Des dispositifs d’aide qui peuvent s’appliquer aux élèves dyslexiques

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Diagnostic

Il existe plusieurs méthodes et outils pour poser le diagnostic de dyslexie.
Le Wechsler Intelligence Scale for Children, quatrième édition – W.I.S.C.-IV, permet le dépistage de troubles de nature psycho-pathologique. C’est un test qui permet d’évaluer l’efficience cognitive d’un enfant d’âge scolaire, de 6 à 16 ans et 11 mois. Suite à la passation du test, un chiffrage est donné, c’est le Quotient Intellectuel Total – Q.I.T., ici considéré comme une mesure de l’efficience cognitive (échelle verbale + praxico-logique).
A priori ce test n’a aucun rapport avec l’étude de la dyslexie, car en tant que trouble spécifique, elle ne présente pas de lien avec ce qui peut-être évalué par les sub-tests, puisqu’elle est mise en évidence par des scores significativement bas en résultat des tests de lecture. L’intervention d’un spécialiste des troubles des apprentissages scolaires paraîtrait plus adaptée à première vue, alors pourquoi faire appel à un psychologue ?
Initialement parce qu’avant de poser un diagnostic de dyslexie, il faut commencer par écarter les autres hypothèses explicatives plus simples telles qu’un dysfonctionnement pédagogique, des déficits sensoriels, ou éventuellement un retard mental.
Après la passation des différents sub-tests du W.I.S.C.-IV, on obtient l’efficience de l’élève dans des domaines divers, c’est alors qu’il est nécessaire de comparer l’efficience en lecture de l’élève à celle qui a été calculée dans ces autres domaines.
Cela pour faire apparaître un écart significatif entre ces scores ; si ce n’est pas le cas, il est possible d’attribuer l’échec en lecture à un retard intellectuel global.
De plus, l’intervention du psychologue en milieu scolaire est souvent réclamée par l’enseignant qui sait différencier la dyslexie d’un simple retard de lecture, bien qu’il ne soit pas habilité à énoncer un diagnostic. Ce rôle incombe au médecin scolaire, au psychologue scolaire ou à l’orthophoniste. Cette demande a lieu dans le but de mettre en évidence un fonctionnement particulier chez l’enfant, afin de pouvoir proposer des remédiations plus adaptées.
Or, mieux comprendre l’élève nécessite de l’accompagner durant une certaine période et de l’observer au cours de la passation d’un ensemble de tests psycho-métriques et de niveau scolaire (psycho-pédagogue au sein du R.A.S.E.D)8. (Jumel & Savournin, 2009).

Epidémiologie

Selon l’I.N.S.E.R.M. (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale), la dyslexie toucherait un peu moins de 5% des enfants de primaire. Cependant, peu d’études ont été menées pour juger de la prévalence de ce trouble.
Concernant les enfants en difficulté de lecture, environ un quart d’entre eux seraient atteints de dyslexie.
La dyslexie est un trouble à dominante masculine, en effet, 75% des personnes dyslexiques sont des garçons9. (Cahen, 2000).

