Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
1983-1987 : Un redémarrage timoré
Lorsque s’ouvre l’année 1983, le CROUS de Caen est au fond du gouffre. Si la faillite a été annoncée fin 1982, le Centre Régional n’est pas totalement mort pour autant. Un redressement est décidé avec une série de mesures destinées à sauver le CROUS, avec de nouveaux efforts supplémentaires. La tâche à réaliser est ambitieuse, mais chacun doit fournir les efforts nécessaires pour redresser le Centre Régional, tout en gardant à l’esprit que les Vingt Piteuses sont toujours d’actualité. La crise économique est passée, la dépression est en cours, il y a urgence à réagir, car la situation économique actuelle semble s’inscrire dans la durée.
Les efforts apportés en restauration et en logement
Devant la situation, deux immenses chantiers sont lancés, en restauration et en hébergement. Le but est clair et la volonté affichée : le redressement des CROUS passe part le redressement des missions directes. Nous l’avons vu précédemment, ces deux missions accusent d’un vieillissement du patrimoine immobilier, qui n’est plus à même d’accueillir les étudiants dans de bonnes conditions. Dans ce contexte, chaque partie représentée au CROUS, que sont l’État, la Direction, les étudiants, les personnels et les collectivités locales consentent à un effort globalisé, qui tend dans la même direction. C’est le début de l’Union de sauvegarde des CROUS, dans une période de redressement financier.
Une nouvelle offre de restauration
Le début de l’année 1983 est consacré à une réflexion profonde sur la situation actuelle de la restauration. Au delà du fait que les salles des restaurants ne sont pas remplies, on cherche à étudier les raisons profondes de cette difficulté. La vision finit par sauter aux yeux des administrateurs : le système de restauration est dépassé, les habitudes des étudiants ont changé64. Il est alors normal que les restaurants soient désertés s’ils ne remplissent pas de nouveaux critères. La problématique émerge dans chaque CROUS et est remontée au CNOUS. Un grand projet national de transformation des restaurants universitaires est mis au point, afin d’actualiser l’offre proposée aux étudiants65.
Le projet prévoit, dans sa conception générale, et donc à adapter dans chaque CROUS, une meilleure diversité de l’offre de restauration, et plus simplement des files avec un repas obligatoire, mais aussi un accent porté sur la diversification des mets proposés dans les cafétérias, des travaux à réaliser sur le patrimoine des restaurants pour les rendre plus attirants, moins bruyants, et plus accessibles. Pour que tous les CROUS jouent le jeu, le CNOUS annonce avoir reçu une dotation de l’État qui sera répartie proportionnellement aux CROUS en fonction de la densité des travaux à effectuer. A Caen, on mise sur la prudence, et plutôt que de rénover les quatre restaurants d’un coup, on préfère expérimenter sur le RU A, pour mettre une méthode au point, observer les retours, puis une fois aboutie, la diffuser. Le RU A est choisi car l’on sait maintenant qu’il était complètement dépassé. L’année entière est consacrée en discussions et réflexions, en ce qui concerne la restauration, sur la façon de faire du RU A un restaurant moderne, à la pointe de l’innovation, et ouvert à cette nouvelle génération d’étudiants. Le projet est élaboré, et le CNOUS est très satisfait de la direction prise à Caen, qui reçoit 13.000.000 F de dotation extraordinaire à utiliser pour la rénovation de ce restaurant66.
