Darwin et la théorie de la descendance avec modification

Année 2009, année Darwin : un vieux monsieur très discret est fêté 200 ans après sa naissance et 150 ans après la parution de son œuvre «On the origin of species by means of natural selection or preservation of favoured races in the struggle for life », ouvrage fondateur de la théorie de l‟évolution. Darwin est à l‟honneur en France et à travers le monde. Un site dédié à l‟événement , initiative d‟un collectif de chercheurs, d‟enseignants, d‟institutions et d‟associations en partenariat avec des collectivités territoriales, des laboratoires de recherche et des institutions, recense toutes les manifestations proposées en France, des conférences pour le grand public aux conférences pour les spécialistes en passant par des expositions, des débats publics. Comment expliquer une telle mobilisation pour ce double anniversaire en France et au delà des frontières ?

La théorie de l‟évolution a 150 ans. C‟est un des savoirs fondamentaux de notre société moderne, un élément de base de la culture scientifique moderne. Sa publication a constitué une véritable révolution scientifique dans une société victorienne très hiérarchisée. Darwin lui-même, effrayé de ce qu‟il avait pressenti, attendit plus de vingt années avant de publier les conclusions de son voyage sur le Beagle. Il était en effet tout à fait conscient de la bombe que contenait son ouvrage. La société de l‟époque était tout à fait prête à accepter que l‟homme ait évolué. Evolué oui ! Mais en partant du singe, pas question. Dans l‟origine des espèces, il faisait juste une allusion à ce sujet « La lumière sera faite sur l’origine de l’homme et son histoire ». Au XXe siècle, la génétique donnera raison à Darwin.

Depuis, Darwin est toujours au cœur de la tourmente puisque, comme le dit si bien Freud (1916), la science a infligé une blessure « à l’amour-propre de l’humanité quand la biologie a frustré l’homme du privilège d’une création particulière ». Du procès du singe en 1925 à la diffusion massive de l‟atlas de la création en 2006, nombreuses furent les tentatives pour déstabiliser les arguments évolutionnistes. Les médias relaient tour à tour thèses créationnistes, thèses évolutionnistes et plus récemment celles du dessein intelligent et entretiennent, consciemment ou non, le prétendu conflit entre science et religion. Jean Gayon (2007) préfère parler de controverse sociale de grande ampleur qui traverse la science, qui traverse la religion. D‟ailleurs, Charles Darwin lui-même, tout au long de sa vie, a évolué d‟un sentiment religieux (son père le destinait à la fonction de pasteur) à un état sceptique au moment de la parution de l‟origine des espèces à un athéisme en fin de vie .

La théorie de l’évolution, une théorie qui évolue … 

Chaline (2006) définit l‟évolution comme l‟ensemble des « modifications des êtres vivants au cours du temps. Ces modifications peuvent toucher tous les niveaux d’organisation du vivant depuis les gènes, les chromosomes jusqu’aux morphologies internes et externes, le comportement et le mode de vie ». Elle explique la diversification de la vie, de ses premières formes à l‟ensemble des êtres vivants actuels par une chaîne de ramifications buissonnantes. Si cette idée d‟évolution biologique est souvent d‟emblée associée à Darwin, ce dernier n‟en est pas le découvreur. En revanche, il a été le premier à avoir accumulé suffisamment de preuves et d‟arguments pour la valider sur le plan scientifique et en proposer une première théorisation .

Darwin et la théorie de la descendance avec modification (sélection naturelle)

La genèse d’une œuvre

Le voyage sur le Beagle
A 22 ans, Darwin s‟embarque sur le Beagle. Au cours de ce voyage qui dura cinq années, il va étudier tout ce qu‟il est possible d‟étudier : la paléontologie, la géologie, la botanique, la zoologie et bien d‟autres. Dans son autobiographie, Darwin écrit « Le voyage sur le Beagle a été de beaucoup l’évènement le plus important de ma vie et a déterminé ma carrière entière » (Conry, 1969). En effet, c‟est au cours de ce périple que son travail de naturaliste va prendre toute son ampleur. La collecte de spécimens est riche, la description des espèces et de leurs habitudes est précise. «Je fus amené à étudier de très près plusieurs branches de l’histoire naturelle et ma puissance d’observation progressa […] Une autre de mes occupations consistait à collectionner des animaux de toute nature et à décrire brièvement et à disséquer beaucoup d’animaux » (Darwin, 2008).

