Démarche expérimentale, validation, et ostensifs informatisés

L’intégration des nouvelles technologies dans l’enseignement scolaire à tout niveau est devenu un objectif de politique éducative dans le monde entier. Les recherches sur l’utilisation des technologies par les enseignants montrent que cette intégration est très problématique. La grande majorité des enseignants qui utilisent les technologies dans leur exercice professionnel le font en dehors de la classe (préparation de cours et des évaluations), et ceux qui les utilisent en classe ont tendance à restreindre fortement leur utilisation par les élèves (Betrancourt, 2007). Le cas de l’enseignement des mathématiques n’est pas une exception dans ce panorama.

Dans les années 1998-2000, le Ministère de l’Education de la Colombie a développé le projet « Intégration des Nouvelles Technologies dans l’Enseignement des Mathématiques ». Le but de ce projet était de générer des expériences et des recherches autour de l’utilisation des technologies informatiques pour l’enseignement des mathématiques. Dans le cadre de ce projet, a été constitué un réseau d’enseignants de mathématiques d’écoles secondaires et d’universités, pour collaborer à des expériences de formation et de recherche, en utilisant des calculatrices TI-92, qui incorporent le logiciel Cabri-géomètre de géométrie dynamique . Ayant participé à ce projet dès son élaboration jusqu’à son évaluation, j’ai pris conscience du rôle fondamental de la formation des enseignants dans un projet de ce genre, et de leurs difficultés d’assimilation des nouvelles pratiques mathématiques adaptées aux nouveaux outils disponibles. En effet, on a pu constater que malgré les cours de formation intensifs à l’utilisation de la calculatrice, et la proposition d’un projet didactique autour de la résolution de problèmes, les enseignants faisaient une utilisation ostensive de la technologie, avec des activités très dirigées (Acosta et al, 2004). Ruthven (2004) montre aussi que lorsqu’il y a un effort d’utilisation des logiciels de géométrie dynamique en classe, dans une grande majorité des cas, les enseignants adoptent une stratégie ostensive. Or, les recherches en didactique des mathématiques signalent cette stratégie ostensive comme source de difficultés pour l’apprentissage, étant donné que la construction du sens du savoir mathématique se produit dans l’interaction avec des problèmes auxquels ce savoir donne solution (Vergnaud 1991). C’est seulement dans le long terme qu’une évolution des pratiques commence à se développer, liée à une double expertise de la part des enseignants : expertise dans l’usage de la technologie, mais aussi dans la « lecture mathématique » qu’ils peuvent faire des actions des élèves avec la technologie (Lagrange, 2002). Dans le but d’améliorer les connaissances sur ces phénomènes, j’ai entrepris une première étude dans mon mémoire de DEA «Environnements Informatiques d’Apprentissage Humain et Didactique » de l’Université Joseph Fourier de Grenoble.

Les mathématiques comme praxéologie : tâches, techniques, technologies, théories 

Les mathématiques ne peuvent donc se décrire et se comprendre que comme une pratique humaine, une « praxéologie ». Les composantes d’une praxéologie sont les types de tâches, les techniques, les technologies et les théories. Dans une institution donnée, les sujets ont des tâches à accomplir, travail qu’ils effectuent avec certains procédés appelés « techniques ». L’ensemble ‘type de tâches-techniques’ constitue un bloc de savoir-faire. Il faut signaler que toute institution a tendance à n’utiliser qu’une certaine technique pour accomplir ses tâches, technique qui deviendra routinière et naturalisée au point de ne pas se différencier de la tâche. Pour qu’une technique puisse s’intégrer et survivre dans une institution donnée, elle doit être expliquée et justifiée. Le discours qui accompagne la technique pour répondre à ces besoins, est appelé « technologie » de la technique. Mais les technologies à son tour doivent être expliquées et justifiées, par le moyen des « théories », qui constituent des « technologies des technologies ».L’ensemble ‘technologiesthéories’ constitue le bloc du savoir théorique. Même si dans les institutions éducatives on a tendance à privilégier le savoir théorique et le présenter comme origine du savoir-faire, l’approche anthropologique situe le bloc ‘tâches-techniques’ comme le lieu de genèse du savoir. On peut concevoir ainsi la (re)construction du savoir comme un processus qui part de l’acceptation d’une ou de plusieurs tâches problématiques, c’est-à-dire des tâches pour lesquelles on ne dispose pas de technique appropriée. Les sujets doivent donc produire des techniques pour résoudre ces tâches, et les perfectionner. C’est le développement du savoirfaire. Mais dans la mise au point de ces techniques, les sujets développent un discours explicatif et justificatif, discours qui constitue la technologie de ces techniques. Finalement, la théorie est le résultat du travail de systématisation de différentes technologies, en les articulant et en expliquant leurs relations. L’enseignant est conçu comme directeur de l’étude, et comme tel, il organise différents dispositifs didactiques – activités, matériaux, organisations, tâches- (Chevallard, Bosch et Gascon, 1997) afin de mettre en scène les différents moments de l’étude. Pour notre travail, nous adoptons un type d’organisation didactique constructiviste (Bosch et Gascon, 2002), qui privilégie les moments ‘technologico-théorique et exploratoire’. La TAD considère ainsi deux praxéologies différentes, mais indissociables : une praxéologie mathématique, et une praxéologie didactique qui lui est associée. La praxéologie mathématique fait référence aux tâches, techniques, technologies et théories relatives à la problématique mathématique, la praxéologie didactique fait référence aux tâches, techniques, technologies et théories relatives au travail de l’enseignant, c’est-à-dire à la mise en scène et le développement de la praxéologie mathématique qu’il veut proposer à ses élèves.