Le projet est ainsi dévoilé au Conseil d’Administration et peut dés lors nous parvenir. Après divers échanges et négociations, le projet prévoit un restaurant d’ensemble, conservant l’aspect de restauration traditionnelle, mais ajoutant des éléments empruntés aux cafétérias. L’aspect novateur concerne la fin des files uniques et la liberté de pouvoir constituer son repas comme on le souhaite. Les files sont réorganisées sous formes de petits îlots qui servent un met par îlot, autour duquel gravitent les usagers composant leur plateau repas. De nouvelles caisses voient le jour et acceptent les « tickets RU », mais aussi de façon innovante le paiement en espèce, là où auparavant il fallait acheter ses tickets en amont, à l’entrée du restaurant. Les tarifs sont mis à jour pour rentrer dans le coût du repas social. Le Conseil d’Administration décide donc qu’un plateau repas normal au RU A doit donc être composé au total de neuf mets différents, dont au moins une entrée, un plat principal, et un dessert. Les choix sont grandement augmentés, on mentionne notamment le choix de viande qui passe à trois choix différents chaque jours. Le projet est considéré comme très satisfaisant, sauf du côté de l’Université qui grince des dents quant à la question de l’accès à nouveau des étudiants dans le restaurant, qui était alors réservé au personnels de l’Université. Le CROUS décide donc d’ajouter à son projet une salle supplémentaire, réservée aux personnels, et isolée de la salle des étudiants67. Enfin, pour aussi fidéliser les usagers dans les cafétérias, la carte est uniformisée en partie, entre les différents pôles géographiques, et lorsqu’une commande remplit les conditions requises qui en fait l’équivalent d’un repas, le CNOUS autorise les CROUS à considérer que cela correspond à la vente d’un repas, et permet donc le versement de la même subvention qu’en restauration traditionnelle.
Le projet rencontre un fort succès, et est rapidement étendu aux autres restaurants, ce qui témoigne de son efficacité. Ainsi, le RU B est le premier à suivre en 1985, bien que le projet soit plus compliqué à mettre en œuvre, puisqu’il s’agit d’un restaurant sur deux étages68, on prépare aussi le RU C dans la même année. Enfin, à la fin de l’année, en raison de la croissance des effectifs sur le Campus 2, on pense à préparer une extension du RU D, et profiter, pendant ces travaux, pour y exporter ce nouveau système69. Les effets sont immédiats : la qualité augmente sensiblement, et les étudiants trouvent que cela est une bonne chose, même si ils considèrent que le CROUS est à la limite entre un repas social et un repas trop cher. Les chiffres de la restauration compilés au début 1986 sont explicites70.
Ici, on peut d’abord voir les effets de la désertion des restaurants jusqu’en 1984, et le temps que le RUA soit réaménagé. Seulement à partir de 1985, on assiste déjà à une remontée et une anticipation bien supérieure à ce que n’était la restauration avant, tout en gardant en tête qu’à partir du lancement du projet, il y constamment l’un des quatre restaurants fermé, chacun leur tour, le temps que les travaux soient réalisés. Cela explique pourquoi l’augmentation n’est pas aussi importante face à l’ampleur du projet. Une dernière innovation concerne les restaurants médico-sociaux, pour les étudiants avec un régime alimentaire spécifique, pour raisons médicales. Ce concept est abandonné, car avec la mise en place des différents points de restauration, il y a une plus grande ouverture pour composer son repas71. Le concept est arrêté puisque ces bénéficiaires se tournent naturellement vers ce nouveau mode de restauration, où ils payent moins cher pour au final pratiquement la même chose (pour rappel, l’étudiant paye la moitié du repas grâce au « ticket RU », l’étudiant en repas médico-social le paye plein pot). La fin de ce régime permet de libérer des salles de restauration qui sont dés lors intégrées dans le nouveau plan de restauration.
Enfin, un dernier détail montre la détermination du CROUS de Caen en matière d’élargissement de l’offre de restauration. A la fin de l’année 1986, on ouvre sur le site d’Hérouville-Saint-Clair un point de vente à emporter de produits froids. Cela montre que le plan de restauration consiste aussi a doter chaque implantation du CROUS d’un point de restauration. En effet, la cité d’Hérouville-Saint-Clair restait le seul site qui ne cumulait pas les missions directes, il y avait le site d’hébergement, il y manquait la restauration. Cependant, on sait peut de chose sur ce point de vente, aucun chiffre n’est mentionné à son ouverture, ni même sa localisation dans la cité, qui n’en garde aucune traces. On sait simplement que le concept est proposé au vote des administrateurs du CROUS72.
Le plan de réhabilitation des cités universitaires
Le second grand volet de sauvetage des CROUS concerne aussi l’action sur le logement, qui se situe au plus mal. Il y a urgence à rétablir les cités, pour faire revenir les étudiants, et donc favoriser le retour des loyers. Contrairement à la restauration, ici le projet affiche une ambition plus mesurée, et cela se ressent en terme de dotations de la part du CNOUS, ce que les élus étudiants critiquent vivement73.
