La pauvretécaractérise la situation d’un individu qui ne dispose pas des ressources réputées suffisantes pour vivre dignement dans une société et son contexte.La pauvreté résulte généralement de conditions de départ défavorables (mauvais accès à la formation, santé déficiente,…), et parfois d’accidents (destruction de biens, accident de santé, perte d’emploi, etc.). Mais cela engendre souvent un cercle vicieux. La pauvreté oblige à se loger à bas prix, donc dans des quartiers ayant mauvaise réputation, où il y a peu de travail et une offre éducative dégradée, une criminalité sinon plus élevée du moins plus violente, une prévention médicale moins active, etc. Les chances de trouver un revenu par le travail sont moindres, la tentation plus forte de faire appel au travail illégal (« au noir »), à des sources de revenu illusoires (loteries, paris) ou dangereuses (crime, drogue) ou encore dégradantes (prostitution), les risques d’accidents sont plus importants, et l’exploitation par les mafias, ou groupes organisés, sont des facteurs de désocialisation, voire d’une insécurité à la fois personnelle et globale.
Les économistes utilisent le terme de croissance conventionnellement pour décrire une augmentation de la production sur le long terme. Selon la définition de François Perroux, la croissance économique correspond à « l’augmentation soutenue pendant une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de dimension, pour une nation, le produit global net en termes réels. » (Perroux, 1990). La définition de Simon Kuznets va au-delà et affirme qu’il y a croissance lorsque la croissance du PIB est supérieure à la croissance de la population. Généralement, la croissance économique engendre l’enrichissement. Ce dernier peut permettre de faire reculer la pauvreté. Notons que la croissance économique figure parmi l’un des quatre axes cardinaux du carré magique de Nicolas Kaldor (les quatre axes sont : taux de croissance économique, taux de chômage, taux d’inflation et solde de la balance courante).
Débats théoriques autour du lien entre croissance et pauvreté
Depuis Adam Smith et sa richesse des nations, la croissance économique et la pauvreté occupe l’esprit de nombreux économistes. D’un point de vue orthodoxe, la croissance économique entraine la réduction de la pauvreté. Mais la croissance ne suffit pas pour réduire la pauvreté. Pour plus de précision, cette première partie sera consacrée en une revue théorique de la croissance économique et de la pauvreté. Notre première préoccupation est de chercher le lien entre la croissance économique et la pauvreté. Nous soutenons l’hypothèse selon laquelle la croissance économique est une condition nécessaire et non suffisante à la réduction de la pauvreté. Par contre, l’aspect multidimensionnel de la pauvreté pose la limite de la croissance économique. L’objet du second chapitre est de mettre en évidence cette limite.
La croissance comme un préalable à la réduction de la pauvreté
La plupart des manuels de théorie économique, d’histoire de la pensée économique et d’histoire des faits économiques, font remonter les origines de la croissance à la première révolution industrielle. Initié en 1776 par la vision optimiste d’Adam Smith (vertus de la division du travail), le thème de la croissance réapparaîtra au XIXème siècle dans les travaux de Malthus, Ricardo et Marx. Il faudra cependant attendre le XXème siècle et les années 50 pour que les modèles théoriques de la croissance connaissent un véritable succès. Les modèles post-keynésiens (Harrod-Domar) et néoclassiques (Solow) ont introduit un véritable débat sur la question de la croissance équilibrée. Depuis les années 70-80, la croissance a connu un nouvel essor sous l’impulsion des théoriciens de la régulation et de la croissance endogène.
Les précurseurs
Depuis plus de deux siècles, les économistes s’interrogent sur les causes de la croissance.Adam Smith, Thomas Malthus, David Ricardo et Karl Marx sont les véritables précurseurs de cette réflexion.
La division internationale d’Adam Smith (1776)
Dans ses Recherches sur la nature et les causes de la Richesse des Nations (1776), Adam Smith met en évidence le rôle de la division du travail (surplus, marché, gains de productivité) comme facteur de croissance. Cette division du travail se trouve renforcée par la participation du pays au commerce international (théorie des avantages absolus).L’optimisme de Smith apparaît à travers les traits d’une croissance illimitée (elle dure tant que l’on peut étendre la division du travail et le marché).
Le principe de population de Thomas Malthus (1796)
Dans son Essai sur le principe de population (1796), Thomas Malthus considère que la croissance est limitée en raison de la démographie galopante. Il attribue la misère en Angleterre au décalage entre deux lois : la loi de progression arithmétique des subsistances et la loi de progression géométrique. La sortie de cet état passe par la mortalité, la baisse de la natalité et le célibat.
