Définition et classifications des vascularites systémiques

Généralités

Définition et classifications des vascularites systémiques

Définitions

Sous le terme de vascularites systémiques, on désigne un groupe d’affections caractérisées par une atteinte inflammatoire des vaisseaux sanguins artériels, capillaires et veineux conduisant à une altération de la paroi vasculaire, intéressant aussi bien l’endothélium que la média ou l’adventice. Les sténoses ou l’occlusion des lumières vasculaires par une thrombose ou une prolifération intimale sont la traduction de l’atteinte de l’endothélium vasculaire.

Historique et classification des vascularites

En raison de l’hétérogénéité épidémiologique, étiologique, physiopathologique, clinique et pronostique, la classification des vascularites a toujours fait objet de controverse.
La plupart des classifications proposées, se basent sur des critères cliniques et histologiques à savoir, La classification de Zeek en 1952, la première classification des vascularites, qui adopte le terme d’angéite nécrosante et distingue cinq formes de vascularite: l’angéite d’hypersensibilité, l’angéite granulomateuse allergique, l’artérite rhumatologique, la périartérite noueuse et l’artérite temporale [5]. D’autres maladies sont ensuite inclues dans cette définition comme l’artérite de Takayasu et les granulomatoses avec polyangéite. La classification de Fauci (1978), classification de Lie (1988) et la classification de Kahn et Peltie.

Les deux classifications les plus utilisées sont la classification de l’ACR 1990 qui repose sur des critères cliniques et la classification de Chapel Hill établie en 1993 puis modifiée en 2012 et qui repose essentiellement sur des critères histologiques.

Classification ACR

En 1990, l’American college of Rheumatology (ACR) a établi une classification des principales vascularites systémiques fondée sur des critères cliniques, biologiques et histologiques. On se doit de rappeler que les critères de classification ne doivent pas être utilisés comme critères diagnostiques car ils ne permettent que de distinguer des maladies dont le diagnostic principal, la vascularite, a déjà été fait [4] (voir annexe).

Classification de Chapel Hill 

Classification de Chapel Hill 1993

Les vascularites systémiques sont classées selon le calibre du vaisseau atteint et la nature de l’infiltrat inflammatoire (présence d’une nécrose fibrinoide de la paroi vasculaire et/ou d’un granulome extravasculaire) [4]. Trois groupes de vascularites ont été identifiées :
 Les vascularites des gros vaisseaux qui affectent l’aorte et ses branches de division comme la maladie de Horton et l’artérite de Takayasu.
 Les vascularites de moyen calibre qui touchent les vaisseaux occupant une position intermédiaire à savoir la périartérite noueuse (PAN) et la maladie de Kawasaki.
 Les vascularites de petit calibre qui touche les capillaires et les vaisseaux pré et post capillaires à savoir la granulomatose de Wegener (GW), le syndrome de Churg-Strauss (SCS), la polyangéite microscopique (PAM), le syndrome de Goodpasture, le purpura rhumatoïde et la cryoglobulinémie mixte essentielle.

Classification Chapel Hill révisée 2012

En 2012, la nomenclature de Chapel Hill a été révisée, en raison de la meilleure compréhension des étiologies, de la physiopathologie, des caractéristiques démographiques et cliniques [6].
Les principaux objectifs étaient :
• La mise en valeur des ANCA en individualisant le groupe des vascularites associées aux ANCA
• La modification de la nomenclature de certaines vascularites : le nom de «granulomatose de Wegener » a été remplacé par « granulomatose avec polyangéite », celui de « syndrome de Shurg-Strauss » par « la granulomatose à éosinophile avec polyangéite » et celui de « purpura de Henoch-Scholein » par celui de « vascularite à IgA »
• L’inclusion d’autres vascularites notamment la maladie de Behçet et le syndrome de Cogan.

Classification des vascularites chez l’enfant

Les systèmes ACR 1990 et Chapel Hill ne sont pas valables tels quels chez l’enfant. Certaines vascularites ne sont pas décrites chez l’enfant (la maladie d’Horton par exemple), ou ont une évolution différente [4, 9]. Certaines portent le même nom chez l’enfant et l’adulte mais ne recouvrent pas toujours le même tableau clinique. Si l’histologie les réunit la clinique et l’évolution sont bien souvent différentes [4] (par exemple l’atteinte rénale de la PAN est présente chez plus de 40% des adultes et moins de 2% des enfants) [10].

