Moins bien connues que la plupart des autres végétaux du fait de leur habitat essentiellement aquatique qui les place hors de l’environnement habituel de l’homme, les algues sont des thallophytes chlorophylliens. La flore algale de la côte sénégalaise est assez riche avec près de 260 espèces d’algues, dont la proportion en algues rouges représente près de 50% (1). Des études effectuées sur les algues ont permis de mettre en évidence, des produits organiques élaborés et s’accumulant dans les cellules où ils se manifestent comme métabolites propres, c’est le cas de l’amidon ou des lipides (2). En effet on remarque l’importance des algues dans la biosphère, par leur photosynthèse ; elles produisent à partir du gaz carbonique une masse annuelle très importante de composés organiques. Elles peuvent aussi jouer le rôle de défense chimique sur le plan écologique en synthétisant un métabolite secondaire (soit une molécule ou une substance toxique) pour survivre du fait de l’environnement où elles peuvent être attaquées par les prédateurs ou par les agents pathogènes. Ce métabolite synthétisé pour sa survie, nocif à une bactérie si on l’isole peut servir de médicaments ou de médiateurs chimiques. On peut aussi noter que certaines rhodophycées ou algues rouges sont employées comme engrais. L’utilisation la plus généralisée des algues rouges est la production industrielle desubstances polysaccharidiques renfermant une certaine proportion de monomères sulfatés.
Ces substances, élaborées au niveau des parois, sont plus ou moins solubles dans l’eau bouillante et donnent des produits industriels : l’agar-agar ou gélose et le carraghénane (3).
L’énumération d’ailleurs incomplète, des usages de ces produits explique qu’à l’heure actuelle, l’industrie des dérivés des algues rouges soit florissante. Ainsi l’étude sur les constituants chimiques des algues constitue un véritable enjeu pour le développement de la recherche de nouveaux métabolites.
GENERALITES SUR LES ALGUES
Définitions et caractères généraux des algues
Les algues sont des organismes chlorophylliens. Elles présentent une très grande diversité morphologique ayant des formes uni ou pluricellulaires. Leur appareil végétatif qui est dépourvu de racines, de tiges et de feuilles est nommé thalle (4). Ce thalle en aucun cas ne comporte des organes différenciés comme en ont les végétaux supérieurs, d’où l’absence de tissus vasculaires. Ils se reproduisent sans jamais donner des fruits, graines ou fleurs d’où le terme de cryptogrammes. Bien que renfermant de façon constante de la chlorophylle, la couleur du thalle n’est pas toujours verte, car un pigment spécifique lié à la classe de l’algue considérée peut s’ajouter au pigment photosynthétique fondamental.
Les algues rouges
Les rhodophycées ou algues rouges viennent après les algues vertes. Elles constituent l’unique classe de l’embranchement des Rhodophytes et essentiellement marines. On compte 4000 espèces qui se répartissent en deux grandes classes (5). Les Bangiophycées (Bangiales) qui sont des formes primitives microscopiques et unicellulaires. A l’exception du Porphyra, algue macroscopique. Les Floridéophycées sont les formes macroscopiques pluricellulaires les plus évoluées. Toutes les algues rouges macroscopiques appartiennent à ce groupe.
Rhodophycées de la côte sénégalaise
C’est la classe d’algues la plus représentée de la côte sénégalaise soit près de 50% de l’ensemble avec quelques espèces très répandues comme le genre Polysiphonia, Laurencia ,Corallina, Meristotheca,Gracilaria etc.
Algue rouge : genre Polysiphonia
La majeure partie des espèces du genre Polysiphonia sont réparties sur toutes les côtes du monde. On dénombre 14 espèces de Polysiphonia dans 25 algues de l’ordre des Céramiales et 9 de la famille des Rhodomélacées apparentées. Donc, à présent le Polysiphonia a une circonscription générale incluant au moins 200 espèces. Les Polysiphonia comportent trois clades fortement étayés, groupe Polysiphonia, groupe Neosiphonia et groupe » multipéricentrique ». Etant donné la confusion qui entoure la taxonomie traditionnelle dans le genre Polysiphonia, une matrice de 28 caractères anatomiques est produite représentant l’espèce des lignées principales du genre Polysiphonia (6). C’est ainsi que différentes familles de composé ont été identifiées à partir du genre Polysiphonia.
Familles de composés isolés du genre Polysiphonia
L’étude des métabolites secondaires du Polysiphonia permet de distinguer les familles de composés suivantes :
– Glucides et dérivés ;
– Bromophénols ;
– Acides gras ;
– Lipides polaires ;
– Amino-acides ;
– Stérols.
Glucides et dérivés ;
Batey et Turvey (8) ont isolé du P. lanosa le composé 6- O-méthyl-4-sulfate βgalactose.
MATERIEL ET METHODES
Présentation de l’espèce Polysiphonia harveyi
Lieu de récolte
L’algue rouge Polysiphonia harveyi a été récoltée au niveau de la petite côte précisément à Joal situé à 114km de Dakar au mois de juillet 2000.
