Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Protéines et glycoprotéines
Ce sont essentiellement les cytokines qui correspondent à des seconds messagers agissant à distance sur les cellules par l’intermédiaire de récepteurs spécifiques. Elles portent l’information dans le système immunitaire mais elles peuvent aussi avoir pour cible d’autres tissus. Par ailleurs, elles sont produites par de très nombreuses cellules. Elles peuvent agir de manière autocrine (en modifiant le phénotype cellulaire) et de manière paracrine.
Les cytokines sont classées en trois familles : les hematopoietines ou interleukines, la famille du TNF, et les interférons qui interviennent dans la réponse immunitaire spécifique [44,45].
Dans le groupe des interleukines, on a l’interleukine 1-bêta et l’interleukine 6. D’abord considérée comme un facteur pyrogène associé à la douleur, l’interleukine 1-bêta constitue l’un des tous premiers facteurs déclenchant de la réponse inflammatoire au même titre que le TNF alpha. L’IL-1beta agit par l’intermédiaire de récepteurs (type I et II). La fixation de I’lL-1beta sur son récepteur entraine un changement de conformation, ce dernier qui favorise le recrutement d’une protéine transmembranaire accessoire (IL-1 -RacP) qui elle-même recrutera une protéine adaptatrice nécessaire à l’activation des kinases de signalisation. L’effet de I’lL-1beta est limité par l’action de récepteurs solubles (tronqués) et par un inhibiteur naturel (I’lL-1Ra) qui paralyse les récepteurs [5]. D’autres médiateurs anti-inflammatoires (anticorps anti-cytokine) participent à la régulation en neutralisant certaines cytokines (voir figure 6).
La cytokine sécrétée se fixe sur son récepteur au niveau de la cellule sécrétrice (action autocrine) ou sur d’autres cellules (action paracrine).
L’interleukine-6 (IL-6), le LIF (leukemia inhibitory factor) et l’oncostatine M (OSM) appartiennent à la même famille des neurokines. La production de I’lL-6 est souvent la conséquence d’une inflammation exacerbée et elle est retrouvée dans la circulation systémique. Les effets sont pléiotropiques. Leurs récepteurs sont hétérodimériques et portent en commun une protéine, la gp130.
La production de I’lL-6 est souvent induite par I’IL-1. L’IL-6, comme le TNF alpha se retrouve en abondance dans les exudats [6].
Le TNF alpha agit sous forme d’un trimère. Cette forme soluble trimérique reconnait préférentiellement un récepteur de type I (p55) et favorise l’agrégation des domaines de mort (DD) avec le recrutement de protéines adaptatrices qui transmettront le signal. La fonction du second récepteur (TNF-RII) n’est pas claire : il servirait d’intermédiaire pour transporter le TNF alpha vers le récepteur de type I. Son action peut être atténuée en présence de formes solubles du récepteur [3]. D’autres facteurs de l’inflammation sont responsables de la perméabilité de l’endothélium et de la vasodilatation.
La bradykinine est un nonapeptide qui a des effets vasodilatateurs, natriurétiques et pro-inflammatoires. Elle active des récepteurs à sept domaines transmembranaires conduisant à l’induction de la NO-synthase endothéliale, des phospholipases de type A2 et de nombreuses prostaglandines.
L’intensité de la réaction inflammatoire pourrait être diminuée par le blocage des récepteurs membranaires des cellules endothéliales et des cellules musculaires lisses.
