Définition du travail de groupe
Avant de continuer, il est toutefois nécessaire de définir clairement ce que l’on entend en utilisant la notion de travail de groupe.« L’élève travaille en équipe, partage des tâches, s’engage dans un dialogue constructif, accepte la contradiction tout en défendant son point de vue, fait preuve de diplomatie, négocie et recherche un consensus. L’élève sait que la classe, l’école, l’établissement sont des lieux de collaboration, d’entraide et de mutualisation des savoirs. Il aide celui qui ne sait pas comme il apprend des autres. L’utilisation des outils numériques contribue à ces modalités d’organisation, d’échange et de collaboration. ». Cette définition est proposée par le décret du 31 mars 2015 au sein des instructions officielles concernant les cycles 2,3 et 41. C’est donc cette définition du travail de groupe que j’utilise dans ce mémoire avec toutefois une réserve sur l’utilisation du mot « équipe ». En effet, je pense qu’il est nécessaire de justifier mon utilisation du mot « groupe » à contrario de l’utilisation du mot « équipe ». Selon Bodoczky et Malderez (2009) un groupe est « par définition des équipes de ressources où le tout est plus grand que la somme des parties ». Mais il n’en reste pas moins que dans le vocabulaire collectif, le terme d’équipe est employé dans le sens de compétition, de rivalité entre plusieurs équipes. Malgré le fait qu’au sein d’une équipe ou d’un groupe, les personnes qui en font partie travaillent de concert pour atteindre un même résultat. Si on se place au niveau d’une classe, le but recherché n’est en aucun cas de créer de la rivalité entre les groupes d’élèves. J’utiliserais donc le qualificatif de groupe plutôt que celui d’équipe.
L’utilisation du travail de groupe comme un outil d’apprentissage
Malgré le fait qu’il ne s’agisse pas du propos principal de ce mémoire, il me semblait toutefois nécessaire de détailler les apports du travail de groupe en termes d’apprentissage. Sur le modèle en triangle d’une situation pédagogique proposé par Jean Houssaye (1993) et représenté sur la figure 1, l’acte pédagogique du travail de groupe se situe sur l’axe « Apprendre ». Cela se traduit par le fait que l’élève se confronte au savoir avec ses pairs. Durant ce type de séance, le professeur joue le rôle du« mort ». Cela ne veut pas dire que son rôle n’est pas essentiel. En amont de la séance, c’est lui qui a préparé et prévu un scénario pédagogique pertinent pour permettre aux élèves d’acquérir ou de réinvestir des connaissances. Au sein d’un groupe l’élève peut apprendre de lui-même. Il peut de façon autonome demander de l’aide, sous forme de tutorat, à ses camarades et ainsi être acteur de son apprentissage. Le travail de groupe permet un développement sociocognitif chez l’enfant comme l’affirme Meirieu, P. (2010). La progression de l’enfant se fera alors au travers des interactions, de concertations et de remises en question avec les autres membres du groupe. Il s’agit pour l’enfant de prendre en compte l’avis des autres. Cette remise en question que permet le travail de groupe, autant que l’hétérogénéité des membres puisse le permettre, apporte des bénéfices, tant sur le plan social que sur le plan cognitif. Pour améliorer cet apprentissage de groupe, et pour éviter une des dérives qui est la prise de pouvoir des bons élèves et transformer ce moment d’échange en un cours magistral, il peut être intéressant d’imposer un moment d’appropriation. Ce moment d’appropriation permet, comme le dit Frédéric Artur(2018), professeur de Sciences Physiques en collège et formateurs à l’Académie de Nantes« Sans ce temps de réflexion individuelle, on constate souvent qu’à l’intérieur du groupe, ceux que l’on appelle couramment « les bons élèves » prennent le « pouvoir » et imposent alors leur point de vue et leur rythme aux autres ». Ce travail individuel peut aussi permettre une meilleure mise au travail des élèves. En effet, si la formation des groupes est réalisée juste après avoir donné les consignes alors, il y a un très grand risque de bavardages lors des premières minutes. À l’inverse, si un temps d’appropriation individuel existe avant la mise en groupe, alors les élèves ont déjà des arguments, des pistes de résolution à apporter à leurs camarades. Le petit temps de bavardage est donc ainsi évité.
