Les nanoparticules sont utilisées par l’Homme depuis longtemps, notamment dans la fameuse coupe de Lycurgue datant du VIème siècle après JC, qui possède une couleur verte ou bien rouge selon l’orientation de son éclairage, changement dû à la présence de nanoparticules d’or et d’argent, ou encore dans la confection de vitraux à l’époque du moyen-âge. Cependant, ces nanoparticules étaient utilisées sans qu’on en ait vraiment conscience et n’en connaisse réellement la taille et les propriétés. A partir de 1959 les nanotechnologies qui ont pris un essor important sous l’impulsion de Richard Feynman et se sont développées à grande échelle à partir des années 90 ont permis la compréhension de la physique et de la chimie particulière des nanoparticules. Ces dernières possèdent des propriétés bien différentes des matériaux massifs en partie dues au fait que le rapport entre les nombres d’atomes de surface et de volume n’est plus négligeable lorsque la taille des particules devient nanométrique. Ces nouvelles propriétés sont à l’origine de nouveaux domaines d’études et d’applications, allant de la cosmétique à l’informatique en passant par l’énergie. Ces différents axes de recherches sont menés dans divers laboratoires comme le Laboratoire de Physique et de Chimie des Nano-Objets (LPCNO) ou le Centre d’Elaboration et d’Etudes Structurales (CEMES). Ces Laboratoires ont des domaines d’expertises variés, partagés au sein de leurs diverses équipes. Par exemple, l’équipe Nanostructures et Chimie Organométallique (NCO) du LPCNO s’est spécialisée dans la synthèse de nanoparticules métalliques, magnétiques et/ou semi-conductrices par des voies organométalliques et polyol. En collaboration avec l’équipe Nanomagnétisme, diverses études sont menées sur les propriétés magnétiques, électroniques ou encore l’efficacité en catalyse de ces particules. La connaissance des propriétés magnétiques des nanoparticules constitue une des thématiques phares du LPCNO au vue des nombreuses applications potentielles des nanoparticules magnétiques notamment en spintronique ou dans la confection d’aimants permanents à fort champ coercitif ou encore en oncologie grâce aux propriétés d’hyperthermie des nanoparticules. En effet, il est possible d’intégrer des bio-récepteurs sur des nanoparticules magnétiques, telles que des nanosphères de fer, et de les inoculer dans un patient atteint du cancer. Via leurs récepteurs les nanoparticules se dirigent autour des cellules cancéreuses, ensuite l’application d’un champ magnétique alternatif induira un échauffement magnétique des nanoparticules ce qui provoquera l’élévation de la température au sein de la cellule cancéreuse entrainant sa destruction. La connaissance approfondie de l’énergie dégagée par la nanoparticule en fonction du champ magnétique appliqué permettra d’optimiser l’efficacité du traitement. Nous pouvons aussi citer l’utilisation de nanofils ou nanobâtonnets de cobalt pour la création de nouveaux supports de stockage informatique. La croissance verticale de ces bâtonnets sur un substrat donne une surface à haute densité de bâtonnets où chaque bâtonnet correspond à un bit de donnée. À terme, grâce à la connaissance exacte des propriétés magnétiques de ces nanobâtonnets, il sera possible de créer des disques durs avec une densité supérieure à 10 Tbit/in².
Toutes les applications technologiques potentielles des nanoparticules nécessitent au préalable une parfaite connaissance de la corrélation entre leur propriété magnétique, leur forme et leur structure cristalline et chimique. Cependant, les techniques actuelles de magnétométrie telles que le SQUID ou le magnétomètre à échantillon vibrant ne sont pas assez sensibles pour mesurer les propriétés magnétiques de nano-objets uniques. Les mesures se font sur des assemblées ce qui a pour conséquence de masquer les propriétés individuelles des objets à cause des interactions magnétiques entre particules ainsi que des effets de distribution de taille, de forme ou de composition chimique.
Des progrès ont été fait récemment en magnétométrie, notamment dans l’équipe de W. Wernsdorfer . Ils ont développé le μ-SQUID ce qui leur a permis d’étudier les mécanismes d’inversion de l’aimantation d’une nanoparticule de cobalt de 3 nm ayant une aimantation d’environ 1700 magnétons de Bohr pour un champ magnétique de 0,5 T et des températures inférieures à 6 K. Quelques années plus tard, ils ont amélioré cette technologie en développant le nano-SQUID à base de nanotubes de carbone afin d’augmenter le facteur de couplage entre la nanoparticule magnétique et le nano-SQUID et envisager des sensibilités magnétiques élevées de l’ordre du magnéton de Bohr. Toutefois, la mesure expérimentale de nanoparticules inférieures à 3 nm de diamètre avec un nano-SQUID n’a pas encore été démontrée.
Techniques de dépôt
L’enjeu principal de ma thèse est de déposer une seule nanoparticule magnétique sur un résonateur à nanotube de carbone. Le contrôle du dépôt de particules est donc le cœur de ce projet. Pour arriver à ce but, diverses techniques de dépôts existent, toutefois certaines sont plus pertinentes que d’autres, et ce pour différentes raisons. Dans la partie qui suit, je présente un ensemble de méthodes de dépôts ainsi que les raisons qui nous ont conduits à choisir l’électrospray et NADIS. Il est possible de classer ces méthodes en différentes catégories : i) les techniques de dépôts incluant la synthèse des nanoparticules, ii) les techniques de dépôts utilisant des nanoparticules présynthétisées.
