Les tirages de Monte-Carlo
La ventilation spatiale utilise des méthodes de tirages de Monte-Carlo pondérés par des variables de contrôle. Ces techniques s’appuient sur des tirages aléatoires répétés pour évaluer une quantité et/ou approcher la solution d’un système déterministe. Par exemple, dans une commune nous avons trois établissements économiques. L’effectif des salariés est une variable de contrôle que nous connaissons. Nous allons nous appuyer sur cette information auxiliaire (données de contrôle). Pour placer un actif à l’intérieur de sa commune de travail, nous devons choisir un établissement économique parmi plusieurs alternatives. Nous pouvons supposer que les individus ont des probabilités différentes de travailler dans chaque établissement. Un tirage de Monte-Carlo consiste à placer un actif dans un de ces établissements en fonction des probabilités construites à l’aide des variables attributaires des données de contrôle (effectif des salariés par exemple). Bien sûr nous ne savons jamais si les tirages au sort ont sélectionné les établissements économiques réellement fréquentés par les actifs. Toutefois, plus nous devons localiser d’actifs dans une zone, et donc plus nous effectuons de tirages au sort, plus la distribution des effectifs par établissements se rapproche de la réalité. Les tirages de Monte-Carlo permettent au moins de respecter le nombre de déplacements générés par les activités économiques. Nous pouvons utiliser la même méthode pour les lieux de résidence, à condition de disposer de données de contrôle. La question est de savoir si en procédant par tirages au sort successif des origines et des destinations, est-ce que nous reproduisons des couples origines-destinations représentatifs ? Quelle est l’incidence sur les indicateurs de la mobilité que l’on peut produire à partir de cette méthode ? En ventilant statistiquement les origines-destinations des actifs, retrouverons nous des distances de déplacements cohérentes, retranscrivons-nous les contraintes d’accès aux systèmes de transport alternatifs à la voiture ? Pour amoindrir l’incertitude inhérente à la stochasticité des tirages de Monte-Carlo, les données de contrôle pondérant les tirages peuvent être multipliées aux origines et aux destinations. Aussi nous pouvons ré-agréger quelque peu les résultats.
L’agrégation et la ré-agrégation
La demande en données finement localisées n’a pas pour but d’être utilisée à une échelle microscopique. La production de données fines a vocation à être ré-agrégée pour pouvoir construire des supports géographiques d’analyses selon des besoins divers. Nous proposons de désagréger les origines-destinations sur des supports les plus fins possibles selon la Désagrégation spatiale des données de mobilité du recensement de la population appliquée à l’Île-de-France disponibilité des données de contrôle, puis nous ré-agrégeons les résultats sur un support régulier dont les mailles constituant le support sont des carreaux de 1km de côté. De cette manière, nous espérons gagner en représentativité tout en étant descendu en échelle. Plus nous ré-agrégeons, plus nous nous rapprochons des distributions avant désagrégation. Au demeurant, le choix du support carroyé de 1km permet de répondre aux objectifs d’harmonisation des données (INSPIRE).
