Décentralisation de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH

L’infection par le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) est une maladie infectieuse transmissible grave. Elle reste un problème de santé publique d’une portée sans précédent du fait de son ampleur et de sa gravité. Trois décennies après la découverte des premiers cas de sida aux Etats-Unis d’Amérique (USA) en 1981, le VIH a déjà provoqué plus de 25 millions de décès dans le monde et entraîné de profonds bouleversements démographiques et économiques dans les pays les plus fortement touchés [56].

L’Organisation des Nations Unies pour la Lutte contre le Sida (ONUSIDA) a estimée à 36,9 millions le nombre de personnes vivant avec le VIH/sida (Pv VIH) dans le monde en fin 2014. L’Afrique subsaharienne qui représente 12% de la population mondiale, est la zone du globe la plus touchée par la maladie, avec plus de 70% des Pv VIH dans le monde. Elle est également le siège d’un peu plus de 66% des nouvelles infections par VIH en fin 2014 [1].

Des progrès considérables ont été notés dans la riposte face à cette pandémie depuis la nouvelle déclaration politique de l’ONU dénommée « Intensifier nos efforts pour éliminer le VIH » (résolution 65/277) lors de la 65ème Assemblée générale des Nations Unies sur le VIH/SIDA (UNGASS) tenue à New York en juin 2011 [57], par la mise en place d’importants moyens financiers et de mécanismes politiques innovants par la communauté internationale. Effet l’ONUSIDA a estimé que 31,1 milliards US$ seront requis pour la riposte au sida en 2020, et que 29,3 milliards US$ seront requis en 2030 [1].

Le Sénégal est l’un des pays de l’Afrique subsaharienne qui s’est engagé très tôt dans la lutte contre la pandémie du VIH à travers un programme de prévention et de prise en charge, programme baptisé Initiative Sénégalaise d’Accès aux Antirétroviraux (ISAARV). Cette dernière a ainsi été créée en 1998 [54], initialement axée à Dakar, elle a été décentralisée dans les régions en 2001 avec comme objectif la prise en charge de 7000 personnes en fin 2006 [54]. C’est dans cette lancée que le nombre de sites de prises en charge est passé de 8 à 68 entre 2002 et 2007 et le nombre de Pv VIH sous trithérapie de 1855 à 7178 entre 2004 – 2007 et 12249 en 2009 [55], rendant ainsi la prise en charge médicale et psychosociale des Pv VIH décentralisée et accessible à tous les niveaux.

DEFINITION ET HISTORIQUE 

Définition de l’infection à VIH/SIDA

L’infection à VIH est une maladie infectieuse virale chronique causée par le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH). Elle se caractérise par une diminution progressive des moyens de défenses de l’organisme ; et a été diagnostiquée en premier chez les homosexuels, d’où sa première appellation « gay-related immunodeficiency disease» (GRID). L’acronyme SIDA signifiait Syndrome de l’Immunodéficience Acquise. Actuellement le terme de « SIDA » renvoie au dernier stade de l’infection au VIH en l’absence de traitement antirétroviral. C’est l’ensemble des manifestations cliniques, immuno-virologiques et psychosociales, conséquence d’une destruction progressive du système immunitaire par le VIH [6].

Historique

❖ C’est probablement vers la fin du XIXᵉ/début du XXᵉ siècle que le SIV (Simian Immunodefiency Virus), passant du singe à l’homme, se transforma en VIH [7].
❖ Au début des années 1980, les premiers cas de sida ont été rapportés aux USA, par des médecins de New York et de San Francisco. Ces médecins se sont aperçu que beaucoup de leurs patients homosexuels souffraient de pneumocystose parfois associée à un sarcome de kaposi. D’où le nom de « gay syndrome », Gay Related Immune Deficiency (GRID) qui lui a été donné [4].
❖ En juillet 1981, le Centers for disease control (CDC) d’Atlanta releva une fréquence anormalement élevée de pneumonie à pneumocystis carinii et de sarcome de kaposi chez les homosexuels. Dans la mesure où, à cette époque, le sida concernait uniquement des homosexuels très actifs qui utilisaient des drogues ludiques (poppers) contenant du nitrite d’amyle, la première hypothèse physiopathologique pour expliquer la déplétion lymphocytaire va être reportée sur sa toxicité pour les lymphocytes T CD4+. Cette hypothèse va être rapidement écartée [4].

Des cas de SIDA furent observés aux USA pendant la même période chez des polytransfusés, des héroïnomanes et des haïtiens ; le SIDA fut ainsi appelé la maladie des quatre « H » (homosexuels, hémophilies, héroïnomanes et haïtiens).

