Historique
Le fait que les élèves aient des devoirs à domicile n’est pas nouveau. En effet, comme nous pouvons le découvrir dans l’ouvrage « Faire ses devoirs, enjeux cognitifs et sociaux d’une pratique ordinaire » coécrit par plusieurs auteurs dont Patrick Rayou (2009), les devoirs existaient déjà il y a 4000 ans environ. Voici un bref extrait d’un fragment de tablette d’un élève : J’ai récité ma tablette et pris mon repas ; j’ai préparé ma nouvelle tablette, j’ai écrit dessus, je l’ai remplie ; après ils m’ont donné mon travail oral et, dans l’après-midi, ils m’ont donné mon travail écrit. Je suis rentré chez moi…J’ai lu ma tablette et mon père était content… […](p.9). Nous remarquons donc que les élèves ont commencé très tôt à réaliser des devoirs à domicile, même si ceux-ci ne se présentaient pas sous la même forme que nous les connaissons actuellement. Selon Rayou (2009), la problématique des devoirs à domicile a totalement changé en un siècle.
Définition du « devoir » et des devoirs à domicile
Premièrement, il serait primordial de définir le mot devoir. Dans la société, chaque être humain possède des droits et des devoirs. Selon Durkheim (1963), « le devoir découle d’une norme qui a elle-même un caractère obligatoire » (p.77). Il dit que le devoir est « une contrainte sur la volonté », mais « que le sujet reste libre de s’y soustraire ». D’après lui, « le devoir est volontaire jusqu’à un certain degré parce sa raison d’être n’est pas toujours bien saisie par l’individu qui s’y astreint » (p.77). Cette dernière phrase peut être appliquée au domaine scolaire. Effectivement, il est probable que certains élèves fassent leurs devoirs pour la simple raison qu’ils n’ont pas envie d’être sanctionnés par la suite. Cependant, ils n’ont peut-être pas compris les réels enjeux des devoirs à domicile ou alors on ne leur a tout simplement jamais expliqué le bienfondé de cette tâche.Les devoirs à domicile sont les travaux que les élèves rapportent de l’école et qu’ils doiventeffectuer à la maison. Ceux-ci rythment les journées et les semaines des élèves et de leurs familles. La quantité et la fréquence de ces devoirs peuvent varier d’une semaine à l’autre, d’un jour à l’autre, mais également en fonction du degré et des enseignants. Ainsi, en matière de devoirs à domicile, il y a autant de pratiques que d’enseignants, car chacun est libre de gérer comme bon lui semble les travaux qu’il donne à ses élèves. Néanmoins, l’enseignant est soumis aux lois et aux ordonnances scolaires.
Les devoirs à domicile en bref selon quelques auteurs
Selon Perrenoud (1994), les devoirs à domicile qu’il nomme « travail scolaire » ne représentent pas un travail comme les autres, car celui-ci n’a pas de répercussion directe sur l’enfant. « Sa principale raison d’être est en principe de favoriser ou de consolider des apprentissages » (p.60). D’après lui, les élèves n’arrivent pas à donner un sens aux devoirs à domicile, ceux-ci étant imposés par l’enseignant. Glasman (2004) affirme que les devoirs à domicile ont pour objectif de permettre aux élèves de s’approprier de différentes manières, « par la familiarisation, la manipulation, l’exercice, la mémorisation » (p.5), des notions vues en classe. D’ailleurs, il semblerait que la tendance des enseignants est de donner des tâches simples aux élèves, afin de s’assurer que ceux-ci les réalisent seuls et non pas en famille. De plus, ceci éviterait de mettre une pression et une charge supplémentaire sur les parents. D’après lui, il y a également d’autres fonctions assignées aux devoirs à domicile et c’est précisément pour cela que les enseignants