De la surface au cœur des étoiles: vers une modélisation unifiée de la matière condensée aux plasmas

Les conditions nécessaires à la vie sur terre sont caractérisées par des températures de l’ordre d’une vingtaine de degrés Celsius, des densités de l’ordre de quelques grammes par centimètre cube et des pressions de l’ordre de la pression atmosphérique qui garantissent, par exemple, la présence d’eau liquide en surface. Ces conditions nous semblent si ordinaires dans le quotidien que nous en oublions le caractère exceptionnel. Dès que nous nous tournons vers le ciel, le caractère spectaculaire de l’apparence que présentent les astres de notre entourage impose certaines interrogations. Quelle est la pression sur Vénus ou sur Jupiter ? Quelle est la température au cœur du Soleil ? Quelle est la densité à l’intérieur des étoiles ? Nous tentons de résoudre ces questions à l’aide de calculs et par la mesure directement in situ lorsque c’est envisageable. La vie sous une forme quelconque peut-elle se trouver sur d’autres planètes au sein et en dehors de notre système solaire ? La recherche des exoplanètes s’est révélée particulièrement fructueuse ces dernières années avec un recensement de plus de 4 500 en 2021 dont environ 70 sont potentiellement habitables [1-3]. Au delà de la recherche d’exoplanètes, d’autres immenses objets tels que les étoiles, les naines blanches, les étoiles à neutrons ou encore les trous noirs nous poussent à considérer des densités gigantesques allant d’une centaine de grammes par centimètre cube dans le cœur du Soleil jusqu’au million de tonnes par millimètre cube au centre d’une étoile à neutrons, des températures de plusieurs millions de degrés Celsius et des pressions écrasantes, de l’ordre du gigabar au cœur du Soleil par exemple. Parallèlement aux découvertes expérimentales, le calcul théorique s’est rapidement amélioré et nous permet maintenant d’atteindre des conditions de température et de densité représentatives des milieux microscopiques de ces monstres astrophysiques. Cette discipline à part entière, baptisée « physique de la matière en conditions extrêmes » couvre à la fois la théorie, les observations, mais aussi les expériences laser (National Ignition Facility aux États-Unis, Laser Mégajoule en France) ou laser à rayons X (Linac Coherent Light Source aux États-Unis, European X-Ray Free-Electron Laser Facility en Allemagne).

La résolution du problème du corps noir par Max Planck au début du XXe siècle introduisit une nouvelle constante fondamentale, qui prit par la suite le nom de son découvreur, notée h, ainsi que de la notion de quanta d’énergie a constitué les bases de la mécanique quantique. Cette théorie a notamment permis de donner naissance à la statistique de Bose-Einstein et de Fermi-Dirac pour la description respectivement des bosons, et des fermions qui obéissent au principe d’exclusion de Pauli. C’est paradoxalement grâce à l’infinitésimal, où les lois de la mécanique quantique s’appliquent, que la thermodynamique des objets astrophysiques peut être comprise. La constante de Planck, qui possède une valeur si faible dans notre système international d’unités, est la brique fondamentale absolument nécessaire pour décrire des pressions aussi écrasantes au centre des étoiles. Lorsqu’il s’est agi ensuite de décrire la matière condensée, c’est-à-dire un système d’atomes en interaction, la résolution du problème quantique s’est avérée hors de portée.

Méthodes ab initio

Méthode de Hartree-Fock

En physique du solide, les méthodes ab initio ont pour but de résoudre l’équation de Schrödinger électronique à N-corps. Comme aucune solution analytique n’existe pour un problème de ce type, les premières solutions envisagées pour le résoudre furent de se placer dans l’approximation de champ moyen, qui rapporte le problème à N-corps à N problèmes indépendants à 2 corps. Les électrons sont considérés comme indépendants, et interagissent uniquement dans le potentiel effectif moyen du noyau et des autres électrons, base de la théorie de Hartree-Fock, développée dans les années 1930. Les autres approximations de cette théorie sont l’approximation de Born-Oppenheimer [17], qui néglige le mouvement des noyaux par rapport aux électrons, permettant la dissociation de leurs fonctions d’onde, et l’approximation non relativiste, qui implique que dans un solide, les électrons ont une vitesse négligeable devant celle de la lumière dans le vide .

