DES OBSTACLES REELS AU DEVELOPPEMENT DE L’ACTIVITE TOURISTIQUE A BETANIA

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CHAPITRE II : BETANIA UN SITE AUX POTENTIALITES REELLES
Dans ce chapitre, nous tenterons d’analyser le concept touristique « vitrine vezo » dans le contexte du village de Bétania. Il s’agira d’interpréter la situation des différentes dimensions de ce projet tant sur sa dimension « produit touristique », que sur ses dimensions aménagement et développement local. Les composantes organisation, gestion et financement seront également interprétées dans ce chapitre. Nous en déduirons les principaux atouts à valoriser, et les contraintes et points de blocage sur lesquels agir pour adapter le concept touristique aux réalités de son environnement, mais également aux aspirations de la communauté de Bétania.
La première question que l’on peut se poser est de définir quels sont les atouts réels de Bétania, quels sont les « produits » que la communauté peut offrir à différentes formes de tourisme, et quels impacts économiques peuvent en être déduits considérant les différentes formes d’investissements nécessaires (financiers, humains, social,…). Il conviendra plus tard d’analy ser les risques liés au succès possible de cette image, tant pour la communauté que pour l’activité touristique elle-même (dérives identitaires, spéculation, fragilisation du tissu social,…).
Le fokontany de Bétania est un quartier de la Commune Urbaine de Morondava dans la Région de Menabe. Il est séparé de la ville par un estuaire. La population serait aujourd’hui de 1123 habitants (575 femmes, 548 hommes) répartis en 6 dodoky, regroupant chacun entre 20 à 30 toits. Les sakalava d’origine sont majoritaires (plus de 60%), on rencontre également des antandroy des mahafaly et des antaisaka. Les dodoky ont été mis en place pour faciliter la communication au sein du village. Les dodoky du Nord correspondent globalement à une même grand e famille (descendance matrilinéaire). Ceux du Sud sont davantage panachés (De nombreux hommes ont migré au village, principalement après avoir épousé une fille du village). Chaque dodoky est dirigé par un comité composé d’un président, d’un vice-président, d’un secrétaire et d’un trésorier, élus par des chefs de ménage membre du dodoky.
Une Assemblée Générale (AG) des chefs de ménage de Bétania se réunit régulièrement pour les grandes décisions communes à prendre. Elle est généralement convoquée par le président du fokontany. Le « antsiva » peut être sonné pour appeler les gens. Un crieur annonce simultanément l’objet de la réunion. Le chef de dodoky dirige les réunions et les litiges (avec un comité) au sein de son dodoky. Si le litige n’est pas réglé à ce niveau, on envoie l’affaire au conseil des présidents de dodoky et du fokontany, qui essayera de trouver une solution à l’amiable. Si les parties ou les contrevenants n’arrivent pas à un accord, l’affaire est portée soit au commissariat de Morondava, soit la gendarmerie, soit une plainte est déposée au tribunal.
L’ensemble des familles pratique la pêche. Le parc de pirogues regrouperait environ 200 pirogues à balancier, et 120 pirogues simples. Quelques chefs de ménage ont une activité salariée à Morondava (employés des pêcheries), mais disposent néanmoins de leurs propres pirogues. Les revenus des familles sont erratiques. Elles ne pratiquent pas d’épargne. Les surplus de recette sont généralement investis directement dans la construction d’habitations ou d’embarcations ou d’acquisition d’équipements ménagers.
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Le village comprend 1 église catholique (30% de la population), et 1 temple luthérien. Le « culte » des ancêtres reste largemen t pratiqué. Un centre de santé a été construit, il est géré par un comité de santéIl. est approvisionné régulièrement en médicament. Un infirmier épaulé par une aide soignante et des religieuses assure une permanence régulière.