Le projet est ici moins ambitieux, car tous les regards sont tournés vers le redressement de la restauration. Mais le CNOUS joue avec la même technique qu’en restauration, à savoir encourager les projets par l’apport de subventions, qui concerne cette fois ci la réalisation de travaux d’isolation des bâtiments, pour en faire baisser les coûts. L’idée ici malgré le manque de moyens est doublement intéressante. D’une part, les dotations du CNOUS servent, comme d’habitude à réduire le coût de réalisation de ces travaux : ils coûtent moins cher pour les Centres Régionaux qui y participent. D’autre part, les travaux d’isolation entrepris permettent de baisser la facture de chauffage totale, et donc baisser les dépenses, qui peuvent être concentrés sur d’autres actions. Le CROUS de Caen participe donc au « Plan Campus » et se focalise à nouveau sur le Campus 174. Ici, plus que du raccommodage, la Direction affiche sa détermination de véritablement rénover les bâtiments, et de passer aux autres sites à l’instant où le campus 1 sera terminé. Le projet ambitieux est donc de rénover l’isolation des dix bâtiments des deux cités universitaires sur le plateau du campus, tout en changeant les chaudières, pour un nouveau modèle fonctionnant au gaz, et donc qui permet de dégager encore plus d’économie sur le long terme75. Les élus étudiants participent à la dynamique ambitieuse engagée par le CROUS, mais tout en faisant connaître leur désappointement quant à la création d’une fracture entre d’un côté les deux cités rénovées du campus 1, et de l’autre le reste du parc, complètement désuet. Ils ont notamment l’occasion de le manifester lorsque la Direction doit revoir son plan de rénovation des autres cités de Caen et d’Hérouville-Saint-Clair à la baisse, puisque le CNOUS donne à ce moment moins de subventions. Ils considèrent alors que cela fait donc apparaître une fracture géographique du logement social, entre le centre-ville rénové et les marges laissées de côté76.
Et en effet, cette fracture apparaît et se développe, notamment sur Hérouville-Saint-Clair, par le fait de deux événements qui se produisent simultanément. D’une part, le CROUS est obligé d’engager des poursuites à cause d’un vice d’installation de nouvelle fenêtres sur certains bâtiments, alors que la Direction faisait un effort dans l’idée de rattraper la situation des cités éloignées77. Enfin, fin 1986, on se rend compte aussi sur la cité et sur le parc de logements en HLM disséminé autour de la cité, et géré par le Centre Régional78, qu’il y a des interventions de plus en plus nombreuses sur des problèmes d’eau. Cela vient du réseau de distribution d’eau qui doit être complètement remplacé. Là, le CROUS de Caen ne peut plus engager les sommes nécessaires. La direction de la cité universitaire demande alors à la direction du Centre Régional et au Conseil d’Administration la création d’un poste administratif en contrepartie car les interventions se multiplient et il faut une personne supplémentaire pour coordonner les interventions simplement sur le réseau d’eau. Cela est accepté79.
Enfin, concernant le logement, la fin de l’année 1986 voit le retour d’une problématique qui avait été oubliée pendant un moment : on commence à manquer de place pour loger les étudiants. Cela montre d’une part que les travaux font revenir les étudiants, mais annonce aussi les prémices de la Seconde Phase de Massification de l’Enseignement Supérieur. Devant une telle situation, on commence à réfléchir sur les moyens à disposition, et le Conseil d’Administration finit par tomber d’accord : il faudrait construire, mais on manque de place sur les sites existant déjà. Alors une solution semble se dessiner : créer un nouveau site d’hébergement, et, dans la mesure du possible, l’installer au plus près du Campus 2, en pleine explosion d’effectifs étudiants80. Il n’empêche que les travaux sont au goûts des étudiants, puisqu’il est annoncé au 31 mai 1985 que le parc de logement affiche près de 98% d’occupation, ce qui est un chiffre excellent, nonobstant la grande dégringolade précédente81.