Mobilité générale et mobilité individuelle
« En 2008, chaque jour de semaine ouvrée, les Français de 6 ans ou plus effectuent en moyenne 177 millions de déplacements locaux » (Armoogum, Hubert, Roux, 2010,p.5). Pris individuellement, un Français effectue entre 3,0 et 3,4 déplacements par jour. « Ce sont 175 millions de décisions instantanées qu’il faut essayer de comprendre, d’analyser pour conduire des changements» (ADEME, Blog Transport du futur). Cette multitude de décisions de déplacement est habituellement subsumée sous le concept de mobilité générale. La mobilité générale est un phénomène collectif : c’est la somme des mobilités individuelle. Pour la comprendre, il faut connaître la façon dont les mobilités individuelles se combinent dans l’espace géographique et se renforcent. Au niveau individuel, la mobilité est aussi la capacité à se déplacer. Les analyses sociologiques ont démontré très tôt la relation entre la position dans l’échelle sociale et la volonté et capacité à se déplacer (Sorokin, 1927). Il existe une relation entre les revenus, les distances parcourues et le nombre d’activités réalisés (illustration 1). Cette augmentation des distances parcourues selon les revenus s’explique en partie par des aspirations individuelles croissantes et rendue possible par les moyens de transport rapides et coûteux. Dans un contexte de croissance économique et urbaine, les services se diversifient mais selon des logiques de localisation qui ne sont pas forcément celles des ménages. Les individus souhaitent accéder à ces services en se déplaçant dans l’espace géographique. Cette demande est multiple et prend différents visages selon les catégories socio-économiques. Pour analyser la mobilité générale, il est nécessaire de connaître les déterminants de la somme des mobilités. Les lieux de résidence des citoyens déterminent, en partie, la façon dont les mobilités s’additionnent. Outre, les attributs intrinsèques du logement qui sont plus ou moins fréquents selon les lieux, le choix du lieu de résidence doit répondre à un besoin de proximité à diverses aménités. Les individus doivent accéder à de multiples services et la localisation résidentielle doit permettre cet accès. Le choix résidentiel dépend, entre autres, de l’accessibilité du lieu de résidence aux autres services comme les lieux d’emploi et les lieux de consommation de biens courants. La localisation résidentielle offre un certain panel d’opportunités. Et, pouvoir choisir dans ce panel d’opportunités dépend, en autres, de sa capacité à se déplacer. Cette capacité dépend des moyens économiques permettant d’arbitrer entre un logement de qualité et la proximité à un éventail d’aménités urbaines, dans un contexte de concurrence aux ressources foncières amenant à une ségrégation socio-spatiale (illustration 2 et 3). Ainsi, en Île-de-France, les localisations résidentielles des ménages les moins aisés sont plus éloignées des services courants (Vallée al., 2015) Les choix résidentiels sont contraints par le gradient des prix fonciers qui est fortement différencié (illustration 3). Sous l’influence des mécanismes de l’offre et de la demande, les lieux offrant une meilleure qualité de vie sont plus chers à occuper, même si la qualité de vie n’explique qu’une faible partie des prix fonciers (Bonin et Hubert, 2015). La demande de logement des ménages ayant le plus de ressources économiques, peut donc conduire à faire augmenter les prix fonciers et empêcher les ménages plus modestes d’accéder au logement même dans les quartiers centraux mais traditionnellement populaires (phénomène de gentrification). Les évolutions sont différentes selon que l’accès au logement se fait par la location ou, ce qui est beaucoup plus récent, par l’accession à la propriété. Celle-ci engage des sommes bien plus importantes, des systèmes de crédit sur de longues périodes et peut donner prise à la spéculation. Par l’évolution des prix du foncier, les moins aisés sont renvoyés dans des localisations moins convoitées ou plus périphériques (moindre accessibilité) et donc moins chères : «la question des stratégies, résidentielles et autres, est directement liée à celle des ressources. Sans ressources, pas de stratégies. C’est par l’intermédiaire des ressources que stratégies individuelles et contraintes structurelles interagissent.» (Bonvalet et Dureau, 1990, p.132). Les politiques de la mobilité doivent donc considérer ces mécanismes qui restreignent les choix de localisation résidentielle. Continuons l’analyse de la demande de mobilité avec le motif du travail. Selon le rapport « La mobilité des Français, panorama issu de l’enquête nationale transports et déplacements 2008 » commandité par le Commissariat Général du Développement Durable (CGDD, 2010), il y a en France, en 2008, 14,6 millions d’actifs ayant un lieu de travail fixe et régulier. De manière générale, ce motif représente 20 % (illustration 4) de l’ensemble des 177 millions de déplacements. En moyenne, les Français habitent à 11 km de leur lieu de travail. Cependant, la mesure des temps de trajet domicile-travail est difficile. Dans bien des cas les parcours ne sont pas directs. L’Enquête Nationale Transports Déplacements (ENTD) 2008 donne comme indication que les Français se déplacent en moyenne 55 minutes par jour, sachant qu’un déplacement dure en moyenne 17,9 minutes pour une distance de 25,2km. La littérature montre que les budgets-temps quotidiens moyens sont à peu près constants selon les agglomérations (Zahavi, 1980), mais les distances domicile-travail varient selon les déterminants socio-économiques (âge, CSP, sexe) (Bacaïni, 1995) et selon les localisations (taille de l’agglomération, position dans l’aire urbaine) (Hubert et Delisle, 2010). Nous pouvons ajouter que les choix de la localisation résidentielle sont dépendants du lieu d’activité professionnelle. Mais il n’est pas observé de volonté directe d’habiter à proximité de son lieu de travail (Korsu, 2006). Les lieux de résidence doivent permettre l’accès à des services courants, marchands ou non. Toutefois, les actifs occupés peuvent aussi accéder à ces activités depuis leur lieu de travail. L’examen du chaînage des activités permet de distinguer des lieux structurants (lieu de résidence et lieu d’emploi), des lieux substituables des activités courantes ou des lieux exceptionnellement fréquentés, à mettre au second plan. Ces deux localisations sont supposées rendre accessibles un certain nombre d’autres opportunités sous la contrainte du temps disponible pour les activités extérieures, domestiques et du transport. Cette contrainte du temps a été formalisée par les travaux de la Time-Geography (Hägerstrand, 1975). Autrement dit, les déplacements sont en partie structurés par les localisations résidentielles, et d’emplois pour les actifs. À partir des données de l’Enquête Globale Transports d’Île-de-France 1991–1992, Mouna Boulahbal explore l’effet structurant de la liaison domicile-travail. « Il apparaît que le lieu de travail a un rôle polarisant fort sur la distribution spatiale des activités des individus, ce rôle pouvant être plus ou moins accentué selon la situation géographique de l’emploi et du domicile. En revanche, l’alignement de la distribution des activités autour du trajet domicile-travail est moins bien vérifié et, quand il est observé, il reste limité à une partie du trajet domiciletravail proche du lieu de résidence» (Boulahbal, 2001). Il en ressort que les activités régulièrement exercées par les individus ayant un emploi ont tendance à être proches du lieu de résidence ou du lieu de travail, selon l’accessibilité des activités à ces lieux et selon le temps dont disposent les individus en ces lieux. Les lieux de résidence et d’emplois ne déterminent pas à eux seuls les mobilités. Les besoins de déplacements et les arbitrages entre les différents lieux d’activités évoluent dans le temps sans que les individus changent nécessairement leur lieu de résidence ou d’emploi. En fonction du cycle de vie, les localisations à atteindre évoluent. Les choix de localisation résidentielle d’hier peuvent ne plus correspondre aux activités exercées aujourd’hui. (changement d’emploi, position du ménage). Les lieux changent également, que les ménages aient pu ou non anticiper certains de ces changements. L’agrandissement des ménages par cohabitation et naissances entraîne souvent un changement de résidence et peut provoquer un besoin de mobilité plus grand. Les ménages souhaitant habiter dans des logements plus grands s’éloignent des centres où ces logements sont rares, ainsi la proximité aux lieux d’emploi, aux commerces ou aux lieux de divertissement n’est plus la priorité. Mais les individus ne ré-adaptent pas pour autant l’ensemble de leurs programmes d’activités quotidiennes. Il est dangereux de vouloir systématiquement normaliser les comportements, d’autant plus que les tentatives d’optimisation de la mobilité peuvent suivre des logiques individuelles, de couples ou de familles qui visent des temporalités différentes. Les choix résidentiels sont contraints par des conditions d’accessibilité. Parmi les critères de localisation des ménages avec enfants la possibilité d’accès à des écoles de qualité est bien souvent mise en avant. Toutefois, une localisation résidentielle ne permet pas forcément la proximité à la fois de l’école, du collège, du lycée et de l’enseignement supérieur. Nous observons tout de même à l’aide de l’ENTD (CGDD, 2010) que les déplacements domicileétude sont en 2008 plus courts en distance (5,6 km) que les déplacements domicile-travail. Mais dans certains cas de ménages bi-actifs la congruence (adaptation réciproque) des programmes d’activités de chacun peut devenir vite complexe à mettre en place s’il faut accompagner les enfants à l’école.