Bien que proche de Morondava, ce quartier est particulièrement défavorisé par son enclavement. Un équipement solaire a été installé il y a une dizaine d’années (installation fournissant l’énergie pour 2congélateurs et 7 ampoules de 60 watts). Il est aujourd’hui en panne. Quelques foyers sont équipés de groupes électrogènes. 15 puits ont été creusés(dont 4 busés), leur qualité est très variable (2 d’entre eux fournissent de l’eau potable). Le quartier n’est pas relié aux réseaux de la JIRAMA. Le village ne dispose pas de sanitaire, et l’enlèvement des déchets n’est pas assuré par la commune. L’EPP comprend 5 classes (275 scolarisés). 6 enseignants y travaillent par roulement. Un certain nombre d’enfants sont inscrits dans les écoles privées de Morondava.
Deux opérateurs touristiques se sont tentés à Bétania. Ils ont tous deux arrêtés leurs activités depuis plusieurs années. Un guide touristique réside dans le quartier.
Un certain nombre d’associations ont été érigées dans le village : 4 associations de pêcheurs (Avotra, Taratra, Manalotsoa, Te Hanatsoa) , un FRAM, un comité santé, et une association de scouts.
Section 1 : Une culture préservée aux portes d’unecapitale régionale
Succédant à l’agitation diurne de Morondava, aux « déhanchements » des automobiles qui longent les multiples mares qui ont envahies les nids de poules des principaux axes routiers de la ville, la traversée de la passe de Bétania nous conduit à un monde différent : le « pays vezo ».
Les vezo constituent un groupe social particulier à Madagascar, souvent incompris, en particulier de par une relation au temps et au monde qui leur est propre. Qui sont ces vezo ? En quoi leur culture et leur mode de vie peuvent attirer la curiosité ? En quoi le vécu de cette identité peutil- favoriser l’échange humain et de culture ?
Il s’agit principalement dans ce chapitre de mettre en valeur un capital humain inestimable porté par une culture et un art de vivre riches d’enseignements. L’approximation du terme « produit touristique » ne doit pas évacuer le risque de transformations sociales préjudiciables au profit d’options économiques rudes. L’identité vezo constitue le concept premier de ce projet touristique, elle porte également l’une des préoccupations première de cett étude. La préservation de cette identité, sans occulter l’aspiration à certains changements, constitue le fondement des propositions techniques.
Les vezo se définissent par leur rapport organique à la mer (nous verrons plus loin que la morphologie des fonds marins et celle du corps sont très liées). Les vezo vivent sur la côte, vivent avec la mer, et vivent de la mer. La mer est leur espace, et les vezo s’adaptent aux transformations saisonnières de ce milieu. Ils migrent avec les bancs de poissons et adaptent leurs pratiques en conséquence (séchage, salage des prises pour leur conservation). Les périodes de migration offrent le spectacle de d’impressionnants ballets de pirogues, de plages occupées
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par des tentes faites des épars et de la voile de la pirogue. Les vezo sont aujourd’hui appelés les semi-nomades de la mer. Autrefois les campements vezo pouvaient également se déplacer définitivement au rythme des crises politiques. Dans l’histoire, ce peuple doux et pacifique a toujours utilisé la migration pour fuir la violence. Le nomadisme marin est généralement saisonnier. Il se pratique en saison froide, période à laquelle les bancs de poissons migrent. Les conditions climatiques du moment sont également plus favorables pour conserver et transformer les prises. Ces migrations saisonnières s’appellent « vialava »
.Le vialava constitue un moment fort dans la vie d’un pêcheur vezo. Il s’agit également d’une période importante dans la vie de al communauté. La particularité de cet événement est qu’il se produit généralement à la période de pointe de l’activité touristique.
Les vezo affirment qu’ils ne sont pas ce qu’ils sont parce qu’ils sont nés comme cela. Les vezo sont devenus ce qu’ils sont par ce qu’ils ont fait. Leur identité et leur différence sont le résultat des activités qu’ils ont conduites. Les vezo sont des gens qui luttent contre la mer et vivent au bord de la mer. Etre vezo est avant tout un apprentissage : il s’agit d’apprendre à nager, à pê cher, à pagayer, à naviguer, à construire une barque,… .
L’identité des vezo n’est pas intérieure (lien de sang,…), mais extérieure, ce qui explique que si ils en font le choix, ils peuvent être transformés en autre chose par exemple en « masikoro », pour ceux qui veulent retourner à la terre.