donnent également des devoirs. En effet, il prétend qu’il y a plusieurs enjeux autour des devoirs à domicile, par exemple, conditionner les élèves au scolaire, donner une bonne image des enseignants et assurer le lien entre l’école et la famille. Canter & Hausner (1995), prétendent que les devoirs à domicile renforcent l’enseignement des enseignants, qu’ils améliorent le rendement des élèves, qu’ils favorisent les élèves dans l’acquisition de bonnes habitudes, mais qu’ils assurent également un lien entre l’école et la maison. « Les devoirs n’ont pas seulement pour but de réviser et de renforcer la matière vue en classe. Ils aident aussi l’enfant à accroître son autonomie et à développer son sens des responsabilités » (p.1). D’après ces auteurs, à l’école, l’enseignant gère le travail que les élèves doivent faire, il structure leur travail. En revanche, à la maison, c’estl’enfant qui doitgérer lui-même son travail et organiser son temps libre en fonction de ses devoirs. Selon Canter et Hausner, l’enfant apprend dans ce processus de décision à :
• Suivre des directives
• Travailler seul
• Commencer et terminer une tâche
• Gérer son temps
• Donner le meilleur de lui-même
Pour Dubois et Navarro-Dubois (2004), « les tâches données toutes les semaines aux enfants ne sont pas sans taches, sans contradictions, sans ambiguïtés, sans problèmes… . Rien n’est clair en matière de devoirs » (p.1). Nous découvrirons plus loin ce qu’ils sousentendent par ces propos.
Les devoirs et les enseignants
Tout d’abord, nous allons cerner les raisons pour lesquelles les enseignants donnent des devoirs.Les enseignants sont tenus de suivre le programme scolaire qui s’avère être conséquent. C’est pour cette raison qu’ils sont contraints de donner aux élèves certaines tâches à accomplir à la maison, pour pouvoir suivre le rythme imposé par les programmes. Selon Favre & Steffen (1988, cités par Dubois & Navarro-Dubois, 2004, p.1), « les enseignants n’ont pas le temps de tout faire en classe » (p.1). Par conséquent, ils renvoient ces activités de mémorisation, de drill et de répétition à la maison et donc aux familles. Ce procédé semble efficace, même si, paradoxalement, les enseignants accordent beaucoup de temps à la préparation des devoirs, à leurs explicitations et à leurs corrections. Ces deux auteurs se questionnent : « Ne pourrait-on pas investir ce temps en classe, sinon mieux, différemment avec les enfants …? Et éviter de considérer les devoirs comme une soupape de sécurité » (p.2). Il serait intéressant de prendre du temps pour y réfléchir. Les enseignants sont les acteurs principaux des devoirs à domicile. Ils préparent les devoirs, les analysent et les transmettent aux élèves. Ce sont eux qui sont à la base de la pyramide et qui auront le dernier mot sur les travaux réalisés par les élèves. Bien évidemment que dans sa classe, l’enseignant s’engage à travailler avec les élèves de manière équitable, afin que ceux-ci aient les mêmes chances de réussir. Plusieurs types de travaux sont donnés par les enseignants ayant chacun des objectifs différents. Voici les trois types de devoirs qu’a répertoriés Rayou (2009) :
• Type 1 : Mémoriser « enfoncer le clou »
• Type 2 : S’exercer « apprendre intelligemment »
• Type 3 : S’organiser « apprendre le goût de l’effort »