Dérivés oxydes de l’acide arachidonique et phospholipides
Ces molécules appartiennent toutes à la grande famille des lipides. Les plus impliquées dans la réaction inflammatoire sont les icosanoides (du grec icosa : vingt). Ces parmi ces derniers, qu’on trouve les prostaglandines, les thromboxanes et les leucotriènes. Les deux premiers sont des prostanoides. Ces molécules lipidiques dérivent toutes de l’acide arachidonique (issu lui-même des phospholipides membranaires) après plusieurs étapes d’oxydation (voir figure 7)
Cependant les deux médiateurs lipidiques majeurs sont les prostaglandines et les leucotriènes. Isolées initialement du liquide séminal, les prostaglandines sont de puissants médiateurs de la réponse inflammatoire. Ce sont des molécules de signalisation à vie courte, ce qui limite leur action à des voies autocrines et paracrines activées par des récepteurs membranaires très spécifiques. Leur chef de file est la prostaglandine E2 (PGE2) dont la fixation sur les récepteurs des cellules du centre thermique de l’hypothalamus provoque la fièvre. La PGE2 est impliquée dans la régulation de nombreux évènements physiologiques : cycle veille/sommeil, croissance des cellules (notamment du myocarde), tension artérielle, protection de la paroi gastro-intestinale, fonctions reproductrices. Elle est également associée et des évènements pathologiques comme la fièvre, la douleur, la vasodilatation, l’angiogenèse et la vascularisation des tumeurs.
La biosynthèse des prostaglandines commence par la transformation de l’acide arachidonique en prostaglandine G2 sous l’action de la cyclo-oxygénase ou COX. Cette dernière existe sous deux isoformes, la COX-l, responsable d’une activité basale et de l’homéostasie tissulaire et la COX-2 qui est inductible par de nombreux stimuli pro-inflammatoires.
Ces deux enzymes aux structures très similaires sont codées par deux gènes différents. La COX-1 est exprimée constitutionnellement et de façon ubiquitaire. Elle exerce un rôle régulateur dans différents processus physiologiques, tels que la cytoprotection gastrique, l’hémostase primaire, l’homéostasie vasculaire et l’hémodynamique rénale [3].
Inversement, la COX-2 est une enzyme essentiellement inductible, qui n’est exprimée à l’état basal que dans de rares tissus comme la prostate et le cerveau. Le gène de COX-2 possède dans sa région promotrice des éléments de réponse à des facteurs de transcription activables par les facteurs de croissance et les cytokines pro-inflammatoires, ce qui explique son caractère inductible dans certaines circonstances. La COX-2 participe ainsi à la régulation de différentes réponses physiologiques sous contrôle hormonal (ovulation, nidation, travail utérin, métabolisme osseux, métabolisme hydrosodé) et est exprimée de façon quasi ubiquitaire en situation inflammatoire. De même, l’expression de COX-2 augmente dans le système nerveux central en réponse à différents stimulus périphériques, expliquant son rôle dans la transmission de la douleur et la fièvre.
En réalité, les COX assurent toutes les fonctions précitées, par l’intermédiaire des différentes prostaglandines dont elles catalysent la biosynthèse.
Après la cyclo-oxygénase la prostaglandine G2 subit l’action de la peroxydase qui la transforme en prostaglandine H2. C’est de cette dernière que proviennent par le biais des enzymes terminales (isomérases, réductases, synthases), les autres prostaglandines (D2, E2, F2, I2) et la thromboxane A2 (TxA2). (voir figure 9)
Le thromboxane participe à l’activation des plaquettes, la PGD2 a des effets chimiotactiques dans les mastocytes.
La PGI2 ou prostacycline particulièrement active dans les cellules endothéliales.
Elle empêche l’adhésion des plaquettes et la coagulation.
Enfin la PGE2 est synthétisée par les PG E2-synthases présentes dans de nombreuses cellules: cellules endothéliales, vasculaires, musculaires lisses, et dans les chondrocytes. [46,47]
Contrairement aux prostaglandines, les leucotriènes sont produits essentiellement par les cellules du système immunitaire telles que les polynucléaires, les macrophages et les mastocytes. Les leucotriènes agissent également par l’intermédiaire de récepteurs transmembranaires et, à l’intérieur de la cellule, par l’intermédiaire de récepteurs nucléaires.
Le leucotriène B4 (LTB4) sécrété a un fort pouvoir chimiotactique sur les polynucléaires neutrophiles et les leucocytes, facilitant le recrutement aux sites inflammatoires et leur adhésion à la paroi vasculaire.
Les leucotriènes eux aussi sont synthétisés à partir de l’acide arachidonique sous l’action de la 5-lipoxygénase (monoperoxydase). Le premier produit synthétisé est l’acide 5-hydroperoxide (HPETE) qui devient leucotriène A4 (LTA4) toujours sous l’action de la 5-lipoxygénase. Le LTA4 donnera le leucotriène B4 (LTB4) sous l’action d’une hydrolase (voir figure 6).