L’identité vezo s’exprime donc par les voies de l’apprentissage (ou de l’initiation). Ces sont les voies de cette initiation qui peuvent être valorisées dans un concept touristique vezo. Deux grands thèmes peuvent être envisagés : l’art de la pêche, la construction de pirogues et de boutres. Les fêtes traditionnelles et l’art culinaire vezo sont également des empreintes culturelles qui pourront être valorisées.
1-1 La pêche
Les principaux signes de « vézitude » sont caractér isés par les traces que les activités de la mer laissent sur le corps (cicatrices des coupures occasionnées par les lignes sur les doigts, absence de cals sur les doigts des femmes, la manière de marcher propre aux gens qui vivent près de la plage,…). Les vezo ne naissent pas avec un corps de vezo, mais acquièrent ce corps.
Pour le vezo, la mer est un territoire, délimité par l’usage et l’expérience, sur lequel on prélève les ressources nécessaires et quel’on identifie au corps humain. L’espace marin (riake) est ainsi divisé en bandes parallèle de la cote usqu’auj large. Chacune de ces zones correspond à des pratiques de pêche :
– andohariake (tête de la mer), première frange littorale après le passage de la barre, et ambohondriake (dos de la mer) frange où l es eaux sont vertes et la profondeur inférieure à 10 mètres, sont des secteurs où la pêche se pratique au filet,
– ampondriake (cœur de la mer) s’étend jusqu’à l’extrémité du plateau continental. Cette zone assez large (environ 20 km) est décomposée en plusieurs zones (hamaïha), au sein desquels les lieux favorables à la pêche sont appelés riva. Chaque riva possède sa spécificité selon les fonds. Les fonds sableux autour des îles s’appellent antsarake. Ces fonds sont généralement suivis de zones coralliennes ou ankavandana. La pêche autour des îles se pratique le jour surantsarake et la nuit sur ankavandana. Le teva (précipice) qualifie la pente du plateau continental. A partir de là on quitte le
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domaine familier des vezo, il s’agit d’andrivabe (grande rive). En dehors des fonds sableux périphériques aux îles la pêche se pratique à l’hameçon (palangrotte).
L’activité pêche est donc rythmée par les déplacements de la ressource. Quoiqu’il en soit un vrai pêcheur vezo passe une grande partie de la journée en mer. Et cela est particulièrement vrai pour les pêcheurs de Bétania qui bénéficient de l’opportunité des marchés de Morondava pour écouler sans difficulté les prises. Les pirogues peuvent donc effectuer deux ou plusieurs sorties dans la journée au passage des bancs de poissons. L’activité pêche est néanmoins soumise à des pics de calendrier : janvier à mars (merlan et tout venant), avril à mai (crevette et tout venant), juin à août ( vialava), octobre à novembre (thon, capitaine, carangue, cabot, rouget,…).
La mer, les bancs de poisson et les conditions climatiques rythment la vie du village. Les activités des femmes sont également étroitement liées à ce rythme. Ce sont elles qui assurent, en plus de la pêche à pied, le conditionnement (lavage, triage,…) et la commercialisation du poisson. Leur calendrier journalier peut être très chargé (cf. encadré une journée de femme vezo).
Bien évidemment, cette organisation familiale du temps de travail quotidien interroge sur la disponibilité des ménages pour s’investir dans l’activité touristique. Ce choix doit être analysé au sein des familles. Ouvrir une chambre, ou bien une table d’hôte implique une disponibilité certaine, mais également d’aborder cette question avec une préoccupation de professionnalisme. Il n’est pas envisageable que certains types de tâches (cuisine, service,…) soient confiée s aux enfants et aux personnes âgées quand la mer sollicite plus de bras, en parti culier ceux de la responsable habituelle. Le mode de division des activités à Bétania est axé sur la pêche, mais attribue aux femmes les responsabilités de la tenue de la maison et de la cuisine. Les hommes doivent prendre en considération que le développement du tourisme retirera un certain nombre d’intrants à l’activité pêche, et qu’il sera nécessaire de s’adapter à cela. La gestion des activités de guidage, plus masculine, pose le même type de problème.

