Défaillance de l’électronique de commande
L’électronique de commande est l’élément matériel qui permet de traduire les ordres venant du système de contrôle au convertisseur (cf. Figure I. 7). Majoritairement, il s’agit d’un driver (ou allumeur) qui adapte les tensions de commande issues de la modulation (M.L.I.) (0V, +5V) aux tensions de grilles des composants semi conducteurs (-15V, +15V). Les deux interrupteurs de la même cellule sont commandés de façon complémentaire ; quand l’un est passant, l’autre est ouvert. Cette fonction est réalisée par le driver. Généralement, la défaillance de la commande des interrupteurs de puissance est associée à la défaillance des circuits drivers [Schwab 2003]. Les défaillances les plus critiques sont celles liées aux problèmes de connectique entre le driver et la carte de commande (impulsion de commande parasite, rupture des liaisons avec la commande, …), défaillance de la carte de commande et défaillance de l’alimentation des driver [Richardeau 2002 [Vallon(a) 2003]. Elles apparaissent sous forme de deux modes de défaillances :
● le driver est toujours actif et sa tension de sortie reste figée à l’état +15V
● ou bien toujours inactif où sa tension de sortie -15V ou 0V .
Du point de vue fonctionnel, l’apparition de ces anomalies peut avoir des effets néfastes sur tout le convertisseur. En effet, lorsque la sortie du driver est en permanence à l’état +15V, l’interrupteur reste donc à l’état passant. A ce moment, il peut y avoir un courtcircuit de la cellule (et de la source de tension, Ubat sur la Figure I. 7) si la voie de commande de l’interrupteur complémentaire reste intacte. Dans le cas contraire où la sortie du driver est toujours inactive, l’interrupteur concerné reste ouvert en permanence. On ne peut donc pas qualifier ce fonctionnement de défaut en circuit ouvert car la diode en antiparallèle (de roue libre) reste opérationnelle.
Néanmoins, l’industrie actuelle des circuits de commande (allumeurs ou drivers) a réalisé des avancées remarquables surtout dans le domaine de la détection précoce de la défaillance [Dulau 2006]. Sont proposés aujourd’hui des circuits “drivers” (allumeurs) «intelligents» capables de détecter rapidement les courts-circuits et d’envoyer un signal d’alarme au système de contrôle. Ces informations sont alors immédiatement exploitées pour la protection de l’équipement (confinement de défaut) et la reconfiguration pour une marche dégradée (continuité de service). Si de tels dispositifs améliorent la fiabilité du convertisseur, ils peuvent occasionner des pertes de performances en particulier dues aux retards de transmission des signaux.
Les imperfections liées à la commande M.L.I.
Les principaux problèmes des commandes M.L.I. sont liés en partie à la caractéristique de non-linéarité du convertisseur de puissance et aux perturbations de la commande de grille telles que la présence des délais de commutation, de temps de propagation de la commande et les chutes de tension aux bornes de la grille. En réalité, le circuit de commande des semi-conducteurs (M.L.I + driver + grille du semi-conducteur) ne peut pas être assimilé à une source de tension idéale à deux états +15V et -15V. Il comprend plusieurs éléments parasites tels que des inductances, résistances ou capacités qui sont à l’origine des oscillations/perturbation des tensions de commande. De plus, ils induisent des retards dans la transmission des signaux de commande (contrôle au convertisseur) en raison de leur constante de temps des circuits qu’ils forment. Du côté du convertisseur, la non-linéarité la plus contraignante est celle introduite par le temps mort ; temps qui sert comme protection contre le court-circuit de la source de tension [Kim 2003].
Temps morts et tensions parasites générées
Tous les semi-conducteurs de puissance commandés présentent des retards intrinsèques au blocage. C’est le cas, notamment, pour les composants bipolaires (GTO, I.G.B.T.,…). Ces temps de stockage de charges peuvent prendre des valeurs considérables, jusqu’à 10μs pour un GTO (Thyristor à extinction par la gâchette) par exemple. Ce temps dépend énormément des conditions de charge, de la température et de la commande [Foch 2000]. Ce retard peut provoquer, lorsque les semi-conducteurs sont placés sur un bras d’onduleur, un court-circuit de la charge plus au moins long. Ce court-circuit peut être préjudiciable au bon fonctionnement du convertisseur et du système tout entier, d’où la nécessité de les éviter. Le principe utilisé pour remédier à ce problème est l’introduction dans la commande du convertisseur de temps morts fixes, l’extinction est alors immédiate et l’amorçage est retardé [Yong-Kai 2009].
