Des violences transnationales : la cybercriminalité, la piraterie, le trafic de personnes, de substances illicites et d’armes à feu.

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LA VIOLENCE : UNE ENDÉMIE UNIVERSELLE.

Actuellement, le constat est amer et effrayant : la violence est permanente dans toutes les sociétés du monde, des pays du Nord à ceux du Sud. De l’atteinte aux personnes à l’atteinte aux biens, en passant par le terrorisme et la guérilla, la violence peut prendre plusieurs formes, dont l’ampleur varie d’un pays à un autre. Quoique pouvant se produire séparément, les actes de violence impliquent dans la majorité des cas des blessures (physiques et/ou émotionnelles) et les statistiques existantes sont implacables. Dans son dernier rapport, l’OMS (2002, Op. Cit.) avait dénombré que chaque année, plus de 1,6 million de personnes dans le monde perdent leur vie dans des violences.

La violence dans le monde

Images et récits de la violence envahissent les médias : c’est dans la rue, c’est à la maison, c’est à l’école, c’est dans les lieux de travail et les institutions. Les actes de violence peuvent être perpétrés de manière individuelle ou collective et à travers eux, de nombreuses significations peuvent être distinguées dont la survie, le divertissement, l’expression du pouvoir, la valeur d’une arme de guerre … Dans certains pays, la violence crée un climat de peur généralisée, détruit le capital humain et social, perturbe les échanges économiques et éloigne les investissements financiers. À travers le temps, un niveau de violence élevé peut être considéré comme une cause de la pauvreté, elle-même origine de la violence. La spirale violence-pauvreté détruit tout dans son sillage.

La criminalité dans le monde

Classer le degré de criminalité d’un pays selon le taux de violence est très relatif par rapport à son ampleur. Dans certains pays, le moindre cas est répertorié dans différentes bases de données, soit dans les statistiques policières, soit dans les statistiques judiciaires et les statistiques sanitaires (c’est-à-dire les causes de décès). Dans d’autres pays, l’infrastructure de collecte et de compilation de données est quasi inexistante. De plus, les classifications de chaque cas diffèrent d’un pays à l’autre. Cependant, les faits et la réalité croisés avec des caractéristiques populationnelle, économique, environnementale, sociale, ethnique, historique et politique ont permis – sur la base d’autres études – d’établir une vue d’ensemble de la criminalité dans le monde (croquis n°01).
Les données portant sur le taux d’homicide dans ce croquis sont celles énoncées par OUIMET (2011) pour étudier la criminalité dans le monde3. Il montre que le taux d’homicide est largement structuré sur une base spatiale car les pays d’une même région tendent à avoir un taux d’homicide qui se rapproche. Les pays de l’Afrique subsaharienne sont ceux qui ont les taux d’homicide les plus élevés, suivis des pays de l’Amérique latine et de certains pays de l’ex-empire soviétique. Les pays de l’Asie de l’Est ainsi que les pays de l’Europe de l’Ouest ont des taux d’homicide relativement bas. La première interprétation démontre que les pays les moins développés économiquement ont des taux d’homicide supérieurs à ceux des pays plus favorisés. Cette réalité tend à relativiser l’importance de facteurs particuliers aux pays eux-mêmes, tels que le type de système politique ou la présence de conflits. C’est ainsi qu’il y a des pays qui ne suivent pas cette tendance, dont les États-Unis qui ont un taux d’homicide trop élevé compte tenu du niveau de vie, ce qui est aussi le cas de la Russie et de l’Afrique du Sud. En revanche, certains pays ont un taux d’homicide très bas, compte tenu de leur pauvreté. C’est le cas du Tadjikistan et du Maroc.
L’analyse croisée avec les caractéristiques de chaque pays, semble corroborer que les pays à forte criminalité présentent les critères ci-après : une population jeune, une population urbaine importante à faible niveau de vie, une corruption importante (Afrique Sub-Saharienne et Amérique Latine), une société fracturée par l’inégalité (exception faite des États-Unis et de la Russie, les pays industrialisés ont tous un taux de criminalité très bas), une fractionnalisation ethnique et linguistique (Afrique Sub-Saharienne), une religion tribale4, une liberté démocratique pratiquée d’une manière erronée (les États-Unis) ou des démocraties imparfaites (le Brésil, le Mexique, le Honduras, l’Ukraine, la Slovaquie, le Bénin ou le Mali), et un conflit armé5 (les pays du Moyen-Orient et de l’Afrique Sub-Saharienne).

