DÉGRADATION SOUS EFFET COURONNE
Rupture diélectrique ou claquage
La rupture diélectrique d’un isolant correspond à la création d’un arc électrique traversant l’isolant se produisant soit par une perforation ou un contournement. Lorsqu’un isolant est soumis à une tension suffisamment élevée pour générer un champ capable de créer des décharges à la surface, l’érosion de l’isolant débute. Au-delà de cette tension, le champ électrique devient plus intense, l’isolant perd ses propriétés isolantes et permet le passage de l’arc électrique et le claquage se produit. La tension à laquelle la rupture diélectrique se produit présente la tension de claquage.
Dissado (1992) a classé la rupture diélectrique dans les isolants en trois catégories:
• Le modèle à faible niveau de dégradation, dans lequel les propriétés du système d’isolation sont assujetties au champ électrique avec possibilité de contribution de d’autres facteurs.
• Le modèle déterministe, dans lequel la rupture ultime est liée à l’effet direct d’un événement antérieur ou d’une condition qui a été créé suite à un dépassement du champ électrique critique.
• Le modèle stochastique dans lequel une variation du champ électrique causée par des inhomogénéités peut mener à une forte probabilité que la rupture diélectrique se produise.
D’autre part, les modèles déterministes sur les isolants solides peuvent être classés, selon les mécanismes menant à la rupture, en quatre catégories : claquage électrique, claquage thermique, claquage électromécanique et le claquage par décharges partielles.
Claquage intrinsèque
Il s’agit du mécanisme le plus simple parmi les différents mécanismes de claquage existants.
Ce type de claquage appelé parfois «claquage purement électrique» ne dépend pas des électrodes ni de l’épaisseur de l’isolant. Sous l’effet du champ électrique, des électrons de la bande de conduction entrent en collision avec les particules de l’isolant produisant le claquage.
Claquage thermique
Le claquage thermique se produit lorsque la chaleur fournie par effet joule lors du passage du courant, dans un isolant, dépasse celle qui doit être évacuée. La température de l’isolant augmente entrainant une augmentation de sa conductivité donnant la possibilité de rupture par emballement thermique.
Claquage électromécanique
En plus des contraintes électriques, ce type de claquage dépend fortement des propriétés mécaniques notamment le module de Young (Dissado, 1992). Il est la résultante de l’effet des deux contraintes électriques et thermiques. Lorsque l’isolant est assujetti à un champ électrique intense, son épaisseur tend à diminuer sous l’effet de l’attraction électrostatique entre les électrodes. Cela entraine un renforcement du champ électrique menant à sa rupture.
Claquage par décharge partielle
L’inhomogénéité dans un isolant qui se présente sous forme de vides ou défauts dans la structure d’un isolant peut être la cause principale d’une défaillance à long terme. Les décharges partielles apparaissent dans les isolants solides lorsque le champ électrique dépasse la valeur critique (valeur d’amorçage d’une décharge). Tant que l’isolant est soumis à des DP, des cratères vont être formés à travers l’isolant causant la destruction de l’isolant.
Les matériaux candidats
Pour des raisons de confidentialité, les conditions de préparation des composites étudiés et les recettes détaillées ne seront pas divulguées.Le matériau VNT840 comprend trois lots soit la boite#4, boite#16 et boite#28. Ces lots correspondent à des échantillons du début, de milieu et de la fin de la ligne d’extrusion. Il s’agit de composites à base de polyéthylène téréphtalate recyclé (PET) comme matrice, renforcés de fibres de verre, de mica et de noir de carbone. Ces composites sont destinés à la fabrication des supports de bougies d’allumage pour l’automobile.
Les échantillons étudiés sont des disques de 101 mm de diamètres et 1,6 mm d’épaisseur. Ils sont fabriqués par le Groupe Lavergne selon le procédé d’injection à partir de granules de PET recyclé, contenant des flocons de mica et des fibres de verre. Du noir de carbone ainsi que des additifs comme des plastifiants sont aussi incorporés afin d’améliorer l’aspect de surface.
Les fibres de verre ont des bonnes propriétés mécaniques et une bonne résistance thermique.
Ils ont un champ de claquage élevé et un facteur de dissipation faible. Les fibres de verre utilisées dans les matériaux candidats sont du type E sans sodium. Ce type de fibre de verre est employé pour améliorer les propriétés mécaniques des composites.
Le mica est utilisé sous forme de flocons de deux tailles différentes 60S et 150S ce qui correspond à 254 µm et 89 µm . Le mica, qui joue le rôle de barrière diélectrique grâce à son champ de claquage élevé et sa résistance aux décharges partielles, a un facteur de perte constant jusqu’à 50MHz et une stabilité thermique jusqu’à 600°C (Pham, 2005).