Avant ce voyage, Darwin ne se démarquait pas des créationnistes mais les questions que ses observations vont générer ne trouveront aucune réponse satisfaisante en adéquation avec les idées de l‟époque. Ces interrogations laissées en suspend vont le pousser à remettre en question l‟enseignement reçu à Cambridge, mélange de théologie et de sciences naturelles. Au cours de ces cinq années, il forge ses opinions :
● à partir de ses observations, notamment des tortues et des pinsons des Galápagos, il commence à douter du créationnisme et commence à se rapprocher des idées transformistes de Lamarck. En effet, tortues et pinsons présentent à la fois des caractères identiques et des caractères différents selon l‟île sur laquelle ils vivent. Darwin émet alors l‟hypothèse que les différentes espèces sont issues d‟une seule, ce qui n‟est pas en accord avec les pensées créationnistes.

« J’avais été, pendant le voyage sur le Beagle, frappé d’abord en découvrant dans les couches Pampéannes de grands animaux fossiles recouverts d’une armure semblable à celles des armadillos actuels ; puis par l’ordre selon lequel les animaux d’espèces presque semblables se remplacent les uns les autres à mesure qu’on s’avance vers le sud du continent, et enfin par le caractère sud-américain de la plupart des espèces des îles Galápagos, et plus spécialement par la façon dont elles diffèrent légèrement entre elles sur chaque île du groupe […] Il est évident que ces faits et beaucoup d’autres analogues ne peuvent s’expliquer que par la supposition que les espèces se modifient graduellement » (Darwin, 2008);

● il commence alors à s‟opposer au catastrophisme et adhère à l‟uniformitarisme et au gradualisme de Lyell. Ce dernier définit les changements subis par la surface de la Terre comme étant le résultat de forces agissant de manière constante et graduelle. « J’avais apporté avec moi le premier volume des Principles of geology de Lyell que j’étudiais attentivement, et ce livre me rendit de grands services » .

Les techniques des éleveurs et la règle de la sélection

Après son retour en Angleterre, Darwin s‟est intéressé aux travaux des éleveurs et fréquente les horticulteurs et colombophiles. Il constate que les éleveurs, pour améliorer les espèces, tiennent compte des variations spontanées, isolent les individus portants des traits intéressants et les accouplent avec des individus portant les mêmes caractères. « Le pouvoir de sélection, d’accumulation que possède l’homme est la clef du problème ; la nature fournit les variations, l’homme les accumule dans certaines directions qui lui sont utiles […] Je m’aperçus très vite que la sélection représenta la clef du succès qu’a rencontré l’homme pour créer des races utiles d’animaux et de plantes. Mais comment la sélection pouvait-elle être appliquée à des organismes vivant à l’état de nature ? »

La lecture de Malthus, un catalyseur

De nombreux spécialistes de Darwin s‟accordent à dire que c‟est la lecture d‟un ouvrage de Thomas Robert Malthus (1766 – 1834), Essai sur le principe de population publié en 1798, qui a permis à Darwin de formuler un élément clé qui le conduira vers l‟élaboration de sa théorie, le principe de la lutte pour l‟existence et par la suite son Principe de sélection naturelle. C‟est à partir de ce moment-là (1842) que Darwin commença à rédiger les premiers éléments de sa théorie.

L’œuvre de Darwin

L’origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, publiée en 1859, va bouleverser les idées reçues en paléontologie, en zoologie mais également en philosophie et en religion. Pour en présenter ici les traits qui nous paraissent les plus significatifs, nous ferons essentiellement référence à deux auteurs, Gould et Mayr.