La fécondité du travail de groupe
Le travail de groupe est un exercice pédagogique qui n’est pas inné pour tout le monde, ni pour les élèves, ni forcément pour le professeur.PeyratMalaterre (2011, p. 81) affirme qu’ « Il faut aussi expliquer les buts et les objectifs (du travail de groupe) aux élèves qui ne pourraient pas voir l’intérêt, ou ne pas vouloir d’un changement de méthode de travail. Pour certains, il est plus simple de continuer « comme on a toujours fait, chacun pour soi, pas de discussion, pas de problème, pas de conflit, pas de temps perdu à expliquer ». ». Il apparaît alors essentiel de montrer expérimentalement l’intérêt d’une telle méthode aux élèves, comme il est possible de le faire en sciences pour mettre en évidence une notion. C’est au travers du test dit de la NASA que cet objectif pourra être rendu possible. Ce test, dont une version est disponible page 10 du livre de Michel Barlow (1993), permet de mettre en évidence l’utilité et le besoin de travailler en groupe pour résoudre des problèmes. Il permet de comparer grâce à l’établissement d’un classement, un point de vue personnel, un point de vue de groupe et un point de vue de référence établit par des scientifiques de la NASA. De façon générale, les résultats obtenus en groupe sont meilleurs que les résultats obtenus individuellement. Il s’agira ici de montrer aux élèves, et surtout à ceux qui sont réticents aux travaux de groupe, qu’il existe des situations où ils auront besoin de leurs camarades.Pour se faire, j’ai choisi d’étudier le livre de Michel Barlow intitulé Le travail en groupe des élèves publié en 1993. Il a pour objectif de proposer aux enseignants un panel d’outils pratiques permettant de mettre en place le travail de groupe. Il s’applique à toutes les disciplines et à tous les niveaux d’enseignements à partir de repères théoriques et méthodologiques.En feuilletant ces pages, plusieurs faits marquants ont attiré mon attention et j’en ai extrait un point essentiel que je détaillerais par la suite : Comment faire découvrir expérimentalement à nos élèves la fécondité du travail en groupe ? Avant d’aller plus loin, il est important d’apporter du sens aux mots. Qu’est-ce que le travail en groupe? Selon Michel Barlow, docteur en philosophie, ès lettres et en sciences de l’éducation, ancien chargé de cours à l’université de Lyon I et à l’institut supérieur de Pédagogie de Paris, le travail de groupe est l’ensemble des « situations pédagogiques où le groupe-classe « éclate » en équipe plus restreintes ». Une fois la nécessité de l’échange acquise, les élèves et le professeur pourront aussi s’interroger sur la qualité de l’échange. En effet, il pourra arriver que dans certains groupes un élève obtienne un meilleur score individuellement. Ces arguments n’ont alors peut-être pas été pris en compte par les autres élèves ou le système de vote mis en place au sein du groupe n’a pas permis d’obtenir le classement attendu. En effet, le dysfonctionnement du vote pourra apparaître clairement, puisqu’on ne vote pas pour définir des savoirs scientifiques. Michel Barlow a analysé les résultats du test pratiqué avec des élèves de sixième et le résultat était convaincant. Je m’essaierais donc à pratiquer ce test avec mes deux classes de seconde en modifiant toutefois certains points pratiques que j’expliquerais quelques lignes plus loin. Ce type d’exercice permet aux élèves de comprendre l’intérêt du travail de groupe et donc de cette méthode pédagogique. Quoi de plus normal en somme. Sauf que si ce travail n’est pas préalablement réalisé avant la mise en place du travail de groupes, les élèves n’en connaîtront pas et n’en comprendront pas forcément les subtilités. De manière naturelle, beaucoup de groupes se reposeront sur le meilleur d’entre eux, ce qui n’est pas du tout l’objectif du professeur qui cherche à faire progresser, ou tout du moins faire acquérir une notion, à tous les élèves. En effet, d’après Michel Barlow « on pourrait même dire qu’en ne faisant agir que celui qui déjà sait ou sait faire, on empêche toute possibilité de formation ! » (Barlow, 1993, p. 9). Il paraît alors essentiel de faire comprendre aux élèves que la parole de chaque membre du groupe, quel que soit son niveau de compréhension, doit toujours être considéré d’autant plus si le groupe est composé d’élèves de niveaux hétérogènes. Dans la prochaine partie, je tenterais de vérifier les propos de Michel Barlow en reproduisant cette même expérience auprès de mes élèves de seconde dans l’intérêt pour eux de comprendre l’intérêt du travail de groupe.
