre 39,5 et 42,6% en incluant les insolubles (Pu, 1996). Ces teneurs sont plus élevées que celle des graines de Parkia biglobosa (12%) (Laokole, 1994; Odunfa, 1985). Elles sont proches de celles relevées dans le soja (Glycine max) (32%) (Gauthier et al., 1996). Le sucrose et l’amidon sont les sucres dominants; ils représentent à eux deux près de 90% des sucres, fibres exclus. Les graines d’H. sabdariffa se caractérisent par une forte teneur en fibres. Elles renferment environ 12% de cellulose et l’insoluble formique (cellulose + lignine) avoisine le seuil de 23% (El-Adawy et Khalil, 1994; Pu, 1996).
Les concentrations de sels minéraux des graines d’oseille sont de l’ordre de 7 à 12% (El-Adawy et Khalil, 1994; Bengaly, 2001). Le potassium est l’élément minéral dominant avec des concentrations de l’ordre de 23 g/100g de cendres brutes. Ensuite viennent le sodium (11 g/100 g), le magnésium (8 g/ 100 g) et le calcium (7 g/ 100 g). Le manganèse (0,07 g/100 g), le fer (0,14 g/ 100 g) et le zinc (0,07 g/ 100 g) sont présents en faible quantité et seules des traces de cuivre ont été relevées (El-Adawy et Khalil, 1994; Pu, 1996; Bengaly, 2001). Au regard de cette composition en sels minéraux, certains auteurs ont préconisé son utilisation comme complément des farines boulangères en éléments minéraux notamment en calcium (El-Adawy et Khalil, 1994).
La graine d’H. sabdariffa contient plus de 25 composés volatiles dont des hydrocarbures, des alcools et des aldéhydes (Jirovetz et al., 1992). Ces composés sont importants pour l’arôme de l’huile dont la typicité peut être mise à profit en cuisine.
Composition des autres parties de la plante
Les feuilles d’H. sabdariffa contiennent une quantité non négligeable de protéines comparables au standard de l’OMS (Sena et al., 1998). Sena et ses collaborateurs (1998) ont également mentionné que les feuilles d’Hibiscus pourraient constituer potentiellement une bonne source de fer, calcium, magnésium et zinc. Elles contiennent également des acides organiques (acide ascorbique, tartrique, citrique, malique, oxalique…), des alcaloïdes, des triterpènes, des saponosides et du mucilage (Fortin et al., 1997; Kerharo et Adams 1974). Ces feuilles constituent une bonne source de nutriments, c’est pourquoi elles entrent dans l’alimentation des populations des pays producteurs (Diouf et al., 2007; Kahane et al., 2005). Les fleurs d’H. sabdariffa renferment de l’acide hibiscique, des flavonoïdes (gossypétine, hibiscétine, sabdarétine), des hétérosides (gossytrine, hibistrine, hibiscine), de la phytostéroline et de la cire (Fortin et al., 1997; Kerharo et Adams 1974). Les calices d’H. sabdariffa constituent la partie la plus importante de la plante du point de vue économique dont la composition varie suivant la variété, la zone géographique de production, le climat, les conditions de culture, etc. Ils sont riches en acides organiques dont les acides succinique, ascorbique, oxalique, tartrique et malique (Daffallah et Al-Mustafa 1996; Wong et al., 2002). Les sucres présents dans les calices sont constitués de glucose (sucre majoritaire), fructose et saccharose (Wong et al., 2002). L’élément minéral dominant dans les calices est le calcium. Les calices d’H. sabdariffa contiennent également des mucilages, des pectines, ainsi que tous les acides aminés essentiels (El-Adawy et Khalil, 1994; Tsai, 1995). L’une des caractéristiques d’H.sabdariffa est également sa richesse en anthocyanes (calices rouges) dont la teneur peut atteindre 1,5 g. kg-1de calices secs, teneur comparable à la mûre et supérieure à la plupart des autres végétaux comestibles (Mazza et Miniati, 2000). L’activité antioxydante des anthocyanes confère aux boissons à base d’H. sabdariffa des propriétés antioxydantes intéressantes (Tsai et al., 2002; Wang et al., 2000). Les calices d’H. sabdariffa renferment également les vitamines B1, B2, B3, C et D (Fortin et al., 1997).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I: SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1 Description botanique de la plante d’Hibiscus sabdariffa L.