Les supports d’analyses en lien avec les réseaux de transport routier
La modélisation de transport ne concerne pas seulement les étapes de création de matrice de déplacement. Elle consiste à appliquer sur un réseau de transport, les flux dénombrés par les matrices de déplacements. Nous faisons une aparté pour présenter les éléments de la littérature de la modélisation de trafic sur la question du choix du support en lien avec les réseaux de transports. Cette parenthèse met en avant le rôle des supports d’analyse dans la schématisation des réseaux et le fait qu’ils peuvent donc influencer les résultats de modélisation de trafic. Les supports ne doivent être ni trop fins (car le modèle n’est pas assez fidèle) ni trop grossier car il ne permet pas de juger de l’effet des aménagements de taille courante. Il y a un équilibre à trouver par un travail de spécialistes des modèles et du territoire. Les supports d’analyse ne sont donc pas déterminés a priori mais construits au fur et à mesure à partir des retours d’expérience et des évolutions des territoires. Nous refermerons la parenthèse à la section 2.2. Pour étudier les effets de choix des supports zonaux et linéaires (les réseaux de transports) et donc produire des résultats en connaissance de cause il faut faire varier la précision de chacun des supports et examiner les différences dans les résultats. En modélisation de transport routier beaucoup de littérature existent, citons par exemple : (Bovy et Jansen,1993) (Crevo,1991) (Ding,1994) (Khatib et al, 2001) (Chang et al., 2002) (Choi 2003) (Zhang et population jusqu’à celui de 1999. Désormais, la brique de base pour la diffusion des résultats du recensement rénové, qui débute avec le millésime 2006, est le quartier IRIS et l’îlot est abandonné. Kukudia, 2005) (Martinez,2007) (Jeon et al., 2010) (Jeon, 2012) et pour une revue de littérature (Nix, 2009).
La production de données suffisamment représentatives pour être diffusées
Nous prenons maintenant le rôle d’un producteur de données. Son travail est de collecter des observations sur le terrain et de les transmettre aux utilisateurs en stockant l’information dans un support que nous pouvons appeler de base, et qui satisfait aux contraintes de la production et de la diffusion. Dans une enquête par tirage au sort, le tirage est organisé par zone afin que l’échantillon soit grossièrement représentatif de la population totale à l’intérieur des zones. C’est la fonction principale du support pour un producteur. De plus, si l’enquête suit un plan de sondage, la non-réponse peut avoir un effet négatif qui peut être redressé à l’aide des données du recensement. Ainsi plus l’effectif tiré au sort est faible plus le support de tirage doit être aligné à celui du recensement pour redresser l’échantillon. Par construction, le support de base est le zonage disponible le plus fin pour effectuer des analyses descriptives. Une base de données de déplacements a pour objectif de contenir un nombre suffisant d’enquêtés pour donner une indication sur la capacité de chaque zone à générer des déplacements. Plus les échantillons par zone sont grands, plus l’échantillon est représentatif des populations totales à l’intérieure des zones. Dans le jargon statistique nous parlons également d’hypothèse d’homogénéité (2 échantillons sont issus de la même population sont dit homogènes). Mais ces hypothèses que nous sommes obligés de prendre dans le cas d’enquêtes statistiques ne sont pas les seules qui déterminent le support de la base de donnée à diffuser. La littérature présente 10 règles pour construire un zonage dédié à l’étude des transports:
1-Achieve a maximum of homogeneity inside the newly created zones, which is important for the trip generation and the modal split phase of the model sequence.
2-Retain a maximum of interaction between newly established zones or a minimum of intrazonal trips, which is an important requirement for the trip distribution and trip assignment models.
3-Limit the number of trip ends for the newly created spatial entity in order to avoid overloading of the adjacent street network in the assignment phase.
4-Respect physical, political, ad historical boundaries as far as they are of importance from planning point of view.
