Des stratégies territoriales multifactorielles de lutte contre l’enclavement et la paupérisation des quartiers populaires

Un prérequis pour une société harmonieuse ? Les finalités d’une diversité sociale territorialisée

Il existe un consensus sur ce à l’ambition de la mixité sociale, ainsi qu’une relative unanimité quant à ses bienfaits et ses mérites, qui sont élogieusement décrits dans les allocutions publiques.  Considérée comme un des maîtres-mots du « politiquement correct », son utilisation est gage de normalisation du discours, de banalisation de l’image renvoyée, et de sensibilité aux problématiques sociales. C’est donc une notion qui rassemble davantage qu’elle ne divise, bien qu’elle présente des effets pervers, souvent tus.

Conjurer la ségrégation socio-spatiale et ses néfastes effets

La mixité sociale est présentée comme l’antidote d’une société ségréguée, injuste et inégalitaire. Son « double inversé » que représente la ségrégation socio-spatiale est effectivement source de mécanismes d’exclusion cumulatifs, résultant indirectement de logiques individuelles de mise à l’écart initiées par certains et dont d’autres sont les premières victimes.

La lutte contre la ségrégation : une revendication d’égalité et de justice sociale et/ou un moyen d’acheter la paix sociale ?

La mixité sociale est souvent définie par ce qu’elle souhaite conjurer : la ségrégation socio-spatiale.
Elle est « érigée comme la réponse politique et technique » à une morphologie urbaine de plus en plus segmentée, qui a très tôt été pointée du doigt comme portant atteinte à la cohésion et à l’équilibre de la nation.
François MIRON, magistrat sous Henri IV avait prévenu le roi dès 1604 des dangers politiques encourus dans de telles situations : « c’est une malheureuse idée de bâtir des quartiers à usage exclusif d’artisans et d’ouvriers. Dans une capitale où se trouve le Souverain, il ne faut pas que les petits soient d’un côté et les gros et dodus de l’autre », au risque que « vos quartiers pôvres devie[ennent] des citadelles qui bloqueraient vos quartiers riches » et ainsi « il se pourrait que les balles vinssent ricocher sur votre couronne ».
C’est donc d’abord à des fins de maintien de la sécurité intérieure et de pacification des « classes dangereuses » potentiellement revendicatives voire émeutières que le constat de séparation des groupes sociaux dans l’espace a été questionné.
Au cours des siècles qui ont suivi et particulièrement au siècle dernier s’est opéré, nous dit Philippe GENESTIER, « un glissement de la signification » du terme, avec « une prise en charge morale » qui est celle de la dénonciation de l’inégalité. La géographie était alors la discipline qui la première s’intéressa véritablement à ce phénomène, et Pierre GEORGE, qui « la fit évoluer vers une meilleure prise en compte des problèmes urbains » au travers notamment du « courant » de la « géographie active » qu’il initia au milieu des années cinquante, fut le premier à charger le terme de ségrégation d’un jugement moral et à l’utiliser dans un sens péjoratif et dénonciateur.
Les sociologues et démographes s’en sont ensuite emparés provoquant un engouement chez les décideurs politiques, qui à la fin des années soixante-dix et au début de la décennie quatre-vingts établirent les prémices de ce qui sera ensuite appelé la politique de la ville, dont l’objectif est le désenclavement des quartiers d’habitat social et leur insertion dans la ville. Le rapport DUBEDOUT intitulé « Ensemble, refaire la ville » paru en 1983 insistait sur la nécessité d’une recomposition sociale des quartiers afin de « stopper le processus ségrégatif ». Depuis, la « ségrégation socio-spatiale » réapparaît périodiquement dans le débat public, alimenté par les médias – plutôt prolixes au sujet des quartiers sensibles, par les nombreuses contributions de chercheurs ou bien à la suite d’évènements comme les émeutes urbaines.
La lutte contre la ségrégation territoriale rassemble donc au-delà des frontières idéologiques, certains dénonçant les inégalités qu’elle engendre et ses conséquences discriminantes pour les populations qui en souffrent, d’autres cherchant davantage la paix sociale et la limitation des débordements, la ségrégation urbaine étant « susceptible d’avoir des effets sur l’action collective et les mouvements sociaux».

