Le dépistage combiné
Historique En 1866, John Langdon Dow, médecin Britannique, décrit pour la première fois le tableau clinique de la Trisomie 21. Cependant, ce n’est seulement qu’en 1958, qu’un généticien Français, J. Lejeune, met en évidence une origine génétique au syndrome : la présence d’un troisième chromosome sur la paire vingt-et-un du caryotype. (3) Le développement du diagnostic prénatal ces cinq dernières décennies a permis de mettre en évidence une corrélation entre l’âge maternel et le risque de T21. En effet, le risque d’avoir un enfant trisomique augmente avec l’âge. Cette relation explique que, pendant plusieurs années, toutes les patientes de plus de 38 ans se voyaient proposer de façon systématique une amniocentèse. Cette stratégie de dépistage avait deux inconvénients majeurs. Dans un premier temps, les risques liés aux techniques de prélèvements avaient pour conséquence un taux de fausses couches élevé chez cette catégorie de patientes alors que le plus souvent, le fœtus était indemne d’anomalie chromosomique. Et, dans un second temps, cette stratégie de dépistage excluait du diagnostic les femmes jeunes, qui n’était pas à risque nul de T21. C’est dans les années 1980, pour palier à cette problématique, qu’a été mis en évidence la présence dans le sang maternel de marqueurs spécifiques à la grossesse. Le dosage de ces marqueurs permet aujourd’hui d’estimer un risque pour la patiente de porter un enfant atteint de trisomie 21. Depuis 1997, ce test de dépistage est proposé à toutes les patientes, quel que soit leur âge.
Objectifs Le test de dépistage par les marqueurs sériques maternels (MSM) de la Trisomie 21 a pour objectif d’établir un risque pour le fœtus d’être porteur de la T21. Depuis 2010, les recommandations préconisent de le réaliser au premier trimestre de la grossesse. En effet, sa fiabilité est meilleure. (4) Au cours du premier trimestre, il porte le nom de dépistage combiné. Il associe l’âge maternel, la mesure de la clarté nucale (CN), et le dosage par une prise de sang maternel de marqueurs spécifiques de celui-ci :
▪ La PAPP-A : synthétisée par le trophoblaste. Sa concentration augmente jusqu’au terme de la grossesse.
▪ La fraction libre de l’unité béta de l’hormone Chorionique Gravidique : synthétisée également par le trophoblaste. Son taux augmente jusqu’à 10 semaines d’aménorrhée (SA) puis il diminue. (5)
Pour quelles patientes ? Aujourd’hui, en France, le Code de la Santé Publique prévoit que toutes les femmes enceintes, quel que soit leur âge, se voient proposer la possibilité d’effectuer le test de dépistage de la T21 au cours du premier trimestre de leur grossesse. (6) Plus que de proposer le test de dépistage de façon systématique, le professionnel de santé se doit de donner une information complète et claire sur celui-ci. En donnant ces informations, il laisse alors le libre choix à la patiente, de réaliser le test de dépistage tout en évitant d’influencer ou de contraindre celles qui prennent le choix de ne pas le réaliser.
Forme du résultat Le résultat du test combiné est exprimé sous forme de risque. Par convention :
-Le risque pour le fœtus d’être porteur d’une T21 sera considéré comme élevé s’il est supérieur à 1/250
-Le risque pour le fœtus d’être porteur d’une T21 sera considéré comme faible s’il est inférieur à 1/250 Il est important de souligner qu’un résultat à risque élevé ne conclut pas en l’existence d’une trisomie 21 de façon certaine, et à contrario, un risque faible n’est pas synonyme de l’absence certaine d’une T21 chez l’enfant. De même, afin d’améliorer la compréhension des patientes, il est important de souligner la différence de définition des mots dépistage et diagnostic. En effet, le test de dépistage de la T21 se définit comme un test permettant de mettre en évidence un risque pour le fœtus d’être porteur de la T21. En revanche, les résultats des tests de diagnostic se définissent comme les résultats de certitude, pour confirmer ou infirmer, l’atteinte du fœtus par ladite maladie.