5-Avoid undesirable shapes of newly created zones
6-Group only adjacent basic spatial units
7-Generated only connected zones
8-Avoid the formation of islands, which means zones that are completely contained in another zone
9-Obtain a zonal system in which the number of households, population, area, or trips generated and attracted are nearly equal in each zone (the variation with respect to one of these variables should be kept as small as possible)
10-Base the delineation of the zonal boundaries on the census boundaries. (Baas, 1980, p.1)
La contrainte numéro une à respecter est l’homogénéité des observations à l’intérieur des zones (point n°1). Mais il faut respecter les limites naturelles (fleuves, relief), politiques et historiques (point n°4) qui ne définissent pas forcément des zones homogènes. Il faut prendre en compte le réseau routier (point n°3) tout en minimisant le nombre de déplacements intrazones et en maximisant les déplacements entre les zones (point n°2) . Il faut respecter toutes ces contraintes en faisant le choix des zones de manière à agréger progressivement des souszones adjacentes (point n°6) et en évitant des zones contenues dans d’autres (point n°8), tout en construisant le moins possible de couples de zones sans déplacement (point n°7). Les zones doivent être délimitées de manière à respecter les zones de diffusion des recensements de population pour permettre le redressement. Enfin, les zones doivent contenir approximativement le même nombre d’observations (point n°9). Les règles à respecter pour un producteur sont nombreuses, peut être un peu trop. La première règle est de diffuser des données représentatives donc s’appuyant le plus possible sur les hypothèses d’homogénéité. A l’intérieur d’une zone les observations doivent se ressembler. Et recouvrir si possible tout l’espace de la zone. Cependant, un support est « homogène » seulement par rapport à une ou plusieurs variables d’intérêt, quand la valeur de ces variables varie peu et de manière aléatoire à l’intérieur des zones. Ainsi avec un support homogène, peu importe où nous nous nous trouvons dans la zone, la proportion étudiée ne change pas (illustration 16). Mais cette définition n’est pas complète. Un support homogène doit être construit en ajustant le périmètre aux valeurs des variables. La construction d’un support de l’information doit tendre à minimiser la variance intra-zone (intra-groupe) et maximiser la variance inter-zone (inter-groupe) des variables d’intérêt. Le choix du support revient donc à discrétiser les coordonnées géographiques des observations statistiques en classes spatiales des variables d’intérêt. La première variable qui peut être utilisée est souvent la densité de population. En considérant d’autres variables le problème est dit contraint puisque nous souhaitons regrouper spatialement des observations qui se ressemblent alors que rien ne dit qu’elles le soient lorsqu’elles sont à proximité. Un support qui essaye d’homogénéiser une variable d’intérêt donne lieu à un support irrégulier. La construction de tel support est un processus pouvant respecter de multiples contraintes qui sont parfois contradictoires. Parfois même il se peut qu’il n’existe aucune solution satisfaisante. Et, il est difficile de construire des zones devant respecter des « fonctionsobjectifs » maximisant l’homogénéité de plusieurs critères tout en préservant la connexité des zones. Le nombre de critères possibles à considérer doit être faible. Or dans le cas de données bi-localisées nous avons déjà deux types de variables à homogénéiser : celles qui déterminent les origines des déplacements et celles qui déterminent les destinations. Nous avons vu au chapitre 1 que les lieux d’emploi sont plus concentrés dans l’espace que les lieux de résidence. Cette méthode peut conduire à produire des zones très petites, biscornues ou avec peu de population ou d’activité. A l’inverse, il n’est pas forcément vrai qu’une zone petite ou de faible densité soit homogène mais cela semble être une règle communément admise. L’application des règles de Baas pour construire un zonage de base de données de déplacement suppose un examen précis du territoire et une connaissance des zones à analyser. En outre, l’application d’une méthode standard qui assure la comparabilité des enquêtes peut avoir pour inconvénient de se baser trop sur certaines règles, en particulier la 4ème (le respect des zonages administratifs), comme on le verra plus loin dans le cas des enquêtes à faible taux d’échantillonnage. Afin de répondre aux besoins divers des analyses, les nouvelles orientations en matière de diffusion de statistiques publiques sont en évolutions et se dirigent vers la diffusion de supports réguliers de petites tailles ayant vocation à être agrégées à façon par les utilisateurs et non plus par les producteurs.