Selon cet auteur, dans les devoirs de type 1, les élèves vont « mettre en pli, en quelque sorte les apprentissages faits en classe pour les fixer et les conserver à l’identique » (p.95).Les devoirs de type 2 permettent à l’élève de « constituer des schèmes cognitifs transposables sur de nouveaux objets » (p.95). Ces devoirs-là vont permettre à l’élève de transférer ses connaissances dans d’autres sujets. Dans ce type de travail, l’élève apprend à apprendre. L’élève doit être capable de développer une méthode de travail qu’il pourra appliquer par la suite à d’autres tâches. Les devoirs de type 3 permettent à l’élève de s’habituer à reprendre un travail vu en classe et à le revoir à la maison en le mémorisant et en transportant ses procédures sur d’autres travaux. L’enfant se familiarise également au travail personnel. Ce type de devoir « vise […] à former, sur la durée, un sujet apprenant qui aura lui-même pris le pli du travail » (p.95). Glasman (2004) a, lui aussi, réparti les devoirs en plusieurs catégories :
• Les devoirs de préparation permettent à l’élève de découvrir un thème avant qu’il soit abordé en classe
• Les devoirs de pratique renforcent les acquis d’une leçon précédente
• Les devoirs de prolongement permettent aux élèves d’étendre leurs connaissances à de nouveaux concepts
• Les devoirs créatifs contribuent à ce que les élèves utilisent les concepts connus dans de nouveaux contextes
Cet auteur donne quelques éléments à prendre en compte concernant ces types de devoirs. Par exemple, pour les devoirs de préparation, pour être efficace, il faut que les consignes de départ soient claires et il faut respecter le rythme de chaque élève. Pour ce qui est des devoirs de pratique, leur valeur a été remise en cause à plusieurs reprises, car ces tâches deviennent vite répétitives et ennuyeuses. Quant aux devoirs de prolongement, ils peuvent être pour certains élèves une source de motivation. Pour conclure, les devoirs créatifs semblent être stimulants pour les élèves. Ils peuvent toutefois creuser les inégalités sociales. Les devoirs de type 2 chez Rayou peuvent être reliés aux devoirs créatifs chez Glasman. Chez ce dernier, les devoirs de pratique peuvent rejoindre les devoirs de type 1 chez Rayou. Pour ce qui est des autres types de devoirs, nous ne pouvons pas les rattacher, car ils ont des objectifs différents.
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Table des matières
CHAPITRE 1. PROBLEMATIQUE
1.1 PRESENTATION ET IMPORTANCE DU PROBLEME
1.2 ETAT DES CONNAISSANCES LIE AU THEME
1.2.1 Historique
1.2.2 Définition du « devoir » et des devoirs à domicile
1.2.3 Les devoirs selon les directives cantonales
1.2.3.1 Généralités
1.2.3.2 Finalités
1.2.3.3 Principes
1.2.3.4 Réglementation
1.2.3.5 Les procédures d’apprentissage
1.2.3.6 Structures
1.2.4 Les devoirs à domicile en bref selon quelques auteurs
1.2.5 Les devoirs et les enseignants
1.2.6 Les parents et les devoirs
1.2.7 Les devoirs à domicile, un moyen de communication
1.2.8 Les devoirs à domicile et l’autonomie
1.3 QUESTION DE RECHERCHE ET OBJECTIFS OU HYPOTHESES DE RECHERCHE
1.3.1 Identification de la question de recherche
1.3.2 Objectifs de recherche
CHAPITRE 2. METHODOLOGIE
2.1 FONDEMENTS METHODOLOGIQUES
2.1.1 Recherche qualitative
2.1.2 Approche inductive et déductive
2.1.3 Démarche compréhensive
2.2 NATURE DU CORPUS
2.2.1 Moyen utilisé pour la collecte des données
2.2.2 Population cible
2.2.3 Procédure et protocole de recherche
2.3 METHODES ET/OU TECHNIQUES D’ANALYSE DES DONNEES
2.3.1 Transcription
2.3.2 Traitement des données
2.3.3 Méthodes et analyses
CHAPITRE 3. ANALYSE DES RESULTATS
3.1 REMARQUES
3.2 PRESENTATION DES RESULTATS
3.2.1 Chez les enseignantes
3.2.2 Chez les parents
3.3 ANALYSE DES ENTRETIENS
3.3.1 Chez les enseignants
3.3.2 Chez les parents
3.4 INTERPRETATION ET DISCUSSION DES RESULTATS EN LIEN AVEC LA QUESTION DE RECHERCHE
BIBLIOGRAPHIE
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