De la critique de la société à la considération de la vie primitive

Toute philosophie est liée à la personnalité et à l’histoire d’un auteur. Chaque penseur a son propre vécu. Avant d’aborder un tel concept philosophique, il est important de tourner les yeux vers l’historique du philosophe en question. Cela nous amène à jeter un coup d’œil sur la vie passée de Jean-Jacques ROUSSEAU.

Fils d’Isaac ROUSSEAU citoyen et de Suzanne BERNARD citoyenne, JeanJacques ROUSSEAU est né à Genève, le 28 juin 1712. Il a perdu sa mère à sa naissance. Son père Isaac ROUSSEAU est un horloger. En 1717, son père a vendu sa maison de la haute ville de Genève pour s’installer dans un quartier pauvre. A partir de là, Jean-Jacques ROUSSEAU n’est plus un garçon du haut. Citoyen genevois, il est devenu simple natif. A cette époque, la ville de Genève est divisée socialement, politiquement et géographiquement en deux : la haute ville et la basse ville. La haute ville est réservée aux vrais citoyens et la basse ville aux simples natifs. Les habitants de la haute ville portent le nom de « gens du haut ». Ils ont des prétentions aristocratiques. Ils appartiennent politiquement au parti nommé des « Négatifs » parce qu’ils disent toujours non à toutes les revendications ou « représentations » du peuple. Les « représentants » sont l’expression attribuée à des gens des quartiers populaires de la basse ville. Devenu simple natif, Jean-Jacques ROUSSEAU est élevé dans un quartier le plus populaire et le plus turbulent de la basse ville appelé Saint-Gervais comme il dit : «je n’étais plus qu’un enfant de Saint-Gervais. » Les « gens du bas » sont privés de toute liberté. Cette privation de liberté touche beaucoup le cœur de JeanJacques ROUSSEAU. Son père l’a abandonné pour se réfugier à cause de la crise politique du 11 octobre 1722. Des gens charitables l’ont accueilli. De là, Jean-Jacques ROUSSEAU a rencontré un manque d’éducation parentale. Son enfance est presque négligée aussi bien par son père que par les autres accompagnateurs. Il est mis en pension à Bossey, chez le pasteur Lambercier et mis en apprentissage chez le graveur Duccommun. Ce graveur lui a traité brutalement. Sa jeunesse est pleine d’aventures. D’une éducation protestante,Jean-Jacques ROUSSEAU est obligé de se convertir au catholicisme par peur de la persécution. Il est nourri par charité tour à tour et il est humilié par des maîtres orgueilleux. En 1768, Jean-Jacques ROUSSEAU s’est cru victime du « complot universel ». Il est décédé en 1778.

Toute philosophie est fille de son temps. La théorie philosophique est souvent, en rapport avec un évènement bien précis. La vision et la critique de JeanJacques ROUSSEAU sur la civilisation et la réalité sociopolitique de son temps l’ont poussé à exposer ses idées dans ses ouvrages. Jean-Jacques ROUSSEAU est un philosophe de XVIIIème ou de siècle des Lumières. En Europe, le XVIIIème est appelé siècle des Lumières car à cette époque, le rôle de la raison, de la réflexion personnelle et du progrès scientifique est considéré comme source d’accès à la vérité et à la liberté. Politiquement, cette époque est encore marquée par l’absolutisme héritier de certains monarques en particulier Louis XIV. Ceci a beaucoup influencé les pays occidentaux. Une monarchie est absolue lorsque tous les pouvoirs sont entre les mains d’un seul roi. De là, Jean-Jacques ROUSSEAU voit que la civilisation et la politique de son temps minimisent l’humanité. A travers ses ouvrages, il veut exercer une profonde influence sur la pensée politique et sur l’éducation. Il condamne les institutions, dans lesquels l’Etat est supérieur à l’homme et il s’intéresse à la notion d’homme en tant qu’individu. Il a l’intention de découvrir le caractère « perfectible » de l’être humain: l’homme est capable d’amélioration sur le plan humain, comme sur celui de la connaissance.

