Des inégalités entre femmes et hommes persistantes
Origine et définition du concept d’égalité
Le terme d’égalité correspond à un « principe fondamental selon lequel chaque être humain est investi des mêmes droits et des mêmes obligations que les autres. […] On entend, par égalité entre les sexes, que les femmes et les hommes aient des conditions égales pour réaliser leurs pleins droits et leur potentiel et pour contribuer à l’évolution politique, économique, sociale et culturelle du pays, tout en profitant également de ces changements » . Ce concept d’égalité s’inscrit dans un processus historique débutant avec le christianisme, qui a posé le principe d’égalité des hommes devant Dieu. Par la suite, L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert énonce que la nature humaine est commune à tous les hommes, ce qui nécessite que chacun traite l’autre comme son égal. De fait, « l’égalité constitue à la fois un être et un devoir être » . Bien que les Lumières aient affirmé que la raison était propre aux êtres humains, on considère, au XIXème siècle, que les femmes sont pourvues d’une raison inférieure. En France, la Révolution a permis de tendre vers l’égalité, en ouvrant la voie aux revendications politiques des femmes et en corrigeant certaines discriminations à leur encontre. L’article premier de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme le caractère juridique de l’égalité. Cependant, il importe de faire la distinction entre égalité formelle et égalité réelle. En effet, la loi a pu générer ou renforcer certaines inégalités. C’est pourquoi des mesures différenciées vis-à-vis de certains groupes désavantagés ont été mises en place afin d’atteindre une égalité réelle. Force est de constater que les inégalités, caractérisées par une différence d’accès à des ressources sociales, persistent. On peut par exemple noter l’inégalité salariale entre femmes et hommes. Celles-ci sont moins payées et obtiennent des postes moins élevés pour les mêmes diplômes. Selon l’INSEE, en 2013, à poste et conditions d’activité équivalents, l’écart salarial entre femmes et hommes est légèrement inférieur à 10 % . Il convient de revenir sur ces inégalités pour mieux les combattre.
Exemples d’inégalités entre les sexes en France
La différence entre hommes et femmes se construit à partir d’un principe de division. Historiquement, est généralement réservé aux hommes ce qui relève de l’extérieur, de l’officiel, du public. Les femmes sont quant à elles davantage reléguées à la sphère privée, celle des travaux domestiques . En effet, elles effectuent la plus grande part du travail domestique et sont bien souvent celles qui s’arrangent en cas d’imprévu pour garder les enfants. Leurs métiers se situent bien souvent dans ce prolongement et relèvent des domaines du soin, de l’enseignement, des services. Bien que les femmes aient eu accès à un espace et des métiers auparavant réservés aux hommes grâce à l’éducation, elles restent bien souvent exclues des postes d’autorité et à responsabilité. Par ailleurs, « seuls 17 % des métiers, représentant 16 % des emplois, sont mixtes, au sens où la proportion d’hommes (ou de femmes) y est comprise entre 40 % et 60 % ; Cette faible mixité touche particulièrement les métiers peu ou moyennement qualifiés » . De plus, l’insertion professionnelle est meilleure pour les garçons que pour les filles alors que ces derniers ont des diplômes moins élevés.
Cette différence marquée entre femmes et hommes concernant le choix des métiers se retrouve aussi concernant le choix des filières. Alors que les filles sont celles qui réussissent le mieux scolairement, elle se dirigent vers des orientations moins « rentables » professionnellement. Les filières industrielles sont très majoritairement masculines alors que les filières tertiaires sont très majoritairement féminines. Les filles, minoritaires au sein de l’une de ces filières, sont souvent confrontées à des plaisanteries sexistes et une remise en cause de leurs compétences. Dans l’enseignement général, les filles sont majoritaires dans la section littéraire et minoritaires dans les sections scientifiques. Ces disparités se retrouvent aussi dans l’enseignement supérieur, où les femmes sont majoritaires en lettres et sciences humaines alors qu’elles sont minoritaires en sciences exactes et sciences de l’ingénieur. A l’origine de ces choix différenciés, P. Bourdieu affirme que « les filles incorporent sous forme de schèmes de perception et d’appréciation […] les principes de la vision dominante qui les portent à trouver normal, ou même naturel, l’ordre social tel qu’il est et à devancer en quelque sorte leur destin, refusant les filières ou les carrières d’où elles sont en tout cas exclues, s’empressant vers celles auxquelles elles sont en tout cas destinées ». Comprendre la cause des inégalités semble donc primordial.