Le LTA4 libéré par les polynucléaires dans le plasma sera transformé en LTB4 par une LTA4-hydrolase libérée par les cellules endothéliales. Cette molécule, fortement chimiotactique, est reconnue par des récepteurs situes sur les membranes des neutrophiles et des monocytes. Enfin, le leucotriène C4 est obtenu par fixation d’une molécule de glutathion réduit sur le LTA4 (voir figure 6). Reconnu par des récepteurs à leucotriènes présents sur les cellules musculaires, il participe à la vasodilatation et à la perméabilité des cellules endothéliales.
LES ANTI-INFLAMMATOIRES NON STEROIDIENS (AINS)
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont des médicaments symptomatiques à action rapide qui ont des propriétés analgésiques, antipyrétiques et anti-inflammatoires. C’est l’une des classes médicamenteuses les plus prescrites dans le monde à cause de leur efficacité.
Classification
Ils sont divisés en huit groupes hétérogènes, en fonction de leurs structures chimiques. Ce sont : les salicylés (groupe de l’acide acétylsalicylique ou aspirine), les arylcarboxyliques, les fénamates, les indoliques, les pyrazolés, les oxicams, les coxibes et les autres AINS (voir tableau 1) [8].
Pharmacocinétique
Absorption
Les AINS étant des acides faibles lipophiles, leur résorption est donc rapide et quasi-complète. La concentration sérique maximale (Cmax) est atteinte en 1 à 2 heures pour les formes standards. Les formes injectables permettent l’obtention du pic plus rapidement, sans que leur efficacité ne soit supérieure.
En outre, l’alimentation n’affecte pas habituellement la biodisponibilité. [9]
Distribution
Plus de 95 % de la forme circulante des AINS sont liés de manière réversible à l’albumine. Cette proportion est plus faible en cas d’hypoprotidémie, ou chez le sujet âgé, ou dans certaines maladies inflammatoires (comme la Polyarthrite Rhumatoide).
Par conséquent, les AINS déplacent les médicaments fixés sur les protéines (antivitamines K, sulfamides hypoglycémiants, phénytoïne…), pouvant augmenter leur toxicité.
La fraction libre, pharmacologiquement active, est inférieure à 5 %.
Les AINS diffusent bien dans le tissu et le liquide synovial. Ils passent la barrière foeto-placentaire, la barrière hémato-encéphalique, et passent dans le lait maternel. [7,9]
Métabolisme et élimination
Pour la majorité des AINS, il existe un métabolisme hépatique aboutissant à la formation de métabolites inactifs.
Cependant, il y a deux exceptions :
– la phénylbutazone est transformée au niveau du foie en oxyphenbutazone qui possède une activité anti-inflammatoire,
– certains AINS sont des pro-médicaments (sulindac) transformés en produit actif au niveau du foie. Les AINS sont principalement éliminés par les reins sous forme active et de métabolites inactifs. A ce niveau, les AINS peuvent entrer en compétition avec des substances endogènes (acide urique) ou d’autres médicaments (lithium, méthotrexate…) au niveau des processus de sécrétion et de réabsorption tubulaires. Certains possèdent, en outre, une élimination biliaire avec cycle entéro-hépatique (indométacine, diclofénac, piroxicam). [7,9]
La demi-vie d’élimination plasmatique des AINS est variable selon les produits, dictant en partie leur rythme d’administration. On peut distinguer 3 catégories (voir tableau 1) :
une demi-vie plasmatique courte, inférieure à 10 heures (2 à 6 heures): les salicylés, la plupart des dérivés arylcarboxyliques et indoliques (ibuprofène, kétoprofène, flurbiprofène), diclofénac, étodolac, acide niflumique, indométacine. En principe 3 prises quotidiennes.
une demi-vie plasmatique intermédiaire, entre 10 à 18 heures: naproxène, sulindac. En principe deux prises quotidiennes.
une demi-vie plasmatique longue, supérieure à 24 heures: phénylbutazone, oxicams. En principe une seule prise quotidienne.