Les fêtes traditionnelles

Un certain nombre de cérémonies rythment la vie sociale: fandeho (mariage), funérailles, bilo (rituel de guérison), forazazalahy (circoncision).
Le mariage constitue une fête importante chez les V ezo. Cette cérémonie est à la fois religieuse et traditionnelle. Le périple démarre par le tobaly ou vody ondry, qui est la cérémonie demande en mariage. Les parents du jeune homme se rendent chez les parents de la fille. Cette cérémonie consomme beaucoup d’alcool. Au cours de cette cérémonie la famille du prétendant s’engagent à bien traiter la fille. Les fronts des fiancés sont ensuite enduits de terre blanche, ce qui marque la bénédiction des parents. Le fandeho est la cérémonie de mariage proprement dite. Le hazomanga bénit l’union. Tous les amis et parents sont invités à la cérémonie. Un zébu est sacrifié et l’alcool (rhum) coule à flot.
Le soroanaka est la cérémonie de reconnaissance de l’enfant par le père. Cette cérémonie reconnaît à l’enfant le droit d’hériter et d’être enterré dans le cimetière familial. Un zébu est sacrifié pour cettecérémonie Les fronts de la mère, de l’enfant et du père sont enduits du sang de l’animal. Les familles des parents partagent ensuite alcool (rhum) et nourriture.
Le forazazalahy objet de grandes fêtes dans le passé est aujourd’hui passé dans l’anonymat. A Bétania la circoncision est généralement pratiquée par un médecin.

La cuisine vezo

La gastronomie vezo fait partie des attraits touristiques de Bétania. La base de l’alimentation est bien évidemment le poisson. Des poulets, des canards et des caprins sont élevés au village. Ils sont principalement consommés pendant les fêtes (Nouvel An, Pâques, Noël,…) qui réunissent générale ment la grande famille autour d’une même table. Les zébus sont élevés par quelques familles riches (16 familles possèderaient chacune entre 5 et 20 têtes). Les ani maux sont sacrifiés au cours des grandes cérémonies : fandeho, jotso botsy ou soroanaka.
Les vezo cultivent peu et consomment peu de fruits, à l’exception de la noix de coco (mandrafo). Les produits agricoles sont obtenus par échange.

Un milieu naturel qui lutte pour préserver son originalité

L’île de Bétania dispose d’un environnement natureltout à fait original aux portes d’une capitale régionale. Cet environnement se caractérise en particulier par la présence de lambeaux de mangrove, ses dunes littorales couvertes de satra, et sa faune marine et terrestre. Outre son caractère « exotique », la mangrove revêt une utilité toute particulière pour les habitants de Bétania. D’une part, elle constitue le lieu de reproduction des crevettes et le lieu de vie des crabes et autres mollusques, d’autre part, elle joue un rôle d’éponge pour contenir un stock phréatique d’eau douce. Cela est important, pour un village où l’eau douce constitue une ressource rare.
Pour les résidents des zones littorales, la plantation de cocotiers marque une possession foncière. Ces arbres, héritage de la période coloniale, plantés en grand nombre, donnent une image « paradisiaque » au site. Elles révèlent également une appropriation foncière de plus en plus forte.
Contrairement à la majeure partie de la zone côtière qui est peu habitée, la frange littorale de Bétania subit également la proximité d’un centre urbain important. D’autre part la taille du village est importante. Aujourd’hui, la pression anthropique sur les ressources naturelles est forte.
La mangrove tout d’abord est fortement exploitée. Les utilisations du bois de mangrove sont diverses : construction de clôtures et de cases (ceriops tagal), flotteurs de filets (bois de pneumatophores), construction de boutres et de goélettes, pharmacopée (somangy, lombiry…), produits de beauté ( finamby, kolimba,…). En revanche, la pêche au crabe est peu pratiquée dans la mangrove de Bétania.