Une concentration des difficultés économiques et sociales dans les quartiers ségrégués : des mécanismes d’exclusion cumulatifs à l’œuvre

La littérature scientifique relative à la ségrégation n’a cessé de s’étoffer et de nombreux auteurs ont mis en évidence les mécanismes d’exclusion cumulatifs à l’œuvre dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, communément appelés, souvent de manière dépréciative, « banlieues », « quartiers pauvres », ou « ghettos ». En distribuant de manières différentes des groupes sociaux aux ressources inégales dans l’espace de la ville, « la ségrégation inscrit ces inégalités dans l’espace » déclarent Marco OBERTI et Edmond PRETECEILLE.
Ils constatent l’existence de poches de pauvreté sur ces territoires, « caractérisés par la précarité, le chômage et la forte présence d’immigrés », souvent enclavés en périphérie des grands centres urbains et peu reliés aux centres-villes. Assignés à résidence de par la faiblesse de leurs ressources économiques et financières, les habitants de ces quartiers ne peuvent élire domicile ailleurs et les logements qu’ils occupent, moins onéreux que dans d’autres territoires, présentent des qualités intrinsèques peu notables.
Leur localisation rend l’accès aux ressources urbaines plus difficile, ces quartiers en étant généralement moins bien dotés, notamment pour ce qui est des services et équipements de proximité.
Les habitants sont également éloignés des opportunités de formation et d’emploi, les jeunes y connaissent un risque accru d’échec scolaire ; on parle d’ailleurs de plus en plus de « ségrégation scolaire », qui « pénalise principalement les élèves de milieux populaires».
La « spécialisation des territoires » pour reprendre l’expression de Renaud EPSTEIN condamne les habitants des quartiers qui la subissent à des « destins verrouillés» du fait de la faiblesse des opportunités, passerelles et chances de promotion sociale auxquelles ils peuvent prétendre.
L’environnement social dans lequel ils vivent, soumis à des « effets de quartiers », influe, nous dit Eric MAURIN, sur leur capacité à se former, s’informer et à mobiliser des réseaux de socialisation.

Les bienfaits supposés ou avérés de la mixité sociale

La mixité sociale, loin d’être un concept scientifique comme nous avons pu le voir précédemment, du fait de l’opacité de ses contours, renvoie davantage à un « mythe » et à ses représentations, qui structurent la société. Louis BESSON, plutôt prolixe sur la notion et fervent convaincu de ses bienfaits faisait d’ailleurs référence à « un idéal, et comme tous les idéaux, il n’est jamais assuré d’être atteint ».

Vivre ensemble malgré les différences : la mixité comme vecteur de tolérance et de pacification de la société

Une société caractérisée par la mixité sociale renvoie dans l’imaginaire collectif à un territoire où les différences, aussi nombreuses soient-elles entre les individus qui la composent, ne les empêchent pas de « vivre ensemble » sans heurts.
Cette capacité à cohabiter sereinement viendrait du fait que, chaque groupe social trouvant sa place dans chaque quartier, tous les individus auraient conscience de l’Autre, des Autres et de leurs différences. Ne pas en faire l’expérience au quotidien laisserait place à l’ignorance et aux idées reçues qui mènent souvent au mépris, à la défiance et au sentiment de supériorité. Louis BESSON fait à ce sujet référence à « l’immense gâchis de l’ignorance mutuelle que suppose la ségrégation », condamnant « les uns et les autres à s’ignorer mutuellement, et donc à ne pas du tout se connaître et donc à ne pas se reconnaitre ».
L’exemple de l’explication souvent portée dans le débat public des bons scores faits par le Front National dans la France rurale, alors taxée de « raciste » ou de « xénophobe » est parlant : la peur motivée par la méconnaissance de personnes étrangères ou de couleur, qu’elle n’a pas l’habitude de côtoyer semble être l’un des facteurs de succès électoral de ce parti sur ces territoires.« Se reconnaître » c’est aussi considérer l’Autre comme égal et mettre des mots sur ce qui rassemble, au-delà des différences. La tolérance dont la mixité sociale semble être le vecteur doit mener à une société pacifiée, exemptée des tensions entre communautés et des violences parfois engendrées par des réactions virulentes face à des discriminations construites sur des représentations. L’objectif de la mixité sociale, est pour ses promoteurs de « créer de l’harmonie, car dans l’harmonie il y a des chances que puissent se développer de la fraternité, du partage ».