Présentation de l’activité proposée
Cette activité proposée à mes deux classes de seconde s’inscrit dans le thème de la Santé au sein du sous thème Les médicaments. Elle porte sur les espèces chimiques d’origine naturelle, artificielle ou synthétique. L’objectif de cette séance étant pour l’élève de connaître et de comprendre la différence entre espèces chimiques naturelle, artificielle et synthétique ainsi que de connaître et de comprendre le rôle de la chimie de synthèse. Cette activité est une analyse documentaire dans laquelle l’élève doit extraire des informations, à partir de plusieurs textes, pour lui permettre de répondre aux questions fournies à la fin de l’activité. J’ai choisi de proposer ce type d’activité à réaliser individuellement puisqu’il me semble qu’il n’y avait pas grand intérêt à la proposer en groupe. En effet, d’après Michel Barlow (1993, p. 63) « Le travail en groupe ne se justifie que si la tâche a un niveau de complexité telle qu’elle ne pourrait être accomplie par des individus. ». C’est aussi typiquement le genre d’erreur qu’il faut éviter lors de la mise en place de travaux de groupe. Il faut que la solution de l’activité soit suffisamment difficile à atteindre pour que les élèves ressentent la nécessité d’échanger et ainsi éviter au maximum que chaque élève ne résolve le problème de façon isolée. C’est donc pour cela que j’ai choisi ce type d’activité. Seule la dernière question « Pourquoi dire qu’un « produit chimique est mauvais pour la santé alors qu’un produit naturel est bon pour la santé » n’a pas de sens ? » pourrait être proposée dans le cadre d’un rapide travail de groupe puisqu’elle nécessite un échange d’arguments. Mais j’ai choisi de faire participer la classe entière lors de la correction de cette question où il y aura là aussi un échange entre élèves. Le contenu de la séance étant présenté et mes choix expliqués, je vais aborder les résultats et l’analyse des comportements des élèves.