En outre, la déformation de la forme d’onde des courants n’affecte pas uniquement les performances de la chaîne de conversion mais aussi celles du système contrôle-commande puisque les valeurs des courants mesurés (feedback) sont, dans ce cas, erronées [Kim 2003] [Wang 2011]. Plusieurs travaux existent dans la littérature et qui traitent de l’influence du temps mort et les méthodes de compensation. La majorité des travaux proposent d’agir sur le contrôle de la structure pour éliminer les effets du temps mort [Harakawa 2005] [Dong-Hee 2012] [Yen-Shin 2004] [Yong-Kai 2008] [Urasaki 2007] [Kim 2003] [Yong-Kai 2009] [Yong 2011] [Lihua 2007]. La stratégie consiste à prendre en compte la durée du temps mort dans le calcul des durées de commutations des interrupteurs. Après avoir donné un aperçu des défaillances de la commande et les imperfections associées, intéressons-nous aux défaillances du point de vue physique de l’assemblage d’un module de puissance liées aux contraintes du domaine automobile .
Défaillances de l’assemblage d’un module de puissance
Les modules I.G.B.T. sont le siège des mécanismes de dégradation et de vieillissement ayant des origines fonctionnelles ou environnementales. Plusieurs travaux ont été menés pour déterminer les modes de défaillances, leurs causes, leur criticités ainsi que les mécanismes d’accélération du vieillissement. La plupart des études menées concernent les conséquences du cyclage thermique appliqué aux modules I.G.B.T. destinés à la traction électrique que ce soit pour le domaine automobile, ferroviaire ou aéronautique. Les causes de ces modes de défaillance ont plusieurs origines distinctes [Vallon 2003] [Ciappa 2002] [Bouarroudj 2010] [Coquery 2001] [Martineau 2010]; levée des fils de bonding, endommagement des puces ou de la brasure, dégradation du substrat, court-circuit de la grille….etc. Nous proposons dans ce paragraphe un point ciblé sur les modes de défaillances les plus communs qui se manifestent au sein de l’assemblage du module de puissance.
Fissuration et délamination des brasures
Dans la littérature, ce mode de défaillance est qualifié de mode le plus courant dans les modules I.G.B.T., notamment sous l’influence du cyclage thermique. Ce mode de défaillance prend naissance suite aux efforts thermomécaniques du cyclage thermique entraînant la fissuration des brasures, plus particulières au niveau du contact substrat/semelle (cf. Figure I. 2). Cette brasure constitue le maillon le plus fragile car l’écart entre les coefficients de dilatation du substrat (en alumine) et de la semelle (en cuivre) est le plus important de tous. De plus, les imperfections (vide) qui apparaissent lors de l’assemblage (brasage/soudage) ne font qu’amorcer et accélérer la dégradation des brasures.
|
Table des matières
Introduction générale
Chapitre I. Problématique des défaillances, et tolérance aux défauts d’un ensemble convertisseur machine dédié à une application véhicule électrique
1. Introduction
2. Les contraintes électrothermiques et mécaniques spécifiques à l’environnement VE et leur effet sur le composant
2.1. Cyclage thermique et de puissance
3. Problématique des défaillances des composants et de la commande dans une stratégie de modulation M.L.I
3.1. Défaillance de l’électronique de commande
3.1.1 Les imperfections liées à la commande M.L.I
3.2. Défaillances de l’assemblage d’un module de puissance
3.2.1 Fissuration et délamination des brasures
3.2.2 La levée et craquelure des fils de bonding
3.2.3 Cassure et dégradation de la puce semi-conductrice
3.3. Défaillances d’une cellule de commutation
3.3.1 Court-circuit type I
3.3.2 Court-circuit type II
4. Architectures convertisseur polyphasées permettant d’assurer un fonctionnement à marche dégradée pour application VE
4.1. Reconfiguration de l’onduleur classique à trois bras
4.1.1 Fonctionnement à deux phases
4.1.2 Fonctionnement à deux phases avec un bras supplémentaire connecté sur le neutre