Etiologie

Au niveau de l’étiologie de la dyslexie, de nombreuses propositions de causes envisageables ont été faites.
La conception organiciste est celle qui sera envisagée la première. Selon cette théorie, l’origine du trouble est soit neurologique soit héréditaire. Au sein même de cette conception, plusieurs causes sont envisagées :
– La possibilité d’une atteinte cérébrale, mise en avant par l’autopsie de patients alexiques. Ces patients présentaient des lésions corticales. Les médecins ont donc supposé la même atteinte chez les enfants dyslexiques. De nos jours, cette thèse a été abandonnée car il n’y a pas eu de preuve probante mise en avant pour la corroborer. Il existe plusieurs théories au sein même de la théorie de l’atteinte cérébrale.
* Premièrement, la théorie du « minimal brain damage » est en quelque sorte une version moderne de la thèse de l’atteinte cérébrale. C’est Mc Keith qui met en avant cette hypothèse de lésion cérébrale minime à la fin des années soixante. Dans un second temps, le mot « damage » a été remplacé par le terme « dysfunction » afin de ne pas affirmer l’existence d’une lésion qui n’existerait pas forcément. Cette théorie permettrait d’expliquer de nombreux cas de dysfonctionnements, tels la pré et la post-maturité, des traumatismes crâniens sans oublier la dyslexie. Cette approche comprend aussi les études sur les indices psychophysiologiques réalisées par le biais de tracés électro-encéphalographiques. Ceux-ci ont montré des zones hyperactives mais aussi des zones du cerveau déficitaires.
* La neuro-anatomopathologie concerne la recherche de lésions cérébrales. Elle a permis aux neurologues de s’accorder sur deux grands types d’anomalies chez les sujets dyslexiques. D’une part les anomalies au niveau microscopique et d’autre part les anomalies au niveau macroscopique. Certaines recherches ont également mis en avant une anomalie microscopique au niveau sous cortical, plus précisément des noyaux géniculés latéraux, où se trouvent les voies visuelles. Ces noyaux présentent, chez les personnes dyslexiques, une nette atrophie et une disposition en couche anormale. Ainsi la dyslexie serait engendrée par des difficultés perceptives.
– L’hérédité est une autre des théories qui constituent la thèse organiciste. Elle considère que les difficultés de lecture sont constitutionnelles. Cette théorie s’est traduite par la recherche d’antécédents familiaux. Il semble que l’apparition de difficultés en lecture soit plus courante dans les familles déjà touchées par la dyslexie mais les généticiens s’accordent sur le fait que l’origine de la dyslexie n’est pas purement héréditaire. De plus, il est nécessaire de rappeler que de telles études tiennent peu compte des facteurs environnementaux.
– La théorie du retard de maturation postule que la dyslexie serait liée à la maturation incomplète de certains éléments cérébraux. La possibilité d’une mauvais transfert inter-hémisphérique des informations est aussi envisagée. Cependant, au regard du manque de précision des indices neurologiques, il n’est pas possible d’affirmer que c’est seulement dans cet aspect que résident les
difficultés en lecture.
Donc, bien qu’il semble probable que les difficultés en lecture aient des bases organiques, il n’a pas été prouvé que tous les élèves dyslexiques souffrent d’un quelconque dysfonctionnement cérébral.
Les déficits instrumentaux et cognitifs constituent une autre hypothèse quant aux causes de la dyslexie. C’est un courant qui se développe à la fin de la seconde guerre mondiale et par lequel la position médicale va peu à peu céder sa place aux recherches en psychologie de l’éducation. Dans le cadre de ces travaux, différentes théories seront proposées :
– Les théories relatives à l’intelligence, selon lesquelles Q.I. et réussite en lecture sont corrélés. Donc plus un enfant serait intelligent, plus il apprendrait facilement. Or, on ne peut retenir cette théorie dans le cadre de la dyslexie puisqu’elle est définie comme étant « un trouble de l’apprentissage de la lecture survenant en dépit d’une intelligence normale ».
– Les hypothèses sur la perception ont d’abord mis en cause un trouble global de discrimination des formes dans la dyslexie ; celui-ci serait donc à l’origine des difficultés de reconnaissance des lettres et des mots. Mais par la suite, les résultats d’autres études ont montré chez les dyslexiques des performances de traitement visuo-spatiale égales ou supérieures à celle des sujets témoins. Actuellement, les recherches remettent en cause le déficit perceptif au profit d’un déficit cognitif plus large, qui porterait sur des mécanismes plus fins tels que la mémoire à court terme. Dans ce domaine, il a été mis en évidence que le recours aux mécanismes d’auto-répétition semble favoriser l’activité mnémonique de l’enfant dyslexique.
– Au niveau du langage, le déficit linguistique des enfants dyslexiques est mis en avant par les sub-tests verbaux de la W.I.S.C.-IV. Ce déficit linguistique touche en priorité la fluidité verbale, le vocabulaire, l’usage d’abstraction et la complexité structurale des phrases. Les recherches ont permis de conclure à la probabilité d’un déficit linguistique global qui porterait à la fois sur les aspects sémantiques, syntaxiques et phonétiques du langage.
Pour conclure sur la théorie des déficits cognitifs, il est possible de dire qu’elle repose sur l’idée selon laquelle la cause des troubles dyslexiques serait organique. Mais les difficultés spécifiques des dyslexiques remettent en question la base physiologique du déficit cognitif qui serait en cause dans la dyslexie.
Une autre position théorique à propos de l’étiologie de la dyslexie est celle des troubles affectifs. C’est une approche qui s’est développée grâce aux institutions extra-scolaires dédiées à la prise en charge d’enfants en difficulté, comme les Centres Psycho-Pédagogiques (C.P.P.) et les Centres Médico-Psycho-Pédogogiques (C.M.P.P.). Au sein de cette position se situent différentes conceptions :
– Dans la conception psychanalytique, les facteurs étrangers à l’enfant sont pris en compte. Il s’agit ici de comprendre les origines de la difficulté d’apprentissage par l’analyse des relations objectales de l’enfant. Cette conception présente donc beaucoup de causes qui pourraient mener à un trouble d’acquisition de la lecture. Nonobstant, les études menées dans ce cadre portent surtout sur l’identification des facteurs génétiques, ou économiques qui pourraient intervenir dans le développement du trouble dyslexique. Cette conception fait donc apparaître la dyslexie comme étant la conséquence de l’infiltration de l’apprentissage de la lecture par un conflit envahissant pouvant être conscient ou inconscient.
– La dyslexie serait ainsi un symptôme névrotique. En effet, comme l’a dit Freud, « toute inhibition que s’impose le MOI peut être nommée symptôme », le symptôme est donc perçu comme étant l’émergence du conflit évoqué dans la théorie psychanalytique.
Cette approche théorique par la psychanalyse a pour inconvénient de proposer des facteurs très hétérogènes pouvant être la cause de la dyslexie. Ainsi, les recherches menées sur le sujet ont permis de faire émerger de nombreux facteurs étiologiques mais très peu de recoupements peuvent être opérés entre ces différents résultats.
La théorie du handicap socio-culturel comme cause de la dyslexie considère les différences entre les enfants dans le domaine des acquisitions scolaires en terme d’inégalités. Ici, l’échec des élèves serait le résultat du mode de vie familial dans les milieux considérés comme modestes. Les enfants issus de ces milieux seraient handicapés par rapport aux autres dans leur développement psychologique. Ils seraient restreints dans leur accès au savoir.
Mais les recherches ayant eu lieu sur la base de cette théorie sont constituées pour la majorité de comparaisons entre deux groupes d’enfants. Un groupe dont les membres sont issus d’un milieu social « favorisé » et les autres issus d’un milieu « défavorisé ». Pour que ces résultats soient valides, il faudrait que les analyses sociologiques soient affinées et qu’elles présentent les milieux « défavorisés » comme étant différents des milieux « favorisés », et non inférieurs.
La thèse de l’étiologie pédagogique dans la dyslexie est la dernière possibilité évoquée par les chercheurs. Elle place l’Ecole en tant que responsable de l’échec scolaire en sa qualité d’institution responsable de l’enseignement. Il y aurait effectivement des variables scolaires qui seraient en cause dans les résultats obtenus par les élèves dans l’apprentissage de la lecture. Donc, l’école aurait une part de responsabilité dans le développement de la dyslexie. Les recherches sur cette théorie ont porté sur différents éléments importants du Système scolaire :
– Au niveau du type de pédagogie, il a été mis en avant que celui-ci n’influençait pas les résultats en lecture. Cependant, la méthode pédagogique mise en place dans une classe est en corrélation directe avec les caractéristiques personnelles de l’enseignant. Donc il paraît nécessaire d’étudier cet élément.
– Du côté de l’enseignant, il a été prouvé que les résultats des élèves corrélés avec le niveau d’expertise de l’enseignant. En effet, plus l’enseignant est expérimenté, meilleurs sont les résultats de l’élève.
L’enseignant peut aussi influer sur les performances de l’élève en lecture du point de vue de l’effet Pygmalion. C’est à dire que si l’enseignant a des attentes élevées par rapport à un élève, celui-ci réussira d’autant plus les tâches qui lui sont assignées, alors qu’à l’inverse, si le maître place peu d’attentes dans un élève, ce dernier a plus de chances d’échouer dans les tâches désignées.
Des travaux ont aussi montré l’existence d’une relation entre les interactions verbales maître/élève et ses performances en lecture.
Donc les recherches qui visent à trouver les causes de la dyslexie dans l’institution scolaire fournissent des résultats hétérogènes10.(Bellone, 2003).