Deux conférences ont été organisées sous l’égide de l’European League Against Rheumatism /Pediatric Rheumatology European Society (EULAR/PRES) à Vienne en 2005 où une nomenclature pédiatrique spécifique inspirée de celle de Chapel Hell a été proposée pour mettre en valeur les spécificités pédiatriques des vascularites. Et puis à Ankara en 2009 où une autre classification des vascularites primitives de l’enfant a été proposée [10].

Les vascularites à ANCA

Immunopathologie

Les anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles ou ANCA (Anti Neutrophil Cytoplasmic Antibodies), sont des autoanticorps reconnaissant des antigènes du cytoplasme des polynucléaires neutrophiles [] à l’origine d’une fluorescence cytoplasmique diffuse c-ANCA ou périnucléaire p-ANCA et qui sont dirigés respectivement contre la protéinase 3 (PR3) ou la myéloperoxydase (MPO), enzymes contenues dans les granules de sécrétion et les lysosomes des PNN. Les ANCA anti-PR3 sont présents chez 85 à 90% des malades atteints de forme systémique de GPA, tandis que les ANCA anti-MPO sont détectés chez 60 à 75% des malades atteints de PAM et chez environ 40% des malades atteints de l’EGPA [28].

Pathogénicité des anti-MPO

Si les ANCA ont été décrits pour la première fois en 1982, c’est seulement en 2002 que leur rôle pathogène a été démontré in vivo dans un modèle expérimental grâce à des expériences d’immunotransfert dans un modèle murin. Dans ce modèle, des ANCA anti-MPO ont été induits en immunisant des souris invalidées pour le gène de la MPO et ont été secondairement injectés à des souris dépourvues de lymphocytes B et de lymphocytes T (invalidées pour le gène Rag). Chez ces souris, l’injection d’ANCA anti-MPO entraîne des lésions de glomérulonéphrite extracapillaire et apporte la preuve que les ANCA anti-MPO peuvent à eux seuls induire une vascularite nécrosante [28]. (figure-12).

Dans ce modèle, il a très récemment été mis en évidence par la même équipe que les PNN infiltrent les lésions glomérulaires et sont indispensables au développement des lésions de vascularite. Ainsi, la déplétion des PNN circulants par des Ac monoclonaux protège de l’apparition des lésions rénales, tandis que l’injection de lipopolysaccharide (LPS) bactérien est suivie d’un afflux de PNN, qui est suivie d’une augmentation transitoire du TNF-a circulants et de MPO et une aggravation des lésions de vascularite. Dans ce modèle, l’administration d’un Ac monoclonal anti-TNF-a préalablement à l’injection d’ANCA anti-MPO diminue l’intensité des lésions glomérulaires médiées par le LPS, sans toutefois les prévenir [28,33]. Jusqu’à très récemment, aucune preuve définitive du caractère autoimmun des vascularites ANCA-positives n’était disponible chez l’homme. De façon singulière, une démonstration du rôle pathogène des ANCA anti-MPO a été récemment obtenue du fait de la survenue d’un syndrome pneumo-rénal chez un nouveau-né dont la mère avait une polyangéite microscopique diagnostiquée en cours de grossesse.

La vascularite systémique observée chez le nouveau-né était la conséquence du passage transplacentaire des ANCA anti-MPO de sa mère. L’apport de cette observation est très important. En effet, la détection d’autoanticorps au cours d’une pathologie n’est pas suffisante pour faire la preuve d’un mécanisme auto-immun. Selon Rose et Bonna
• Direct, par transfert de cette pathologie d’un individu à l’autre au sein de l’espèce humaine ou de l’homme à l’animal par l’intermédiaire des autoanticorps pathogènes ou des lymphocytes T auto-réactifs ; , différents niveaux de preuve peuvent être obtenus pour documenter le caractère auto-immun d’une maladie:
• Indirect, par la reproduction de la maladie auto-immune humaine dans un modèle expérimental animal ;
• Circonstanciel, par l’accumulation de données cliniques ou expérimentales suggestives.