Cependant, le nombre de prises quotidiennes peut varier :
– selon la forme galénique : certains AINS à courte demi-vie plasmatique ont été conditionnés sous des formes à libération digestive prolongée ;
– selon l’intensité des douleurs dans le nycthémère ;
– selon la tolérance: la phénylbutazone est prescrite en trois prises quotidiennes pour améliorer la tolérance.
Compte tenu de la persistance de l’AINS dans la synoviale, la demi-vie plasmatique d’un AINS ne reflète pas forcément sa durée d’action thérapeutique sur les signes articulaires. [7,9]
Pharmacodynamie
Action antipyrétique
Les AINS diminuent la fièvre d’origine infectieuse, inflammatoire ou néoplasique en entravant la synthèse de prostaglandines pyrogènes (PGE2), induite par des cytokines (interleukine-1) dans l’aire pré-optique de l’hypothalamus, centre de la thermorégulation. [7]
Action antalgique
Les AINS sont antalgiques par leur action périphérique au sein du site inflammatoire. L’action antalgique des AINS est importante quand les douleurs sont dues à un excès de nociception où les prostaglandines jouent un rôle pathogène: douleurs de l’appareil locomoteur, céphalées, douleurs post-opératoires, douleurs dentaires, dysménorrhées, colique hépatique, colique néphrétique.
La posologie de l’action antalgique est plus faible que celle de l’action anti-inflammatoire.
Pour mémoire, les AINS forment, avec le paracétamol, le premier niveau de la stratégie en 3 paliers préconisée par l’OMS pour le traitement des douleurs chroniques cancéreuses. [7,9]
Action anti-inflammatoire
Souvent intriquée avec la précédente, l’action anti-inflammatoire requiert volontiers des posologies plus élevées. Cette caractéristique est à l’origine de la commercialisation d’AINS faiblement dosés comme antalgiques (ou antalgiques-antipyrétiques). En contrariant la formation des prostaglandines, les AINS inhibent la composante vasculaire de la réaction inflammatoire aiguë, responsable de la classique tétrade: œdème, douleur, rougeur, chaleur. Leur action est rapide et purement suspensive: l’action anti-inflammatoire disparaît rapidement après l’arrêt de l’AINS; les AINS ne modifient pas le cours évolutif des rhumatismes inflammatoires chroniques.
Les AINS ont aussi une action sur les polynucléaires neutrophiles (PNN): inhibition de certaines fonctions, comme l’adhérence, le chimiotactisme, l’agrégation cellulaire, la phagocytose et la libération d’anions superoxydés et de radicaux libres. [7,9]
Action antiagrégante
Tous les AINS interfèrent avec l’agrégation plaquettaire, mais seule l’aspirine allonge nettement le temps de saignement (50-100 % en moyenne). Cela tient à sa capacité d’inactiver définitivement la cyclo-oxygénase plaquettaire, qui catalyse la formation de thromboxane A2 (TXA2), puissant agent agrégant et vasoconstricteur.
Cet effet qui est optimal dès les faibles doses d’aspirine (100 à 250 mg/j), se corrige en 1 semaine environ après l’arrêt du médicament, délai nécessaire au renouvellement des plaquettes. Cette action a pour corollaire l’indication de l’aspirine comme agent anti-thrombotique [7].
Effets indésirables
Ils affecteraient 10 à 25 % des patients traités. Les plus fréquents sont digestifs. Les complications graves sont rares si l’on respecte les contre-indications et les modalités d’administration usuelles [9].
Effets indésirables digestifs
Ils sont fréquents, généralement dose-dépendants, communs à tous les AINS, à toutes les formes galéniques et voies d’administrations (orale, rectale, parentérale) et impliquent plusieurs mécanismes.