❖ En mai 1983, le virus responsable du SIDA a été identifié par l’équipe de l’Institut Pasteur à Paris (Pr Luc Montagnier, Pr Françoise Barré-Sinoussi), après culture d’un échantillon de biopsie ganglionnaire d’un patient atteint de « lymphadénopathie généralisée ». En collaboration avec l’équipe Américaine du professeur Robert Gallo, le virus fut donc appelé Lymphadenopathy Associated Virus (LAV).
❖ En 1984, apparurent les premiers tests sérologiques. C’est à cette époque que les activités antirétrovirales de la zidovudine (AZT) ont été mises en évidence, ainsi qu’une connaissance plus claire des moyens de transmission.
❖ En 1986, la communauté scientifique adopta le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) à la place de LAV. Enregistrement du premier cas de VIH au Sénégal.
❖ En 1987, le test de dépistage du VIH fut mis sur pied par « Diagnostics pasteur ».
❖ En 1988, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), proclama le 1er Décembre «Journée internationale du sida » et mise en place de la première initiative gouvernementale d’accès aux antirétroviraux au Sénégal (ISAARV).
❖ En 1991, le peintre Américain, Frank More, créa un ruban rouge, en guise de solidarité et de compassion pour la cause du SIDA.
❖ En 1994, la combinaison de deux ARV (AZT-3TC) sous le nom de COMBIVIR fut testée et s’avèra plus efficace que la prise d’un seul médicament. Dans la même année, fut mise en place dans quinze pays dont le Sénégal le model CTA/UTA, développé par la croix rouge française [5].
❖ En 1996, il y eut la mise à disposition des ARV de la classe des inhibiteurs de la protéase, qui vont révolutionner le pronostic et la prise en charge de l’infection à VIH. Dans la même année, la trithérapie ARV, dont l’efficacité est démontrée fut adoptée.
❖ En Décembre 1997 à Abidjan, un consensus fut adopté sur les indications des traitements ARV, notamment en Afrique subsaharienne, lors de la réunion de la Conférence Internationale sur le Sida et les Maladies sexuellement transmissibles (CISMA).
❖ En 1998, l’Initiative Sénégalaise d’Accès aux Antirétroviraux (ISAARV) fut mise sur pied [8].
❖ L’année 2000, constitua le début de la mise à disposition des trithérapies dans les pays du Sud suite au congrès international de Durban ainsi que le lancement du programme mondial Access signé par 5 laboratoires pharmaceutiques et 5 organisations mondiales pour mettre à la disposition des pays du Sud des ARV à des prix réduits de 80 à 95%, permettant d’envisager des coûts annuels de traitement entre 100 et 200 € (contre 1000 € mensuels dans les pays industrialisés) [7].
❖ En 2008, le prix Nobel de médecine fut attribué aux Pr F. Barré-Sinoussi et L. Montagnier pour leurs travaux sur la découverte du VIH [7].

SITUATION EPIDEMIOLOGIQUE DE L’INFECTION A VIH

L’infection à VIH constitue un véritable problème de santé publique à l’échelle mondiale, sous régionale et nationale.

Dans le monde 

La pandémie liée à l’infection par le VIH est vieille de plus de 30 ans. La progression de la prévalence de l’infection au VIH est une réalité dans le monde bien que connaissant une atténuation. Selon l’ONUSIDA, en 2014, environ 36,9 millions de personnes [34,3 millions – 41,4 millions] vivaient avec le VIH et 1,2 million de personnes [980 000 – 1,6 million] sont décédées de maladies liées au sida [1].

Contrairement à la prévalence, l’incidence de l’infection VIH est globalement en baisse depuis 2000. En effet, selon la fiche d’information 2015 de l’ONUSIDA [1], un total de 2 millions de personnes [1,9 millions – 2,2 millions] ont été nouvellement infectées par le VIH, dont 220 000 enfants [190 000- 260 000], contre 3,1 millions [3,0 millions – 3,3 millions] en 2000, soit :
– 35% de moins que les 3,1 millions [3,0 millions – 3,3 millions] de personnes nouvellement infectées en 2000.
– 58% de moins que les 520 000 [470 000 – 580 000] enfants nouvellement infectées en 2000 [1].

En juin 2015, 15,8 millions de personnes vivant avec le VIH ont eu accès à la trithérapie antirétrovirale, contre 13,6 millions en juin 2014[1].
– 41% [38% – 46%] de l’ensemble des adultes vivant avec le VIH avaient accès au traitement en 2014, contre 23% [21% – 24%] en 2010.
– 32% [30% – 34%] de l’ensemble des enfants vivant avec le VIH avaient accès au traitement en 2014, contre 14% [13% – 15%] en 2010.
– 73% [68% – 79%] des femmes enceintes vivant avec le VIH avaient accès aux médicaments antirétroviraux pour prévenir la transmission du VIH à leurs bébés en 2014.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. DEFINITION ET HISTORIQUE
1.1. Définition de l’infection à VIH/SIDA
1.2. Historique
2. SITUATION EPIDEMIOLOGIQUE DE L’INFECTION A VIH
2.1. Dans le monde
2.2. En Afrique subsaharienne
2.3. Au Sénégal
3. PHYSIOPATHOLOGIE DE L’INFECTION A VIH
3.1. Agent pathogène
3.2. Structure du VIH
3.3. Génome du VIH
3.4. Propriétés physicochimiques du VIH
4. MODES DE TRANSMISSION DU VIH
4.1. Transmission par voie sexuelle
4.2. Transmission par voie sanguine
4.3. Transmission de la mère-enfant (TME) ou transmission verticale
4.4. Situations sans risque de transmission du VIH
5. HISTOIRE NATURELLE DE L’INFECTION A VIH CHEZ L’HOMME
5.1. Primo infection
5.2. Phase de séropositivité asymptomatique
5.3. Phase d’immunodépression mineure
5.4. Phase d’immunodépression sévère ou de sida
6. CLASSIFICATIONS DE LA MALADIE A VIH
7. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L’INFECTION A VIH
7.1. Diagnostic indirect « sérologique » de l’infection à VIH
7.2. Diagnostic direct de l’infection à VIH
8. PRISE EN CHARGE GLOBALE DE L’INFECTION A VIH
8.1. Test de dépistage du VIH
8.2. Prise en charge psychosociale
8.3. Prise en charge nutritionnelle
8.4. Prise en charge vaccinale
8.5. Prise en charge médicale
8.6. Prise en charge thérapeutique
8.7. Suivi
9. PREVENTION CONTRE L’INFECTION A VIH
9.1. Mesures générales
9.2. Prévention de la transmission mère-enfant
9.3. Prise en charge des accidents exposant au sang ou au sexe (AES)
CONCLUSION

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