Violence en temps de guerre et en temps de crise

Les conflits politiques et armés entraînent toujours avec eux des violations des Droits de l’Homme et ils exacerbent les comportements discriminatoires et violents qui existent déjà dans les sociétés en « temps de paix ». Même si PEROUSE de MONTCLOS (2006) insiste bien sur l’effet de loupe médiatique qui porte sur les conflits armés, l’ampleur des dégâts lors des conflits ne saurait occulter la hausse de la violence.
La première décennie du XXIème siècle a été très secouée de révolutions, de contestations et d’insurrections de toutes sortes engendrant des crises politiques, des révoltes armées, des guerres civiles ou des guerres avec d’autres pays. Le début fut marqué par l’attentat terroriste contre les Etats-Unis du 11 Septembre 2001 déclenchant des ripostes envers l’Afghanistan suivi de la guerre interminable en Irak depuis 2003. S’ensuivent ensuite différents conflits (politiques, armés ou civils) dans le monde, mais qui sont plus marqués dans le monde arabe6.
Les crises s’exprimant par les révolutions et insurrections sont des manifestations de contestation du pouvoir en place, d’aspirations à des changements plus démocratiques et d’améliorations des conditions de vie de la population. Si les manifestations – même pacifiques – sont réprimées par le pouvoir en place, les protestations deviennent des émeutes causant des pillages collectifs et des destructions de toutes sortes. Par ailleurs, le climat de tensions qui règne provoque des sentiments de frustration au sein de la population augmentant ainsi la violence. La crise paralysant l’économie aggrave la pauvreté qui s’enlise, nourrissant ainsi la signification de la violence comme stratégie de survie par les vols et les pillages. Par ailleurs, les révoltes et répressions armées ne sont jamais à l’abri de provoquer d’atteintes aux personnes.
En temps de guerre, à part les pertes de vie humaine et les destructions de toutes sortes, ce sont les violences sexuelles qui s’intensifient le plus. À titre d’exemple, Amnesty International (cité par MÉDECINS du MONDE, 2006) avait dénombré 5000 femmes violées entre Octobre 2002 et Février 2003, soit en moyenne 40 par jour dans la région de Kivu, en République Démocratique de Congo. Les États en conflit et les groupes armés ont tendance à avoir recours à la violence sexiste où les stéréotypes sexistes sont accentués : « l’homme est fort et part à la guerre, la femme est faible et reste au foyer ». C’est ainsi que les violences sexuelles, particulièrement le viol, deviennent une arme ou une véritable stratégie de guerre, car il peut déstructurer toute une société. Comme ce fut le cas pour les conflits en ex-Yougoslavie, Tchétchénie ou Rwanda (OCKRENT, 2006), le viol devient un moyen de la guerre et un crime qui ne finit pas. C’est un moyen de terroriser et d’asservir une population, tout en distillant la haine et la destruction. Il est utilisé pour mobiliser ou immobiliser, affamer, déshonorer et détruire la descendance de la population ou d’un groupe. Il sert également de récompenses en cas de victoire où les femmes deviennent des butins de guerre, de moyen de souder les troupes voire de les récompenser pour leur bravoure au combat, avec ou sans victoire. Dans certains cas, ce sont même les « gardiens de paix » des troupes locales ou ceux des Nations Unies qui se servent du viol contre la protection des femmes et des enfants comme ce fut le cas en Sierra Leone, au Liberia et en Guinée (Ibid.).