Enfant historiquement malheureux et qui se sent être délaissé, Jean-Jacques ROUSSEAU valorise l’éducation. Victime de l’inégalité de l’homme social, il a tendance à mettre en place l’égalité citoyenne. Celle-ci ouvre la voie à la liberté qui est un élément important pour le bonheur de l’homme social. De là, JeanJacques ROUSSEAU a une aspiration à la liberté humaine et à une nouvelle forme de la société d’où le choix du sujet : Le système d’institution de la société idéale selon la doctrine politique de Jean-Jacques ROUSSEAU.

Conscient de la dégradation de l’homme social, Jean-Jacques ROUSSEAU s’intéresse au fondement de la meilleure société. L’évènement après la mort de Louis XIV en 1715 est une occasion pour Jean-Jacques ROUSSEAU d’attirer le peuple à revendiquer sa liberté. De ce fait, il s’interroge sur le droit de chaque individu, sur le droit politique, sur le pouvoir politique, sur le régime politique, sur la forme du gouvernement et sur le mode d’éducation. Ses interrogations sont toujours guidées par une forte aspiration à la liberté. Les réflexions de JeanJacques ROUSSEAU sur l’organisation de la société vont pousser, plus tard, les acteurs de la révolution française à accomplir leur dessein. Elles vont aussi tracer la voie au libéralisme social et vont susciter des changements sur le plan politique dans le monde occidental du XIXème siècle. La mise en place des droits fondamentaux par l’ONU (Organisation des Nations Unies), adoptée en 1948 est inspirée sur la théorie rousseauiste de la vie sociale. Tout cela montre que JeanJacques ROUSSEAU a élaboré une théorie très importante pour l’avenir de la société humaine. C’est justement dans le souci d’améliorer l’organisation de toutes les sociétés étatiques, en particulier, les sociétés au sein des pays sous développés, que ce sujet est choisi. Ce sujet peut conscientiser les gouvernants et les politiciens à assumer leurs responsabilités vis-à-vis de la nation et à rendre compte de la liberté humaine et de la justice sociale comme l’exprime JeanJacques ROUSSEAU: « Justice et liberté, voilà les premiers devoirs de l’homme.

LE RECUL VERS LE PASSE DE L’HISTOIRE DE L’HUMANITE SUIVI DE LA CONSCIENCE DE NECESSITE DE LA SOCIETE 

De la critique de la société à la considération de la vie primitive 

La société, source de la perversion

L’homme est un être imparfait. Il a des manques à remplir. Il court incessamment pour les combler. A cause de ces manques, l’homme est conscient qu’il a certaines faiblesses. La reconnaissance de ces faiblesses le pousse à se regrouper et à fonder la société. Or, la doctrine politique de Rousseau informe que la société est la principale source du problème de la liberté humaine. Rousseau conçoit qu’au fur et à mesure que l’homme s’associe et avance dans le domaine du savoir, il tombe dans le mal. Autrement dit, le mal s’effectue suivant l’évolution technologique et scientifique. La civilisation et l’instruction sont, aux yeux de Rousseau, des facteurs dégradant de la tranquillité et du bonheur de l’homme. Elles agissent pour le malheur de l’homme. De là, les individus, au lieu de s’aimer, se rivalisent. C’est pourquoi Rousseau par l’intermédiaire de Starobinski affirme :

« Les fausses lumières » de la civilisation, loin d’éclairer le monde humain, voilent la transparence naturelle, séparent les hommes les uns des autres, particularisent les intérêts, détruisent toute possibilité de la confiance réciproque, et substituent à la communication essentielle des âmes un commerce factrice et dénué de sincérité ; ainsi se constitue une société où chacun s’isole dans son amour propre et se protège derrière une apparence mensongère.