Ainsi, le transfert de la mère à l’enfant d’une vascularite ANCA-positive permet de classer cette dernière dans les maladies autoimmunes prouvées (critère direct) [34].

Pathogénicité des anti-PR3

Si le rôle pathogène des ANCA anti-MPO est désormais établi, celui des ANCA anti-PR3 n’a pu être clairement démontré in vivo. Injectés à des souris 129/SvEv sauvages par voie intraveineuse, des anticorps anti-PR3 murins n’induisent qu’une inflammation locale de type panniculite et seulement après avoir co-injecté du TNF-α localement, mais sans aucune réaction inflammatoire systémique.

Chez des souris BALB/c, l’immunisation par un peptide complémentaire (AA 105-201) de la PR3 (cPR3) stimule la synthèse d’anticorps anti-cPR3 puis d’anticorps anti-idiotypiques dirigés contre les ANCA anti-cPR3 reconnaissant la PR3 native, permettant de discuter la responsabilité d’agents infectieux à l’origine de la réponse immune anti-PR3, en particulier Staphylococcus aureus. Chez l’homme, la PR3 serait capable d’induire une maturation phénotypique et fonctionnelle d’une population de cellules dendritiques dérivées des monocytes, par l’intermédiaire du récepteur de type 2 de la protéase activée ou PAR-2 (protease-activated receptor-2).

Au cours de la maladie de Wegener, en particulier dans les formes localisées, les cytokines Th1 favoriseraient la formation des lésions granulomateuses. Au cours de cette pathologie, les granulomes contiennent également des lymphocytes B mémoire. Très récemment, Voswinkel et al ont mis en évidence des homologies importantes entre les gènes codant pour la chaîne lourde des immunoglobulines utilisés par les lymphocytes B au sein des granulomes et ceux utilisés par les lymphocytes B produisant des ANCA anti-PR3. Ainsi, le passage d’une forme clinique localisée de maladie de Wegener à une forme systémique avec production d’ANCA pourrait être la conséquence d’une sélection puis d’une maturation d’affinité de lymphocytes B autoréactifs au sein des granulomes [28,30].

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Table des matières

INTRODUCTION 
MATÉRIELS ET MÉTHODES 
RÉSULTATS 
I. Données générales
1. Données sociodémographiques
II. Données cliniques
1. Antécédents
2. Manifestations cliniques
3. Pathologies associées
III. Données paracliniques
1. Hémogramme
2. Bilan inflammatoire
3. Bilan rénal
4. Bilan radiologique
5. Bilan histopathologique
IV. Bilan immunologique
1. Immunofluorescence indirecte
2. Immunodot
V. Résultat des ANCA selon les formes cliniques
1. Formes avec atteinte rénale
2. Forme avec atteinte digestive
3. Formes selon les pathologies associées
4. Formes pédiatriques
DISCUSSION 
I. Généralités
1. Définition et classifications des vascularites systémiques
2. Les vascularites à ANCA
2.1. Immunopathologie
2.2. Epidémiologie
2.3. Expressions cliniques
2.4. Apport de l’immunologie
2.5. Prise en charge thérapeutique
II. Discussion des résultats
1. Données sociodémographiques
2. Données cliniques
2.1. ANCA et interactions médicamenteuses
2.2. Role du tabagisme
2.3. Expressions cliniques des vascularites
a. Manifestations générales
b. Atteinte rénale
c. Atteinte rhumatologique
d. Atteinte digestive
e. Atteinte pleuro-pulmonaire
f. Atteinte neurologique
g. Atteinte cutanée
3. Données immunologiques
3.1. Aspects des ANCA
3.2. Détection des cibles antigéniques
3.3. Cibles antigéniques mineurs des ANCA
3.4. ANCA et formes cliniques
a. ANCA et LED
b. ANCA et pathologies digestives
c. ANCA et polyarthrite rhumatoide
d. ANCA et sclérodermie
e. ANCA et formes pédiatriques
3.5. ANCA et suivi des patients
4. Limites et recommandation de l’étude
CONCLUSION 
RESUMES 
ANNEXS 
BIBLIOGRAPHIE

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