Violence à l’égard des femmes et des enfants

Plusieurs études des dernières décennies ont montré que la place occupée par les femmes et les enfants au sein de leur famille et de la communauté accompagnée des représentations que la société leur accorde les remettent à une position où la violence peut les atteindre facilement, que ce soit en temps normal ou lors d’une guerre ou d’une crise7. La définition de la violence à l’égard des femmes englobe non seulement les actes de violence dont sont victimes les femmes et les enfants, mais également les actes perpétrés contre une femme ou un enfant parce qu’elle est une femme ou parce qu’il est un enfant (par exemple les mutilations génitales).
À l’échelle mondiale, il semble que les petites filles sont plus exposées à la violence que les petits garçons. En effet, leur appartenance au sexe féminin les expose : (i) aux mutilations génitales féminines en Afrique, (ii) à la sélection embryonnaire ou l’infanticide pour la préférence aux garçons en Asie, (iii) aux mariages précoces, à l’industrie du sexe ainsi qu’à la privation de nombreuses libertés dans le monde entier. Par contre, les garçons sont utilisés comme enfants-soldats en temps de guerre et de crise (pays du Moyen Orient) et partagent avec les filles les problèmes de maltraitance, les violences économiques, et les travaux précoces.
En matière de violence faite aux femmes, les statistiques existantes sont éloquentes … et affligeantes. Une étude multipays de l’OMS (2005) a fait état de 10 à 69 % des femmes (selon les pays) ayant été agressées physiquement par un partenaire masculin à un moment ou un autre de leur vie. En Asie, 90 millions de femmes manquent dans les statistiques démographiques au nom de la préférence pour l’enfant mâle. Plus de 120 millions de femmes et fillettes ont subi une mutilation génitale, pour des raisons culturelles ou religieuses.
Malgré le poids de ces chiffres avancés par les Nations Unies, il est nécessaire de préciser que mesurer la violence à l’égard des femmes n’est pas une évidence étant donné qu’elle est tue face à l’opprobre de la communauté. Puisqu’une part importante des actes de violence se déroule dans le cadre intrafamilial ou ayant été perpétrée par le conjoint, le concubin ou un partenaire intime, la dénonciation reste tributaire de l’omnipotence de la coutume et n’est faite que dans des cas extrêmes. Dans certains pays, les actes de violence à l’égard des femmes étaient considérés comme « naturels » et « normaux ». Les enquêtes nationales sur le sujet sont donc rares, que ce soit dans les pays développés ou dans les pays en développement. De ce fait, les statistiques existantes sur le sujet ne recouvrent pas la réelle ampleur des actes et ne constituent pas une base de comparaison fiable et un outil de classement entre les pays8. Un déterminant principal – la pauvreté – apparait malgré tout comme une évidence et confirme que la violence à l’égard des femmes est plus présente et moins dénoncée dans les pays pauvres que les pays riches.

Des violences transnationales : la cybercriminalité, la piraterie, le trafic de personnes, de substances illicites et d’armes à feu.

En analysant le champ transnational de la mondialisation, DOLLFUS (2001 : 106) a accordé une importance particulière au transnational douteux et clandestin, composé de la cybercriminalité, des réseaux de trafic clandestin (armes, drogues, personnes, prostitution, …) et des paradis fiscaux.
Le réseau virtuel recouvre toute la planète et diffuse de nombreuses formes de violence dont les ventes sur internet qui assurent le blanchiment de l’argent du crime, les harcèlements, les délits de presse, les provocations relatives à la haine raciale et aux crimes contre l’humanité, les infractions sexuelles à caractère pornographique ou apparentes à la pédophilie et des hackers9 qui piratent des systèmes de la navigation de la défense nationale ou de l’aviation civile à des fins terroristes, mafieuses, etc. L’espace virtuel est connoté par PANSIER et JEZ (2000) comme le théâtre d’une criminalité bien réelle, multiforme, mais souvent insaisissable sur qui repose tous les réseaux de trafics transfrontaliers.
La piraterie, représentée dans le croquis n°01, est sûrement la forme de violence transnationale qui regagne en notoriété ces quelques dernières années. Depuis 2008, les attaques ne cessent d’augmenter et les détroits de Malacca et de Singapour laissent la place aux côtes somaliennes, dans la corne de l’Afrique, et nigériennes dans le golfe de Guinée, comme espaces privilégiés des pirates (GALLAIS-BOUCHET, 2009). Malgré la mise en place du Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires, l’Organisation Maritime Internationale a quelques peines à combattre le fléau à cause de son caractère transnational, laissant ainsi la protection des armateurs aux sociétés privées (BARRAULT, 2007).
Au XXIème siècle, la traite des personnes continue d’exister, mais sous une forme nouvelle qui prive des milliers d’individus de leurs droits fondamentaux. Les trafiquants des « temps modernes » qui s’y livrent traitent femmes, hommes et enfants comme des marchandises, les maltraitent, les exploitent sexuellement et/ ou économiquement. Ce phénomène trouve ses racines dans les comportements sociaux et culturels appartenant à l’histoire des pays concernés et dans la paupérisation des sociétés. Elle peut également être liée à des migrations forcées causées par les guerres et les crises donnant naissance à des réfugiés, accompagnant de fait des conditions déplorables. Bien que ses dimensions transfrontalières soient très pertinentes pour des analyses géographiques et géopolitiques, les informations disponibles à l’échelle mondiale sur l’ampleur du phénomène sont limitées étant donné son côté « clandestin ». Néanmoins, des études10 s’accordent à affirmer qu’elle touche entre 700 000 et 2 millions de personnes par an, dont les pays d’origine sont ceux d’Asie ainsi que l’Afrique Subsaharienne, pour des « migrations » vers des pays plus prospères.