Le Narcissisme
Dès son enfance, la femme crée de façon partiellement consciente l’image de son enfant idéal, appelé « enfant imaginaire ». Celui-ci se construit sur les bases de son histoire, sur ses valeurs familiales, sur son prisme culturel et sur ses désirs. L’enfant imaginaire est empreint d’espoir. Il est l’être parfait à ses yeux, dépourvu de défauts. Au T1, il existe une indifférenciation psychique de la patiente et de son enfant : ce qui laisse peu de place pour les représentations liées à celui-ci. L’enfant est alors une continuité d’elle-même. C’est dans ce contexte que la grossesse renforce le narcissisme de la mère. (10) C’est ainsi que l’annonce d’un résultat à risque d’anomalie chromosomique engendre une réelle blessure narcissique pour la mère. Le doute du résultat laisse supposer que l’enfant attendu ne correspond plus à celui qui a été rêvé. Le présent n’est pas à la hauteur de ce qu’elle avait espéré. L’annonce favorise l’élaboration d’un imaginaire de « monstruosité ». Elle peut se sentir humiliée et blessée par ce fœtus qui est la continuité d’elle-même. En psychanalyse, une blessure narcissique est liée à une prise de conscience. La patiente réalise alors que l’image qu’elle avait d’elle-même et de son enfant est erronée. Cette prise de conscience peut entraîner une perte de confiance en soi importante et conduire, dans certains cas, à des difficultés psychologiques plus importantes et pérennes
Transparence psychique
La transparence psychique est un concept, mis en évidence par Monique Bydlowski, selon lequel, chez la femme enceinte, l’inconscient devient plus accessible. En effet, il existe un accès à la conscience des éléments du passé et des événements refoulés grâce à une censure beaucoup plus perméable et un abaissement des défenses au cours de la période de gestation. M. Bydlowski définit la grossesse comme l’opportunité d’une « rencontre intime avec soi-même ». (13) Ce mécanisme, dépendant de chaque femme, est d’intensité variable. Dans certains cas, de cette transparence psychique,ressurgiront des souvenirs douloureux et des conflits du passé. (7) Dans ce contexte, la grossesse peut donc être définie comme une période de crise maturative, propice à la proposition de relation d’aide. Cette réceptivité à la relation d’aide s’explique en partie par la disponibilité d’une femme plus ouverte à parler d’elle-même et de son passé. De même, l’hypersensibilité maternelle au cours de la grossesse lui confère une capacité à vivre les choses de façon plus intense. Elle rend la patiente plus vulnérable face aux situations de stress et d’angoisse.
Vécu de l’amniocentèse et de la BT
Quelques jours après la réalisation de l’entretien, les patientes effectuent le test à visée diagnostic de la T21. Comme-vu ci-dessus, l’entretien, pour la majorité des patientes, a une fonction rassurante. Cependant, le jour de l’amniocentèse ou de la BT, plus des deux tiers des patientes (70%) se sentent angoissées. Cette angoisse n’est pas fonction de la qualité de l’entretien ou de la présence d’un accompagnement spécifique. Bien que celle-ci peut être diminuée par la présence d’un soutien en amont du geste, l’angoisse du geste le jour-même est physiologique. Freud la décrit comme « l’angoisse-signale ». (41) Celle-ci désigne un dispositif mis en action par le moi, devant une situation de danger, de façon à éviter d’être débordé par l’afflux des excitations. Son objectif est de protéger la patiente. Le signal d’angoisse reproduit sous une forme atténuée la réaction d’angoisse vécue dans une situation traumatique, ce qui permet de déclencher des opérations de défense. Par la suite, la totalité des patientes qui ont réalisé l’amniocentèse ou la BT ont bien vécu le geste. Elles soulignent l’importance de la présence des professionnels de santé, de l’aide-soignant-au médecin, ce qui leur a permis de se sentir accompagnées et rassurées le jour du geste.
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Table des matières
Introduction
1 Vécu du test de dépistage de la Trisomie 21 du premier trimestre
1.1 Le dépistage combiné
1.2 Remaniements psychologiques du premier trimestre
1.3 L’annonce d’un résultat à risque
2 De l’annonce des résultats du test de dépistage à l’entretien : une période de remaniements psychologiques
2.1 Mécanismes de défense des patientes face à l’annonce
2.2 Impacts psychologiques de la suspicion de Trisomie 21
3 Vécu des patientes lors des tests diagnostiques
3.1 Les prélèvements ovulaires
3.2 Particularité du Diagnostic Prénatal Non Invasif
3.3 Vécu du geste de diagnostic
4 Présentation de l’étude
4.1 Objectifs
4.3 Méthodologie
5 Résultats
5.1 Caractéristiques de la population
5.2 Vécu du test de dépistage de la T21
5.3 Vécu de l’entretien
5.4 Vécu des tests diagnostics
5.5 Accompagnement et projection
6 Validité de l’étude
7 Analyses des résultats
7.1 Population
7.2 Le consentement
7.3 L’annonce : un moment crucial de la prise en charge
7.4 L’entretien
7.5 Vécu de l’amniocentèse et de la BT
7.6 Et le DPNI ?
7.7 L’accompagnement par les professionnels
8 Discussion
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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