La diversité comme moteur d’échanges renforçant le lien social

La mixité sociale engendrerait, davantage qu’une cohabitation sans heurts d’êtres aux identités sociales et culturelles différentes, l’échange entre les individus. L’ambition est, par la mise en œuvre de mesures et dispositifs visant la mixité sociale, « de créer du lien social dans et par la ville ». Louis BESSON nous confiait à ce propos que « cohabiter dans la diversité implique une ouverture des uns vers les autres et réciproquement ».
La différence, qu’importe sa nature, lorsqu’elle est perçue, peut attiser la curiosité des individus et pousser les individus à l’échange, en témoignent des habitants de la Villeneuve de Grenoble . Ils donnent l’exemple des différentes communautés culturelles, religieuses ou ethniques présentes sur le quartier de l’Arlequin qui avaient l’habitude de partager des repas pour « se faire découvrir la gastronomie de leur pays d’origine ». On note d’ailleurs que la perception de la différence est le fruit d’un « construit social » mis en exergue par différents auteurs qui se sont attachés à analyser la psychologie sociale des enfants. BENNETT, DEWBERRY et YEELES ont par exemple mis en évidence, au travers d’une expérience consistant à demander à des enfants de regrouper en autant de tas qu’ils souhaitent seize photographies représentant des garçons et des filles de différentes couleurs de peau arborant différentes expressions faciales, que les enfants utilisent très peu le critère de la couleur de peau pour les catégoriser.

La mixité sociale : un idéal promouvant l’égalité de chances et l’intégration

La mixité ou diversité sociale est « un facteur essentiel de l’intégration, de la cohésion et de l’égalité des chances » affirment le réseau des acteurs de l’habitat, qui prétendent la mettre en œuvre.
Les politiques menées depuis une quarantaine d’années relatives à l’habitat, au logement, à la lutte contre les discriminations et plus récemment à l’éducation, sont celles qui mobilisent le plus la notion de mixité sociale pour justifier leurs actions. Ces dernières tendent, à l’aide de dispositifs spécialement destinés à certaines catégories de population les plus défavorisées, à réduire directement les inégalités qu’elles subissent au moyen d’aides financières et matérielles, de services rendus, de mécanismes de discrimination positive, etc. « L’action en faveur de la mixité est [donc] bien une politique d’égalité et de justice sociale », en conclut Cyprien AVENEL, sociologue et enseignant à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris.
Le mythe intégrateur qu’a fait miroiter la victoire d’une équipe de France métissée qualifiée élogieusement de « black, blanc, beur » à la coupe du monde de football de 1998 est un épisode auquel on se réfère régulièrement, comme « un bel élan unanimement salué d’un Etat-nation, d’un modèle d’intégration ». Ses joueurs aux diverses origines venant de milieux sociaux différents perçus comme « le reflet de la diversité » ont incarné l’idéal d’égalité des chances et de réussite pour les descendants d’immigrés et jeunes issus des quartiers populaires. On pourrait emprunter la métaphore de Platon du « manteau multicolore, brodé de fils de toutes teintes » pour qualifier cette équipe, qui a su réconcilier, le temps de célébrer la victoire, l’intégralité de la population française.

Une source d’enrichissement mutuel ou un moyen « d’éduquer les masses » ?

