De l’utilité des dispositifs proposés par l’enseignant

De l’utilité des dispositifs proposés par l’enseignant

Le présent mémoire interroge les représentations des élèves à propos d’un cours de philosophie reçu durant une année scolaire. Il tente une analyse sur trois axes : les objets enseignés, les dispositifs proposés par l’enseignant et enfin les obstacles ou les facilités rencontrées par les élèves.

Deux évènements m’ont menée à cette réflexion et je souhaite les exposer ci-dessous en guise de préambule. L’expérience en stage d’un élève particulièrement réticent au cours de philosophie m’a interpelée. Couché sur la table, soupirant, dormant presque, souvent absent, son comportement exprimait une telle résistance que je ne pouvais faire autrement que de l’interroger sur son attitude. « Je ne comprends pas à quoi ça sert de parler de trucs si compliqués », sa réponse a suscité des interrogations : quelles représentations les élèves ontils de la philosophie ? Pourquoi ? Quels sont les obstacles qu’ils rencontrent ? Quelles stratégies mettent-ils en place pour les dépasser ? Qu’est-ce qu’ils retiennent du cours ? Qu’est-ce que cela leur apporte ? Autant de questions qui m’ont animée cette année, et il met apparu évident que la première étape pour tenter d’y répondre était d’aller les poser aux élèves. Le deuxième évènement qui a motivé cette réflexion est la découverte du plan d’étude. En ce qui concerne la philosophie, la liberté accordée aux enseignants dans le choix des dispositifs ainsi que dans les contenus de cours est précieuse et tout à fait réjouissante. Une grande place est laissée à la créativité, les dispositifs et les contenus peuvent véritablement être réinventés en fonction du public, raison de plus pour s’interroger sur ses représentations.

Mise en valeur de la subjectivité des élèves 

D’un point de vue méthodologique, ma démarche reste avant tout qualitative. C’est à partir des représentations des élèves que je réponds à mes questions de recherche. Car la subjectivité des interviewés demeure une source de données significatives pour analyser une problématique scolaire (Crahay, 2006). En effet, tout processus d’enseignement et d’apprentissage peut être appréhendé et compris en exploitant la parole des apprenants (Schurmans, 2011). Même si cette parole n’est pas représentative de l’ensemble d’une population, elle révèle des modes de pensées et des expériences qui nous permettent de mieux saisir un phénomène social, donc scolaire et didactique (Kaufmann, 2001). En cela, la didactique de la philosophie ne peut que s’en enrichir. En interrogeant la manière dont les élèves ont vécu leur année de cours de philosophie, je vise plusieurs objectifs : situer leurs intérêts pour la discipline; cibler les sujets porteurs de sens ; interroger la pertinence des supports utilisés pour faciliter les apprentissages.

Dans cette perspective j’ai mené un entretien semi-directif avec un groupe d’élèves. Parce que l’artificialité de la situation de communication peut orienter les contenus, j’ai dû recourir à trois procédés pour encourager la parole des interviewés : l’élaboration d’un canevas d’entretien , la formulation de questions explicites et ouvertes et la demande d’explicitation (Kaufmann, 2001). L’élaboration du canevas d’entretien prépare l’architecture des échanges et permet de rester centré sur la problématique de la recherche. Aussi, ma démarche est pragmatique : c’est à partir de mes questions de recherche que j’ai décliné les grands sujets de l’entretien. Des questions simples, précises, qui permettent d’orienter le discours sont organisées de façon progressive, allant du simple au complexe. Si un point nécessite des précisions supplémentaires, la demande d’explicitation permet alors d’approfondir certaines thématiques.