Théorème de Hohenberg et Kohn 

Certaines méthodes développées après Hartree-Fock ont tenté de décrire le terme de corrélation électroniques, mais ce n’est qu’à partir de la formulation des théorèmes de Hohenberg et Kohn (HK) en 1964 [21] que la description de ces systèmes va s’accélérer en conséquence. La première démonstration par l’absurde proposée par Hohenberg et Kohn prouve que, le potentiel extérieur v(r) dans lequel un ensemble non homogène d’électrons en interaction se trouve, est une fonctionnelle unique de la densité électronique n(r) de l’état fondamental. En d’autres termes, l’état fondamental Ψ du système à N-corps électronique est une unique fonctionnelle de n(r).

L’Ansatz de Kohn et Sham

Une méthode de résolution des équations de la DFT, fut proposée par Kohn et Sham (KSDFT) en 1965 [22]. Leur proposition fut d’introduire un système fictif d’électrons indépendants ayant la même densité que le système en interaction, dans un potentiel effectif. La fonctionnelle de la densité prend la forme

F[n] = Ts[n] + EH[n] + Exc[n],

où Ts [n] est l’énergie cinétique du système d’électrons indépendants, EH est l’énergie de Hartree, résultant de l’interaction de Coulomb entre différents points de la densité électronique, et Exc est l’énergie d’échange-corrélation et contient entre autres la différence entre les énergies cinétiques du système en interaction et du système indépendant, et dont on s’attend à ce qu’il soit petit devant les autres. Toute la difficulté de résolution est désormais uniquement tournée vers l’estimation du potentiel d’échange-corrélation. Cette méthode a gagné en intérêt suite à la croissance exponentielle des moyens de calcul à partir des années 70, et les estimations des fonctionnelles d’échange-corrélation se sont perfectionnées avec le temps. L’avantage principal de ce modèle est qu’une fois la fonctionnelle fixée, la résolution du problème à N-corps est directe, s’inscrivant dans un procédé itératif de champ auto-cohérent similaire à la méthode de Hartree-Fock.

Méthodes sans orbitales

Outre les difficultés d’estimation de l’interaction d’échange-corrélation, nous verrons que la DFT a un champ d’application réservé à des températures peu élevées (T < TF) et à un nombre d’atomes relativement faible. La complexité du problème augmente en loi cubique lorsque le nombre d’états quantiques considéré augmente, car les orbitales de Kohn-Sham ψi nécessitent d’être orthogonalisées. C’est pourquoi cette méthode n’est pas considérée pour des hautes températures T > TF, nécessitant un très grand nombre d’orbitales [23]. Dans le même temps, la DFT de Kohn-Sham nécessite un échantillonnage de la zone de Brillouin pour décrire les fonctions d’onde, ce qui augmente davantage le nombre d’orbitales à prendre en compte. La méthode de la DFT sans orbitales appliquée aux plasmas propose de pallier ces difficultés en introduisant la densité d’énergie cinétique, ouvrant la possibilité d’étudier des systèmes de plus grande taille, et plus chauds [24-26]. L’idée de cette méthode est de se débarrasser des termes faisant apparaître les orbitales de Kohn-Sham en les approximant, et de minimiser l’énergie du système par rapport à n(r) de la même façon que dans les méthodes de Hartree-Fock et de la DFT de Kohn-Sham.

Dans le cas spécifique de la DFT sans orbitales, les pseudopotentiels non locaux ne peuvent être utilisés car leurs opérateurs de projection associés doivent agir sur des fonctions d’onde, et ne peuvent être approximés analytiquement [32]. C’est pourquoi il est nécessaire de faire des approximations de localité, et de symétrie sphérique autour du noyau [33].