Pathogénie de la toxicité digestive aux AINS
Un des mécanismes des effets indésirables digestifs est la toxicité directe des AINS sur la muqueuse digestive. En effet étant des acides faibles, les AINS restent dans le milieu acide de l’estomac, sous leur forme non ionisée, lipophile donc diffusant facilement à travers la couche phospholipidique de la paroi cellulaire de l’épithélium gastrique. Dans les cellules les AINS sont dissociés en forme ionisée et piègent les ions H+ responsables de la destruction de l’épithélium. [8]
Les AINS entrainent aussi des troubles de la microcirculation sanguine au niveau de la muqueuse gastrique par l’intermédiaire des leucotriènes et des polynucléaires neutrophiles, pouvant provoquer ou aggraver des lésions gastriques par ischémie. En effet, les AINS stimulent la production des leucotriènes (C4 et D4) dont l’effet nocif est rapporté à la vasoconstriction et aux troubles de la perméabilité capillaire qu’elles induisent dans la microcirculation gastrique [22,23]. A côté de ceci, les AINS favorisent l’activation et l’adhésion des polynucléaires neutrophiles à l’endothélium provoquant ainsi un ralentissement circulatoire voire une occlusion complète des microvaisseaux, à l’origine d’une ischémie muqueuse [24].
Cependant le principal mécanisme qui explique la toxicité digestive est l’inhibition de la synthèse des prostaglandines dont le rôle protecteur se manifeste de plusieurs manières (voir figure 12).
L’administration des prostaglandines (PGE1 et PGE2) inhibe la sécrétion acide des cellules pariétales de l’estomac. Les prostaglandines(PG) ont en outre, un effet sur la quantité et la qualité de la barrière muqueuse gastrique. L’administration de PG augmente la quantité et le PH du mucus gastrique [11], duodénal [12] et stimule la sécrétion bicarbonatée [13,14]. Inversement l’indométacine inhibiteur de la synthèse des PG diminue la sécrétion de mucus [15].
Les PG, en particulier la PGE2 jouent aussi un rôle trophique propre sur la muqueuse gastrique [16]. Les PG stimulent les cellules souches intestinales et assurent ainsi la régénération physiologique de la muqueuse gastrique et la cicatrisation des lésions intestinales. Ce rôle semble essentiellement assuré via la COX1, dont l’expression est fortement stimulée en cas d’agression. En plus, les PG ont des propriétés vasodilatatrices, d’où leur inhibition par les AINS provoque une réduction du flux sanguin muqueux responsable de lésions ischémiques. Cette situation participe à l’aggravation de lésions préexistantes en altérant leur cicatrisation [17].
Les lésions anatomiques de la muqueuse digestive
Les lésions gastro-duodénales des AINS sont visibles en endoscopie. Elles sont plus fréquentes au niveau de l’estomac, où elles prédominent sur l’antre, qu’au niveau du bulbe duodénal. La gastropathie des AINS prédomine chez le sujet âgé (> 65 ans), aux antécédents ulcéreux [7]. Il peut s’agir de :
– Erythème, hémorragies sous-muqueuses, oedème de la muqueuse.
– Erosions pouvant entraîner des micro-saignements.
– Lésions multiples ou diffuses : gastrite hémorragique.
– Ulcère typiquement rond, à l’emporte-pièce, beaucoup plus souvent gastrique que duodénal. Ces lésions peuvent entraîner une hémorragie digestive ou une perforation, mais dans 30 à 50% des cas elles sont asymptomatiques [18]. Il n’y a que peu de corrélations entre l’intensité des symptômes digestifs et la présence de lésions muqueuses sous AINS [7,18]. Les lésions de la muqueuse de l’intestin grêle ou du colon sont plus rares [7].
Les symptômes digestifs mineurs
Environ 40% des patients sous AINS décrivent des nausées, vomissements, dyspepsie, épigastralgies, douleurs abdominales, diarrhées [19]. La survenue de ces symptômes peut faire interrompre le traitement.
Les complications digestives graves
Une lésion digestive, le plus souvent gastrique, peut entraîner un saignement chronique occulte, sans symptômes digestifs, et être responsable d’une anémie par carence martiale.
Toute anémie ou aggravation d’une anémie sous AINS nécessite un contrôle endoscopique gastro-duodénal [7].
Le risque d’hémorragie ulcéreuse est multiplié d’un facteur 2 à 5 chez les utilisateurs d’AINS [20]. De même le risque de perforation d’ulcère est multiplié de 4 à 6 avec les AINS [21].