Calorimétrie différentielle à balayage (DSC)
L’analyse DSC (Differential Scanning Calorimetry) est une méthode qui sert à déterminer la variation du flux de chaleur absorbée ou dégagée par le spécimen en fonction de la température ou du temps lorsqu’il est soumis à un programme de température sous atmosphère contrôlée. Lorsque le spécimen est chauffé, il peut survenir des changements de phases endothermiques ou exothermiques accompagnés d’échange de chaleur. L’appareil dispose de deux cellules de mesure, l’une qui est vide est prise comme référence et l’autre contenant l’échantillon à analyser. Cette méthode nous permet de déterminer la température des différentes transformations survenues et de quantifier le flux de chaleur.Les mesures de DSC ont été réalisées avec un analyseur Perkin Elmer Diamond entre 0 et 300°C sous atmosphère inerte (N2) avec une vitesse de balayage de 10°C. min-1.
Mesures dans le domaine fréquentiel
Des mesures diélectriques ont été effectuées sur une gamme de fréquence allant de 10-2 jusqu’à 106 Hz selon la configuration plan-plan à l’aide d’un dispositif de mesures diélectriques Novocontrol alpha-N et du porte échantillon modèle 8009. Les mesures ont été enregistrées via le logiciel de pilotage Windeta fourni par la compagnie Novocontrol.
Description du banc d’essai
Il se compose d’une enceinte climatique dans laquelle est placée la cellule de mesure qui représente une configuration pointe-plan. Cette dernière comprend deux plaques rectangulaires (153 x120 x 12,7 mm) en acier qui sont reliées l’une à l’autre par deux tiges isolantes en polyimide capable de résister à des températures très élevées allant jusqu’à 300°C.
La plaque inférieure est mise à la terre et représente donc l’électrode passive. La plaque supérieure est percée à son centre portant une colonne filetée permettant de tenir à son extrémité inférieure une pointe en acier au carbone recouvert de Nickel. Cette pointe de 50 mm de longueur représente l’électrode active. La distance inter électrode est variable et peut être ajustée à l’aide de la vis micrométrique soudée à l’extrémité supérieure de la colonne. La source d’alimentation comprend un générateur de fonction standard modèle Topward 8102 permettant de générer une onde sinusoïdale à une fréquence de 300 Hz afin d’accélérer le vieillissement des matériaux testés.
Ce générateur permet de fournir un signal sinusoïdal maximum de 20 V.
La tension fournie par le générateur est élevée par la suite à l’aide d’un amplificateur non inverseur modèle TREK 20/20A capable d’offrir un gain fixe de 2000V /V dans la plage de 0 à ± 20 kV avec une gamme de sortie de 0 à ± 20 mA.
L’oscilloscope Tektronix TDS2012B qui est branché au générateur permet de visualiser le signal de la tension et du courant de décharge ainsi que les décharges couronnes détectées par le moniteur de courant Pearson .
Procédure expérimentale
La procédure expérimentale suivie pour réaliser les tests de dégradation des matériaux sous effet couronne est la suivante:
• Nettoyer les échantillons à l’éthanol ensuite les sécher avant la manipulation.
• Placer l’échantillon dans la cellule de mesure. Des pinces en plastiques peuvent être utilisées pour fixer l’échantillon et assurer la planéité de la surface de l’échantillon à tester.
• Ajuster la distance inter électrode à l’aide de la vis micrométrique soudée à la tige reliée à la pointe.
• Régler le four à la température désirée (la température maximale que le four peut atteindre est de 200°C). La température du four peut être contrôlée par un thermocouple numérique.
• Régler la fréquence et la tension à l’aide du générateur (un signal sinusoïdal apparait à l’écran de l’oscilloscope). Une tension de 3 Volts (valeur nominale) sera amplifiée à 6 kV à la sortie.
• Vérifier que le système des décharges partielles a bel et bien détecté des décharges au niveau de la pointe.
• Appliquer la tension une fois que l’environnement est thermiquement stable. Une fois la source HT estimée, il est possible de contrôler la tension envoyée sur l’échantillon en utilisant un multimètre branché à l’amplificateur. La tension s’applique pendant une durée bien déterminée (24 h, 48 h, 72 h, 96 h….) selon le choix.
• L’échantillon est retiré de l’enceinte climatique dès que la tension appliquée est arrêtée.
Le prototype a été testé jusqu’à 12 kV. Au-delà de cette tension, l’effet de l’amplitude n’a été vérifié afin d’éviter le passage à l’arc électrique.
Mesure de la tension d’initiation
Nous tenons à présenter dans cette partie quelques mesures pour déterminer la tension d’initiation de la décharge couronne tenant en compte l’effet de la tension appliquée, le rayon de courbure de la pointe et la distance inter électrode.