La réaffirmation de l’utilité des CROUS
Le décret salutaire des CROUS n’arrive pas comme un cheveu sur la soupe. Il est le fruit de la mobilisation des organisations étudiantes représentatives aux Œuvres Universitaires, dont notamment les deux UNEF. C’est l’aboutissement d’une mobilisation institutionnelle et revendicative, d’interventions en conseils et de manifestations, qui force le gouvernement de cohabitation CHIRAC a faire machine arrière concernant la privatisation des CROUS. Le cœur du décret confirme que les CROUS restent des services publics, tout en apportant une nuée de détails supplémentaires, mais qui actualisent les prérogatives de ces services publics régionaux. Afin de mieux comprendre les tenants et aboutissants de ce décret, je l’ai fait figurer intégralement en annexe 8100.
Quelles évolutions comparées à la loi de 1955 ?
Le but du décret en question est de réaffirmer l’utilité publique des CROUS. Pour ce faire, on s’appuie, pour sa rédaction, sur une base institutionnelle, à savoir la loi du 16 avril 1955 qui créé les CROUS. Cet appui est nécessaire afin de reprendre et citer des éléments légaux, comme les définitions du CNOUS, des CROUS, des CLOUS, ainsi que de la reconnaissance des CROUS en fonctionnement101. L’un des détails qui permet de réaffirmer ce caractère public des Œuvres Universitaires concerne la mise en place de structures des CROUS. Le décret mentionne à l’article 14 que « [les CROUS] assurent les prestations et les services propres à améliorer les conditions de vie et de travail des étudiants, créent dans ce but des structures leur permettant d’adapter et de diversifier les prestations qu’ils proposent aux usagers en tenant compte de leurs besoins et peuvent passer des conventions avec des organismes extérieurs de droit public ou privé pouvant apporter leur collaboration aux services du centre ». Les CROUS ici gagnent une place non négligeable. Dorénavant, ils sont légitimement les organisateurs de leurs missions, autour duquel gravitent des organismes extérieurs qui apportent leurs services aux CROUS. La différence essentielle avec la loi de 1955 provient d’un changement hiérarchique institutionnel : avant 1987, les CROUS sont un service parmi d’autres, après 1987, les CROUS deviennent dorénavant les représentants régionaux de l’État dans le cadre des services à l’étudiant et le référent public des six missions reconnues : restauration, logement, aides sociales, emploi, culture, international. Par ce décret, une volonté certaine est affiché : les CROUS ne seront pas cédés au secteur privé.
Une autre transformation apportée par ce décret nous arrive par le biais du Conseil d’Administration de notre CROUS. Le décret est ici étudié à titre d’information lors de la nouvelle mandature du Conseil d’Administration, qui se réunit pour le première fois le 25 juin 1987. On y fait mention de la fin d’un système, celui de la séparation entre les étudiants bénéficiaires des Œuvres, et les étudiants non bénéficiaires des Œuvres102. Cette séparation avait été mise en place par la loi du 16 avril 1955, et séparait de fait les étudiants en deux catégories. Les étudiants bénéficiaires étaient ceux qui remplissaient des conditions sociales, au même titre que pour les Bourses sur Critères Sociaux, et qui de fait avaient le plein accès aux prérogatives des CROUS : le droit au repas à tarif social, la priorité en ce qui concerne l’affectation à un logement étudiant etc103 … Les étudiants qui n’étaient pas bénéficiaires, eux, payaient leur repas plein pot, et ne pouvaient demander une chambre au CROUS que si il y en avait de disponible, et qu’aucun bénéficiaire ne se trouvait sur liste d’attente. Cette séparation éclate grâce à ce nouveau décret, les étudiants ont alors dorénavant un égal accès aux structures du CROUS. Il y a même une extension des conditions d’accès aux CROUS : à partir de la publication du décret, tout étudiant qui cotise au Régime Étudiant de Sécurité Sociale (RESS) a, de fait, droit aux services de son CROUS104. Cela ne concerne plus exclusivement les étudiants des Universités et des écoles du supérieur. Les CROUS s’ouvrent à une nouvelle catégorie de la population étudiante, renforçant son aspect de service public universitaire universel. Mais cela n’est pas sans poser quelques problèmes d’ordre administratif. En effet, pour ce qui est de la restauration, cela signifie que tout un nouveau public arrive en masse dans les restaurants du CROUS, et ont de fait droit au tarif social, au repas à peu près à moitié prix au lieu du repas à plein prix (le tarif social du repas en 1987 est de 16,05F, dont 9,3F à charge de l’étudiant, et 6,75F en subvention de l’État105). Il faut donc apporter des dotations supplémentaires, ce que l’État fait volontiers. Car cette logique de dotations financières supplémentaires rentre dans une logique globale, qui dépasse de fait la restauration. Des délégations de crédits arrivent pour les CROUS, notamment pour préparer de nouveaux chantiers en logement au terme d’une grande enquête sur les terrains de l’État occupé par les CROUS106, nous aurons l’occasion d’y revenir plus tard.