Les supports de base de tirage
Le périmètre d’étude des enquêtes Ménages-Déplacements doit être soit celui du SCOTT ou, pour les plus grosses aires urbaines celui du Plan de Déplacements Urbains. Par construction, les limites des aires d’étude des EMDs s’appuient sur les limites communales. Les supports de tirage servent à appliquer un plan de sondage stratifié (Loonis, 2009). Il faut découper le périmètre d’étude en zones géographiques dans lesquelles seront tirés au sort des échantillons suffisamment importants pour refléter la composition de ces secteurs. Le Certu préconise de définir une vingtaine de secteurs de tirage avec au moins 70 ménages enquêtés et validés par zone. Les ménages d’un secteur doivent comporter au moins 160 personnes. Au total, une EMD doit rassembler au moins 1 500 ménages enquêtés. La documentation Certu précise que les taux d’échantillonnage étant faibles, c’est la taille de l’échantillon qui détermine la précision des indicateurs. Une taille de 160 personnes par zone constitue selon le Certu un bon compromis entre la représentativité sociale par zone et la précision requise. Cependant, nous savons que les études de mobilité ont aussi besoin de représentativité spatiale (les observations doivent recouvrir l’ensemble de l’espace des zones), l’effectif de répondants doit être mis en relation avec les superficies des zones. Mais les règles pour effectuer le découpage du périmètre d’étude en secteurs de tirage n’abordent pas directement le critère de superficie. Les critères sont :
-le respect des contours IRIS
-la préservation des zonages pré-existants
-l’homogénéité des secteurs (« Chaque secteur de tirage d’échantillon doit être aussi homogène que possible en termes de structure urbaine et sociale » (Certu,2008,p.23.)
La combinaison de ces trois règles donne dans la pratique des supports de tirage construits à partir d’IRIS ou d’agrégats d’IRIS. Rappelons que le zonage en IRIS est construit par l’Insee afin d’étudier la population dans les zones urbaines denses avec un zonage fin mais suffisamment peuplé pour garantir l’anonymat des répondants au recensement (au moins 2 000 individus par IRIS). Les IRIS remplacent le découpage en îlots déficient pour la garantie de l’anonymat En se servant des IRIS pour construire le support de tirage, on est assuré de disposer des indicateurs socio-démographiques au lieu de résidence nécessaires pour le redressement de la non-réponse des EMD. Mais le support de tirage devient aussi la base du support d’analyse, sans pour autant que ce soit obligatoire et en faisant attention aux évolutions temporelles du découpage en IRIS (chapitre 3.1.2) En 2008, le Certu ne spécifie aucune règle pour les communes non découpées en IRIS (illustration 17), car moins peuplées, ce qui signifie que la diversité géographique des communes non découpées en IRIS ne peut pas être pris en compte dans le plan de sondage.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 : Des données pour répondre aux changements de paradigme des politiques de transport
1.1 Le changement de paradigme des politiques de mobilité et ses conséquences sur le besoin de données en matière de mobilité
1.1.1 Genèse de la mobilité
1.1.1.1 Mobilité générale et mobilité individuelle
1.1.1.2 L’urbanisation en zones et la solution automobile au problème de l’accessibilité
1.1.2 Les nouveaux objectifs des politiques de transport : un changement de paradigme
1.1.2.1 Comprendre l’objectif du facteur 4
1.1.2.2 La réduction de la part modale de la voiture dans l’évaluation des projets de transport
1.1.2.3 L’appel aux données pour connaître et agir
1.2 Les données sur la mobilité dans la perspective des nouveaux besoins des politiques de transport
1.2.1 Les attributs et supports géographiques souhaités pour les données de déplacements dans le cadre du développement durable