Perception des élèves sur les objets choisis en philosophie 

Ma première question de recherche porte sur la manière dont les élèves perçoivent les objets du cours de philosophie. Il leur a été demandé d’exposer les contenus traités durant une année scolaire et de signaler leur préférence. Les réponses mettent en lumière les sujets que les interviewés ont retenus, mais définissent également leurs critères dans le choix de ces objets. « Les grands philosophes » est le premier thème évoqué. Les interviewés soulignent que la séance introductive pour présenter quelques auteurs au moyen de citations les a rapidement mis dans le bain. Voici un extrait d’entretien qui l’illustre : « je trouve intéressant d’arriver au cours de philo puis d’avoir direct plein d’avis de plein de philosophes différents/ de pouvoir les comparer tout de suite […] on était direct dedans ». On peut se demander si l’appréciation des élèves dépend en fin de compte de l’empan de l’objet et du dispositif utilisé par l’enseignant. Aborder quelques philosophes célèbres par des citations en guise d’introduction posent des balises pour les élèves, tant au niveau des différents courants de pensée qu’au niveau des auteurs. Il est vrai aussi que cela permet de mettre en place efficacement un cadre de références utile, une carte conceptuelle en quelque sorte particulièrement appréciée des apprenants novices, comme le souligne l’extrait suivant : « pour les gens qui n’avaient jamais fait de philo/ puisque/ enfin/ on était quand même plus de la moitié à avoir jamais fait de philo ». Cependant, un tel dispositif interroge : ne donne-t-il pas l’illusion qu’un apprenant peut s’approprier la pensée complexe d’un auteur sans une réflexion aboutie ? On note que le discours des élèves montre qu’ils se sentent déjà philosophes, prêts à débattre des idées fondatrices d’une discipline. Les activités à partir de phrases sont  privilégiées au détriment de l’étude de thèses et de raisonnements philosophiques plus complexes, car elles nuisent, selon les interviewés, à l’accès immédiat de la pensée de l’auteur : « on avait cette phrase d’introduction d’un philosophe et après on pouvait prendre un peu ses idées pour soi puis réfléchir et discuter ensemble ». Outre les grands philosophes sur la question des objets, les élèves évoquent également les notions abordées en cours. La violence est la première mentionnée. Elle figure comme un thème qui facilite la compréhension des élèves et qui permet d’aborder plusieurs points de vue d’auteurs susceptibles d’entrer en résonnance avec leur vécu. Elle leur apporte surtout des outils pour considérer différemment leur réalité. L’extrait suivant l’illustre parfaitement : « j’ai beaucoup appris avec le thème sur la violence// ça m’a permis de comprendre des choses// et aussi j’ai découvert des trucs comme le narcissisme primaire ». Le terrorisme est un autre sujet désigné par tous les étudiants comme significatif. Dans les discours, on constate qu’il encourage un élargissement des connaissances des apprenants susceptibles de favoriser leur appréhension du monde qui les entoure. Dans ce cas, la didactique de la philosophie sert de boite à outils pour mieux traduire l’actualité véhiculée par les médias. La troisième notion, la liberté, est le dernier sujet traité en classe. Les élèves s’accordent à dire que le temps d’étude fut trop bref. Ils le regrettent d’autant plus que c’est un sujet qui les touche et s’intègre parfaitement à leur parcours d’étudiant et à leur identité de jeunes adultes : « le thème qui m’a le plus parlé et sur lequel j’aurais aimé le plus travailler/ c’était la liberté qu’on a fait à la fin en très peu de temps// c’était court/ c’est dommage […]la liberté c’est nous// on va sortir de l’école/ on est complètement libre/ on peut choisir ce qu’on veut faire ». Au cours de l’entretien, les élèves mentionnent une dernière notion intitulée Dieu. Contrairement aux précédentes, cette notion est totalement dépourvue d’intérêt à leurs yeux, surtout quand « on nous parle de Dieu égal nature ». Le sujet semble trop éloigné et décontextualisé de leurs préoccupations. Globalement, les grands philosophes, la violence, le terrorisme et la liberté sont pour l’essentiel les sujets retenus par les élèves après une année de cours. Ce qui rend cette liste particulièrement pertinente, c’est qu’elle isole un certain nombre de critères de préférence explicites ou induits dans les discours. Une analyse (trop) rapide indique qu’un seul indicateur semble signaler l’intérêt des apprenants : « j’ai bien aimé la violence parce que je trouvais intéressant ». Le « c’est intéressant » comme justificatif de choix apparait plus de vingt fois dans l’entretien. Si l’on ne prend pas garde, peut-être conclurait-on rapidement à une absence de repères formels pour définir les appréciations des élèves par rapport à une discipline scolaire moins familière. Néanmoins, une analyse fine des contenus distingue huit critères qui justifient les préférences. Je les décline tour à tour en prenant soin de les illustrer .