Certains mollusques sont capturés pour servir d’appâts ( tsakody, marintondro).
La mangrove de Bétania (et du village de Lovobé au Sud de Bétania) est aujourd’hui particulièrement menacée par les importants apports sédimentaires charriés par le fleuve Morondava, et qui empiètent sur son territoire.
Les palmes de satra sont utilisées pour la couverture des maisons, et comme matière première pour les activités de vannerie. L’utilisation actuelle de satra ne semble pas menacer cette ressource. Au contraire, grâce aux importants phénomène d’érosion, son territoire sableux de prédilection gagne du terrain tant sur la mer que sur la mangrove.
Aujourd’hui la zone touristique de Morondava, Bétania inclus est menacé par à la fois par la régression de l’ancien delta, et surtout les apports sédimentaires sableux en provenance du Sud (rivière Kabatomena) sous l’effet du transit littoral. Ce phénomène d’érosion a deux caractéristiques principales:
– l’avancée d’un front de sédimentation à l’Ouest et au Nord de Bétania (plusieurs dizaines de mètres par an). Cela induit simultanément le pivotement et l’ensablement du chenal de Bétania, le développement des cordons dunaires, et surtout l’éloignement progressif du village de la plage,
– l’érosion de la pointe de Nosy Kely, qui menace les réceptifs hôteliers et qui impose des aménagements littoraux.
Le développement non contrôlé d’activités touristiques « industrielles » sur l’île de Bétania, constitue également une menace pour le cadre de vie, le caractère du site, la conduite de l’activité pêche (les réceptifs sont généralement construits sur le littoral et constituent un obstacle physique gênant pour les pêcheurs entre la plage et leurs habitations), la gestion des ressources en eau douce, et différentes formes de pollutions biologiques et chimiques.
Ces pollutions chimiques et biologiques (piles, plastiques, déchets humains,…), sont déjà importantes à Bétania, elles commencent d’ailleurs à Nosy Kely, point de départ des visites sur l’île. L’enclavement du village pose deux grandes questions : les modes de gestion et d’élimination des ordures ménagères et domestiques, l’amélioration des conditions d’hygiène dans le village.
Le développement d’activités touristiques à Bétaniaquelle que soient leur nature, passe par une amélioration du cadre de vie au sein du village, nécessite une mobilisation commune, impose des règles et des comportements responsables. Ces dispositions ont un coût économique et social, et devront être nécessairement « rentabilisés » par les retombées de l’activité touristique.

Un terroir qui porte une histoire riche

L’île de Bétania constitue une triple référence historique :
– Elle est le premier site d’implantation des missions luthériennes à Madagascar. Le premier temple a été construit sur ’île,
– Elle constitue une référence pour l’abolition de l’esclavage,
– Par ses cimetières, elle porte la marque de la transmission du pouvoir monarchique à la société moderne.
Comme son nom l’indique, la création du village de Bétania est liée à l’implantation d’une mission luthérienne sur le site. Sa création date de 1886.
« L’île » de Bétania (qui s’appelait initialement Nosy Mitsinjo) était à l’époque plus vaste qu’elle ne l’est aujourd’hui, et était occupée par des communautés de pêcheurs et des éleveurs sakalava. Bétania constitue la porte de l’évangélisation dans le Menabe. Le nom de Bétania a été donné par les missionnaires norvégiens (Ils auraient débarqué sur l’île en 1854, bien avant l’arrivée des troupes françaises). Bétania fait référence à un personnage du nouveau estament, Marie de Béthanie, sœur de Lazare, et disciple de Jésus- Christ (Contr airement aux protestants, les catholiques l’identifient à Marie Madeleine).
Le passé de Bétania fut également l’un des principaux lieux de passage des importations d’esclaves au XIXème siècle dans la région.
Ces esclaves ont progressivement été affranchis en particulier avec l’aide des missionnaires norvégiens. Cependant le nom qui leur était donné à l’origine « makoa » est resté, ce qui les maintient dans une certaine forme de marginalité. La question de l’intégration sociale des « makoa » reste complexe jusqu’à aujourd’hui. Les makoa sont considérés par certains comme les premiers occupants de Bétania. Il est toutefois difficile de se faire une opinion précise sur l’antériorité réelle si l’on considère les importantes mutations géomorphologiques du milieu. Certains de leurs descendants vivent de l’agriculture dans le village de Marofoky situé 2 km à l’Est de Bétania.
Les systèmes funéraires traduisent les transformations sociales. A l’époque monarchique, les tombeaux sakalava témoignaient du statut social de l’individu et de sa descendance. La période coloniale a « démocratisé » l’accès aux tombeaux. Précédemment la sépulture était liée au territoire de vie du défunt et de sa descendance. Les nouvelles nécropoles ont pris un caractère communautaire, image des regroupements humains hétéroclites au sein de villages et des agglomérations, mais aussi de systèmes d’alliance qui ont bouleversé les rapports des lignages avec leurs territoires. Cela s’est traduit également dans la symbolique des monuments funéraires.
Les trois sites funéraires de Bétania portent l’histoire de ces évolutions sociales.