Couplage ab initio et dynamique moléculaire

La DFT dans l’ansatz de Kohn-Sham (KSDFT) permet de calculer toutes les propriétés d’un système statique telles que l’énergie, la pression, ou encore l’entropie. Mais il est aussi possible de calculer les forces qui s’exercent sur chaque ion, soit par le théorème de Hellmann-Feynman soit tout simplement en différenciant numériquement l’énergie. La dynamique moléculaire classique s’applique donc sur les ions, avec des forces qui résultent d’un calcul quantique, justifiant de l’appellation de dynamique moléculaire quantique (QMD), souvent utilisée. Toutes les techniques de la dynamique moléculaire classique sont applicables (thermostats, systèmes périodiques etc.). Cette QMD à température finie est permise par l’utilisation de la fonctionnelle de Mermin [37] qui introduit les notions d’énergie libre et d’entropie. Dans sa conception première, telle qu’implémentée dans le code VASP [38], elle s’adresse à des systèmes comme les métaux liquides [39] dont la température est inférieure à l’électronvolt. L’idée d’utiliser la QMD pour décrire des plasmas de plusieurs dizaines d’électronvolts, est relativement récente et a été validée par la prédiction exacte de l’Hugoniot du deutérium en contradiction, à l’époque, avec les résultats expérimentaux, qui se sont avérés par la suite mal interprétés [40].

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Table des matières

1 Introduction générale
2 État de l’art
2.1 Contexte et enjeux physiques
2.2 Méthodes classiques
2.2.1 Monte Carlo classique
2.2.2 Dynamique moléculaire
2.3 Méthodes ab initio
2.3.1 Méthode de Hartree-Fock
2.3.2 Théorème de Hohenberg et Kohn
2.3.3 L’Ansatz de Kohn et Sham
2.3.4 Méthodes sans orbitales
2.3.5 Couplage ab initio et dynamique moléculaire
2.4 Monte Carlo quantique et nouvelles méthodes
2.5 Observables d’intérêt
2.5.1 Grandeurs thermodynamiques
2.5.2 Ionisation
2.5.3 Propriétés de transport
2.5.4 Relations de Rankine-Hugoniot
2.5.5 Expérimentations
2.6 Domaines de validité restreints
3 Gaz d’électrons
3.1 Statistique de Fermi-Dirac
3.1.1 Distribution de Fermi-Dirac
3.1.2 Énergie de Fermi et potentiel chimique
3.2 Modèle du gaz de Fermi
3.2.1 Densité d’états d’une particule libre
3.2.2 Énergie de Fermi et potentiel chimique
3.2.3 Thermodynamique
3.2.4 Limites classiques
3.3 Orbitales et occupation
3.3.1 Description en nombre d’orbitales
3.3.2 Nombre d’orbitales par occupation
3.4 Modèle du gaz d’électrons homogène
3.4.1 Paradigme
3.4.2 Approximation de Hartree-Fock
4 Théorie de la fonctionnelle de la densité à température finie
4.1 Introduction
4.2 Théorème de Mermin
4.3 Théorie de la fonctionnelle de la densité de Kohn et Sham
4.3.1 Ansatz de Kohn-Sham
4.3.2 Description des fonctions d’onde en base d’ondes planes
4.3.3 Forces et contraintes
4.3.4 Dépendance en température
4.4 Échange et corrélation
4.4.1 Approximation de la densité locale
4.4.2 Approximation du gradient généralisé
4.4.3 Autres fonctionnelles
4.4.4 Dépendance en température
4.5 Pseudopotentiels
4.5.1 Séparabilité
4.5.2 Conservation de norme et pseudopotentiels ultra-doux
4.5.3 Méthode projector augmented-wave
4.5.4 Dépendance en température
4.6 Vers les hautes températures
5 Dynamique moléculaire ab initio étendue
5.1 Introduction
5.2 Les fonctions d’onde électroniques de haute énergie
5.2.1 Définition d’un système de test
5.2.2 Énergie des bandes d’index élevé
5.2.3 Base d’ondes planes et énergies associées
5.2.4 Paquets d’ondes gaussiens
5.3 Potentiel résiduel
5.3.1 Évaluation par moyenne périphérique
5.3.2 Évaluation par moyenne spatiale
5.4 Estimation de l’erreur
5.5 Contributions des orbitales de haute énergie
5.5.1 Nombre d’électrons
5.5.2 Densité électronique
5.5.3 Énergie
5.5.4 Contraintes
5.5.5 Entropie
5.5.6 Terme de double-comptage
5.6 Implémentation
5.6.1 Composition du module
5.6.2 Appels et ajout des contributions
5.6.3 Utilisation
6 Conclusion générale

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