De nouveaux moyens, de nouvelles constructions
Devant des CROUS qui récupèrent petit à petit des moyens financiers, le budget se rétablit aussi à Caen, c’est l’occasion de regarder à nouveau vers l’avenir, de préparer et lancer des chantiers. Du point de vue fonctionnel, le décret de 1987 marque à la fois continuité et rupture dans le fonctionnement budgétaire de notre Centre Régional.
Un budget qui se rétablit timidement
Les investissements massifs ne sont pas encore au rendez-vous pour le CROUS de Caen quand le décret est publié. Mais maintenant, grâce à ce dernier, on peut de nouveau compter sur le soutien financier du CNOUS. Cela donne une motivation pour le CROUS de Caen, pour préparer de nouveaux projets. Jusqu’à la fin des années 1980, le Centre Régional se prépare à lancer de nouveaux projets, tout en utilisant efficacement les quelques nouvelles dotations qui lui parviennent.
Selon les dires au Conseil d’Administration et les votes des nouveaux administrateurs, les efforts financiers et budgétaires sont dirigés vers le remplacement du matériel usagé dans les structures. Cependant, nous n’en avons pas d’idée précise, car les archives budgétaires ici font partie du corpus archivistique disparu. Cependant, un élément est évoqué en 1990 et fait le bilan d’une gigantesque opération de maintenance effectuée en hébergement, pour le remplacement du matériel. On y découvre que de 1988 à 1990, le CROUS de Caen dédie près de deux millions de francs par année, sur trois ans, pour le remplacement du matériel usagé des cités universitaires, et la même somme environ pour le remplacement du matériel en restauration, dans les quatre restaurants gérés par le CROUS de Caen (ici principalement dans le matériel de cuisine)110. C’est une somme bien conséquente au final, qui représente près de douze millions de francs investis en trois ans, que le CROUS n’aurait jamais pu investir si le CNOUS n’avait pas apporté des sécurités budgétaires derrière. Il n’y a qu’en cours d’année 1987 que tout ne se passe pas aussi bien car le budget élaboré marque la transition entre la période étudiée dans le chapitre 1, de disette budgétaire, et le redémarrage des missions du CROUS. En effet, le CNOUS doit annuler, au moment de l’élaboration du budget à Caen, une subvention qui aurait permis de remettre en travaux le RU A en 1987. Cela agace les élus étudiants et cela force la Direction du CROUS a prendre un nouveau risque : puiser à nouveau tout le fond de roulement du Centre Régional pour financer les travaux, car ils ont déjà commencé. Évidemment, dans ce budget qui se rétablit timidement, ce sont les actions directes qui bénéficient le plus de la relance par le décret comme on vient de le voir avec le plan d’investissement. Les missions indirectes voient leur budget gelé systématiquement, surtout pour le FSU et le budget pour l’accueil des étudiants étrangers. Le redémarrage n’est pas pour l’instant à la hauteur souhaitée par le décret de 1987.