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Table des matières

Introduction.
PREMIERE PARTIE : Violence et santé : du Nord au Sud, des grandes agglomérations aux petites localités, des rhétoriques globales aux expérie
Chapitre I : La violence : une endémie universelle.
1.1. La violence dans le monde.
1.1.1. La criminalité dans le monde.
1.1.2. Violence en temps de guerre et temps de crise.
1.1.3. Violence à l’égard des femmes et des enfants.
1.1.4. Des violences transnationales : la cybercriminalité, la piraterie, le trafic de personnes, de substances illicites et d’armes à feu.
1.2. Une importante violence urbaine.
1.3. La problématique de la violence à Antananarivo.
1.3.1. La violence en hausse.
1.3.2. Les tendances de la violence dans la capitale : beaucoup plus d’atteintes aux personnes et une hausse en période de fête et de vacanc
1.3.3. Concentration de violences dans les quartiers défavorisés et les zones les plus peuplées.
Chapitre II : La violence, l’accès et le recours aux soins pour les victimes: de la géographie sociale et du bien-être à la géographie 
2.1. De la géographie sociale à travers la violence et les victimes de violence.
2.2. De la violence et des victimes à travers la notion de « bien-être » en géographie.
2.3. De la géographie de la santé et des soins à travers la violence et ses victimes.
Chapitre III : Une étude de la violence, de l’accès et du recours aux soins dans le quartier d’Anosibe : méthodes.
3.1. Anosibe : un quartier pauvre.
3.2. Méthodes
3.2.1. Approches et techniques.
3.2.2. La population d’enquête.
3.2.3. Les questionnaires et leur structuration.
3.2.4. Traitements et analyses des données.
DEUXIEME PARTIE : Violence et non-accès aux soins : des maux ancrés dans le quartier d’Anosibe.
Chapitre IV : Anosibe : un foyer des déterminants socio-spatiaux et culturels de la violence.
4.1. Un environnement criminogène.
4.1.1. L’habitat et les infrastructures viaires : sources d’insécurité.
4.2. L’espace familial : lieu d’expression de la violence.
4.3. Le territoire, cible de tous les enjeux.
4.3.1. L’expression spatiale de la violence dans le quartier d’Anosibe.
4.3.2. Effet « tache d’huile » de la violence ?
4.3.3. La violence comme défense du « territoire ».
4.3.4. D’héritage social en héritage spatial.
Chapitre V : Ampleur, vécu et perception de la violence dans le quartier d’Anosibe.
5.1. Silence des victimes et violence « étouffée ».
5.2. Violences : problèmes de pauvres, par les pauvres à l’égard des pauvres ?
5.3. De la violence : un risque pour le bien-être et un problème de santé ou une condition de vie ordinaire ?
Chapitre VI : Les espaces de soins des victimes de violence dans le quartier d’Anosibe.
6.1. L’offre de soins pour la population d’Anosibe : à l’image du système de soins à plusieurs vitesses dans la capitale.
6.2. L’offre de soins publique aux victimes de violence: de la violence institutionnelle ?
6.3. L’espace sanitaire des victimes de violence dans le quartier d’Anosibe.
Conclusion générale.
Références et Bibliographie.
Annexes.

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