Dyslexie et échec scolaire

Les élèves dyslexiques nécessitent la mise en place de différents dispositifs, cela peut aller du simple étayage à des dispositifs relevant de l’adaptation. Cela dépend notamment du degré du trouble dyslexique que présente l’élève.
En premier lieu, l’enseignant peut mettre en place un dispositif d’étayage. Cette notion désigne l’ensemble des interactions entre l’adulte et l’élève, où l’aide de l’adulte permet à l’élève d’apprendre à organiser ses conduites. Cela pour qu’il puisse ensuite répondre seul à un problème qu’il ne savait pas résoudre au départ. Cet étayage aurait six fonctions, définies par Bruner J.-S. en 1983 :
– L’enrôlement : il correspond à faire susciter à l’élève de l’intérêt pour la tâche et l’y faire adhérer.
– La réduction des degrés de liberté qui consiste à simplifier la tâche pour la mettre à la portée de l’apprenant ;
– Le maintien de l’orientation : garanti par la proposition d’une tâche motivante afin de conserver l’intérêt de l’élève ;
– La signalisation des caractéristiques déterminantes : c’est l’ensemble des gestes qui indiquent à l’enfant les éléments nécessaires à la résolution de la tâche ;
– Le contrôle de la frustration : l’enseignant va mettre en place des actions pour éviter que les difficultés rencontrées ne deviennent des échecs qui aboutiraient à une démotivation ;
– La démonstration ou « présentation de modèles » : c’est-à-dire exécuter la tâche et la faire avec l’élève à partir de ses propres propositions.
Gombert A. met en avant des Profils pédagogiques dans le Cadre d’un dispositif pilote dans le Département des Hautes-Alpes16. (Gombert & al., 2008).
Celui-ci a permis à 24 élèves dyslexiques sévères (12 dans le primaire et 12 collégiens) de bénéficier d’une double prise en charge Santé – Education nationale à la rentrée 2003 et ce pendant deux années scolaires. Ces élèves étaient soit (dé)scolarisés dans des établissements spécialisés mais non adaptés à la prise en charge de leur trouble. Ce dispositif consistait à les accueillir dans une maison d’enfants à caractère sanitaire où ils recevaient des soins adaptés la moitié du temps, ils passaient l’autre moitié du temps dans des classes ordinaires (une demi-journée pour les élèves de primaire, le matin ou l’après-midi, et selon les disciplines pour les collégiens). L’intégration se faisant sur la base d’un élève par classe, pour favoriser l’aspect socialisant de la scolarisation en milieu ordinaire.
Suite à la mise en place de ce dispositif, des entretiens ont été menés avec les enseignants des classes où ces élèves avaient été accueillis. Cela dans le but de dégager les pratiques qu’ils avaient mises en place.
Après le recueil des données, une analyse factorielle a permis de dégager quatre « profils » d’enseignants en ce qui concerne la mise en œuvre des gestes pédagogiques d’adaptation envers les élèves accueillis : le profil « inclusif », le profil « intégratif », le profil « motivationnel » et le profil « attentionnel ».
Le premier profil concerne des gestes plutôt centrés sur le niveau cognitif de l’élève. Les enseignants appartenant à cette catégorie disent qu’ils individualisent les apprentissages et mettent en place l’aide entre pairs, privilégiant l’aspect relationnel. Ils déclarent tenir compte du potentiel d’apprentissage de l’élève plus que de chercher à les mener vers la norme scolaire.
Dans ce cas ce serait plutôt l’enseignant qui s’adapterait à l’élève dyslexique, et non l’élève qui devrait s’adapter aux cours. Il prendrait en compte les besoins éducatifs particuliers de l’élève en situation de dyslexie sévère au quotidien. Cela aussi bien dans la préparation de ses séances que dans les démarches d’apprentissage mises en œuvre dans la classe.
Ces enseignants pratiquent peu l’évaluation. Ce profil pédagogique d’adaptation tendrait vers le modèle inclusif de scolarisation des élèves en situation de handicap.
Le second profil dégagé fait davantage référence au modèle intégratif de scolarisation des élèves en situation de handicap. Chez les enseignants concernés, les gestes sont axés principalement sur les apprentissages.
L’élève est amené vers les apprentissages du reste de la classe par différents moyens tels que la différenciation pédagogique, l’adaptation des évaluations ou l’aide méthodologique. Il y a donc retour vers la norme scolaire, au contraire du premier profil plus inclusif.
Dans le troisième profil, ce sont les aspects motivationnels qui sont mis en avant. Les gestes d’adaptation pédagogique sont plutôt centrés sur l’adaptation des consignes, des évaluations, ainsi que sur les pratiques de valorisation de l’élève.
Le professeur encourage l’élève en mettant davantage en avant ses réussites plutôt que ses échecs.
Enfin, le dernier profil englobe les gestes pédagogiques d’adaptation qui modifient le cadre de travail de la classe, comme le placement de l’élève dans la salle, ou les outils mis à disposition.
Il y a mise en place d’aides méthodologiques et de pratiques de guidage dans la réalisation de la tâche. Ici, ces gestes professionnels viserait plutôt à rendre l’élève attentif tout au long de la tâche scolaire.
Il est possible de lier ces profils aux fonctions de l’étayage définies par Bruner J.-S. Ainsi, le « profil attentionnel » rassemble des gestes qui ont pour fonction de capter et maintenir l’attention des élèves, cela a un lien avec le maintien de l’orientation.
Quant au « profil motivationnel », les gestes d’adaptation des consignes et de valorisation de l’élève auraient plutôt une fonction d’enrôlement dans la tâche et de contrôle de la frustration.
Pour finir, les profils « intégratif » et « inclusif » regroupent tous deux des gestes qui visent à la réduction des degrés de liberté et au contrôle de la frustration.
En effet, le « profil inclusif » partant du potentiel des élèves pour ensuite individualiser les apprentissages, et la différenciation des moyens d’accès au savoir propre au « profil intégratif », concourent à la fonction suivante : simplifier la tâche pour la mettre à portée de l’élève.
Ce qui varie entre ces deux profils, c’est le rapport à la norme de la classe, et non la fonction des aides pédagogiques.
Dans le premier cas dit « inclusif », le but est d’amener l’élève vers les apprentissages qu’il n’a pas pu effectuer antérieurement, sans le faire forcément en même temps que le groupe-classe.
Dans l’autre cas dit « intégratif », il s’agit plutôt de ramener l’élève vers la norme de la classe17. (Gombert, 2008).