De l’utilité des dispositifs proposés par l’enseignant 

Les élèves ont identifié sept dispositifs en cours de l’entretien. Tous s’accordent à dire que le fait de présenter plusieurs philosophes au moyen de citations est une activité porteuse de sens. Ce dispositif rend les pensées des philosophes facilement accessibles, mais il permet surtout aux élèves de se positionner rapidement par rapport aux différentes thèses exposées. Voici un extrait d’entretien qui l’illustre: « je pense qu’en fait tous ces philosophes et ces citations philosophiques ça m’a complètement ouvert l’esprit// ça m’a fait découvrir plein de pensées qui allaient parfois dans le même sens et parfois pas dans le même sens et de dire tout d’un coup d’un philosophe// ah oui/ là je suis d’accord avec lui pour ça/ mais pas pour ça// et puis après/ je pensais avec d’autres// ah oui/ là/ je comprends ça ». En outre, il est aussi intéressant de relever que les élèves préfèrent ce genre d’activité, car elle encourage l’appropriation des contenus de savoir avec une économie de cout tant au niveau du temps investi qu’au niveau de la compréhension, comme le souligne cet extrait : « moi je suis assez d’accord avec lui sur l’intro// c’est là qu’on a vraiment tout vu en fait// et puis après il y avait des raisonnements qui m’ont plus intéressé que d’autres/ mais je trouve intéressant d’arriver direct en cours de philo/ puis d’avoir plein d’avis de plein de philosophes différents et de tous les temps ». Globalement, les citations permettent aux élèves de saisir rapidement les objets enseignés. Les apprenants peuvent immédiatement se positionner, réfléchir et débattre à l’aide d’un cadre de références facile d’accès. D’ailleurs, certains interviewés soulignent que ces balises ont servi tout au long de l’année : « c’est bien d’avoir une vue d’ensemble […]et après pendant l’année, même quand on voyait des autres auteurs, on pensait à l’intro et on pouvait comparer. En fin de compte, aborder et expliquer la philosophie par le biais de phrases célèbres reste du point de vue des élèves un dispositif extrêmement fonctionnel. Il fait voir efficacement un ensemble d’auteurs qui serviront de points de repère utiles, que ce soit au moment des débats, que ce soit pour ordonner les courants philosophiques au cours de l’année. Le deuxième dispositif relevé positivement par les élèves s’appuie sur l’utilisation de supports iconographiques. Ici, les thématiques sont avancées au moyen d’un dossier d’images à analyser et à discuter. Comme pour le dispositif précédent, la facilité d’utilisation de ce type de supports a été appréciée des apprenants. En effet, il permet de les confronter directement aux contenus de savoirs et encourage la construction de moyens mnémotechniques : « j’ai bien aimé aussi les images après les citations// ça change de la méthode classique// et puis aussi/ y’en a quelques unes qui me sont restées comme celle du roseau et de l’arbre pour situer certains auteurs […] et puis parce que direct tu es tout de suite plongé dans le sujet/ et je me suis dis// ah c’est génial». Les élèves mentionnent également que ce dispositif amorce des discussions riches, notamment lorsque des activités les invitent à réagir à partir d’une image réactive. Cet extrait qui évoque une séance sur la liberté est révélateur à ce propos: « je pense qu’au début du cours pour la liberté/ c’est le fait que justement on devait lever la main pour dire quelle image désignait le mieux la liberté/ quel était le personnage le plus libre/ bien avec Léon/ on a les deux direct levé la main […] c’était pour la fin de nos études, quand on a toute la vie devant nous ». L’image est donc incontestablement un support apprécié par les élèves, qu’elle soit utilisée comme outil déclencheur de débats, qu’elle soit investie pour éveiller l’intérêt des élèves ou encore pour faciliter la compréhension d’un nouveau sujet. Les interviewés relèvent également l’activité des débats comme particulièrement enrichissante. En effet, durant toute l’année, le cours de philosophie a été ponctué par des « discussions philosophiques » que les élèves animaient par groupe de deux à partir d’une liste de sujets. Cet extrait d’entretien le montre : « ce qui était intéressant aussi c’étaient les débats/ ça nous permettait de venir nous-mêmes aux conclusions// quand on présentait le débat on cherchait la bonne note plutôt que de participer vraiment au débat// mais quand c’est les camarades qui présentaient alors on pouvait vraiment participer et discuter// là vraiment en fait on n’étudiait pas la philo, on philosophait vraiment ». Les contenus de l’entretien sont éloquents : les élèves aiment débattre, ils ont l’impression de philosopher véritablement et d’être dans le vif du sujet. Aussi, ils auraient aimé « se disputer » davantage, mais dans une configuration particulière : pour que leurs arguments soient pertinents, forts et enrichis, les interviewés suggèrent que ce dispositif se présente comme une clôture de séquence portant sur un thème précis et moins comme une activité décrochée des thématiques programmées dans le cours : « j’aurais bien aimé qu’on débatte plus// […] ce serait bien de faire des débats sur les sujets qu’on étudie en classe// on a fait par exemple la violence/ la liberté// bien après il faudrait peut-être plus de périodes pour faire ça/ pour confronter les avis des gens là-dessus/ et puis ça aurait fait réfléchir/ même sur notre propre perception// j’aurais trouvé intéressant qu’on puisse discuter de tout ça ». Notons enfin que dans les discours des élèves, les mots débattre et discuter deviennent synonymes, alors qu’ils supposent des situations de communication, une organisation thématique, des prises en charge énonciatives et des stratégies argumentatives fort diverses. Cela signifie clairement que ce dispositif appelle à une explicitation du genre, à un travail formel sur ses composantes et sur la notion d’arguments. Cela permet somme toute la construction de prises de position détachées du sens commun permettant de dialoguer véritablement avec la pensée de l’autre.

Remarques conclusives 

En guise de conclusion, je souhaiterais revenir sur certains points qui m’ont particulièrement interpelée au cours de cette année de formation et plus particulièrement en rédigeant ce mémoire. Il ne s’agit donc pas de résultats, mais plutôt de pistes de réflexion, de partage d’interrogations.

 

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Table des matières

Introduction 
Mise en valeur de la subjectivité des élèves
Perception des élèves sur les objets choisis en philosophie
De l’utilité des dispositifs proposés par l’enseignant
Facilités et résistances des élèves en didactique de la philosophie
Remarques conclusives

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