Existent également des postulats selon lesquels la mixité sociale est la source d’un enrichissement mutuel, entre individus qui par l’échange, partagent des connaissances et expériences.
Les mots de Robert FALK qui écrivait « la diversité sociétale augmente la qualité de vie en enrichissant notre expérience, en augmentant la quantité de ressources culturelles  » font en ce sens écho à ceux de Claude LEVI-STRAUSS qui prônait la nécessité d’une diversité suffisante pour rendre les échanges fructueux.
Ces propos sont partagés par Louis BESSON, pour qui l’ambition de la mixité sociale, déclare-t-il, « est humaniste. C’est dire qu’on se connait dans nos différences, on s’enrichit mutuellement », avant d’ajouter « mélanger c’est enrichir ».
La mixité sociale semble également être le moyen, toujours implicite, « d’éduquer les masses », autrement dit de leur donner à voir « des normes et des valeurs auxquelles elles [les populations « exclues] pourront se conformer ». Enfermées dans des « ghettos » où, d’après certains, règne une homogénéité culturelle et sociale et où personne ne semble en capacité de pouvoir tirer vers le haut leurs habitants, les diverses mesures permettant d’attirer les classes moyennes dans ces quartiers, menées conjointement par les pouvoirs public et les bailleurs sociaux, peuvent être interprétées comme des tentatives de ramener des populations aux savoir-vivre et savoir-être conformes aux attentes des décideurs politiques.

Les effets pervers de la mixité sociale : sa mise en cause comme fin en soi

L’étude de la mixité sociale ne saurait être exhaustive en se limitant à ses bienfaits, autour desquels semble s’être construit un consensus au sein de la classe politique française. Les multiples effets pervers qu’elle induit, notamment lorsqu’elle est imposée, ont été mis en évidence par les milieux scientifiques, dont certains chercheurs ont trouvé inspiration dans les thèses d’auteurs nord-américains.

Ignorance réciproque voire tension : le revers de la médaille d’une mixité sociale imposée

Coexistence visiblement pacifique ne veut pas dire interpénétration entre groupes sociaux qui, souvent forcés à cohabiter dans des résidences ou au sein d’un quartier, se croisent mais ne se côtoient pas. De cette observation d’ « interactions limitées » se pose légitimement la question de la capacité des pouvoirs publics à modeler les relations sociales, par des actions volontaristes menées au nom de la mixité sociale.
L’étude des relations sociales entre habitants des grands ensembles au moment de leur construction dans les années cinquante à soixante-dix a permis de mettre sérieusement en doute le postulat d’une mixité sociale créatrice de liens et de cohésion sociale. Madeleine LEMAIRE et Jean-Claude CHAMBOREDON, auteurs d’un fameux article paru en 1970 ont observé l’impossibilité de résorber les distances sociales par la proximité spatiale induite par ces utopies urbanistiques, aujourd’hui tant décriées. A leur création, les grands ensembles représentaient l’idéal d’une société nouvelle débarrassée des divisions de classes, en permettant, par la pluralité des organismes bailleurs à la clientèle variée chargés de l’attribution des logements, la coexistence d’ouvriers, d’employés, de cadres moyens et supérieurs. Néanmoins, force fut de constater que, loin de constituer des « creusets d’une nouvelle culture urbaine » transcendant les multiples différenciations sociales , les barres d’immeubles et les tours ont hébergé des situations de cohabitation conflictuelle du fait des modes de vie opposés de leurs habitants aux trajectoires diverses. A l’aube des années quatre-vingt écrit Cyprien AVENEL, l’univers relationnel du grand ensemble peut être décrit comme « un groupement artificiel et contraint», renforçant les clivages de classes, contrairement aux potentialités qu’on lui prêtait à l’origine.
Au travers de cet exemple, il apparaît que la diversité sociale territorialisée, lorsqu’elle est contrainte, notamment par les pouvoirs publics qui ont pour objectif la création d’espaces où la cohésion sociale et le bien vivre ensemble règnent, peut en définitive exacerber les tensions.