« Le trépied darwinien »
Dans un monumental ouvrage, Gould (2006) réalise une exégèse de l‟œuvre et de la pensée de Darwin. Il montre notamment que l‟évolution darwinienne repose sur trois piliers fondamentaux, ce qu‟il nomme le « trépied darwinien » :

Pilier de « la nature des agents et du mode d’opération »
La sélection naturelle agit exclusivement sur les organismes, en accordant à certains d‟entre eux une descendance plus importante qu’à d’autres. L’organisme, le phénotype, est l’unique niveau sur lequel agit la sélection. L’organisme est en effet un individu au sens évolutionniste, au sens où il présente les caractéristiques fondamentales nécessaires au fonctionnement de la sélection darwinienne : des délimitations spatiale et temporelle nettes, un corps isolé de celui des autres (par la peau), une naissance et une mort, autrement dit une stabilité au cours de son existence ; une capacité à se « répliquer », avec une part de variabilité chez ses descendants, des différences qui le distinguent des autres individus avec qui il est en interaction (compétition).

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Table des matières

INTRODUCTION
Chapitre I : LA THÉORIE DE L’ÉVOLUTION, UNE THÉORIE QUI ÉVOLUE
1. La genèse des idées évolutionnistes
2. Darwin et la théorie de la descendance avec modification
2.1. La genèse d’une œuvre
2.1.1. Le voyage sur le Beagle
2.1.2. Les techniques des éleveurs et la règle de sélection
2.1.3. La lecture de Malthus, un catalyseur
2.2. L’œuvre de Darwin
2.2.1. Le « trépied darwinien »
2.2.1.1. Nature des agents et mode d’opération
2.2.1.2. Efficacité de la sélection
2.2.1.3. Champ d’applicabilité du mécanisme évolutif fondamental
2.2.2. Le paradigme évolutionniste de Darwin
2.2.2.1. L’évolution en tant que telle
2.2.2.2. L’évolution par descendance d’ancêtres communs
2.2.2.3. Le gradualisme de l’évolution
2.2.2.4. La spéciation populationnelle
2.2.2.5. La sélection naturelle
2.3. Les résistances à la théorie
3. L’après Darwin et la théorie de l’évolution de nos jours
3.1. La théorie synthétique de l’évolution ou néodarwinisme
3.2. La théorie neutraliste de Kimura
3.3. La théorie des équilibres ponctués de Gould et Elredge
4. Les recherches actuelles et les nouvelles orientations de la théorie de l’évolution
4.1. Evo-dévo, une nouvelle synthèse
4.1.1. Les apports de la génétique
4.1.2. Evo-Dévo et la paléontologie
4.2. Autres champs de recherche
5. L’évolution, science théorique ; l’évolution, science historique
5.1. Les contours de la science moderne
5.2. Sciences de l’évolution et régimes de la preuve
6. Vers une représentation graphique du concept d’évolution du vivant
6.1. Définition et origine des cartes de concepts
6.2. Concept d’évolution et cartes conceptuelles
6.2.1. Des cartes existantes
6.2.2. Notre proposition
Chapitre II : SAVOIR SAVANT ET SOCIÉTÉ
1. Evolution, un mot
1.1. Une étude étymologique et « historique »
1.2. Une étude lexicographique
1.3. Une analyse sémantique des synonymes
2. La résistance au darwinisme ou le refus de l’évolution
2.1. Une question de religion : les créationnistes
2.1.1. A propos de création
2.1.2. Une typologie des créationnistes
2.2. Un problème de compréhension/interprétation
3. Des études et enquêtes à travers le monde
3.1. Deux enquêtes récentes : Gallup (2007) et FASEB (2008)
3.2. Une résolution du Conseil de l’Europe (2007)
3.3. Une étude internationale : Biohead Citizen (2007)
3.4. Une étude belge : Perbal, Susanne & Slachmuylder (2006)
Chapitre III : L’ÉVOLUTION DU VIVANT, UN SAVOIR ENSEIGNÉ, UN SAVOIR Á ENSEIGNER Á L’ÉCOLE
1. Le savoir à enseigner et les textes officiels
1.1. Le prescrit
1.2. Les évolutions du prescrit
1.3. L’évolution du vivant dans les manuels scolaires