Des dispositifs d’aide qui peuvent s’appliquer aux élèves dyslexiques

P.P.R.E., P.P.S. et P.I.S.

Un premier dispositif d’aide mis en place dans les cas de dyslexie est constitué par les Programmes Personnalisés de Réussite Educative (P.P.R.E.). Ils s’inscrivent dans un projet d’aide aux élèves en difficulté scolaire. Ils consistent en une programmation d’activités à conduire pour atteindre des objectifs fixés afin d’amener l’élève à s’inscrire dans la réussite scolaire. D’ailleurs, la circulaire n°2006-138 du 25 août 2006 stipule que le P.P.R.E. est « constitué d’une action spécifique d’aide et le cas échéant, d’un ensemble d’autres aides coordonnées. Pour en garantir l’efficacité, cette action spécifique est intensive et de courte durée »
Ce dispositif concerne les élèves maintenus dans une classe, dans ce cas, le P.P.R.E. est préparé en juin, il définit les compétences sur lesquels l’enseignant devra mettre l’accent afin d’aider l’élève. Il peut également être mis en place en cours d’année pour les élèves qui auraient des difficultés avec les éléments du socle commun et pour qui les aides dispensées dans le simple cadre de la différenciation ne suffiraient pas.
Le P.P.R.E. se présente sous la forme d’un document clair, concis et précis. Il engage l’enfant, ses parents, son enseignant et le chef d’établissement. Il est théoriquement limité à huit semaines mais peut-être reconduit. Il évolue avec les progrès de l’élève. Son installation met en jeu plusieurs étapes :
1. Un entretien avec les parents et l’enfant pour informer et expliquer la démarche, cela permet aussi l’implication de ces acteurs dans le P.P.R.E.
2. La passation d’évaluations pour cibler plus précisément des difficultés repérées.
3. L’analyse de ces évaluations pour repérer les besoins de l’élève.
4. Cette analyse va permettre de fixer les objectifs à atteindre traduits en compétences du socle commun.
5. Cela permet ensuite de clarifier les moyens qui vont être mobilisés pour atteindre ces objectifs (quand ? , où ? , avec qui ? , comment ? ).
6. La date d’échéance du P.P.R.E. va être fixée.
7. Enfin, un bilan des aides qui ont été dispensées à l’élève permettra d’ajuster des objectifs pour nouvelle prise en charge si elle a lieu d’être.
Toutes les étapes de cette démarche sont reportées sur un document papier qui sera signé par le directeur en présence des parents, voire des différents partenaires impliqués dans l’aide dispensée à l’élève présentant des difficultés18. (Deman, 2010).
L’objectif du P.P.R.E. est la prévention et la remédiation de la difficulté scolaire. C’est dans ce but qu’il doit être intensif, de courte durée et formalisé dans un contrat qui définit les objectifs visés. C’est ce contrat qui lie l’élève, l’école et la famille avec l’objectif pour toutes les parties de remédier aux difficultés de l’enfant. Il arrive souvent qu’il soit consacré à la résolution de problèmes comportementaux car l’échec scolaire est souvent lié au décrochage19. (Raulin, 2012).
Le Projet Individuel de Scolarisation (P.I.S.) a été définit par la circulaire interministérielle n°2002-24 du 31 janvier 2002 parue dans le bulletin officiel n°6 du 7 février 2002. Il est mis en place afin d’assurer la continuité du parcours scolaire des élèves atteint d’un trouble spécifique du langage oral ou écrit. Il réunit autour de l’élève ses partenaires tels que les parents, les enseignants, les rééducateurs. Cela pour être sûr d’aller dans le même sens et installer une relation de confiance. Ainsi, la mauvaise image scolaire de l’élève dyslexique sera abandonnée au profit du ciblage de ses besoins et de sa mise au centre des discussions20. (Wittrant, 2003).
Le troisième dispositif qui peut-être appliqué à l’élève dyslexique est le Projet Personnalisé de Scolarisation (P.P.S.), définit par la loi n°2005-102 du 11 février 2005. Toujours selon Isabelle Deman, il relève de l’obligation pour la scolarisation des élèves handicapés. Ce dispositif est préalable à l’inscription à la Maison Départementale des Personnes Handicapées (M.D.P.H.), et il est mis à jour une fois par an. C’est l’enseignant référent qui a en charge le parcours scolaire de l’élève qui veille à la cohérence du projet, il est lien entre la M.D.P.H. et l’école. Les parents, le directeur, les enseignants, le médecin scolaire, l’assistante sociale, les personnels du R.A.S.E.D. et autres intervenants extérieurs constituent l’Equipe de Suivi de Scolarisation (E.S.S.) qui rédige le P.P.S. Lors de leurs réunions, ils évaluent les besoins de l’enfant, notamment si son cas nécessite la présence d’un Auxiliaire de Vie Scolaire Individuel (A.V.S.-I.). L’E.S.S. constitue une étape importante car elle permet aux différents acteurs de se rencontrer et donc d’instaurer une relation de coopération.
La circulaire n°2006-126 du 17 août 2006 précise les modalités de la mise en œuvre du P.P.S., elle définit les établissements scolaires de référence. C’est l’établissement scolaire ordinaire le plus proche du domicile de l’élève et cela même si le P.P.S. amène l’élève à fréquenter un autre établissement scolaire. C’est également ce texte qui définit la composition de l’équipe de suivi de scolarisation ainsi que le rôle de l’enseignant référent. (cf. partie III Que dit la loi ?).
Avant l’émergence de ces dispositifs, il n’était pas rare que soit mis en place pour le suivi des enfants dyslexiques une autre forme de prise en charge qui résidait dans la mise en place d’un P.A.I. (Projet d’Accueil Individualisé). Or, ce dispositif est aujourd’hui délaissé au profit de ceux cités précédemment car il n’était pas adapté au trouble dyslexique. En effet, ce type d’aide vise plutôt la mise en place au sein de l’école d’une continuité au niveau de soins relevant du secteur médical, or, ce n’est pas de ce type d’aide dont a besoin l’élève dyslexique.

