Découverte de la vitamine B12 ou cobalamine

Découverte de la vitamine B12 ou cobalamine

En 1849, Thomas Addison, suivi en 1872 par Anton Biermer, a décrit une forme d’anémie, que son évolution mortelle lui a permis de qualifier de « pernicieuse ». Le rôle de la vitamine B12 dans cette anémie et dans la synthèse des globules rouges a été découvert par la suite. En effet, les désordres sanguins et les signes neurologiques observés, ainsi que la relation avec les gastrites atrophiques et les pathologies liées à l’activité protéolytique du suc gastrique, ont amené quelques médecins, dont George Minot, William Murphy et George Whipple (prix Nobel de médecine et physiologie en 1934), à montrer l’efficacité thérapeutique des extraits de foie de veau. Ce facteur curatif ne fut purifié et isolé qu’en 1948 par George Whipple, il reçut alors le nom de vitamine B12.

La structure tridimensionnelle de la vitamine B12 a été définitivement identifiée au début des années 1960 par l’équipe de Dorothy Hodgkin à Oxford (prix Nobel de Chimie en 1964).

Vitamine B12

Structure

La vitamine B12 est une vitamine hydrosoluble que l’on retrouve dans la quasi-totalité des cellules humaines. Sa molécule est considérée comme la plus grosse ainsi que la plus complexe de toutes les vitamines B (environ 1355 g/mol).

Selon la définition donnée par Guéant et al. (1), la vitamine B12 est une 5,6- diméthylbenzimidazole-cobamide. Les cobamides sont obtenus par addition, sous la structure plane tétrapyrrolique (position alpha), d’un ribonucléotide lié au cobalt et d’un pyrrol D aminopropanol, et au-dessus du plan (position beta) d’un second ligand coordinant l’atome de cobalt. Une de ces caractéristiques structurales de la vitamine B12 serait d’être la seule molécule connue dans la nature ayant un ribonucléotide incorporant une base 5,6-diméthylbenzimidazole. A noter, la cobalamine possède une structure analogue à celle de l’hème (noyau tétrapyrrol, ici appelé noyau corrine). L’atome central de fer est remplacé par un atome de cobalt.

Les principales formes de cobalamine sont les suivantes :
-Hydroxocobalamine (X : groupe hydroxyle, OH) : Forme naturelle, synthétisée par des bactéries, convertie par notre organisme en forme biologiquement active (méthyl ou adénosyl cobalamine). Elle est principalement utilisée en thérapeutique pour le traitement des intoxications au cyanure.
-Cyanocobalamine (X : groupe cyanate, CN) : Cobalamine de synthèse, stable, la plus utilisée en thérapeutique.
-Méthylcobalamine (X : groupe méthyle, CH3) : Coenzyme actif biologiquement.
-Adénosylcobalamine (X : groupe 5’-déoxy-adénosyle) : Coenzyme actif biologiquement

Sources et apports nutritionnels recommandés

La vitamine B12 est nécessaire au fonctionnement du corps humain mais elle n’est pas synthétisable par celui-ci. L’apport est donc presque exclusivement exogène. Les principales sources alimentaires sont les aliments d’origine animale : viandes et abats (foie par exemple), poissons et fruits de mer, œufs, le lait et les laitages. Il existe également une très faible synthèse des cobalamines par les bactéries intestinales. En cas de régime végétarien strict, une carence peut apparaître car les végétaux sont presque totalement dépourvus de vitamine B12. Le régime alimentaire normal fournit entre 3 et 30 μg/jour de vitamine B12, ce qui couvre amplement les besoins estimés entre 2 et 10 μg/jour chez l’adulte. Les réserves de l’organisme sont importantes, comprises entre 3 et 5 mg, en grande partie stockées dans le foie (plus de 50%). Ces réserves suffisent à couvrir les besoins pendant 3 à 5 ans. Chez les patients végétariens, ne consommant pas ou peu de protéines d’origine animale, la carence s’installe progressivement (consommation et épuisement des stocks de B12 pendant plusieurs mois, voire années).

Mécanismes d’absorption : vue générale

L’absorption de la vitamine B12 d’origine alimentaire s’effectue en plusieurs étapes: gastriques, intestinales proximales et distales .