A l’origine de ces inégalités : la socialisation de genre
Ces inégalités sexuées existent puisqu’elles s’enracinent dans un processus de socialisation de genre. On peut définir le genre comme « système de bicatégorisation hiérarchisé entre les sexes (homme / femme) et entre les valeurs et représentations qui leurs sont associés (masculin / féminin) » . Ainsi, bien souvent, on associe aux femmes des traits de caractère tels que la sensibilité, l’altruisme. A l’inverse, la force, la rationalité, la compétitivité ou encore le surinvestissement professionnel sont attribués aux hommes. Ces traits de caractère attribués aux femmes sont dévalués par rapport aux hommes. Le genre relève donc d’une construction sociale et, tel que le souligne si bien S. De Beauvoir, « on ne naît pas femme, on le devient ». P. Bourdieu parle d’un « travail collectif de socialisation du biologique et de biologisation du social » . De fait, on s’appuie sur les différences biologiques pour justifier l’ordre social et la relation de domination existante. De manière inconsciente, les individus ont incorporé « les structures de l’ordre masculin ». Le sociologue emploie le terme de « domination masculine », un effet de ce qu’il appelle « la violence symbolique » pouvant être illustrée par le fait qu’une femme souhaite souvent un conjoint plus âgé et plus grand qu’elle. La femme, sans s’en rendre compte, contribue alors à sa propre domination. La différence entre les sexes n’est donc pas naturelle. Elle s’enracine dans une perpétuation des stéréotypes de sexe, définis par N. Mosconi comme un « ensemble de traits et de caractères que l’on attribue automatiquement d’une manière rigide aux membres des catégories filles et garçons ».
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I – CADRE THEORIQUE DANS LEQUEL S’INSCRIT LA RECHERCHE
I- Des inégalités entre femmes et hommes persistantes
1- Origine et définition du concept d’égalité
2- Exemples d’inégalités entre les sexes en France
3- A l’origine de ces inégalités : la socialisation de genre
II- Des stéréotypes ayant des conséquences sur la construction sociale et identitaire de l’enfant.
1- Des valeurs et compétences transmises à travers des jouets « sex-typés »
2- Jouets d’enfants et métiers d’adultes : une suite logique ?
3- Transmission des stéréotypes et construction de l’identité sexuée
III-La question de l’égalité filles-garçons dans le cadre scolaire
1- Mixité scolaire et égalité des sexes au sein de la classe
2- Rôle de l’enseignant.e dans la construction des inégalités entre sexes
3- Rôle de l’institution dans la lutte contre ces inégalités
IV-Développer une pédagogie égalitaire
1- Remettre en cause sa pratique enseignante tout en proposant des activités afin de diffuser une culture commune de l’égalité
2- Prendre en compte la construction de l’identité sexuée afin de mener un travail fructueux
3- Faire évoluer les coins jeux dans la classe à l’école préélémentaire
PARTIE 2 – METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET RESULTATS
I- Préparation de la recherche
1- Contexte
2- Problématique et hypothèses
II-Présentation du projet et de la méthode de recherche
1- Analyse des coins jeux avant et après le projet
2- Mise en place d’une séquence d’enseignement sur le thème des métiers
III-Résultats de la recherche
1- Observation des coins jeux : y a-t-il présence ou non de stéréotypes ?
2- Retour sur les séances menées
3- Observation des coins jeux : y a-t-il eu une évolution des comportements ?
IV-Observations complémentaires et modification du dispositif suite aux résultats
1- Apports du projet
2- Observation des activités proposées sur les tables et pistes d’action
3- Modification du dispositif et nouvelles observations
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE 1 : Répartition entre filles et garçons dans la classe
ANNEXE 2 : Affichages et colliers utilisés au sein des coins jeux
ANNEXE 3 : Séquence d’enseignement
ANNEXE 4 : Photographies des coins jeux et des élèves en situation de jeu libre
ANNEXE 5 : Extrait de l’imagier des métiers
ANNEXE 6 : Analyse des dessins réalisés par les élèves
ANNEXE 7 : Tableau de concordance entre les dates des observations et les phases de la recherche
ANNEXE 8 : Tableaux regroupant l’ensemble des observations (17 observations)
RESUME