Un artisanat riche et original

Comme la pêche rythme les activités sur la mer, l’artisanat rythme les activités du village, et constitue la deuxième vie du pêcheur vezo. L’artisanat fait partie intégrante de l’identité vezo, en particulier la construction de boutres et de pirogues monoxyles.
Les vezo sont à la fois charpentier de la mer, et charpentier sur terre, ils construisent leurs propres maisons en faisant quelquefois appel à un voisin plus expérimenté pour les assemblages délicats. La mangrove et les dunes leur produisent une partie de leur matière première.
La préparation des matériels de pêche (réparation des filets, préparation de lignes,…), constitue également un spectacle permanent original.
En revanche les activités artisanales à destination commerciale sont limitées. Il s’agit principalement de:
– la vannerie (nattes, paniers fabriqués avec des fibres de satra), dont les produits sont commercialisés au niveau du village, ou sur le marché de Morondava. Seules quelques vieilles dames continuent à tresser,
– la construction de maquettes de pirogues ou de boutres. Ces constructions font partie de l’initiation des enfants à la mer. Très jeunes, ils rêvent de leur future laka fiara, et essayent de la reproduire avec des matériaux tout-venant. Certains d’entre eux ont acquis une dextérité dans l’exercice, sont connus et fabriquent à la demande (ils ne disposent pas de stocks). Certaines maquettes pourraient être exposées dans le centre d ’interprétation, tant leur conception se rapproche de la réalité (Maquettes de 1,5 m). Florent Claude,
Balmin Junior et Ollin sont des artisans qui pourraient animer un atelier de maquettistes.
Les femmes vezo, pour se protéger du soleil, appliquent sur leurs visages des mixtures à base d’écorces d’arbres qu’elles appellent « tabaky ». 3 types de tabaky sont utilisés en fonction du type de peau, du teint recherché, et du mode d’utilisation (protection solaire, esthétique) : le masojoany, le fihamy ou le kolimba. Ces visages de femmes enduits constituent également une particularité de Bétania.
Généralement les touristes aiment à ramener dans leurs bagages des objets originaux qui rappellent des moments forts de leurs voyages. Certaines activités artisanales à vocation commerciales pourraient être développées, en particulier vannerie et maquettes. Cela implique d’une part d’adapter le type de production à la demande potentielle (qualité du travail, taille et transportabilité des objets,…), et de raisonner les comptes de trésorerie et le budget temps pour être en mesure de fournir la demande, de gagner de l’argent et de continuer à pêcher.

LES COMPOSANTES DU PROJET

Nous avons inscrit ce projet dans une logique de développement local du village de Betania dont il convient de décliner et d’analyser les principales composantes qui sont bien évidemment étroitement corrélées. L’architecture de ce projet sera donc construite autour de ses composantes commerciales, spatiales, organisationnelles, réglementaires, éducationnelles et institutionnelles. Ces composantes sont présentées brièvement à la suite.

Créer un centre d’interprétation pour attirer la curiosité des touristes

L’accroche des touristes et des TO passe par un outil privilégié, le centre d’interprétation.
Le concept culture vezo est indéniablement porteur. Il se rapporte à la fois à un mode de vie et à une qualité de vie originale, spectaculaire et parfois épique.
La réalisation d’un centre d’interprétation permettra de promouvoir ces caractères. La localisation de ce musée à Nosy Kely mettra les attraits de Bétania directement à la portée de l’ensemble des touristes qui transitent à Morondava. Les différents produits proposés permettront de choisir des itinéraires de visite adaptés à la durée du temps de séjour des touristes de passage. La qualité de ’offrel touristique sur Bétania peut inciter progressivement les TO à fixer les touristes un ou deux jours de plus à Morondava.
Les opérateurs touristiques pourront tirer directement parti de ce centre d’interprétation pour inciter leurs clients à rester un ou deux jours de plus.

Le concept du centre d’interprétation (muséevezo)

Le centre d’interprétation ou le musée vezo constitue le « fer de lance » du projet. Il est le principal élément de valorisation de la culture vezo, il est la porte d’entrée du village de Bétania (l’appât) et constitue le point fort d’un concept susceptible de développer une activité touristique plus intense à Morondava.
Le musée joue un rôle de promotion de la culture vezo au sein d’un concept éco touristique plus complet (chambres et tables d’hôtes, circuits terrestres et mangrove, centre artisanal,…). Le concept général vis un double objectif économique : assurer des ressources complémentaires aux habitants de Bétania et développer l’activité touristique au sein de la commune urbaine de Morondava.
Il a semblé intéressant de situer le centre d’interprétation sur la pointe sud du village de Nosy Kely, près du quartier des pêcheurs , au bord du chenal menant à port Bébé, face au village de Bétania, et à proximité des complexes touristiques de Morondava. Le site proposé est un lieu de passage, intensément fréquenté par les touristes et les habitants de Bétania (donc lieu de rencontre), mais aussi la porte vers Bétania (cf. carte 4 et 5). Un terrain de 740 m² a été identifié. Il se situe sur la propriété de l’hôtel en construction Royal Palissandre. Le propriétaire est disposé à mettre à disposition sous forme d’une convention l’usage gratuit de ce terrain et d’une parcelle de mangrove.