Etat des lieux de la prise en charge de la dyslexie à l’école

La prise en charge en France ou le sentiment d’abandon des parents

Il semble que malgré l’état actuel de la législation concernant l’accueil d’enfants dyslexiques dans les classes, des difficultés persistent.
Lors des démarches que j’ai entreprises pour la rédaction de ce mémoire, j’ai eu la chance d’être mise en contact avec l’APEDYS (Association de Parents d’Enfants DYSlexiques). J’ai ainsi eu l’occasion d’assister à une de leur assemblée générale où certains des parents présents ont consenti à me faire partager leur expérience.
Ces récits ont mis en avant une réelle difficulté de la part des parents à faire reconnaître le trouble de leur enfant, les paragraphes suivant vont exposer les idées saillantes qui ont été évoquées lors de cette entrevue.
Tout d’abord, il est courant que les parents perdent en moyenne trois ans avant de comprendre que leur enfant est atteint de dyslexie. Cela peut être attribué à un manque d’information des enseignants, ainsi que des autres acteurs tels que les médecins et les psychologues. Cela peut prendre encore plus de temps pour les familles défavorisées et qui ne s’adressent pas aux associations spécialisées (telles qu’APEDYS)22. (Conte, 2000).
Ainsi, il n’est pas rare que des enseignants mettent totalement de côté l’hypothèse de la dyslexie en minimisant les difficultés de l’enfant. Dans ces cas ils peuvent énoncer des avis comme ceux-ci : « ça va venir, votre enfant manque juste encore de maturité… ». Cela est vécu comme une perte de temps par les parents qui ne se sentent de ce fait pas écoutés et trouvent l’enseignant peu vigilant, alors qu’il peut ne s’agir que d’un manque de sensibilisation de l’enseignant au problème de la dyslexie.
Puis, en plus du diagnostic, s’ajoute le temps nécessaire à la mise en place d’un dispositif d’aide adapté à l’élève dyslexique. Du côté des parents, cela nécessite également de faire le « deuil de l’enfant idéal », même si parfois le diagnostic est vécu comme un soulagement puisqu’il permet de mettre enfin un mot sur la difficulté de l’enfant.
Cependant, un des problèmes rencontré dans la reconnaissance de la dyslexie en tant que facteur de la difficulté scolaire est qu’elle nécessite d’être faite par le centre du langage, or il n’est pas aisé d’y avoir un rendez-vous, et sans cela, ni reconnaissance ni prise en charge du trouble ne sont possibles. Ce problème renvoie aussi à la lourdeur des démarches à entreprendre pour les parents d’enfants dyslexiques. En effet, il faut remplir beaucoup de papiers pour la prise en charge de son enfant, et une fois qu’un dispositif est mis en place, il faut recommencer les formalités pour l’année suivante. Si bien que les parents se sentent toujours pris au piège de la dyslexie, elle devient un problème du quotidien pour toute la famille.
Les parents mettent aussi en lumière que les élèves dyslexiques manquent d’aide dans le cadre de l’école, par exemple, les enseignants ne différencient pas forcément le travail pour eux. Il semble qu’il y ait également un problème au niveau de la communication entre enseignants, en effet, les élèves sont obligés d’expliciter leur trouble à chaque changement de classe lorsque l’équipe enseignante ne communique pas, cela pose également problème lorsque les enseignants ne sont pas en contact avec l’orthophoniste. La communication entre les différents acteurs semble donc être un facteur essentiel pour une prise en charge adaptée de l’élève dyslexique.