Dans la moitié des cas, ces complications surviennent sans symptômes d’alarme [7] et sont responsables d’une mortalité non négligeable. En 1998 aux USA, le nombre annuel d’hospitalisations dû à ces complications était de 103 000 et le nombre de décès était de 16500 c’est-à-dire équivalent au nombre de décès imputable au syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA) pour la même période. Une étude espagnole avait mis en évidence une mortalité de l’ordre de 15,3 pour 100.000 utilisateurs d’AINS [25].
Les autres manifestations digestives
Plus rares, elles sont à type de [9] :
Oesophagite et/ou ulcère oesophagien: surtout en cas de reflux gastro-oesophagien.
Perforations, sténoses, ulcérations intestinales.
Colites aiguës, colites ischémiques (sur colon sain ou pathologique), hémorragies et perforations coliques.
Les AINS sous forme de suppositoires peuvent entraîner une anorectite (brûlures anales, ténesme ou épreintes), exceptionnellement rectorragies.
hépatite, purement biologique en général [7].
Cas particulier de l’acide acétylsalicylique (aspirine)
A une posologie supérieure à 300 mg/j, l’aspirine est un AINS ce 70% des patients ignorent. De plus, 20% des patients ne déclarent pas son utilisation en automédication [26,27].
L’aspirine à faible dose ou AFD (75-300 mg/j) est largement prescrite pour son rôle antiagrégant plaquettaire (AAP) dans la prévention des évènements cardiovasculaires secondaires. Pourtant même à ces doses d’AAP, elle peut être responsable de lésions similaires à celles causées par les autres AINS [28,29]. En l’absence de protection gastrique, 11% des patients sous aspirine à dose d’AAP développent un ulcère gastroduodénal [30]. Comme pour les AINSns, la toxicité de l’aspirine est dose-dépendante, mais apparait dès la dose de 10 mg/j. L’utilisation de l’AFD est responsable de 15% des hémorragies digestives en Espagne [31].
Les manipulations galéniques, en particulier l’aspirine à délitement entérique, n’ont pas apporté les résultats escomptés en termes de protection gastrique, probablement parce qu’elles ne prennent en compte qu’un seul des mécanismes lésionnels, la toxicité de contact [32]. Le risque hémorragique lié à l’aspirine à faible dose n’était pas significativement différent selon la présentation de l’aspirine, standard, tamponnée ou à délitement entérique [33].
Par ailleurs, l’AFD induit une synergie multiplicatrice d’un facteur 2 à 5, sur la toxicité des AINS utilisés concomitamment [34,35] et particulièrement celle des coxibs [36]. 26 L’aspirine diminue fortement, ou annule l’effet gastroprotecteur potentiel des coxibs par rapport aux AINSns. L’association de l’AFD à un coxib ou AINSns multiplie le risque d’hémorragie ulcéreuse dans les mêmes proportions d’un facteur 2 à 5 [31, 37, 38].
Allergie ou hypersensibilité aux AINS
L’hypersensibilité aux AINS (HSAINS) est une manifestation d’ « intolérance » aux AINS qui n’en épargne aucun. Son mécanisme repose sur l’inhibition de la COX-1 qui entrainerait indirectement une majoration de la production de leucotriènes, par les basophiles, les mastocytes et les éosinophiles. Les AINS stimulent également la production de certaines cytokines pro-inflammatoires et histaminolibératrices comme l’interleukine-1 [39]. Or toutes ces cellules et molécules sont impliquées dans les réacctions immuno-allergiques.
On distingue l’HSAINS pharmacologique impliquant les phénomènes immuno-allergique (76%) et celle liée à un terrain particulier (asthme, urticaire) que les AINS exacerbent (24%) [40].
L’HSAINS peut avoir des manifestations [7, 9,39] :
Cutanéo-muqueuses : éruptions diverses, prurit, stomatites, urticaire, vascularite purpurique, érythèmes polymorphes, pouvant aller jusqu’aux toxidermies bulleuses (syndromes de Lyell et Stevens-Johnson) ;
ORL-pneumologiques : asthme, œdème de Quincke, rhinite, bronchospasme, pneumopathie immuno-allergique ;
Autres : hépatite, fièvre, hyperéosinophilie sanguine, choc anaphylactique, syndrome de Widal (asthme, polypose naso-sinusienne, hypersensibilité à l’aspirine et aux autres AINS).