1.2 Composition et principales utilisations
1.2.1 Composition biochimique
1.2.1.1 Composition des graines
1.2.1.2 Composition des autres parties de la plante
1.2.2 Principales utilisations de la plante d’Hibiscus sabdariffa
1.2.2.1 Utilisations alimentaires
1.2.2.2 Utilisations médicinales
1.3 Fermentation alimentaire
1.4 Fermentation traditionnelle alcaline en Afrique
1.5 Condiments fermentés alcalins d’Afrique et principaux microorganismes associés
1.6 Le Bikalga
1.6.1 Méthode de production
1.6.2 Changements physico-chimiques au cours de la fermentation
1.6.3 Valeur nutritive du Bikalga
1.6.4 Microorganismes associés à la fermentation
1.7 Les bactéries du genre Bacillus
1.8 La nécessité d’optimiser le processus de production du Bikalga
1.9 Avantages de l’utilisation de starter pour la fermentation des graines d’H. sabdariffa
1.10 Les bactériocines
1.10.1 Définition
1.10.2 Classification
1.10.3 Les applications des bactériocines
1.10.3.1 Les bactériocines en agroalimentaire
1.10.3.2 Les applications médicales
1.10.4 Bacillus spp. producteurs de bactériocines
1.11 Les lipopeptides
1.11.1 Structure chimique des lipopeptides
1.11.2 Biosynthèse des lipopeptides
1.11.3 Propriétés des lipopeptides
1.11.3.1 Propriétés physico-chimiques
1.11.3.2 Propriétés biologiques
1.12 Les polykétides
1.12.1 Définition
1.12.2 Biosynthèse des polykétides
1.13 Résistance des bactéries aux antibiotiques
1.13.1 Définition des antibiotiques
1.13.2 Mode d’action des antibiotiques
1.13.3 Classification des antibiotiques
1.13.4 Etude de la bactériostase : Détermination de la CMI
1.13.5 Les différents types de résistance aux antibiotiques
CHAPITRE II : MATERIEL ET METHODES
2.1 Matériels
2.1.1 Les souches bactériennes et les conditions de culture
2.1.2 Les milieux de culture (solides et liquides)
2.1.3 Les tampons, les solutions et les enzymes
2.1.4 Les graines d’H. sabdariffa L.
2.2 Protocole des études réalisées
2.2.1 Confirmation de l’identité des souches dominantes de Bacillus spp. isolées du Bikalga
2.2.1.1 Extraction de l’ADN bactérien
2.2.1.2 Regroupement des isolats par M13-PCR (Polymerase Chain Reaction)
2.2.1.3 Amplification et séquençage du gène gyrB
2.2.2 Etude de l’activité antimicrobienne des souches dominantes de Bacillus spp. isolées du Bikalga
2.2.2.1 Préparation des inocula des souches de Bacillus spp.
2.2.2.2 Préparation des surnageants de culture des souches de Bacillus spp.
2.2.2.3 Détermination de l’activité antimicrobienne par la méthode de diffusion de tache de culture dans l’agar
2.2.2.4 Détermination de l’activité antimicrobienne par la méthode de diffusion en puits du surnageant de culture dans l’agar
2.2.3 Caractérisation physico-chimique des substances antimicrobiennes produites
2.2.3.1 Effet des enzymes, du pH, de la chaleur et des composés chimiques sur l’activité inhibitrice
2.2.3.2 Estimation de la taille des composés antimicrobiens par SDS-PAGE
2.2.3.3 Analyse des substances antimicrobiennes par HPLC-MS
2.2.4 Recherche des gènes codant pour les bactériocines (subtiline, subtilosine, sublancine et éricine), les lipopeptides (iturine/mycosubtiline, surfactine/lichenysine et fengycine/plipastatine), les polykétides (difficidine, macrolantine et bacillaene) et la dipeptide bacilysine
2.2.5 Cinétique de croissance et de production des substances inhibitrices
2.2.6 Essais de production de substances inhibitrices par les souches A4, I8, G3 et H4 dans le bouillon des graines broyées d’H. sabdariffa
2.2.7 Résistance des Bacillus spp. dominantes du Bikalga aux antibiotiques
2.2.7.1 Détermination de la sensibilité des souches aux antibiotiques : détermination des concentrations Minimales Inhibitrices (CMI)
2.2.7.2 Recherche de quelques gènes de résistance aux antibiotiques
2.2.8 Résistance à l’acide et tolérance à la bile des souches de Bacillus spp.dominantes du Bikalga
2.2.8.1 Préparation des inocula des souches de Bacillus spp.
2.2.8.2 Effet de l’acidité sur les souches
2.2.8.3 Effet de la bile sur les souches
2.2.9 Méthodes d’analyses statistiques des données
CHAPITRE III : RESULTATS ET DISCUSSION
3.1 Résultats
3.1.1 Résumé de l’article 1
3.1.2 Article 1 publié: Coproduction of surfactin and a novel bacteriocin by Bacillus subtilis subsp. subtilis H4 isolated from Bikalga, an African alkaline Hibiscus sabdariffa seed fermented condiment.
3.1.3 Résumé de l’article 2
3.1.4 Article 2 publié: Bacillus amyloliquefaciens ssp. plantarumstrains as potential protective starter cultures for the production of Bikalga, an alkaline fermented food.
3.1.5 Résumé de l’article 3
3.1.6 Article 3 publié: Resistance to antimicrobials and acid and bile tolerance of Bacillus spp. isolated from Bikalga, fermented seeds of Hibiscus sabdariffa.
3.2 Discussion générale
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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