Les rendements décroissants de David Ricardo (1817)
Dans ses principes de l’économie politique et de l’impôt (1817), David Ricardo souligne que la croissance est limitée par la loi des rendements décroissants. La valeur ajoutée se répartit entre trois agents : les propriétaires fonciers (rente foncière), salariés (salaire de subsistance) et le capitaliste (profit).Le profit des capitalistes est résiduel, c’est-à-dire qu’il intervient une fois le salaire et la rente foncière payés. Lorsque la population s’accroît, il convient d’augmenter la production agricole, or les nouvelles terres mises en culture sont de moins en moins productives. Le coût de production va donc s’élever, entraînant inévitablement la hausse des salaires et de la rente foncière. Les profits vont se réduire jusqu’au moment les capitalistes ne seront plus incités à investir. L’économie atteint la situation d’état stationnaire. Afin de retarder cette situation, Ricardo préconise d’augmenter les gains de productivité dans l’agriculture grâce au progrès technique et de s’ouvrir au commerce international (théorie des avantages comparatifs) .
La destruction du capitalisme selon Marx (1844)
Karl Marx a été le premier économiste à proposer un modèle formel de croissance, à l’aide deses schémas de reproduction élargie.La croissance est limitée dans le modede production capitaliste en raison de la baisse tendancielle des taux de profit (LeCapital, 1867). En effet, la recherche d’une plus-value toujours plus importante (notamment grâce àdes salaires bas, que Marx appelle, Minimum de Subsistance) et la concurrence entrecapitalistes devraient provoquer une paupérisation des ouvriers et un blocage dans ledéveloppement du système capitaliste (crise).
Schumpeter (1911) et le rôle de l’entrepreneur
Dans son ouvrage, Capitalisme, Socialisme et démocratie, Joseph Schumpeter (1942) fait duprogrès industriel la clé du changement : « L’impulsion fondamentale qui met et maintient enmouvement la machine capitaliste est imprimée par les nouveaux objets de la consommation,les nouvelles méthodes de production et de transport, les nouveaux marchés, les nouveauxtypes d’organisation industrielle – tous éléments créés par l’initiative capitaliste ». End’autres termes, le progrès industriel est porté par des innovateurs (Schumpeter compare le jeu des affaires au poker). L’analyse schumpetérienne est intéressante car elle ne repose pas seulement sur le progrèstechnique, sur l’évolution des connaissances ou les grandes inventions (avec le cycle desrévolutions industrielles successives). Schumpeter y ajoute un héro – le chef d’entreprise. Le chef d’entreprise prend le risque de lancer un nouveau produit ou une nouvelle façon de produire, et unestructure (la concurrence monopolistique) qui assure à celui qui a réussi son pari d’enpercevoir une rétribution financière. La « Destruction – créatrice» finirapar être bénéfique pour tous. Le système tout entier produira plus de richesse. La prise en compte de ces précurseurs est très importante. Grace aux idées venant de ces précurseurs, nous pouvons avoir une première image de la liaison entre la croissance économique et la pauvreté. Adam Smith parle de la division du travail, Malthus de la population, Ricardo des propriétaires foncier et Marx d’une plus-value. Derrière toutes ces idées, il y a la population. Pourtant, la pauvreté touche directement la population. Comme solution à la pauvreté, les économistes ont trouvé la croissance économique. A partir des années 1930 en Angleterre et aux Etats-Unis, le post-keynésianisme a été développé. La section suivante traitera les modèles de croissance post – keynésien.
Le modèle néoclassique : l’approche de Solow
Le modèle néoclassiquea été développé successivement par Ramsey (1928), Solow (1956), Swan (1956), Cass (1965) et Koopmans (1965). Robert Solow(Prix Nobel en 1987) en est la figure pensante. Son article intitulé « A Contribution to theTheory of EconomicGrowth » et paru en 1956 dans the Quarterly Journal of Economics,attribue l’origine de la croissance par tête au montant de capital technique investi(machines, équipements, logiciels, infrastructures…). Lorsque l’investissement par têtedépasse le montant de la dépréciation du capital par tête existant, chaque travailleur disposed’un équipement plus performant et peut produire davantage. Toutefois, lorsqu’on augmentele capital par tête, la production augmente, mais pas de façon proportionnelle (c’est leprincipe des rendements décroissants). Ainsi à force d’augmenter le capital par tête, vavenir un moment où la production par tête augmentera moins vite que cela ne coûte. Lacroissance par tête va cesser :état régulier selon Solow. L’état régulier dépenddu coût relatif du capital. Si ce dernier diminue (un renchérissement du coût du travail inciterales entreprises à substituer du capital au travail), alors l’investissement par tête va augmenterde nouveau jusqu’à ce qu’un nouvel état régulier soit atteint.
|
Table des matières
Introduction générale
Partie 1. Débats théoriques autour du lien entre croissance et pauvreté
Chapitre 1. La croissance comme un préalable à la réduction de la pauvreté
Chapitre 2. La limite de la croissance face à l’aspect multidimensionnel de la pauvreté
Partie 2. Les politiques internationales: entre orthodoxie et hétérodoxie
Chapitre 3. La banque mondiale avec sa lecture néoclassique
Chapitre 4. L’émergence des courants hétérodoxes
Partie 3. Situation de la pauvreté à Madagascar
Chapitre 5. Analyse et description de la pauvreté à Madagascar
Chapitre 6. Les moteurs économiques pour la réduction de la pauvreté à Madagascar
Conclusion générale