1.2.2 Les données de déplacement produites par la statistique publique
1.2.2.1 Les Enquêtes Déplacements standard Certu
1.2.2.2 Les données de mobilité du recensement de la population
1.3 Élargir l’éventail des données pour répondre aux nouvelles questions
1.3.1 Les données de mobilité à l’ère du big data
1.3.2 Le couplage de données
1.3.3 Comment produire des couples origines-destinations domicile-travail synthétiques avec des localisations fines ?
Conclusion du premier chapitre
Chapitre 2 : Les fonctionnalités des supports d’enquêtes
2.1 Les trois fonctions des supports spatiaux des données de mobilité
2.1.1 Les supports d’analyse
2.1.1.1 Un support zonal obtenu par agrégation de zones de la base de données pour la description et la communication
2.1.1.2 Un support linéaire pour l’analyse du trafic : le passage par des données modélisées
2.1.2 Les supports des bases de données de mobilité diffusées par les producteurs
2.1.2.1 La production de données suffisamment représentatives pour être diffusées
2.1.2.2 La solution vers laquelle les producteurs se tournent est un support régulier constitué de petites mailles
2.1.3 Les référentiels de localisation
2.2 Les supports avec des données faiblement échantillonnées : le cas des Enquêtes Ménages-Déplacements
2.2.1 L’alignement des supports utilisés sur la géographie des IRIS de l’Insee
2.2.2 L’agrégation des données d’enquêtes à faible taux d’échantillonnage pour l’analyse
2.3 Les supports spatiaux et l’échantillonnage du recensement rénové de la population
2.3.1 Échantillonnage des communes de moins de 10 000 habitants
2.3.2 Échantillonnage des communes de plus de 10 000 habitants
2.3.3 La précision du recensement
Conclusion du chapitre 2
Chapitre 3 : Clonage et ventilations spatiales sous contraintes d’observations statistiques
3.1 Le clonage des observations du recensement
3.2 La ventilation spatiale sous contraintes
3.2.1 L’inférence écologique – extension aux données bi-localisées
3.2.2 Les données de contrôle pour ventiler les lieux de résidence
3.2.3 Les données de contrôle pour ventiler les lieux de travail
3.2.4 Les descriptions des trajets des déplacements comme variables de contrôle
Conclusion du chapitre 3
Chapitre 4 : Le processus de désagrégation spatiale des localisations résidentielles et d’emplois appliqué à la région Île-de-France
4.1 Appariement des fichiers détails Individus-CANTVILLE et MOBPRO
4.1.1 Appariement des observations de ménages actifs occupés des communes de moins de 10 000 habitants
4.1.2 Appariement des observations de ménages actifs occupés des communes de 10 000 habitants et plus
4.1.3 Évaluation de l’appariement avec les données du CASD
4.2 Ventilation des ménages aux lieux de résidence
4.2.1 Ventilation du support IRIS-Communes au carroyage de 200m de l’Insee
4.2.2 Évaluation de la ventilation sous contrainte des lieux de résidence des ménages
4.3 Ventilations des lieux d’emploi
4.3.1 Les secteurs d’activité
4.3.2 Les effectifs de salariés
4.3.3 Les distances en marche à pied
4.3.4 Évaluation de la ventilation des lieux de travail
Conclusion du chapitre 4
Chapitre 5 : Exploitations des données de mobilité désagrégées du recensement sur le support carroyé de 1km
5. 1 Analyse des distances domicile-travail à vol d’oiseau selon le choix du support
5.1.1 Les distances domicile-travail à vol d’oiseau
5.1.2 Les distances infra-communales
5.1.3 Les déplacements entre communes limitrophes
5.2 Cartographie des lieux générant de grands et de petits déplacements
5.3 Cartographie des carreaux d’attraction et d’émission
5.4 Zooms géographiques et discriminations socio-économiques
5.4.1 La zone aéroportuaire d’Orly et de Rungis
5.4.2 La Plaine-Saint-Denis
5.4.3 Vincennes, Saint-Mandé et le quartier du Bas-Montreuil
5.5 Les modes de transport
Conclusion du chapitre 5
Conclusion générale
Références bibliographiques
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