La préparation du plan de rénovation des cités universitaires
Si le budget progresse timidement, c’est parce que le CNOUS prépare de grands plans d’investissement pour les CROUS, il faut alors se montrer patient et faire des préparations de travaux. On l’a vu plus tôt, l’année 1987 est consacrée à un recensement des terrains de l’État occupé par les CROUS. Ici, c’est un jeu de transferts de terrains qui s’engage, pour accorder aux CROUS des terrains supplémentaires pour s’étendre dans un avenir proche. Les années 1988 à 1990 sont consacrées, une fois cet inventaire réalisé, à la préparation des travaux d’extension et de créations de nouvelle structures. On ressort des cartons les projets que l’on avait arrêté ou laissé à l’abandon, on les dépoussière pour les remettre à jour et les étudier. Au niveau national, des outils sont accordés au CROUS de Caen pour anticiper le plus en amont la préparation des travaux d’hébergement. Une note d’informations communiquée par le CNOUS nous explique la mise en place de l’Indice de Référence des Loyers (IRL)111. Il s’agit d’éléments légaux qui permettent de mesurer et de planifier les coûts des constructions, d’achats des terrains, de mise en place des loyers, ainsi que des augmentations annuelles possibles pour ceux qui sont déjà en place. L’IRL permet d’ajuster de manière nationale les éléments de réglementation en matière de loyers, et notre CROUS doit maintenant s’y conformer. Les loyers déjà en place doivent suivre les publications annuelles de l’IRL et donc il n’est plus possible d’augmenter les loyers au delà des limites prévues. La mise en place de l’IRL est une véritable boîte à outil légale pour le CROUS de Caen, qui permet de planifier tous les projets qu’il souhaite mettre en place.
Un très vaste projet de logement est prévu, on dépoussière une idée qui avait été évoquée quelques années auparavant : construire une nouvelle cité universitaire sur le Campus 2. On pense aussi à construire autre part, car on se rend compte maintenant que la Seconde Phase de Massification est bel et bien en marche. Le début de la Seconde Phase s’incarne en Basse-Normandie avec un Campus 2 qui bénéficie le plus, jusqu’en 1990, de cette augmentation du nombre d’étudiants, j’aurai l’occasion d’y revenir112. Sur la mission de logement, les trois années, de 1987 à 1990 sont utilisées judicieusement pour préparer un gigantesque plan d’extension du logement, qui comprend construction, réhabilitation, mais aussi, et c’est grâce à l’IRL, le projet de rachat de la cité universitaire d’Hérouville-Saint-Clair, qui est relancé113. Le projet est immense, et les fonds sont insuffisants, du moins pour l’instant. Le CROUS n’attend qu’une seule chose, le feu vert qui sera accordé avec les premières grosses subventions, à horizon 1990. Pendant ce temps, c’est la restauration qui bénéficie d’un investissement rapide et efficace pour ses usagers.
|
Table des matières
Chapitre 1 : Les années 1976 à 1987 : du déclin à l’agonie
A-1976-1982 : Le CROUS de Caen au bord de la faillite
A-1 : La Restauration plus que jamais en difficulté
Des restaurants qui ne sont plus en condition d’accueillir les effectifs étudiants
La question du prix social des repas
Le développement spectaculaire des cafétérias
Quelle qualité pour les repas ? Le scandale du « steak-haché »
A-2 : Un logement étudiant proche de l’insalubrité
Un manque crucial de rénovation
Un modèle de logement qui veillit
La concurrence avec le logement en ville
A-3 : le CROUS de Caen sur la scène internationale
Les liens historiques entre les CROUS et leurs homologues allemands : les Studentenwerke
Quels autres contacts internationaux ?
A-4 : Une gestion du CROUS qui atteint ses limites
Quelle action sociale pour les étudiants ?
Un budget à l’agonie
1982 : l’« Année Noire » pour le CROUS de Caen
B-1983-1987 : Un redémarrage timoré
B-1 : Les efforts apportés en restauration et en logement
Une nouvelle offre de restauration
Le plan de réhabilitation des cités universitaires
B-2 : Quels effets sur la vie étudiante ?
La précarité qui s’enfonce
Un FSU à réformer
Une participation pour les étudiants étrangers
B-3 : Quel avenir pour les CROUS ?
Des contours historiques en mouvement
Les administrateurs déchirés sur la question de l’avenir des Œuvres
Chapitre 2 : Les années 1987 à 2001 : la grande remontée
A-La loi du 5 mars 1987 : un nouvel espoir
A-1 : La réaffirmation de l’utilité des CROUS
Quelles évolutions comparées à la loi de 1955 ?
La transformation du Conseil d’Administration du CROUS
A-2 : De nouveaux moyens, de nouvelles constructions
Un budget qui se rétablit timidement
La préparation du plan de rénovation des cités universitaires
La généralisation de la nouvelle offre de restauration : un résultat à la hauteur des enjeux
A-3 : Quels effets sur l’action du CROUS de Caen ?