Métabolisme digestif gastrique

La vitamine B12 d’origine alimentaire arrive dans l’estomac sous forme exclusivement liée aux protéines alimentaires. Deux mécanismes se produisent au niveau gastrique :
– la libération de la vitamine B12 des protéines alimentaires ;
– et sa liaison aux transporteurs endogènes.

Au niveau gastrique, l’association des sécrétions acides (HCl) et pepsiques libère la B12 des protéines alimentaires, qui va pouvoir se lier à des molécules protéiques d’ haptocorrine d’origine essentiellement salivaire (HCs), un des deux transporteurs endogènes présents. Leur affinité pour la B12 est plus grande que celle du facteur intrinsèque (FI), second transporteur présent au niveau de l’estomac. Le FI est sécrété par les cellules pariétales de l’estomac. Il facilite l’assimilation de la vitamine B12 dans l’iléon.

Métabolisme digestif intestinal proximal

Il s’agit d’une étape importante du métabolisme digestif de la vitamine B12, ce qui permet le transfert de la B12 vers le FI et la formation du complexe FI-B12 . Dans le duodénum, l’HCs est dégradée par des protéases pancréatiques.

Métabolisme digestif intestinal distal

Il existe deux mécanismes participant à l’absorption de la B12 dans l’iléon :
– l’absorption par le récepteur spécifique du complexe FI-B12, majoritaire ;
– la diffusion passive, très minoritaire.

L’absorption du complexe FI-B12 par son récepteur est le mécanisme physiologique privilégié concernant la vitamine B12 d’origine alimentaire. Cette voie d’absorption est néanmoins saturable. Le complexe FI-B12 se lie à son récepteur qui est exprimé au niveau de l’iléon distal. Le récepteur spécifique de la bordure en brosse est le complexe Cubam. Il se compose principalement des protéines cubuline, protéine de liaison multi-ligands et amnionless, protéine transmembranaire. Il comporte aussi la mégaline, également protéine de liaison multi-ligands. La RAP (receptor associated protein) est une protéine d’escorte, indispensable à l’expression membranaire de la mégaline. L’internalisation (endocytose) du complexe, une fois fixé, est rapide. Il y a ensuite dissociation de la vitamine B12 du FI, dégradé dans le compartiment lysosomal. La vitamine B12 passe ensuite dans la circulation sanguine, grâce au récepteur MRP1, situé au pôle basal des entérocytes. Puis, dans le plasma, la B12 se lie aux transcobalamines (I et II) afin de former les complexes suivants : B12-TCI (B12 HC) et B12-TCII, permettant le transport de la vitamine B12 vers les cellules des tissus utilisateurs.

Le second mécanisme d’absorption, passif, au niveau de l’iléon distal, est très minoritaire, non spécifique, mais présente l’avantage d’être non saturable. La diffusion passive représente environ 1 à 5% de l’absorption de la dose ingérée. Cette voie n’est pas suffisante pour répondre aux besoins quotidiens si la dose ingérée provient uniquement d’un apport alimentaire standard. Elle est cependant utile en thérapeutique grâce à son caractère non saturable.

Transport sanguin

Deux protéines participent au transport de la B12 dans l’organisme : la transcobalamine II (TCII) et l’haptocorrine (HC ou transcobalamine I) (5). Lors de la liaison de la TCII et de l’HC (TCI) à la B12, il se forme des complexes que l’on nomme : holotranscobalamine (HoloTC) et holohaptocorrine (HoloHC). Le complexe HoloHC représente environ 70 à 90% de la B12 présente dans le sang et correspond à une forme biologiquement inactive. Le complexe HoloTC représente, quant à lui, environ 10 à 30% de la B12 présente dans le sang et correspond à la forme biologiquement active (forme absorbée par les cellules). Lors de la phase sérique, il existe donc un transport de la B12 par ces 2 transcobalamines (I et II). Seule la transcobalamine II semble avoir un rôle physiologiquement important en permettant l’apport vitaminique aux cellules et tissus de l’organisme par liaison spécifique à la membrane cellulaire. L’internalisation (ou endocytose) dans ces tissus s’effectue grâce à la mégaline et au récepteur de la transcobalamine II, le CD320 .