Au début de l’établissement de la société, tout homme a tendance à viser l’intérêt général et les biens communs. Mais au fil du temps, l’homme change de mentalité dont chacun ne se préoccupe que de l’intérêt personnel. Ce qui signifie que la mauvaise foi de l’homme est née avec la société. Celle-ci engendre l’idée d’exploitation, d’esclavage et de tromperie. Selon Rousseau, c’est la contradiction entre la nature originelle et les produits de la civilisation qui amène l’homme à des graves problèmes, à des souffrances. D’un côté, la nature humaine a ses besoins et de l’autre côté, la civilisation a ses propres exigences. Souvent, ce qui est appréciable pour l’un est déprécié pour l’autre et réciproquement. La loi de la nature s’oppose à la morale de l’homme civilisé et aux normes posées par la société. Nature et culture, contradictoires à l’intérieur de chaque individu, sont la source de la méchanceté. De là, tout est bouleversé et aucun homme bon n’existe. C’est pour cette raison que Rousseau dit :

L’homme était bon et heureux dans l’état de liberté naturelle ; il devient mauvais et malheureux quand son penchant naturel et son devoir social sont en opposition.

C’est ainsi que l’homme devient orgueilleux. Et l’orgueil chez l’homme fait exister les classes sociales. Dans la société, l’homme doit aliéner sa nature. Il n’est plus le simple produit de la nature. Il est en dépendance totale des produits sociaux. De là, il est devenu engagé et ne peut vivre que dans et par la société. Il ne peut réagir sans avoir la conscience des exigences sociales. La morale sociale phagocyte sa propre personnalité. Il se trouve entre ses penchants et ses obligations en tant que membre de la société. Aux yeux de Rousseau :

Celui qui est dans l’ordre civil, veut conserver la primauté des sentiments de la nature et ne sait ce qu’il veut. Toujours en contradiction avec lui-même, toujours flottant entre ses penchants et ses devoirs, il ne sera jamais ni homme ni citoyen : il ne sera bon ni pour lui ni pour les autres. Ce sera un des hommes de nos jours (…), ce ne sera rien.

Ce conflit entre nature et culture, transforme l’homme en un être inqualifiable. Par conséquent, il est difficile de saisir l’attitude d’un citoyen. L’adhésion de l’homme dans la société ne veut pas dire l’élimination totale de toute personnalité. Son union avec ses semblables ne l’empêche pas de se conserver. Ce n’est pas l’amour de la collectivité qui pousse l’homme à s’unir. Au contraire, l’homme s’associe pour des raisons individuelles. L’homme vit dans et en société en vue de renforcer sa propre faiblesse. A cause de la faiblesse de la nature et de sa propre nature l’homme est obligé de fonder la société.

Dans la société, l’homme n’a aucune volonté de s’aliéner et de se réaliser dans le but de favoriser l’intérêt général. C’est la tromperie et l’hypocrisie qui anime la vie de l’homme social et civilisé. C’est ainsi que les membres de la société moderne ne cherchent qu’à asservir ses associés pour la satisfaction de ses propres besoins. Ce qui signifie que la société fait tomber l’homme dans l’exploitation de ses semblables en vue de prioriser le confort matériel. Selon Jean de DIEU :

La société civilisée, en développant toujours davantage son opposition à la nature, obscurcit le rapport immédiat des consciences : la perte de la transparence originelle va de pair avec l’aliénation de l’homme dans les choses matérielles.

L’homme civilisé raisonne beaucoup plus que l’homme primitif. Il écoute beaucoup plus sa raison que son cœur. De ce fait, l’égocentrisme se met à la place de la générosité. C’est pour cette raison que Rousseau par l’intermédiaire Starobinski dit :

La chute n’est autre que l’intrusion de l’orgueil ; l’équilibre de l’être sensitif est rompu ; l’homme perd le bienfait de la coïncidence innocente et spontanée avec luimême. Si la nature nous est destinée à être sains, j’ose presque assurer que l’état de réflexion est un animal dépravé. Alors va commencer la division active entre le moi et l’autre ; l’amour propre vient pervertir l’innocent amour de soi, les vices naissent, la société se constitue. Et tandis que la raison se perfectionne, la propriété et l’inégalité s’introduisent parmi les hommes, le mien et le tien se séparent toujours davantage.