2. Evolution des êtres vivants : un enseignement délicat
2.1. Les élèves et l’Evolution du vivant
2.1.1. Les conceptions des élèves sur l‟évolution du vivant
2.1.2. Des obstacles à l‟apprentissage de l‟évolution
2.2. Les enseignants et l’Evolution du vivant
2.2.1. Les conceptions des enseignants
2.2.2. Des obstacles à l‟enseignement de l‟évolution
2.3. L‘évolution du vivant : un savoir à part ?
3. Le concept de rapport au savoir pour élargir la réflexion
3.1. Les différentes approches de la question
3.1.1. Entrée par le sujet
3.1.2. Entrée par le savoir, par l‟objet à enseigner
3.1.3. Une synthèse des différentes approches
3.2.Didactique et rapport au savoir
3.3.Rapport au savoir « Evolution des êtres vivants »
4. Un rappel des constats et hypothèses formulés pour l’étude
4.2. Principaux constats
4.3. Hypothèses au niveau des enseignants
4.4. Hypothèses au niveau des élèves
Chapitre IV : LES ENSEIGNANTS DU CYCLE 3 ET L’ÉVOLUTION DU VIVANT
1. Les conditions de l’étude
1.1. Un questionnaire « papier-crayon »
1.2. Une analyse a priori des questions posées
1.2.1. Les indicateurs retenus
1.2.2. Les connaissances des enseignants et leur origine
1.2.3. Enseigner l‟évolution à l‟école primaire
1.3. Les conditions de passation
1.4. Le traitement des données
2. Résultats et analyses
2.1. Profil des enseignants testés
2.2. Déclarations à propos de l’évolution du vivant
2.3. Déclarations à propos de la théorie de l’évolution
2.4. Origine de leurs connaissances
2.5. Activités en classe
2.6. Un engagement personnel
2.7. Autres informations
3. Conclusion : le rapport au savoir « Evolution des êtres vivants » d’enseignants de cycle 3 de l’école primaire
Chapitre V : LES ÉLÈVES DU CYCLE 3 DE L’ÉCOLE PRIMAIRE ET LE CONCEPT D’ÉVOLUTION DES ESPÈCES
1. Rappel des hypothèses de recherche
2. Choix méthodologiques
2.1. Un questionnaire papier-crayon
2.1.1. Conception générale du questionnaire
2.1.1.1. Nombre et type de questions posées
2.1.1.2. Justification des questions posées
2.1.1.3. Importance de la formulation des questions posées
2.1.1.4. Un tableau pour récapituler
2.1.2. Contenu des questions
2.2. Choix des classes et conditions de passation
3. Résultats et analyses
3.1. Profil de l’échantillon : les indicateurs
3.2. Analyses des réponses
4. Conclusion : le rapport au savoir « Evolution des êtres vivants » d’élèves du cycle 3 de l’école primaire française
4.1. A propos des connaissances sur l’évolution
4.2. A propos de l’influence d’institutions extrascolaires
4.3. Premières réflexions pour l’enseignement
Chapitre VI : APPORTS DIDACTIQUES ET PERSPECTIVES DE RECHERCHE
1. Apports didactiques
1.1. Analyse du savoir savant
1.1.1. Un savoir fondamental
1.1.2. Un savoir complexe
1.1.3. Un savoir non neutre
1.1.4. Un savoir scientifique
1.2. Le savoir transposé
1.3. Les enseignants et le savoir Evolution
1.4. Les élèves et le savoir Evolution
2. Propositions pour l’enseignement, l’apprentissage et la formation des maîtres
2.1. Propositions pour l’enseignement et l’apprentissage
2.1.1. Le rapport au temps long
2.1.1.1. Temps long et grands nombres
2.1.1.2. Temps long, origine des espèces et fossiles
2.1.2. Le rapport au vivant et la question de la dualité Homme-Animal
2.1.3. Le rapport au mot Evolution
2.1.4. Le rapport à la science
2.2. Propositions pour la formation des maîtres
2.2.1. Le rapport à la science
2.2.2. Le rapport à la théorie darwinienne de l‟évolution
2.2.3. Le rapport à l‟enseignement de l‟évolution
3. Perspectives de recherche
3.1. Vers une ingénierie didactique et des propositions curriculaires
3.2. Au-delà du concept d’évolution, un croisement de points de vue
3.3. A propos de modèles et modélisation
Chapitre VII : BIBLIOGRAPHIE
CONCLUSION
ANNEXES

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