Description de l’espèce Polysiphonia harveyi
L’algue rouge Polysiphonia harveyi appartient à l’embranchement des Rhodophytes, classe des Floridéophycées, ordre des Céramiales et famille des Rhodomélacées (3). La cellule apicale est de forme cylindrique. Elle se divise de façon transversale. L’axe principal a un diamètre qui varie entre 1 et 3 μm. Les branches issues de l’axe sont dressées de façon indéterminée. Les initiales de branches latérales y compris celles du trichoblaste sont séparées par un ou plusieurs segments nus de l’entrenœud. Elle a une symétrie radiale. Le nombre de cellules péricentrales est quatre. Les branches sont unisériées ; Les cellules corticales sont présentes .
Méthodes d’extraction et d’analyse
Généralement on utilise des solvants polaires (méthanol) ou un mélange MeOH / CHCl3 pour l’extraction à froid. Après on procède au fractionnement par chromatographie.
Rappels de chromatographie
La chromatographie est une méthode d’analyse et de fractionnement fondée sur l’entrainement d’une phase mobile le long d’une phase fixe ou stationnaire. Il existe plusieurs techniques de chromatographie.
– Chromatographie sur Couche Mince (CCM)
C’est une chromatographie d’adsorption basée sur des interactions entre un mélange de constituants à séparer. La phase stationnaire est déposée en mince couche sur une plaque de verre ou une feuille en matière plastique ou en aluminium.
L’adsorbant le plus utilisé est la silice 60 (diamètre des pores 60 Armstrong). La phase stationnaire contient une substance fluorescente qui est un silicate de zinc éclairé et détecté par la lumière ultraviolet (UV). Le solvant est déposé au fond de la cuve quelque temps avant le début de la chromatographie pour saturer l’atmosphère. Après dépôt de l’échantillon, la plaque est introduite dans la cuve où il monte par capillarité vers le sommet entraînant les substances qui migrent à une vitesse qui dépend de leur polarité et de celle du solvant.
Chromatographie sur colonne
La chromatographie sur colonne permet de séparer un mélange en vue d’isoler de petites quantités des différents constituants de ce mélange. C’est une chromatographie d’adsorption où l’adsorbant ou support généralement solide (Al2O3, SiO2 …) est dans une colonne en verre munie d’un robinet. C’est une chromatographie par gravité qui se fait souvent à la pression atmosphérique. La séparation est liée à la différence d’adsorbabilité des divers composants du mélange. Les composés les plus adsorbés par la phase stationnaire seront élués moins rapidement au travers de la colonne.
– Chromatographie Liquide Haute Performance (HPLC)
C’est une chromatographie d’adsorption fondée sur la distribution des solutés entre deux phases non miscibles, l’une stationnaire (Silice, Aluminium …) à travers une colonne, l’autre mobile (éluant). Si la CCM et la colonne interviennent surtout dans le fractionnement, la HPLC permet d’isoler les métabolites pratiquement purs. La chromatographie liquide haute performance (HPLC) est une forme de chromatographie sur colonne, permettant la séparation, la détection et la quantification de substances pures .
– Chromatographie en phase inverse
C’est une chromatographie d’adsorption liquide-solide dans la quelle la phase stationnaire se distingue par son apolarité.
Elle est constituée de la silice sur laquelle des chaînes alkylées de longueur variable (C2 à C18) sont greffées au niveau des groupements silanol. La chaîne confère à la silice un caractère hydrophobe. La phase mobile est très polaire et hydrophile. Les molécules hydrophobes vont établir des interactions avec la phase stationnaire et sont ainsi adsorbées. Ainsi plus un soluté est apolaire plus il sera retenu au niveau de la phase solide (stationnaire). Inversement un soluté est polaire, plus il sera entrainé par la phase mobile.
|
Table des matières
INTRODUCTION
I -) GENERALITES SUR LES ALGUES
I- 1) Définition et caractères généraux des algues
I- 2) Classification des algues
I- 3) Les algues rouges
a) Rhodophycées de la côte sénégalaise
b) Algues rouges : genre Polysiphonia
I- 4) Familles de composés isolés du genre Polysiphonia
a) Glucides et dérivés
b) Bromophénols
c) Acides gras
d) Lipides polaires
e) Amino-acides
f) Stérols
II -) MATERIEL ET METHODES
II-1) Présentation de l’espèce Polysiphonia harveyi
a) Lieu de récolte
b) Description de l’espèce Polysiphonia harveyi
II-2) Méthodes d’extraction et d’analyse
a) Rappels de chromatographie
b) Méthodes spectroscopiques
– Spectroscopie de Résonance Magnétique Nucléaire (RMN)
– Spectroscopie de masse
c) Extraction
d) Fractionnement et purification par chromatographie
III -) RESULTATS ET DISCUSSIONS
III-1) Détermination structurale de f2 isolé de la fraction F2
a) Analyse du spectre RMN 13C
b) Analyse du spectre de masse
c) Analyse du spectre RMN 1H
d) Analyse du spectre HMBC
III – 2) Détermination structurale de f’3 isolée de la fraction F3
a) Analyse du spectre RMN 1H
b) Analyse du spectre de masse
III – 3) Détermination structurale de la fraction B isolée de F4
a) Analyse du spectre RMN 1H
b) Analyse du spectre de masse
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE