De la régénération des villes à la concurrence interurbaine

De la régénération des villes à la concurrence interurbaine

Une grande partie des villes industrielles européennes ont connu des phases de désindustrialisation, qui ont débuté dans les années 70. L’arrêt de certaines activités a entraîné des effets de crise: chômage, dégradation du bâti, apparition de friches, détériorations sociales et économiques. Il devient nécessaire de rénover le tissu urbain et de trouver des solutions face à une population et à des lieux marqués par la fermeture des anciennes activités industrielles. Les villes entament donc des politiques de régénérations urbaines, initialement dans les pays anglo-saxons, puis en France à partir des années 90. Pour résoudre ces problèmes, les pouvoirs publics ont dû intervenir en fournissant des aides et en s’appuyant sur des politiques de reconversion (B. Lusso, 2010). En effet, depuis la décentralisation à la fin des années 80, l’Etat français n’intervient plus dans la gestion de l’économie et les territoires sont amenés à concevoir l’action locale par eux-mêmes. Les crises et leur intensité n’étant pas les mêmes partout, les collectivités réagissent de différentes manières mais leur but commun est bien de trouver des solutions pour freiner le déclin et redynamiser la ville. Cela passe par la réhabilitation du bâti et des friches, par l’amélioration du cadre et de l’environnement ou encore par des interventions économiques afin de réduire le chômage (A. Chasseriau, 2003). Une fois la réponse à la crise et au déclin programmé donnée, certaines interventions publiques peuvent aller plus loin et ont également pour but de faire rayonner la ville et de développer son attractivité.

Ayant longtemps été des figures de second rang dans les rivalités territoriales en bénéficiant de la protection de l’état, les collectivités doivent désormais programmer leur avenir de manière stratégique pour se développer et surtout se démarquer (M. Chanoux, S. Serval). Cette stratégie s’explique par la pression liée à une «concurrence entre les villes» (P. Le Galès, 1995) qui sont désormais en compétition afin d’exister et d’être propulsées au rang de « villes gagnantes ». De plus, les phénomènes de globalisation placent également les villes dans des échelles de concurrence internationale. En réalité, on ne voyage plus vers un pays, mais vers une ville (A. Chasseriau, 2006). Il y a donc eu une transition de relations verticales traditionnelles dans un pays vers des relations horizontales transnationales. Nous pouvons prendre comme exemple le réseau des villes élues « capitales européennes de la culture ». Ces processus entraînent l’utilisation de plus en plus fréquente d’outils et de techniques qui relèvent du marketing territorial.

Marketing territorial 

Tout d’abord, une brève définition du marketing territorial s’impose : c’est, d’après Vincent Gollain (2010), « l’effort de valorisation des territoires à des marchés concurrentiels pour influencer, en leur faveur, le comportement de leurs publics par une offre dont la valeur perçue est durablement supérieure à celle des concurrents ». Le marketing urbain est nourri, comme nous venons de le préciser, par la mondialisation et la concurrence interurbaine, cependant ce n’est pas un phénomène nouveau. En Europe, c’est au XIXe siècle qu’apparaissent pour la première fois des actions de marketing territorial et urbain. Cela concernait principalement des lieux de villégiature – des villes thermales, balnéaires ou de montagne – qui lançaient des campagnes pour développer leur attractivité en s’associant avec différents acteurs comme des sociétés de chemins de fer, des promoteurs immobiliers, des casinos… (B. Meyronin, 2012). Ces moyens et techniques visant à accroître l’attractivité d’un territoire ont donc des origines anciennes et diverses, et s’adaptent aux différentes époques et cibles. Cependant, le recours au marketing territorial s’est accru ces trente dernières années, notamment avec la poussée du néolibéralisme depuis les années 70, qui a placé le marketing urbain comme la nouvelle norme des pratiques urbaines (N. Godendeau, 2014). Ce marketing, pratiqué par de plus en plus d’acteurs, répond aux besoins des villes de se doter de nouveaux moyens pour survivre et d’être toujours plus attractives. Le marketing peut être basé sur deux choses : tout d’abord sur les composantes géographiques, et les ressources naturelles et humaines du territoire telles que sa morphologie, son climat, ses voies de communication, sa localisation, sa démographie … ou bien sur les composantes « organiques » de celui-ci (histoire, culture et organisation), ses ressources identitaires et symboliques telles que la présence de services publics ou financiers, le poids du territoire (dans l’agglomération, le département, la région…), les dynamiques socio-culturelles, de communications sociales, d’évènementiel, le peuplement, le poids de la culture, de la diversité, l’attractivité, le patrimoine…

Les différents moyens utilisés 

La compétition se joue sur différents niveaux puisque les métropoles mettent en avant les espaces qu’elles peuvent valoriser, à des échelles inférieures, afin de développer et démontrer leur attractivité à une échelle supérieure, sur le plan international notamment (M. Adam, 2015). La concurrence entre les territoires active le local et stimule le lancement de grands projets singularisant le territoire pour attirer l’attention et accroître son attractivité. Ce nouvel élan de développement s’accompagne d’une sorte de propagande de la ville avec une volonté de faire mais surtout de faire savoir. Cette logique se base sur les messages promotionnels et publicitaires de la ville mais également sur une « théâtralisation » de l’espace (E. Vivant, 2009). Selon Patrick Le Galès, les domaines qui sont les plus utilisés à des fins de stratégie et de marketing urbain sont la culture, la communication, l’aménagement, l’urbanisme et le développement économique. Maria Gravari-Barbas (2013) traduit Greg Richards et Julie Wilson, qui ont établi 4 types d’approche que les villes occidentales ont développés pour stimuler leur attractivité:

– Le lancement d’un grand projet urbain, souvent de type équipement (musée, opéra, salle de concert…) avec une architecture iconique, parfois l’œuvre d’un « starchitect». Ces grands projets urbains réinvestissent principalement les espaces péricentraux (Confluence à Lyon, Euroméditerranée à Marseille, Euratlantique à Bordeaux, l’île de Nantes), où la rente foncière est élevée. Ces politiques urbaines favorisent le processus de gentrification, avec la venue de nouvelles populations ciblées. (C. Morel-Journel, G. Pinson, 2012-2013).
– Le développement d’une spécialisation culturelle forte, soit dans un domaine culturel (photo, bande-dessinée, mode, design…), soit avec le développement des industries créatives.
– L’organisation de grands évènements récurrents ou exceptionnels. Généralement, ces évènements se situent dans des zones que les municipalités veulent mettre en avant ou développer, parfois dans le but de sensibiliser ou de faciliter l’acceptation d’un projet grâce à cette phase de « test » avant une pérennisation éventuelle. Ces évènements sont bien souvent médiatisés et véhiculent des valeurs positives via la valorisation d’un lieu.
– La réactivation de ressources patrimoniales, matérielles ou immatérielles, y compris dans les villes n’ayant pas un patrimoine monumental.

Depuis la fin des années 80, ces politiques urbaines sont particulièrement tournées vers la culture, qui n’est plus considérée comme une fonction marginale. Nous pouvons définir la culture au sens large, comme l’a définie David Harvey « les arts, le théâtre, la musique, le cinéma, l’architecture, ou plus largement, les modes de vie locaux, le patrimoine, la mémoire collective… » (2008). La culture est à la fois utilisée comme un vecteur de développement économique mais elle est également utilisée par les métropoles comme un vecteur de rayonnement. La dimension créative d’une ville est révélée par son dynamisme culturel, artistique mais aussi par sa capacité d’innovation. Ce statut de « ville créative » induit souvent le développement d’industries créatives. Elles concernent « la production et la commercialisation de contenus créatifs de nature culturelle et immatérielle » (Unesco). Sont couramment inclus dans ce type d’industrie : l’édition imprimée, le multimédia, la production cinématographique audiovisuelle et phonographique, l’artisanat, le design, l’architecture, la publicité…. De plus en plus de villes se spécialisent dans ce type d’économie car elle est prometteuse en terme de croissance, véhicule une certaine identité culturelle et est symbole d’innovation. En effet, les industries créatives produisent de la symbolique et ces représentations induisent certaines valeurs et mettent en avant une « consommation d’expérience ». Cette notion d’image est importante pour les villes comme nous le verrons dans la partie suivante. Les différentes actions réalisées par les villes ont toutes pour point commun d’être fortement médiatisées, afin de toucher au maximum les différents publics visés.

Les cibles 

Les habitants ou bien utilisateurs quels qu’ils soient de ces espaces deviennent des ambassadeurs de la métropole. C’est pour cela que la volonté des villes est d’identifier et de séduire des cibles précises, capables de diffuser des messages sur la ville. Ces cibles sont variées, et sont à la fois endogènes et exogènes au territoire. Nous pouvons citer les investisseurs, les entreprises, les groupes sociaux favorisés ou au cœur de l’économie de la connaissance en tant que résidents, les organismes publics ou bien les touristes. La presse joue également un rôle important dans ce processus de rayonnement des villes: on observe une multiplication d’articles et de reportages qui vantent le cadre de vie, l’ambiance ou bien encore les opportunités professionnelles de certaines villes. Ces classements, palmarès ou autres listes de critères, font échos auprès des habitants, qui ressentent une fierté, mais également auprès des concepteurs qui utilisent cette donnée pour justifier leur prétendue supériorité par rapport aux autres territoires. Le marketing peut donc être à la fois interne et externe mais la distinction entre les destinataires ne se fait pas toujours. L’habitant de la ville reçoit une multitude de signes puisqu’il est soumis à la fois aux discours, images et évènements du marketing externe et à ceux du marketing interne. (M. Rosemberg, 2000).

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Table des matières

Introduction
Partie 1 : concepts mobilisés, problématique et méthodologie de recherche
I. Concepts mobilisés
1. De la régénération des villes à la concurrence interurbaine
2. Marketing territorial
2.1. Les différents moyens utilisés
2.2. Les cibles
2.3. Les valeurs véhiculées
3. D’une identité urbaine à un imaginaire urbain
3.1. Concept d’identité urbaine
3.2. Concept d’imaginaire
II. Hypothèse et méthode de recherche
2.1. Problématique et hypothèse de travail
2.2. Méthodologie de recherche
Partie 2: cas d’étude, les stratégies urbaines et le marketing territorial de la métropole nantaise depuis la fin des années 80
I. Justification du choix de Nantes comme cas d’étude
1. Passé industriel et renouveau nantais : « de la belle endormie à l’Eden de l’ouest»
2. La « réussite nantaise »
3. L’évolution de l’identité nantaise
4. L’imaginaire nantais
I. Collecte de données
1. Etat des lieux chronologiques des grandes stratégies urbaines nantaises depuis la fin des années 80
2. Interprétation des résultats
Conclusion

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