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DEFINITION ET HISTORIQUE
Dรฉfinition
Le paludisme est une รฉrythrocytopathie provoquรฉe par le dรฉveloppement dans les hรฉmaties dโun hรฉmatozoaire du genre Plasmodium transmis par un moustique, lโanophรจle femelle (47). Cinq espรจces de Plasmodium sont susceptibles dโinfecter lโHomme: Plasmodium falciparum, P. vivax, P. ovale et P. malaria, voire plus rarement P. knowlesi. La gravitรฉ de cette maladie, principalement observรฉe lors de lโinfection par P. falciparum, dรฉcoule dโun ensemble de mรฉcanismes physiopathologiques complexes et encore mal dรฉcrits. Les accรจs graves ร P. falciparum engendrent un taux de mortalitรฉ รฉlevรฉ, notamment dans les pays oรน lโaccรจs aux soins est restreint ainsi que dans ceux oรน le diagnostic et la prise en charge de cette infection sont mรฉconnus (3).
Historique
Les premiรจres observations rapportรฉes de cas de paludisme remontent ร plus de 1500 avant Jรฉsus Christ en Chine puis dans lโAncienne Egypte. Les premiรจres rรฉfรฉrences chinoises connues parlent de dรฉmons armรฉs de marteau, du brasero et ร la marmite dโeau froide, ces descriptions reflรฉtant les trois phases successives de lโaccรจs palustre simple. Des รฉtudes rรฉcentes basรฉes sur lโanalyse de fragment dโADN ont prouvรฉ que Toutankhamon un ancien Pharaon dโEgypte รฉtait atteint du paludisme au moment de son dรฉcรจs (Vers -1327).
Cโest plus tard que la nature saisonniรจre des cas de paludisme fut dรฉcrite par Hippocrate (20). Par la suite, les mรฉdecins de lโInde parlaient de fiรจvres intermittentes รฉpidรฉmiques ou endรฉmiques et les รฉgyptiens rapportaient une corrรฉlation entre lโarrivรฉe des pluies et les รฉpidรฉmies de fiรจvre. Cela sโest confirmรฉ par la mise en รฉvidence de Plasmodium dans les momies รฉgyptiennes vieilles de plus de 5000 ans (32).
Les รฉtudes scientifiques ne devinrent possibles qu’aprรจs la dรฉcouverte des parasites eux-mรชmes par Laveran en 1880 et l’incrimination des moustiques comme vecteurs, d’abord pour le paludisme aviaire par Ross en 1897, puis pour le paludisme humain par les scientifiques italiens Grassi (10).
Concernant le traitement mรฉdicamenteux, le premier antipaludique vรฉritablement actif nโa รฉtรฉ dรฉcouvert quโau XVIIe siรจcle. Cependant, bien que les hommes souffrent du paludisme depuis si longtemps, il fallait attendre lโannรฉe 1630 pour voir apparaitre le premier traitement ร base dโรฉcorce de Quinquina dรฉcouvert par Don Francisco Lopez. Deux siรจcles plus tard, les pharmaciens Pelletier et Caventou parviennent ร isoler le principe actif : la quinine (41).
EPIDEMIOLOGIE DE LโINFECTION PALUSTRE
Rรฉpartition du paludisme dans le monde
En 2017, lโOMS a estimรฉ quโil y eu 219 millions de cas de paludisme dans 87 pays. Entre 2010 et 2017, le nombre de dรฉcรจs dus au paludisme a rรฉgressรฉ au niveau mondial passant de 607 000 ร 435 000. Toutes les rรฉgions ร lโexception du continent amรฉricain ont รฉtรฉ concernรฉes par cette baisse de la mortalitรฉ en 2017 par rapport ร 2010. Les diminutions les plus fortes ont รฉtรฉ enregistrรฉes en Asie du Sud-Est (54%), Afrique (40%) et Mรฉditerranรฉe orientale (10%). Cependant, malgrรฉ cette baisse de la mortalitรฉ, il faut signaler quโen 2017, 3,5 millions de cas dits supplรฉmentaires ont รฉtรฉ rapportรฉs dans les 10 pays africains les plus touchรฉs par la maladie. En effet, parmi les pays les plus affectรฉs par le paludisme, seule lโInde a progressรฉ dans la rรฉduction du fardeau de cette maladie (36).
Situation du paludisme au Sรฉnรฉgal
Au Sรฉnรฉgal, les diffรฉrents paramรจtres caractรฉrisant le profil รฉpidรฉmiologique nโont pas connu de changement notable ces cinq derniรจres annรฉes. La transmission du paludisme est toujours รฉtroitement liรฉe au rythme des pluies et sโeffectue en gรฉnรฉral au cours de la saison des pluies et au dรฉbut de la saison sรจche. Cette pรฉriode correspond ร celle des fortes densitรฉs des populations vectorielles, ร travers le pays. En gรฉnรฉral, les pluies commencent en Juin ou Juillet, plus tรดt au Sud quโau Nord et se poursuivent jusquโen Octobre. Entre Octobre et Novembre, sont diagnostiquรฉs la plus part des cases (43).
Une rรฉpartition inรฉgale de la charge du paludisme est toujours constatรฉe. Cinq rรฉgions (Kolda, Tambacounda, Kรฉdougou, Kaolack, Diourbel) supportent lโessentiel de la charge du paludisme. Elles concentrent 88% des cas confirmรฉs de paludisme (348 712 sur 395 706 cas), 63% des cas graves et 72% des dรฉcรจs dus au paludisme. Ces mรชmes rรฉgions sont les seules ร enregistrer une augmentation de lโincidence entre 2016 et 2017. Les rรฉgions du Nord en prรฉ รฉlimination ont toutes enregistrรฉ une forte baisse de leur incidence allant de โ 39% pour Louga ร โ 62% pour la rรฉgion de Matam (42).