La stigmatisation des populations des quartiers caractérisés par une absence de mixité sociale

La recherche de la mixité sociale le plus souvent limitée géographiquement aux quartiers dits « populaires » entraine également la stigmatisation de leurs populations dont on nie les potentialités. Qualifiées indirectement ou non de « classes dangereuses », « d’assistés » pour les plus âgées ou de « racailles » pour les plus jeunes, ces populations souffrent des effets directement discriminants des politiques de peuplement, entreprises dès le début des années soixante-dix.
Le principe du zonage définissant des territoires sur lesquels la mixité sociale, évaluée selon l’unique critère des ressources économiques, n’est pas effective, entraine un étiquetage de ses habitants et laisse à penser que ceux-ci ont nécessairement des comportements jugés problématiques. De fait, dans l’imaginaire collectif, les actes de petite ou grande délinquance et les comportements déviants sont davantage observables sur ces quartiers qu’ailleurs dans la ville.
De la focalisation des médias ou des hommes politiques sur des évènements ponctuels mettant en lumière les dysfonctionnements soi-disant caractéristiques des quartiers pauvres découlent des raisonnements généralisants dont souffrent leurs habitants. L’acte répréhensif commis par un individu venant du quartier tend donc à avoir des répercussions sur l’image de l’intégralité de sa population, en témoigne le handicap que représente souvent l’adresse inscrite dans le curriculum vitae transmis pour postuler à un emploi. Les vertus prêtées à la mixité sociale semblent donc dévaloriser, par contre coup, les zones caractérisées par son absence allant jusqu’à alimenter le processus d’exclusion sociale et stigmatisation.

Perte d’identité sociale et politique comme conséquence inéluctable du rééquilibrage social des quartiers

Les opérations de rééquilibrage du peuplement des quartiers d’habitat social, notamment via les opérations de rénovation urbaine, entrainent de facto la marginalisation des plus pauvres et la disparition « d’un mode de vie populaire », caractérisé par des solidarités et sociabilités fortes. Les relations sociales denses et l’entraide accompagnant souvent la dureté des conditions d’existence partagées se trouvent, par la mise en œuvre de ces projets, dissipées.
Privées alors de ces ressources sociales et culturelles, les populations qui habitent ces quartiers « renouvelés » subissent perte d’identité et dilution du sentiment d’appartenance. Les effets « désolidarisants » des politiques de peuplement tendent en effet à « noyer les identités collectives et communautaires », ces dernières étant pourtant sources de protection, en particulier pour les minorités opprimées ou rejetées qui risquent la stigmatisation et l’agression en dehors de leur espace communautaire. Colin GIRAUD analysait à ce sujet la recherche contrainte d’entre-soi des homosexuels face à l’intolérance pouvant mener à des actes de violence. Presque un siècle plus tôt, Louis WIRTH décrivait la fonction protectrice du ghetto juif, bien qu’imposé, dans une société leur étant largement hostile.
La dilution dans l’espace des populations dont la conscience de classe et le sentiment d’appartenance sociale et culturelles ont certes largement diminués mais demeurent importants entraîne également un affaiblissement de leurs capacités d’action collective et d’affirmation de leurs revendications. Plusieurs auteurs dénoncent l’obstacle que constituent les politiques mettant en œuvre la mixité sociale à l’émergence d’un contre pouvoir émanant des couches populaires, capable de contrebalancer l’influence croissante d’autres groupes.

Diverses interprétations pour de multiples mises en œuvre : une difficile appropriation par les acteurs de terrain

La traduction de la mixité sociale en des mesures concrètes, menées par les acteurs de terrain qui ont l’obligation de s’en emparer, n’est pas aisée. En effet, comment conduire une action collective sur la base d’une notion si floue et non partagée ? Il semble particulièrement difficile de définir une politique d’intervention commune dont la finalité – tout comme les moyens d’action – est indéterminée, soumise à des interprétations et des visions de l’ordre social diverses voire divergentes vers lequel on souhaite tendre.

Grenoble-Alpes Métropole : un acteur central de la traduction de la mixité sociale sur son territoire

Différentes lois promulguées au cours des années deux mille ont successivement renforcé les métropoles, qui sont devenues l’échelon le plus intégré. L’éventail de leurs compétences s’est élargi suite à de multiples transferts, jusqu’à être élevées au rang de chef de file dans de nombreux domaines d’action publique. Grenoble-Alpes Métropole, en moteur historique du développement de la mixité sociale sur son territoire a accueilli avec bonne volonté les diverses réformes permettant sa traduction par des mesures concrètes, relatives à l’offre de logements sociaux, à la gestion de la demande et aux attributions, qu’elle a initiées avec l’aide de partenaires locaux.