Il est difficile de comprendre l’homme social parce qu’il se situe devant deux chemins opposés et de direction différente. D’une part, il se montre inséparable du groupe ; d’autre part, il cherche à se réaliser seul au sein de son groupe d’où l’antagonisme de la civilisation. En même temps que l’homme développe la société, il la détruit. A ce propos, Starobinski affirme :

L’homme a une inclination à s’associer, parce que dans tel état il se sent plus qu’homme, c’est-à-dire qu’il sent le développement de ses dispositions naturelles. Mais il a aussi un grand penchant à se séparer : en effet, il trouve en même temps en lui l’insociabilité qui fait qu’il ne veut tout régler qu’à sa guise et il s’attend à provoquer surtout une opposition des autres, sachant bien qu’il incline lui-même à s’opposer à eux.

Le caractère égoïste et orgueilleux de l’homme civilisé est la principale source de la division de classe. C’est pourquoi Rousseau condamne la civilisation. Dans la société civilisée, une menace se présente entre les classes. Aucune d’entre elles n’est au service du bien commun. Par conséquent, elles sont devenues conflictuelles. La bataille entre elles a pour fin, l’existence de la classe opprimée et de la classe envahissante. Cette situation fait diversifier les races humaines. De là, chaque classe a une certaine ressemblance à l’homme face à un problème qui cherche à le résoudre. Les conflits font naître à chaque classe une volonté dominatrice. Cette volonté se juge au-dessus de toute autre. Elle considère les autres volontés, celles des classes battues comme des moyens de perfectionnement. Les battus lors d’une guerre n’ont plus de volonté. Ils se dégradent et se trouvent à la même position que les biens matériels des membres de la classe victorieuse et dominante. Ils deviennent des moyens de production. Cette situation semble immorale. C’est pourquoi, Kant condamne la multiplicité des races humaines. A ses yeux, les diverses races humaines peuvent engendrer le mal social. Selon Rousseau, aucun individu n’a le droit de traiter ses semblables comme esclaves. Nul n’est supérieur aux autres devant la loi. Ceux qui se croient avoir le pouvoir sur l’autre se trompent. C’est pourquoi Rousseau affirme.

Le droit d’esclavage est nul, non seulement parce qu’il est illégitime, mais parce qu’il est absurde et ne signifie rien. Ces mots esclavage et droit contradictoires s’excluent mutuellement, soit d’un homme à homme, soit d’un homme à un peuple, ce discours sera toujours insensé.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LE RECUL VERS LE PASSE DE L’HISTOIRE DE L’HUMANITE SUIVI DE LA CONSCIENCE DE NECESSITE DE LA SOCIETE
Chapitre1 : De la critique de la société à la considération de la vie primitive
I-1-1 : La société, source de la perversion
I-1-2 : L’état de nature dans la vision rousseauiste
I-1-3 : La vie à l’état de nature
Chapitre 2 : La nécessité de la vie sociale
I-2-1 : Le dépassement de la vie à l’état de nature
I-2-2 : L’apport de la société à l’humanité
DEUXIEME PARTIE : LE FONDEMENT DE LA SOCIETE IDEALE
Chapitre 1: Les principales exigences de la société idéale à travers la suggestion de Rousseau
II-1-1 : La liberté humaine comme finalité de la société idéale
II-1-2 : Les institutions sociales comme principe
Chapitre 2 : Les meilleurs moyens proposés par Rousseau en vue de réaliser la société idéale
II-2-1 : La mise en place de la volonté générale et du contrat
II-2-2 : L’importance de la pratique de la démocratie pour la liberté citoyenne
II-2-3 : L’éducation rousseauiste, préparation des bons citoyens
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIES

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