Le Royaume-Uni ou un système scolaire différencié

Le Royaume-Uni a un système scolaire bien différent du nôtre en bien des aspects. J’ai eu l’occasion de l’observer dans le cadre du stage en pratique accompagnée de trois semaines que j’ai pu faire dans une école anglaise dans la ville d’Oxford. J’ai eu la chance de participer à cette expérience unique grâce à un échange entre l’IUFM des Pays de la Loire et l’Oxford Brookes University.
Il y a notamment de grosses différences au niveau de la prise en charge de la difficulté scolaire entre les deux pays. Tout d’abord, le système scolaire du Royaume-Uni met à disposition plus de moyens que le système français sur cette question, notamment des moyens humains. En effet, les écoles anglaises bénéficient de personnels spécialisés qui prennent en charge uniquement les élèves en difficulté scolaire, que ce soit des élèves récemment arrivés dans le pays, des élèves ayant des difficultés ponctuelles ou bien des difficultés plus durables, comme c’est le cas avec les élèves dyslexiques.
Ces intervenants viennent sur le temps ordinaire de la classe et mènent des activités individuellement avec les élèves. Ils s’isolent dans une pièce dédiée à ces ateliers (dont la photographie constitue l’annexe 1) avec plusieurs boxes adaptés aux différentes difficultés qui peuvent être présentées par les élèves.
J’ai eu l’occasion d’observer une séance menée par une intervenante spécialisée dans la dyslexie avec une élève présentant ce trouble. L’annexe 2 est une photographie du boxe dans lequel s’est déroulée la séance.
Les activités menées durant ces séances sont les suivantes : on travaille sur un son, il faut trouver le mot intrus parmi une liste de mots présentant le son en question, les mots intrus sont de plus en plus ambigus, puis il faut orthographier certains de ces mots à l’aide de lettres magnétiques, la manipulation des lettres favorise le lien entre l’ouïe et la kinesthésie, en effet le lien entre le son et la lettre se fera mieux si cela passe également par le toucher. Puis, à la fin de la séance, l’élève choisit un petit album et en lit un extrait. Ces albums sont classés par niveau de difficulté 1, 2 ou 3 et c’est l’élève qui décide, conjointement avec l’intervenante, lorsqu’elle peut passer au niveau suivant.
En classe, l’enseignante apportait également une attention particulière à l’élève dyslexique en question. En effet, elle avait instauré un tutorat entre élèves, à chaque fois qu’il y avait une consigne, c’était le camarade assis à côté d’elle qui la lisait à l’élève dyslexique. Cela était devenu un automatisme. Une autre stratégie mise en place par l’enseignante au quotidien était de donner un papier vitrail jaune à l’élève car l’utilisation d’un filtre posé sur un texte en facilite la lecture par l’enfant dyslexique.

Analyse des entretiens

Présentation du cas

Dans l’optique de la création d’une monographie, j’ai mené des entretiens semi-directifs individuels avec un élève dyslexique, sa mère, son orthophoniste et son enseignante (les retranscriptions de ceux-ci constituent l’annexe 3). Le but était de rendre compte de leur expérience à propos de la dyslexie et plus particulièrement de la prise en charge de cet enfant en particulier. Afin de bien comprendre les éléments saillants que je vais relever dans l’analyse de ces entretiens, il convient en premier lieu de présenter le cas de l’élève sur lequel ce centrera cette étude.
K. a été diagnostiqué comme souffrant d’une dyslexie-dysorthographie sévère lorsqu’il était en CE2. Il présentait des difficultés à discriminer certaines lettres qui ont été repérées dès le CE1. C’est d’ailleurs un niveau où il a été maintenu une année supplémentaire. Aucun signe qui aurait laissé présager ce trouble n’avait été décelé dans sa scolarisation à l’école maternelle. Cependant, il a changé d’école entre le CP et le CE1, donc il se peut qu’un manque de communication entre les deux écoles soit à l’origine de la découverte des difficultés de K. à partir du CE1.
L’orthophoniste qui a diagnostiqué K. l’a ensuite suivi pendant trois ans. Puis, sa mère s’est tournée vers une autre orthophoniste car elle n’avait pas l’impression que le suivi était bénéfique pour K. La prise en charge de cette dernière orthophoniste, qui le suit depuis un an et demi, semble être plus adéquate au cas de K.
Aujourd’hui, K. est en CM2, il bénéficie d’une prise en charge par le R.A.S.E.D. (Réseau d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté) au sein de son école. Un P.P.R.E. a également été mis en place pour coordonner les actions des partenaires qui s’occupent de lui. Une demande d’A.V.S.-i (Auxiliaire de Vie Scolaire individuelle) est en cours, cependant, l’Inspection Académique n’y a pas encore donné une suite favorable.
A l’extérieur de l’école, il est suivi par le centre du langage où il est reçu de manière régulière. Il consulte aussi un orthoptiste et verra bientôt un ergothérapeute pour apprendre à se servir d’un ordinateur.

Mon ressenti lors de la passation des entretiens

La passation d’un entretien est un moment privilégié entre la personne interrogée et celle qui pose les questions. En effet, elle est le théâtre où s’expriment beaucoup d’émotions qui ne sont plus visibles une fois l’entretien retranscrit.
Néanmoins, je crois qu’il est important d’y accorder de l’importance. Lors du déroulement de l’entretien avec la mère de l’élève dyslexique que j’ai eu la chance de rencontrer, j’ai ainsi que pu me rendre compte que celle-ci avait un réel besoin de s’exprimer sur son expérience à propos de la dyslexie de son enfant. Cela se traduit notamment par la durée de l’entretien, en effet, c’est celui qui a duré le plus longtemps (36,54 minutes contre 17,08 minutes, 14,08 minutes et 30,20 minutes pour les autres).
Il me paraît également important de souligner que lorsqu’elle parlait des nombreuses démarches administratives qu’elle avait menées, sa voix prenait une intensité plus grave, ce qui révèle la lourdeur que cette tâche à dû représenter.
En ce qui concerne l’entretien avec K., j’ai eu l’impression que chacune de ses réponses était profondément réfléchie, à mon sens, cela témoigne d’une vraie prise de recul par rapport à la dyslexie et donc d’une grande maturité pour son âge. La dyslexie a peut-être contribué au développement de cette maturité chez K., en effet, un enfant confronté à une telle épreuve aussi tôt dans sa scolarité peut être encouragé à réfléchir à des choses auxquelles les autres enfants de son âge ne souffrant pas de dyslexie ne pensent même pas.
Je n’ai ressenti aucune émotion particulière lors des entretiens avec l’enseignante et l’orthophoniste. Cela peut s’expliquer par le fait que ce n’est pas leur vie personnelle qui est touchée par la dyslexie, ainsi, elles peuvent mettre une distance lorsqu’elles parlent de ce trouble et de la manière dont elles le gèrent dans leur vie professionnelle.