Dépôt à partir de précurseurs
Il existe un certain nombre de techniques où les nanoparticules sont synthétisées pendant le dépôt. Parmi ces méthodes on trouve deux catégories répandues, les dépôts chimiques en phase vapeur (CVD) et les dépôts physiques en phase vapeur (PVD). Si le nombre de techniques CVD et PVD est assez étendu, leur principe reste néanmoins le même puisqu’il consiste à exciter une source, sous forme pure ou recombinée par divers procédés, haute température, irradiation laser, micro-ondes, bombardement ionique, haute tension…, afin qu’elle s’évapore puis se condense sur le substrat .
Les atomes éjectés se recondensent en particules sur le substrat. Dans cette configuration, il est donc impossible d’utiliser des nanoparticules pré-synthétisées. Cependant, ces techniques permettent de déposer diverses nanoparticules, que ce soit pour obtenir des biocatalyseurs magnétiques à base de Nickel ou pour décorer des nanotubes de carbones avec de l’or ou du paladium .
Si les résultats paraissent intéressants dans le contexte de la thèse, le fait de ne pas pouvoir utiliser de particules déjà synthétisées pose diverses problématiques. La première est d’être limitée en formes de nanoparticules métalliques, puisque ces méthodes ne permettent que d’avoir un contrôle précis de la forme des objets ou encore de la taille. De plus, il n’est pas possible de détecter la présence de nanoparticules lors de leur dépôt sur le résonateur, il faut attendre la fin du dépôt pour observer le substrat. Des méthodes de dépôts permettant la détection du dépôt et l’utilisation de nanoparticules pré-synthétisées nous paraissent plus pertinentes.
Dépôt à partir de nanoparticules synthétisées
Les techniques de dépôts utilisant des nanoparticules sont pour beaucoup en phase liquide. Ce sont des techniques dites d’auto-assemblage et forment des réseaux en deux dimensions (2D).
Drop casting
La méthode la plus simple pour un dépôt de particules quelles que soient leurs tailles, est de directement déposer une goutte de solution de particules sur la surface désirée. Si le dépôt dépend du mode d’évaporation de la goutte à angle ou diamètre constant . il est possible d’obtenir des monocouches denses par auto-assemblage des particules. Ces auto-assemblages se font par interactions entre particules et/ou entre les particules et la surface et peuvent être de différents types, électrostatiques, chimiques, capillaires ou magnétiques.
Les bons résultats d’auto-assemblages par drop-casting sur une surface relativement grande ont permis à Xukai Xin et al. d’utiliser cette méthode comme étape de fabrication d’électrodes de cristaux de CTZSSe . Dans le but d’améliorer l’homogénéité de la monocouche que ce soit sur l’épaisseur ou sur la surface, le drop-casting est optimisé par différentes équipes en utilisant l’effet Langmuir Blodgett et Langmuir-Schaefer, qui consiste à former une monocouche de solvant apolaire sur un solvant polaire, comme par exemple un film d’huile sur de l’eau dont l’épaisseur serait la longueur de la chaîne aliphatique de l’huile.
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Table des matières
Introduction
Chapitre I Etat de l’art
Partie A Techniques de dépôt
I.A.1 Dépôt à partir de précurseurs
I.A.2 Dépôt à partir de nanoparticules synthétisées
I.A.2.1 Drop casting
I.A.2.2 Dépôts par spin-coating
I.A.2.3 Dépôt par dip-coating
I.A.2.4 Dépôt par tape-casting
I.A.2.5 Dépôt par électrophorèse
I.A.2.6 Dépôt par diélectrophorèse
I.A.2.7 Dépôt par fonctionnalisations de surfaces
I.A.3 Dépôts par projections
I.A.3.1 Dépôt par électrospray
I.A.4 Dépôt par écriture
I.A.4.1 Dip-Pen Nanolithography
I.A.4.2 Dépôt par nanofountain pen
I.A.4.3 NADIS
Partie B Conclusion
Chapitre II Dépôt de nanoparticules par technique NADIS
Partie A Méthodes expérimentales
II.A.1 Fabrication des pointes
II.A.2 Fonctionnalisation des surfaces
II.A.3 Chargement de la pointe
II.A.4 Procédure de dépôt
II.A.4.1 Dépôt par AFM Picoforce
II.A.4.2 Dépôt par AFM D3000
Partie B Dépôts de Nanoparticules
II.B.1 Nanoparticules de polystyrène
II.B.2 Nanoparticules magnétiques
II.B.2.1 Synthèse des nanoparticules
II.B.2.2 Dispersion des nanoparticules
II.B.2.3 Dépôts par Picoforce
II.B.2.4 Dépôt au D3000
II.B.2.5 Imagerie AFM des dépôts
Partie C Conclusion
Chapitre III Dépôt de nanoparticules magnétiques par électrospray
Partie A Fonctionnement d’un électrospray
III.A.1 Introduction
III.A.2 Fonctionnement de l’électrospray
III.A.2.1 Formation du cône de Taylor
III.A.2.2 Mécanismes d’expulsion des charges
Partie B Partie expérimentale
III.B.1 Montage Général
III.B.1.1 Source ionique
III.B.1.2 Sas de décompression
III.B.1.3 Enceinte sous vide
III.B.2 Obtention d’un dépôt de nanoparticules
Partie C Résultats et interprétations
III.C.1.1 Nombre de charges nécessaires selon le nombre de nanoparticules
III.C.1.2 Evolution des gouttes par CRM
III.C.2 Nanoparticules de Fe(0) et FeCo
Synthèse chimique
III.C.2.1 Dépôt
III.C.2.2 Résultats
III.C.2.3 Interprétation des résultats
III.C.3 Nanocubes de 16 nm
III.C.4 Nanobâtonnets de 150 nm de long et 30 nm de diamètre
Partie D Conclusion
Conclusion générale
Bibliographie