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Table des matières

REMERECIEMENT
INTRODUCTION
1ère Partie : LE CADRE DE L’ETUDE
Chapitre I : LE TOURISME DANS LE MENABE
Section 1 : Les tendances actuelles
Section 2 : la plus value du projet : « la vitrine vezo »
Chapitre II : BETANIA UN SITE AUX POTENTIALITES REELLES
Section 1 : Une culture préservée aux portes d’une capitale régionale
1-1 La pêche
1-2 construction de pirogues et de boutres
1-3 Les fêtes traditionnelles
1- 4 La cuisine vezo
Section 2 : Un milieu naturel qui lutte pour préserver son originalité
Section 3 : Un terroir qui porte une histoire riche
Section 4 : Un artisanat riche et original
Chapitre III : LES COMPOSANTES DU PROJET
Section 1: Créer un centre d’interprétation pour attirer la curiosité
des touristes
1-1 : Le concept du centre d’interprétation (musée vezo)
1-2 : L’architecture du musée
1-3 : Le contenu du musée
1-4 : Les coûts d’investissement
1-5 : Les coûts d’équipement
1-6 : Les coûts de fonctionnement
1-7 : Budget d’exploitation
Section 2 : Ouvrir des circuits touristiques pour répondre à la demande
2-1 : Les attraits particuliers observés pendant les repérages
2-2 : Les attraits particuliers observés pendant les repérages
Section 3 : Aménager le village
3-1 : La gestion et l’élimination des déchets.
3-2 : La construction de WC et des bacs à ordure
3-3 : La construction de puits busés.
Section 4 : Création de Gîtes et Accueil touristiques
4-1 : Chambres d’hôtes ou centre touristique
4-2 : Repas chez l’habitant
Section 5 : valorisation de l’artisanat
Section 6 : Programmation
2e partie : PROBLEMATIQUE
Chapitre I: DES OBSTACLES REELS AU DEVELOPPEMENT DE L’ACTIVITE TOURISTIQUE A BETANIA
Section 1 : Un projet d’aménagement urbain et du littoral qui remet le concept en
question
Section 2 : Une communauté dont l’identité repose sur la mer et la pêche
Section 3 : Un environnement ingrat
3-1 : L’absence de commodités de base
3-2 : Un village peu entretenu
3-3 : Un équilibre écologique précaire
Section 4 : Une communauté insuffisamment préparée
Section 5 : Un contexte de développement touristique encore incertain
Chapitre II : PROBLEMES D’ORDRE EXTERNE LIES AU DEVELOPPEMENT TOURISTIQUE DANS LA REGION MENABE
3e partie : PROPOSITION DES SOLUTIONS
Chapitre I : DES DYNAMIQUES PORTEUSES
Section 1 : Une mobilisation qui s’amorce au niveau de la communauté
Section 2 : Des opérateurs intéressés
Section 3 : Des collectivités territoriales qui s’impliquent
Section 4 : Un concept touristique qui se développe et se complète
chapitre II : APPUI SOCIO ORGANISATIONNEL
Section 1 : S’organiser pour gérer par l’activité le développement du village
Section 2 : Fixer des règles
Section 3 : former les ressources humaines
3-1 : Formation sur la gestion des tables d’hôtes.
3-2 : Formation sur le guidage :
3-3: Formation sur l’apprentissage de la langue des touristes :
3-4 : Formation sur la sécurité.
3-5 : Formation d’amélioration sur les produits artisanaux.
3-6 : Formation sur la gestion des stocks et des trésoreries.
3-7 : Formation sur l’audit interne et contrôle comptabilité.
Section 4 : Mobiliser des partenariats
Section 5 : Assurer la Sécurité des piroguiers en mer
CONCLUSION
ANNEXES
Bibliographie

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