L’accueil du diagnostic

La réaction des intervenants à l’annonce du diagnostic est un facteur qui peut influencer la prise en charge de l’élève dyslexique. Dans le cas de K., cette annonce à été une source de soulagement pour lui, en effet, il dit s’être rendu compte des ses difficultés et pour lui, le diagnostic a été synonyme de l’arrivée imminente d’une aide adaptée (cf. annexe 3, p.69).
Au contraire, sa mère a avoué avoir été « désemparée » suite à ce diagnostic (cf. annexe 3, p.58). Cela venait du fait qu’elle méconnaissait la dyslexie, elle ne savait donc pas comment aider efficacement son enfant. De plus, elle s’est sentie peu entourée au départ par l’enseignante et l’orthophoniste qui s’occupaient de son fils à l’époque. Cela était également dû à une mauvaise connaissance de la dyslexie et des stratégies à mettre en place pour aider l’élève dyslexique de leur part. Ce n’est qu’ensuite, lorsque son fils a bénéficié d’une prise en charge adaptée, qu’elle a pu mieux réagir face à son trouble et réellement comprendre que ce diagnostic allait permettre de lui apporter une aide adaptée.
Cela est cohérent avec ce qu’avaient évoqué les membres de l’association APEDYS (cf. partie IV.1 p.33). En effet, le parent doit d’abord se faire à l’idée que son enfant n’est pas parfait (« deuil de l’enfant idéal »), mais ce diagnostic peut aussi s’avérer être un soulagement puisqu’il permet de comprendre d’où viennent les difficultés de l’enfant et donc de lui apporter des aides adaptées. Lorsque le diagnostic de dyslexie a été annoncé à l’enseignante qui était à l’époque celle de K., au dire de la mère de K., sa réaction n’a pas témoigné d’une réelle volonté d’aide envers l’élève dyslexique. Son aide s’est axée sur de petites stratégies qui entrent plutôt dans le cadre de la différenciation pédagogique, aucun projet d’aide n’a été formalisé. Aujourd’hui les choses sont très différentes notamment grâce à l’instauration du P.P.R.E. et à une réelle sensibilisation à la dyslexie qui a été menée dans cette école grâce à la volonté des enseignantes. L’enseignante de la classe où est scolarisé K. cette année s’implique réellement dans la prise en charge de son trouble, elle n’a pas été inquiète lorsqu’elle a su qu’elle allait l’accueillir dans sa classe. Il est possible de penser que c’est aussi lié au fait que la dyslexie est un sujet bien connu à l’école, du fait de l’accueil antérieur d’enfants dyslexiques (à un niveau plus faible que K., certes) et du fait qu’une des enseignantes à elle-même des enfants dyslexiques. Cela a sûrement contribué à la sérénité de l’enseignante à l’idée d’accueillir K. dans sa classe.
Donc, l’accueil du diagnostic par les différents acteurs dépend en partie de leur connaissance de la dyslexie et du degré de nécessité de l’aide à apporter à l’élève. En effet, plus les acteurs méconnaîtront la dyslexie, plus ce trouble leur fera peur. Plus les difficultés seront visibles, et donc plus elles nécessiteront des aides, plus le diagnostic connaîtra un bon accueil, il sera de ce fait perçu comme un moyen d’apporter et d’adapter les aides nécessaires.

Le rejet de l’enfant dyslexique

Les entretiens mettent en évidence qu’il existe un forme de rejet à l’égard de l’élève dyslexique. C’est ce que la mère de K. évoque dans l’entretien qu’elle m’a accordé. Cependant, elle ne l’affirme pas ouvertement, elle commence d’abord par dire de la dyslexie que « ce n’est pas une maladie », puis elle évoque ensuite un suivi par la M.D.P.H., donc relatif au handicap, puis elle explique que ce trouble « fait partie des handicaps » mais que les dyslexiques « ne sont pas des gens handicapés ». Ensuite, elle dénonce la perception que la société a du handicap et de la personne handicapée, ainsi que le manque d’aide apportée à ces personnes. Elle fait comprendre qu’elle pense que la société n’a pas assez d’admiration pour les personnes qui se débattent au quotidien avec leurs difficultés (cf. annexe 3, p.58 à 68).
Nonobstant, bien qu’au fil de l’entretien, elle semble admettre que la dyslexie est un handicap, elle termine tout de même par stipuler qu’il n’y a « pas de honte à être handicapé ou à avoir des difficultés », de cette manière, elle fait comprendre que pour elle, son enfant n’est pas handicapé, qu’il présente juste des difficultés. Donc, il semble qu’il soit difficile pour un parent d’admettre que son enfant soit étiqueté comme étant handicapé, cela se remarque par la réticence à utiliser le mot « handicap » dans le cadre de la dyslexie. Cela est probablement dû au fait que la mère veut protéger son enfant, en effet, elle met en avant la stigmatisation des personnes handicapées, donc admettre que son enfant présente un handicap serait synonyme de stigmatisation pour lui. La mère de K. évoque donc un rejet de la part de la société.
A l’échelle de K., ce rejet s’est matérialisé par certaines moqueries de la part de ses camarades d’école. D’ailleurs, K. n’évoque cela qu’à la fin de l’entretien (cf. annexe 3 p.72), sûrement qu’il lui était plus facile de parler de cette conséquence de son trouble après avoir été mis en confiance par les échanges que nous avions eus précédemment que de me confier ces difficultés dès le début de l’entretien. Cela met donc en jeu une composante émotionnelle dans le quotidien de l’élève dyslexique à l’école, en effet, savoir qu’on va se moquer de lui s’il commet des erreurs ajoute encore aux difficultés liées à son trouble. De plus, cela ne permet pas à l’enfant de créer des liens d’amitié avec les autres élèves de sa classe, il ne sera donc pas dans une situation de sécurité affective optimale. Fort heureusement pour K., une intervention de son orthophoniste dans sa classe a permis de stopper ces moqueries et même de créer une solidarité des autres élèves envers K. (cette intervention sera plus détaillée par la suite, dans la partie V.7 de ce Mémoire). Ici, le rejet originel à l’égard de la dyslexie s’est transformé en facteur d’encouragement.
Donc, bien que les camarades de classe de l’élève dyslexique et au delà de cela, la société toute entière, fasse preuve de rejet envers les personnes touchées par ce trouble, tout comme envers le handicap en général, cela pourrait probablement être réglé si une sensibilisation adéquate était proposée.