Un appel d’air bénéfique
Une nouvelle vague de planification de projets
B-Les années 1990 à 1995 : de nouveaux investissements : le CROUS contreattaque
B-1 : Un nouvel élan d’investissement : le Plan Université Troisième Millénaire (U3M)
Quel constat en Restauration ?
Des vieilles cités qui font peau neuve
De nouvelles résidences qui sortent de terre
Une histoire de terrains …
B-2 : De nouvelles prérogatives
Une mission commune pour la culture
Les débuts de l’informatisation
La gestion du Dossier Social Étudiant
C-De 1995 à 2001 : le retour du CROUS
C-1 : La contractualisation des CROUS
Les projets d’anticipation et de planification de 1996 à 2001
Le grand projet de transformation du logement étudiant
C-2 : Le bilan de la Seconde Phase de Massification de l’Enseignement Supérieur
L’Académie de Caen, une exception dans le phénomène national
Un nouvel éclatement des sites d’enseignement
Une présence du CROUS renforcée
C-3 : Étudiants et personnels, quelle situation à l’orée du troisième millénaire ?
Étudiants et représentants, quelle situation, quelle précarité ?
Des personnels qui donnent leur maximum
Chapitre 3 : Le processus de régionalisation, la fin d’un CROUS emblématique (2002-2018)
A-Le CROUS de Caen, gagnant des réformes de décentralisation (2002-2007)
A-1 : Quelle place du réseau des Œuvres dans la nouvelle Europe ? (2002-2004)
Le CROUS de Caen et le réseau des Œuvres face aux nouveaux défis européens
Quel bilan du projet Université 2000 (U2000) ?
Un nouveau siècle, de nouvelles priorités pour le CROUS de Caen
A-2 : Le quaternat tranquille ? (2004-2007)
De nouvelles possibilités
Tensions et revendications : quels moyens pour un CROUS du XXIe siècle ?
Les effets des réformes de décentralisation et de régionalisation
B-Quelle gestion d’un Centre Régional en temps de crise ? (2007-2011)
B-1 : Le président SARKOZY, le gouvernement FILLON et la crise de 2007-2008
Un CROUS de nouveau menacé dans son action
Quantité ou qualité ?
B-2 : Comment surmonter une nouvelle crise économique ?
Les projets n’attendent pas : la recherche de fonds
7De nouvelles transformations sociales
Des querelles politiques et syndicales
C-Le CROUS de Caen, entre innovations, questions, discussions et régionalisation (2011-2015)
C-1 : Des nouveaux moyens pour les étudiants
Une nouvelle vague de précarité étudiante
Une réforme historique du système social
C-2 : La restauration à réinventer
Une réflexion générale sur la restauration
Du particulier au général : une Restauration pour satisfaire de plus en plus d’étudiants
Le phénomène de la restauration rapide
C-3 : Les nouvelles cités universitaires : le confort caennais
Quels travaux, quels effets ?
Le cas singulier des résidences universitaires d’Hérouville-Saint-Clair
C-4 : La coopération régionale des acteurs universitaires normands
Des nouveaux services pour les étudiants : la Léocarte normande
Les nouveaux théâtres de coopérations : PRES, ComUE et nouveaux organes de discussion régionaux
D-La question de la fusion des CROUS normands : quelle unité pour deux centres historiques ? (2015-2018)
D-1 : Contexte général et politique : le CROUS de Caen au cœur d’un vaste projet de régionalisation
Caen et Rouen : une première expérimentation nationale
Le décret de la « dernière barrière »
D-2 : Tensions et progrès sur la réunification
Un travail d’association des acteurs universitaires normands
Une organisation multi-site : la question du siège
Des craintes pour la suite
D-3 : Pendant ce temps, les derniers projets sont lancés
Le schéma directeur de la restauration
Une dernière innovation en logement : plus d’écologie, plus de services
Regarder vers l’avenir, dans un contexte singulier
Épilogue : Quelle vision d’avenir pour le CROUS de Normandie ?
Parole à Virginie CATHERINE, première Directrice Générale du CROUS de Normandie
Conclusion
Bibliographie
Télécharger le rapport complet