Effets indésirables rénaux
L’insuffisance rénale aiguë (IRA) fonctionnelle
L’existence d’une hypoperfusion rénale, la stimulation du système sympathique adrénergique et l’hyperangiotensinémie, provoquent une vasoconstriction artériolaire normalement contrebalancée par l’effet vasodilatateur des PG (maintenant le débit de perfusion rénale). La brutale inhibition de la synthèse des PG peut alors déclencher une insuffisance rénale par effondrement de la filtration glomérulaire [9].
L’IRA survient sur un terrain prédisposé :
Sujets âgés.
Déshydratation.
Régime sans sel.
Diurétiques.
Hypovolémie efficace (syndrome néphrotique, insuffisance cardiaque, cirrhose décompensée).
Lésions vasculaires rénales (lupus érythémateux disséminé, drépanocytose, diabète sucré).
Insuffisance rénale chronique.
Prise d’inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou d’antagonistes de la rénine-angiotensine 2 (ARA2).
L’IRA survient dans la première semaine du traitement : élévation de la créatininémie et hyperkaliémie. Le rapport sodium/potassium urinaire est inférieur à 1. Elle s’exprime sur le plan clinique par une oligurie avec éventuellement une prise de poids et des œdèmes, d’installation rapide, en quelques jours. L’IRA est habituellement réversible après arrêt de l’AINS, mais parfois incomplètement. Si la prise d’AINS se prolonge, l’IRA fonctionnelle peut devenir organique par nécrose tubulaire aigue (surtout dans les associations AINS-IEC, AINS-ARA2 et AINS-diurétiques). Plus rarement, il peut s’agir d’emblée d’une IRA organique par nécrose papillaire (ischémie de la médullaire rénale) [7,9,77].
Troubles hydro-électrolytiques
Ce sont :
la rétention hydro-sodée: risque de majoration d’une HTA et/ou d’insuffisance cardiaque.
l’hyperkaliémie en rapport avec un syndrome d’hyporéninisme et hypoaldostéronisme (en cas d’insuffisance rénale préalable ou favorisé par les IEC).
l’hyponatrémie.
Néphropathies interstitielles
Elles peuvent être associées à un syndrome néphrotique ou pas. Les formes associées à un syndrome néphrotique ou néphropathies interstitielles chroniques ou encore « néphropathies aux analgésiques » sont classiques et surviennent après en moyenne 6 mois de traitement. Il existe une insuffisance rénale. Leur évolution est favorable après arrêt de l’AINS.
Les formes sans syndrome néphrotique ou néphrites interstitielles aiguës, elles, sont exceptionnelles et surviennent en début de traitement. Le tableau associe: protéinurie modérée, IRA d’intensité variable, syndrome d’hypersensibilité (fièvre, rash cutané, hyperéosinophilie) dans un cas sur deux. On parle dans ce cas de néphropathie tubulo-interstitielle aigue immuno-allergique (NTIA). Elles laissent volontiers des séquelles [7,9,76].
Néphropathies glomérulaires
Les formes histologiques rencontrées sont : la lésion glomérulaire minime (LGM) et la glomérulonéphrite extra-membraneuse (GEM). Elles se caractérisent volontiers par une protéinurie massive qui est réversible avec l’arrêt du traitement (diminution rapide en quelques jours ou quelques semaines pour la LGM et diminution lente en plusieurs mois pour la GEM) [76].
Effets indésirables cardio-vasculaires
Il faut savoir que les AINS quel que soit leur classe sont connus pour entraîner une élévation de la tension artérielle que ce soit chez les sujets connus comme hypertendus ou non [64].
Cependant la classe qui entrainerait le plus d’effets indésirables cardio-vasculaires est celle des coxibs.