4.2. Segmentation de puissance
4.2.1 Architecture électronique en ponts en H alimentant une machine à phases séparées
4.2.2 Architecture électronique alimentant une machine double-étoile
4.2.3 Structures multi-phase
5. Architectures de recharge et de mutualisation des fonctions traction et recharge
5.1. Architectures mono machine
5.2. Architectures multi-machine multi-convertisseur
6. Positionnement des travaux de thèse dans le contexte du projet SOFRACI
7. Bilan et conclusion
8. Bibliographie
Chapitre II. Comparaison entre deux solutions d’électronique de puissance préindustrielles destinées aux applications VE
1. Introduction de la problématique abordée
1.1. Problématique de comparaison entre architectures convertisseur-machine
1.2. Cahier de charge et critères de comparaison
2. Etude comparative en mode traction
2.1. Fonctionnement sans défaut
2.1.1 Onduleur triphasé classique à trois bras
2.1.2 Onduleur triphasé à trois pont en H
2.1.3 Synthèse du comparatif en mode traction sans défaut
2.2. Fonctionnement en mode dégradé
2.2.1 Onduleur triphasé classique à trois bras
2.2.2 Onduleur triphasé en pont en H
2.2.3 Synthèse du comparatif en mode traction dégradé
3. Etude comparative en mode recharge
3.1. Convertisseur classique à trois bras
3.2. Convertisseur en pont en H
3.3. Synthèse du mode recharge
4. Architecture en pont en H avec tension de bus asservie
5. Bilan et conclusion
6. Bibliographie
Chapitre III. Analyse et synthèse de la commande rapprochée de l’onduleur sans défaut pilotant la machine en triphasé
1. Introduction de la problématique abordée
1.1. Structure de contrôle en couple de la MSAP
1.1.1 Modèle de la MSAP
1.1.2 Représentation du modèle de la MSAP dans un repère idoine
1.1.3 Structure de l’algorithme de contrôle en couple de la MSAP : autopilotage
1.2. Modulation de largeur d’impulsion
1.2.1 M.L.I. sur système comportant une voie unique – la M.L.I. intersective
1.2.2 M.L.I. sur système comportant trois voies équilibrées avec neutre flottant- la M.L.I. vectorielle
1.3. Point focal du chapitre III et grille de lecture
1.3.1 Point focal du chapitre III
1.3.2 Cahier des charges de la M.L.I. vectorielle associée à l’actionneur de couple
2. Commande rapprochée de l’onduleur en pont en H alimentant une MSAP
2.1. M.L.I. vectorielle de l’onduleur en pont en H alimentant une MSAP
2.2. Détermination des séquences de M.L.I. pertinentes
2.2.1 Séquence basée sur des vecteurs constitués de tensions monophasées bipolaires
2.2.2 Séquence basée sur des vecteurs à composante homopolaire nulle
2.2.3 Séquence cherchant à construire la composante homopolaire avec des vecteurs également utiles pour la machine principale
2.2.4 Séquence cherchant à utiliser des vecteurs de grande amplitude
2.2.5 Séquence cherchant à utiliser des vecteurs de faible amplitude
3. Etude comparative des cinq méthodes de M.L.I
3.1. Maximisation des performances mécaniques
3.2. Maximisation du rendement
3.2.1 Minimisation des pertes par commutation
3.2.2 Minimisation des pertes supplémentaires
3.3. Mise en œuvre des stratégies M.L.I. dans l’asservissement de couple et ondulation de couple résultante
3.3.1 Ondulation du couple électromagnétique
3.3.2 Ondulation du courant homopolaire
3.3.3 Harmoniques des courants de phases
3.4. Sensibilité des stratégies M.L.I. aux imperfections de la réalisation de la commande.
3.4.1 Sensibilité des stratégies vis-à-vis de la quantification de la commande numérique
3.4.2 Sensibilité à la présence des temps morts
3.5. Sensibilité des stratégies M.L.I. aux imperfections de la machine
3.5.1 Distorsion harmonique des f.é.m
3.5.2 Influence de la distorsion harmonique des f.é.m.s
4. Résilience des méthodes en mode dégradé
4.1. Problématique abordée
4.2. Capacité à maintenir un fonctionnement triphasé
4.2.1 Vecteurs-tensions accessibles après défaillance
4.2.2 Combinaison des vecteurs-tensions accessibles après défaillance
5. Conclusion
6. Bibliographie
Conclusion générale