La transcobalamine II, codée par le gène TCN2 (22q12.2), est synthétisée par l’hépatocyte essentiellement mais aussi les entérocytes, les cellules endothéliales et les cellules monocytaires. La transcobalamine I, codée par le gène TCN1 (11q12.1), appartenant à la famille des haptocorrines, est dérivée de la lignée granuleuse neutrophile et transporte la vitamine B12 aux organes de réserve (foie principalement mais aussi reins, cœur, rate et cerveau). La transcobalamine III, décrite à tort comme une transcobalamine à part entière dans de nombreux articles et ouvrages correspond à des isoformes de la transcobalamine I.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
1. Découverte de la vitamine B12 ou cobalamine
2. Vitamine B12
2.1 Structure
2.2 Sources et apports nutritionnels recommandés
2.3 Mécanismes d’absorption : vue générale
2.3.1 Métabolisme digestif gastrique
2.3.2 Métabolisme digestif intestinal proximal
2.3.3 Métabolisme digestif intestinal distal
2.4 Transport sanguin
2.5 Excrétion et élimination
2.6 Mécanismes d’action
3. Dysvitaminoses B12
3.1 Cas particuliers des patients atteints de néoplasies
3.2 Cas particuliers des femmes enceintes
3.3 La carence en vitamine B12
3.3.1 Prévalence
3.3.2 Etiologies
3.3.3 Conséquences physiopathologiques d’une carence en B12
3.3.4 Clinique
3.3.5 Manifestations neurologiques
3.3.6 Manifestations hématologiques
3.3.7 Traitement des carences en vitamine B12
4. Méthodes d’exploration biologique
4.1 Cobalamine totale circulante
4.2 Homocystéine plasmatique (Hcy)
4.3 Acide méthylmalonique sérique (MMA)
4.4 Holotranscobalamine (HoloTC) ou B12 active
4.4.1 Généralités
4.4.2 Différentes trousses de dosage de la vitamine B12 active
4.4.3 Comparaison holotranscobalamine et vitamine B12 totale
4.5 Existence de zones d’incertitude
OBJECTIFS DU TRAVAIL
II. MATERIELS ET METHODE
1. Type d’étude
2. Populations étudiées
2.1 Etude principale
2.1.1 Critères d’inclusion
2.1.2 Critères d’exclusion
2.1.3 Patients sélectionnés
2.2 Etude complémentaire 1 – Femmes enceintes
2.2.1 Critères d’inclusion
2.2.2 Critères d’exclusion
2.2.3 Patients sélectionnés
2.3 Etude complémentaire 2 – B12 totale > 500 pmol/L
2.3.1 Critères d’inclusion
2.3.2 Critères d’exclusion
2.3.3 Patients sélectionnés
3. Données recueillies et dosages réalisés
3.1 Dosages de vitamine B12 totale
3.2 Dosages de vitamine B12 active
3.2.1 Etude principale
3.2.2 Etude complémentaire 1 – femmes enceintes
3.2.3 Etude complémentaire 2 – B12 totale > 500 pmol/L
3.3 Autres dosages
4. Tests statistiques
III. RESULTATS
1. Performances analytiques de la technique B12 active
2. Etude principale
2.1 Prescriptions des dosages de B12
2.2 Répartition des valeurs de B12 selon le sexe
2.3 Répartition des valeurs de B12 selon l’âge
2.4 Répartition des valeurs de B12 en fonction des caractéristiques hématologiques
2.5 Etude de corrélation entre la B12 totale et la B12 active
2.6 Ratio B12 active/B12 totale
2.7 Comparaisons
2.7.1 Statut en B12 active par rapport à la B12 totale
2.7.2 Statut en B12 totale par rapport à la B12 active
2.8 Discordances entre B12 totale et B12 active
2.9 Dosages de l’acide méthylmalonique sanguin
3. Etudes complémentaires
3.1 Etude complémentaire 1 – Femmes enceintes
3.2 Etude complémentaire 2 – B12 totale > 500 pmol/L
IV. DISCUSSION
V. CONCLUSION

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