L’ensemble des données disponibles, notamment les résultats des études APPROVe et APC [41,42], ont été examinées dans le cadre d’un arbitrage européen (17 février 2005). Ces études montrent une augmentation du risque d’effets indésirables cardiovasculaires, qui peut être considérée comme un effet de classe des coxibs.
Dorénavant, les coxibs sont contre-indiqués chez les patients présentant une maladie cardiaque (telle qu’une angine de poitrine, un infarctus du myocarde ou une insuffisance cardiaque) ou une maladie cérébro-vasculaire (antécédent d’accident vasculaire cérébral ou d’accident ischémique transitoire).
En outre, les coxibs doivent être utilisés avec prudence par les patients présentant des facteurs de risque cardiovasculaire, tels qu’une hypertension, un taux de cholestérol élevé, un diabète ou un tabagisme [9].
Enfin, de récentes études suggèrent que ce risque cardiovasculaire existe aussi pour les AINS classiques, en particulier pour le Diclofenac qui lui aussi a les mêmes contre-indications spécifiques que les coxibs [65,66]
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. L’INFLAMMATION
I.1. Les phases de l’inflammation
I.1.1. La phase d’initiation
I.1.2. La phase d’amplification-généralisation
I.1.3. La phase de résolution
I.2. Les médiateurs de l’inflammation
I.2.1. acides aminés modifiés et peptides
I.2.2. Protéines et glycoprotéines
I.2.3. Dérivés oxydes de l’acide arachidonique et phospholipides
II. LES ANTI-INFLAMMATOIRES NON STEROIDIENS (AINS)
II.1. Classification
I.2. Mécanisme d’action
II.3. Pharmacocinétique
II.3.1. Absorption
II.3.2. Distribution
II.3.3. Métabolisme et élimination
II.4. Pharmacodynamie
II.4.1. Action antipyrétique
II.4.2. Action antalgique
II.4.3. Action anti-inflammatoire
II.4.4. Action antiagrégante
II.5. Effets indésirables
II.5.1. Effets indésirables digestifs
II.5.1.1. Pathogénie de la toxicité digestive aux AINS
II.5.1.2- Les lésions anatomiques de la muqueuse digestive
II.5.1.3. Les symptômes digestifs mineurs
II.5.1.4. Les complications digestives graves
II.5.1.5. Les autres manifestations digestives
II.5.1.6- Cas particulier de l’acide acétylsalicylique (aspirine)
II.5.2. Allergie ou hypersensibilité aux AINS
II.5.3. Effets indésirables rénaux
II.5.3.2. Troubles hydro-électrolytiques
II.5.3.3. Néphropathies interstitielles
II.5.3.4. Néphropathies glomérulaires
II.5.4. Effets indésirables cardio-vasculaires
II.5.5. Effets indésirables neuro-sensoriels et psychiques
II.5.6. Effets indésirables hématologiques
II.5.7. Effets indésirables hépatiques
II.5.8. Effets indésirables gynéco-obstétricaux
II.5.9. Risque infectieux
II.6. Interactions médicamenteuses
II.6.1. Interactions majeures
II.6.1.1. Communes aux AINS
II.6.1.2. Particulières
II.6.2. Interactions mineures
II.7. Règles de prescription
II.7.1. Indications
II.7.2. Contre-indications
II.7.2.1. Générales
II.7.2.2. Particulières
II.7.3. Précautions d’emploi
II.7.3.1. Règles générales
II.7.3.2. Voies d’administration
II.7.3.3. Prévention de la gastropathie des AINS
II.7.4. Surveillance du traitement
DEUXIEME PARTIE
I. METHODOLOGIE
I.1. Cadre d’étude
I.2. Type et période d’étude
I.3. Population d’étude
I.3.1. Critères d’inclusion :
I.3.2. Critères de non inclusion :
I.4. Collecte des données
I.5. Aspects éthiques
I.6. Analyse statistique
II.1. Données de base de la population étudiée
II.2. Etude descriptive des patients sous AINS/AFD
III. DISCUSSION
III.1. Données de base de la population étudiée
III.2. Etude descriptive patients sous AINS/AFD
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
I. CONCLUSION
II. Recommandations
REFERENCES
ANNEXES
Télécharger le rapport complet