Les objets mathématiques : ostensifs/non ostensifs et « l’instrumentation mathématique » 

Afin de caractériser l’activité au sein des institutions, il faut définir les objets mathématiques qui se trouvent au centre de cette activité. La TAD définit deux types d’objets : Les objets ostensifs sont des objets qui ont une matérialité qui peut être captée par les sens – des écritures, des sons, des gestes, etc.- et qui peuvent, de ce fait, être manipulés.

Les objets non ostensifs n’ont pas de matérialité, mais ils se constituent comme des contrôles qui régissent la manipulation des objets ostensifs. Ces deux types d’objets sont à la fois indépendants et solidaires. Solidaires car on ne peut accéder aux objets non ostensifs que par la manipulation des objets ostensifs, et on ne peut manipuler les objets ostensifs que par l’activation de non ostensifs. Indépendants, puis qu’il n’y a pas de règle intrinsèque pour déterminer la relation entre certains ostensifs et certains non ostensifs. Cette association est arbitraire, et se produit au cours de l’action dans l’institution. Une technique ne peut être décrite que comme manipulation d’objets ostensifs, réglée par des non ostensifs. De ce fait, les objets ostensifs et non ostensifs deviennent indissociables des technologies et des théories. A tel point que toute modification, si petite soit-elle, des objets ostensifs, implique une reconstitution de la praxéologie toute entière. Les objets ostensifs ne sont pas des données naturelles, mais une construction institutionnelle. C’est pourquoi il n’est pas suffisant de les montrer pour qu’un sujet puisse les appréhender. « Ils –les objets ostensifs- sont des instruments de l’activité mathématique, des outils matériels sans lesquels l’action ne peut pas se réaliser. La fonction sémiotique des ostensifs, leur capacité à produire du sens, ne peut en effet être séparée de leur fonction instrumentale, de leur capacité à s’intégrer dans des manipulations techniques, technologiques, théoriques » (Chevallard, 1999).

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Table des matières

CONTENU
1 Introduction
2 Cadre théorique et problématique
2.1 Théorie Anthropologique du Didactique
2.1.1 Les mathématiques comme praxéologie : tâches, techniques, technologies, théories
2.1.2 Les objets mathématiques : ostensifs/non ostensifs et « l’instrumentation mathématique »
2.1.3 Discussion de la problématique avec la TAD
2.2 La théorie de l’instrumentation
2.2.1 Le problème de l’activité instrumentée
2.2.2 De l’artefact à l’instrument
2.2.3 La double genèse : instrumentation et instrumentalisation
2.2.4 Instruments et apprentissage
2.2.5 Discussion de la problématique en utilisant l’instrumentation
2.3 Validation et théorie des situations
2.3.1 Discussion de la problématique du point de vue de la validation
2.4 Les Technologies de l’Information et de la Communication et l’apprentissage
2.4.1 Les micro-mondes
2.4.2 Cabri comme micro-monde
2.4.3 Cabri et validation
2.4.4 Invalidation par déplacement des constructions ‘papier-crayon’
2.4.5 Démarche expérimentale
Questions de recherche
Questions de recherche
3 Description de l’ingénierie de formation d’enseignants
3.1 Choix issus d’hypothèses de travail
3.2 Choix mathématiques
3.2.1 Choix du type de problèmes
3.2.2 Choix des techniques
3.3 Choix didactiques
3.3.1 Praxéologie didactique pour enseigner la géométrie en secondaire inférieur à l’aide de Cabri
3.4 Méthodologie générale
3.5 Population
3.6 Dispositifs didactiques de la partie mathématique de la formation
3.6.1 Démarche expérimentale
3.6.2 Démarche empiriste
3.6.3 Problématisation
3.6.4 Validation, invalidation, déplacement
3.6.5 Validation théorique
3.6.6 Choix de la séquence de problèmes
3.6.7 Organisation du travail
3.6.8 Données recueillies
3.7 Dispositifs didactiques de la partie didactique de la formation
3.7.1 Explicitation de la praxéologie didactique
3.7.2 Travail autour des phénomènes dynamiques
3.7.3 Instrumentation et instrumentalisation
3.7.4 Séquence proposée
3.7.5 Analyse didactique
3.7.6 Séquence travaillée pendant le cours présentiel
3.7.7 Données recueillies
3.8 Hypothèses de recherche
4 Analyse de la partie mathématique
4.1 Méthode et grille d’analyse
4.2 Cours présentiel
4.2.1 Premier problème
4.2.2 Problème 3
4.2.3 Problème 7
4.2.4 Problème 8
4.2.5 Problème 10
4.3 Période de pratique avec suivi à distance
4.3.1 Problèmes proposés
4.3.2 Indices de développement d’une démarche expérimentale avec Cabri
4.3.3 Le contrôle théorique des constructions, le problème de la discussion
4.3.4 Problème d’instrumentation des nombres dans Cabri
4.4 Synthèse des résultats de la partie mathématique
5 Analyse de la partie didactique
5.1 Méthode et grille d’analyse
5.2 Période de pratique
5.2.1 Assimilation de la séquence proposée pendant le cours présentiel
5.2.2 Traces d’éléments techniques et technologiques de la praxéologie didactique :
5.2.3 Analyse didactique déficiente:
5.3 Observation finale
5.3.1 Utilisation du ‘jeu de construction’ avec la validation par déplacement
5.3.2 Existence d’un canevas pour l’intervention
5.3.3 Utilisation du logiciel pour invalider des interprétations mathématiques fausses
5.3.4 Les élèves sont accaparés par certains phénomènes visuels, et ne voient pas les autres
5.3.5 Effets didactiques
5.4 Synthèse des résultats de la partie didactique
6 Conclusions

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