Les lacunes de la prise en charge des enfants dyslexiques

Au vu des entretiens, il apparaît que les différents partenaires qui agissent avec K. ont mis en évidence qu’il existait des lacunes dans la prise en charge des enfants dyslexiques en général. Ce sont l’enseignante et la mère de K. qui ont pointé ces manques.
Les manques en question relèvent surtout de la formation des intervenants. En effet, au niveau de la formation des professeurs des écoles en particulier, des critiques sont formulées. Les deux parties mettent en avant qu’il y a un manque de formation sur le sujet de la dyslexie, pour l’enseignante de K., il serait même nécessaire que cela fasse partie « de la formation initiale » et que « deux-trois jours pleins » soient consacrés à l’étude de cette thématique (cf. annexe 3, p.80-81). En effet, pour cette enseignante, la dyslexie est un trouble de plus en plus répandu, il convient donc pour les enseignants de pouvoir proposer des réponses adaptées. Or, pour être en capacité d’apporter ces réponses, l’enseignant doit savoir à quel trouble il est confronté et comment celui-ci se traduit. D’où la nécessité d’une sensibilisation à ces questions dès la formation initiale. La mère de K. va jusqu’à proposer que les enseignants puissent exprimer une suspicion de dyslexie pour orienter les parents vers un orthophoniste qui posera un diagnostic (cf. annexe 3, p.59). Elle met également en avant qu’il faudrait que les enseignants disposent d’une palette de propositions pour aider dans un premier temps l’enfant dyslexique avant qu’un suivi plus global soit mis en place, ce qui peut prendre du temps.
La seconde piste concernant la formation des différents intervenants concerne les orthophonistes. Le constat suivant a été fait : certains orthophonistes s’avèrent être plus compétents dans certains domaines que d’autres, cela peut être par exemple le calcul, et parfois, certains sont spécialistes du suivi de la dyslexie. Cependant, ces compétences ne sont pas clairement affichées par le professionnel, en effet, cela n’a aucune valeur officielle puisqu’il n’existe pas vraiment de spécialisation dans la formation de l’orthophoniste. Cela relève plutôt d’une affinité avec telle ou telle thématique. De plus, il serait intéressant que les orthophonistes soient répertoriés selon leur « spécialité ». De ce fait, il serait plus facile d’orienter convenablement les élèves selon leurs difficultés et de les faire bénéficier d’un suivi efficace, qui répondra réellement à ses besoins (cf. annexe 3, entretien avec un parent, p.67 et entretien avec l’enseignante p.78).
Le cas de K. en est une parfaite illustration, sa première orthophoniste n’était pas très au fait de la prise en charge de la dyslexie, de même pour l’enseignante de sa classe lorsqu’on l’a diagnostiqué. Donc peu de choses pour aider K. ont été mises en place à l’époque. Aujourd’hui, il a pu progresser grâce au suivi d’une orthophoniste très compétente dans la prise en charge de la dyslexie et à l’aide d’une équipe d’enseignante sensibilisée au sujet.
Ainsi, les réponses aux lacunes énoncées pourraient résider dans une formation de meilleure qualité, d’une part des enseignants et d’autre part des orthophonistes. Pour l’enseignante, il s’agirait d’une sensibilisation systématique au sujet de la dyslexie et pour l’orthophoniste cela se traduirait plutôt par une éventuelle spécialisation à ce sujet.

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Table des matières

Introduction
I) Cadre théorique
I.1-La dyslexie
I.1.1) Définition
I.1.2) Diagnostic
I.1.3) Epidémiologie
I.1.4) Etiologie
I.2-L’échec scolaire
I.2.1) Définition
I.2.2) Epidémiologie
I.3-Dyslexie et échec scolaire
I.4- Des dispositifs d’aide qui peuvent s’appliquer aux élèves dyslexiques
I.4.1) P.P.R.E., P.P.S. et P.I.S
I.4.2) Des stratégies pouvant aider l’élève au quotidien
II) Méthodologie
III) Que dit la Loi ?
IV) Etat des lieux de la prise en charge de la dyslexie à l’école
IV.1- La prise en charge en France ou le sentiment d’abandon des parents
IV.2- Le Royaume-Uni ou un système scolaire différencié
V) Analyse des entretiens
V.1- Présentation du cas
V.2- Mon ressenti lors de la passation des entretiens
V.3- L’accueil du diagnostic
V.4- Le rejet de l’enfant dyslexique
V.5- Les lacunes de la prise en charge des enfants dyslexiques
V.6- Le quotidien de la dyslexie
V.7- L’importance de la coopération
Conclusion
Bibliographie

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