Discussion de la séance observée
Cette séance était un peu particulière dans le sens ou il s’agissait de la première fois que je faisais travailler les élèves par groupes de compétence. La première constatation que j’ai pu faire était l’un des désavantages, « Créer des ségrégations », à la constitution de groupe homogène comme l’a présenté JF Vincent à Annexe 1 : Présentation des avantages et des inconvénients en fonction du type de groupe mis en place rédigé par JF VINCENT IA IPR EVS Versailles : « Créer des ségrégations ». Chose que je n’avais pas vraiment anticipé avant le début de la séance. J’ai pu entendre certaines remarques d’élèves pas toujours très valorisantes, mais aucune d’inacceptable. « Tu vois bien que nous on est nul et tous ensemble devant, alors que les meilleurs sont tous au fond de la classe ! ».Ce type propos était principalement émis de la part d’élèves ayant le sujet de remédiation à réaliser. J’ai alors décidé de reprendre et d’insister avec les élèves les raisons qui m’ont poussé à répartir les élèves de la sorte. Cette justification, qui ne me semblait absolument pas nécessaire avant le début de la séance, s’est révélée être essentielle pour réinstaurer une ambiance de classe propice au travail.Ainsi, cela m’a permis de clore ce sujet et de pouvoir enfin mettre les élèves au travail. Le deuxième fait qui m’a marqué est l’attitude d’une bonne moitié des élèves en réussite. En effet, ayant laissé ces derniers en autonomie pour la réalisation de la tâche proposée, ce sont eux qui se sont le moins impliqués. Ils ont probablement dû penser que puisque je les avais laissés en autonomie, et puisqu’ils n’étaient pas dans un groupe de remédiation, il n’était pas nécessaire pour eux de travailler. Contrairement à ce que présentait M. VINCENT comme étant un désavantage de cette forme de travail, « Réduire les attentes à l’égard des groupes faibles. », j’ai l’impression que ce sont les élèves de plus hauts niveaux qui ont ressenti cela. La troisième observation que j’ai pu faire concerne l’entraide des élèves au sein des groupes de remédiation. En effet, j’ai donné la possibilité aux élèves de s’entraider, ceux ayant mieux ou tout simplement plus rapidement compris la méthode de réalisation d’un calcul pouvait aller aider leurs camarades. Une sorte de monitorat. Chose qui a pu avoir lieu à plusieurs reprises notamment avec un élève qui a pu partager ses récentes connaissances à deux autres de ses collègues. Ce trinôme a alors pu échanger librement pour avoir une meilleure compréhension. J’ai pu échanger avec ces trois élèves lors des dernières minutes de la séance et ils m’ont expliqué que le fait de changer de posture pour l’élève aidant ses camarades et que le fait de changer de professeur pour les deux élèves aidés leur avait semblé être quelque chose de bénéfique. Le dernier point que j’ai décidé de détailler et qui est le plus positif pour moi, concerne les élèves qui habituellement ont beaucoup de réticence face au travail. Lors de cette séance, ils ont semblé apprécier l’intérêt qui leur a été accordé et cela a engendré de la motivation pour réaliser la tâche. La chose à laquelle je ne m’attendais pas, c’est que ces élèves ont eu un comportement vis à-vis de leur entourage et de leur mise au travail qui était quasiment exemplaire.
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Table des matières
1. Introduction
1.1. Naissance du sujet
1.2. Définition du travail de groupe
1.3. La gestion de classe
1.4. Objectif de ce mémoire
1.5. L’articulation de ce mémoire
2. Cadre théorique
2.1. Les apports du travail de groupe
2.1.1. L’utilisation du travail de groupe comme un outil d’apprentissage
2.1.2. L’utilisation du travail de groupe comme un outil de motivation
2.2. La fécondité du travail de groupe.
2.3. Les rôles au sein d’un groupe
3. Comment faire découvrir en pratique à nos élèves la fécondité du travail en groupe ?
3.1. Présentation et mise en place de ce test
3.2. Présentation et analyse des résultats obtenus
3.3. Un premier bilan
4. Construction d’un outil pour évaluer le comportement des élèves
4.1. Objectifs
4.2. Critères d’évaluation
4.3. Présentation du panel d’élève
5. Une activité individuelle comme valeur de référence
5.1. Présentation de l’activité proposée
5.2. Présentation et analyse des résultats
5.3. Bilan
6. L’influence des rôles, au sein de groupe hétérogène, sur le comportement des élèves
6.1. Présentation de l’activité proposée
6.2. Présentation et analyse des résultats
6.3. Bilan
7. L’influence de la formation de groupe homogène sur le comportement des élèves
7.1. Groupe homogène formé par affinité
7.1.1. Présentation de l’activité proposée
7.1.2. Présentation et analyse des résultats
7.2. Groupe homogène formé par le professeur
7.2.1. Présentation de l’activité proposée
7.2.2. Discussion de la séance observée
7.3. Bilan
8. Conclusion
Sitographie
Bibliographie
Annexe
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