Afin de déterminer la tension d’initiation de la décharge au voisinage de la pointe, une caméra UV Corona Finder et un système de mesure de décharges partielles Mtronix ont été utilisés. L’étude se fait en régime sinusoïdale à une fréquence de 300 Hz afin d’accélérer le vieillissement des matériaux. La distance inter électrode étant de 1,65 mm et la pointe utilisée ayant un diamètre de cylindre de 8 mm et un rayon de courbure de 1,5 mm.
Au début, l’amplitude du signal de sortie était de 1 kV. Cependant, pour les conditions d’application, cette tension n’était pas suffisante pour initier la décharge au voisinage de la pointe. La tension a été augmentée petit à petit jusqu’à ce que la décharge soit détectée. La valeur nécessaire pour allumer la décharge à 300 Hz pour une distance inter électrode de 1,65 mm avoisine 3,0 kV. Le champ électrique atteint à ce moment est de 2,37 kV/mm. C’est ce qu’on appelle le champ d’allumage ou le champ d’amorçage. L’utilisation de la pointe de 2 mm nécessite une tension de 3,4 kV comme seuil d’amorçage de la décharge. Ce qui donne 2,65 kV/mm comme champ d’allumage. Ces valeurs ont été obtenues par la formule de Mason décrite auparavant.
|
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1 Énoncé de la problématique
1.2 Généralités
1.2.1 Le polyéthylène téréphtalate (PET)
1.2.2 Propriétés électriques principales des PET
1.2.3 Propriétés thermiques du PET
1.2.4 Les propriétés mécaniques du PET
1.2.5 Recyclage du PET
1.2.6 Les matériaux composites
1.3 Les décharges partielles et le mécanisme de la rupture diélectrique
1.3.1 Les décharges partielles
1.3.2 Courant et tension d’une décharge couronne
1.3.3 Décharge couronne, principe et topographie
1.3.4 Rupture diélectrique ou claquage
1.3.4.1 Claquage intrinsèque
1.3.4.2 Claquage thermique
1.3.4.3 Claquage électromécanique
1.3.4.4 Claquage par décharge partielle
1.4 Synthèse sur la dégradation par vieillissement accéléré et la rupture diélectrique dans le cas des isolants électriques
1.5 Conclusion
CHAPITRE 2 DESCRIPTION DES MATÉRIAUX CANDIDATS
2.1 Les matériaux candidats
2.2 Techniques expérimentales
2.2.1 Observation microscopique
2.2.2 Analyse thermique
2.2.2.1 Analyse thermogravimétrique (TGA)
2.2.2.2 Calorimétrie différentielle à balayage (DSC)
2.2.2.3 Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier (FTIR)
2.2.3 Caractérisation électrique
2.2.3.1 Mesures dans le domaine temporel
2.2.3.2 Mesures dans le domaine fréquentiel
2.2.4 Analyse mécanique
2.3 Conclusion
CHAPITRE 3 DÉGRADATION SOUS EFFET COURONNE
3.1 Généralités
3.2 Description du banc d’essai
3.3 Procédure expérimentale
3.4 Mesure de la tension d’initiation
3.5 Caractérisation des décharges couronnes
3.5.1 Méthode électrique .
3.5.2 Méthode optique
3.6 Étude expérimentale
3.7 Détermination du champ électrique par la méthode des éléments finis (Comsol)
3.8 Conclusion
CHAPITRE 4 ÉTUDE DE LA RUPTURE DIELECTRIQUE
4.1 Généralité
4.2 Technique expérimentale
4.2.1 Test à court terme
4.2.2 Tests à montée en escalier
4.3 Analyse statistique des données
4.4 La distribution à deux paramètres de Weibull
4.5 Conclusion
CHAPITRE 5 ANALYSE DES MÉCANISMES DE DÉFAILLANCE
5.1 Généralités
5.2 Dissection et préparation des échantillons
5.3 Analyse microstructurale
5.3.1 Microscopie optique
5.3.2 Analyse par microscopie électronique (MEB)
5.4 Analyse des résultats du vieillissement accéléré des composites
5.4.1 Effet de la température sur la rugosité selon la loi d’Arrhénius
5.5 Analyse statistique des données de la rupture diélectrique
5.5.1 Tests à court terme
5.5.1.1 Homogénéité le long de la ligne d’extrusion (boîte#4, boîte#16 et boîte#28)
5.5.1.2 Variation de rigidité diélectrique
5.5.2 Test à montée en escalier
5.5.3 Tension de claquage résiduelle
5.5.4 Critère de temps de vie
5.6 Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
Télécharger le rapport complet