Décentralisation et transferts de compétences : la métropole comme nouvel échelon en puissance

Les métropoles, issues du projet de loi de réforme des collectivités territoriales élaboré par le gouvernement de François FILLON et créées par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales ont progressivement monté en compétences pour devenir l’échelon le plus intégré et adéquat pour organiser l’implantation de populations aux profils diversifiés sur leur territoire.
Ces nouveaux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre avaient pour mission d’absorber les intercommunalités existantes et de remplacer les départements pour former des pôles urbains dynamiques et puissants de dimension européenne. Leur statut a été remanié par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) promulguée le 27 janvier 2014, qui a également rétabli la clause générale de compétence des départements et régions. Cette loi initiée sous la présidence de François HOLLANDE par le gouvernement de Jean-Marc AYRAULT fait partie de « l’acte III » de la décentralisation . Cette loi « d’affirmation des métropoles », en fait l’intercommunalité la plus intégrée. Sa nouvelle définition la présente comme « un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plusieurs communes d’un seul tenant et sans enclave au sein d’un espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de leur territoire afin d’en améliorer la cohésion […] et de concourir à un développement durable et solidaire du territoire régional […] avec le souci d’un développement territorial équilibré».

 

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Table des matières
Introduction
Partie 1 – De quelle mixité sociale parle-t-on ? Une notion floue aux contours et objectifs multiples grevés de non-dits 
Chapitre 1 – Une absence de définition
1) Une référence omniprésente dans les discours politiques : un idéal de société partagé
2) Le « droit de la mixité sociale » : un cadre juridique aux contours non définis
3) Les différentes dimensions de la notion non stabilisées
Chapitre 2 – Un prérequis pour une société harmonieuse ? Les finalités d’une diversité sociale territorialisée
1) Conjurer la ségrégation socio-spatiale et ses néfastes effets
2) Les bienfaits supposés ou avérés de la mixité sociale
3) Les effets pervers de la mixité sociale : sa mise en cause comme fin en soi
Chapitre 3 – Diverses interprétations pour de multiples mises en œuvre : une difficile appropriation par les acteurs de terrain 
1) Grenoble-Alpes Métropole : un acteur central de la traduction de la mixité sociale sur son territoire
2) Une définition de la mixité sociale variable selon les acteurs, leurs missions et les dispositifs mobilisés
Partie 2 – Des stratégies territoriales multifactorielles de lutte contre l’enclavement et la paupérisation des quartiers populaires
Chapitre 1 – Promotion du caractère généraliste du logement social : diverses actions envisagées pour lutter contre la spécialisation du parc
1) Etat des lieux de l’occupation du parc social en agglomération grenobloise : des difficultés socioéconomiques dues à une paupérisation structurelle
2) La vocation généraliste du parc social affirmée : un gage de mixité dans le respect de sa mission
d’intérêt général
3) De nombreux moyens d’action aux mains des bailleurs sociaux malgré le cadre contraint
Chapitre 2 – Des actions hors QPV : mieux répartir les ménages à faibles ressources et en
difficultés sociales sur le territoire
1) Répartir le logement social sur le territoire : un manque de volonté politique contré par de nouvelles dispositions
2) Réformer la politique de fixation des loyers
3) Construire, faire construire ou acquérir pour développer l’offre hors QPV
Chapitre 3 – Des actions en QPV pour revaloriser leur image et attirer des ménages intégrés aux ressources plus élevées 
1) Des problématiques réelles propres à ces quartiers
2) Conserver les locataires « les plus aisés » et attirer les classes moyennes en QPV : un vœu pieux
3) Le renouvellement urbain pour banaliser les quartiers et les rendre plus attractifs
Conclusion 
Table des annexes
Table des sigles et acronymes 
Bibliographie 
Table des matières

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