La mise en place dโun Programme Nationale de Lutte contre le Paludisme (PNLP) en 1995 a permis une meilleure dรฉfinition des politiques et stratรฉgies de lutte contre la maladie ainsi quโune coordination des activitรฉs sur lโรฉtendue du territoire (42). Parmi les stratรฉgies de lutte prรฉsentement utilisรฉes par le PNLP, on retrouve la promotion de lโutilisation des moustiquaires imprรฉgnรฉes dโinsecticides, la chimio-prophylaxie chez les enfants de 0 ร 10 ans et les femmes enceintes ainsi que la pulvรฉrisation intra-domiciliaire (34).
BIOLOGIE DU PLASMODIUM
Agents pathogรจnes
Les agents รฉtiologiques du paludisme sont des protozoaires appartenant au phylum des Apicomplexa, ร la classe des Sporozoea ; ร la sous-classe des Coccidia ; ร lโordre des Eucoccidiida ; au sous โ ordre des Haemosporina ; ร la famille des Plasmodiidae. Ils sont du genre Plasmodium et cinq espรจces peuvent infecter lโhomme :
— P. falciparum, dรฉcrite en 1887 par Welch, est lโespรจce la plus connue. Responsable de la majoritรฉ des cas elle peut entraรฎner des formes graves, voire mortelles en lโabsence de traitement ;
— P. vivax dรฉcrite par Grassi ; elle est beaucoup plus rรฉpandue en dehors de lโAfrique avec prรจs de 34% en Asie du Sud Est, 42% en rรฉgion Mรฉditerranรฉenne, et seulement 0,3% en rรฉgion Africaine selon lโOMS. Elle est lโagent de la fiรจvre tierce bรฉnigne. Elle รฉvolue par des rechutes ร long terme en raison de lโexistence de formes hypnozoรฏtes qui restent quiescentes au niveau hรฉpatique ;
— P. malariae, dรฉcrite en 1881 par Laveran, elle est moins frรฉquente que les deux premiรจres espรจces. Elle est responsable de la fiรจvre quarte ;
— P. ovale, morphologiquement assez proche de P. vivax avec laquelle elle a รฉtรฉ longtemps confondue. Elle a รฉtรฉ dรฉcrite en 1922 par Stephens. Elle entraรฎne une fiรจvre tierce bรฉnigne รฉvoluant ร long terme. Elle est moins pathogรจne que les autres espรจces. Une classification rรฉcente en sort deux espรจces sympatriques : P curtisi et P. walletieri.
— P. knowlesi dรฉcrite en 1930 par Knowles, elle รฉtait antรฉrieurement connue chez les macaques. Cette espรจce a รฉtรฉ rรฉcemment retrouvรฉe chez lโhomme en Malaisie. Elle serait proche de P. vivax du point de vue gรฉnรฉtique et identique ร P. malariae au plan microscopique (15).
Vecteurs
Au niveau taxonomique, les vecteurs de Plasmodium sont des insectes diptรจres appartenant ร la famille des Culicidae et ร la sous-famille des Anophelinae. On dรฉnombre environ 500 espรจces d’anophรจles dans le monde, parmi lesquelles une cinquantaine est capable de transmettre le paludisme ร lโhomme (4). Seule la femelle, hรฉmatophage, transmet la maladie. Elle ne pique quโร partir du coucher du soleil avec un maximum dโactivitรฉ entre 23 heures et 6 heures du matin. Cela explique que lโutilisation des moustiquaires imprรฉgnรฉes est le moyen de prรฉvention individuelle le plus efficace (2). Ils prรฉsentent des mรฉtamorphoses complรจtes et passent au cours de leurs vie par 4 stades successifs : ลuf, larve, nymphe et adulte. Les 3 premiers stades sont aquatiques tandis que les adultes mรจnent une vie aรฉrienne (5).Les larves dโanophรจles se dรฉveloppent dans les collections dโeau. La nature des sols, le rรฉgime des pluies, la tempรฉrature et lโaltitude, la vรฉgรฉtation naturelle ou lโagriculture, rendent les collections dโeau plus ou moins propices au dรฉveloppement des espรจces vectrices. Le dรฉveloppement et la longรฉvitรฉ des anophรจles dรฉpendent de la tempรฉrature avec un optimum entre 20 et 30ยฐC pour une durรฉe de vie de lโordre de 30 jours (2).
Cycle biologique du Plasmodium
Le Plasmodium possรจde un cycle parasitaire hรฉtรฉroxรจne faisant intervenir deux hรดtes: lโAnophรจles femelle chez qui sโeffectue la reproduction sexuรฉe et lโhomme qui hรฉberge la reproduction asexuรฉe (3).
Cycle chez l’homme
Lโhomme est contaminรฉ lors du repas sanguin de lโanophรจle femelle inoculant ร partir de ses glandes salivaires des millions de sporozoรฏtes mobiles. En effet, les sporozoรฏtes sont injectรฉs au site de la piqรปre et restent quelques minutes dans le derme avant de gagner la circulation lymphatico-sanguine pour rejoindre les hรฉpatocytes de lโhรดte et sโy multiplier. Aprรจs maturation et formation de schizontes intra-hรฉpatiques, lโhรฉpatocyte se rompt et libรจre de nouvelles formes mรฉrozoรฏtes qui gagnent la circulation sanguine. La phase de migration des sporozoรฏtes du site dโinoculation ร lโhรฉpatocyte et la phase de dรฉveloppement hรฉpatique ou exo-รฉrythrocytaire sont cliniquement silencieuses et de durรฉe variable, selon lโespรจce infestante : 7-12 jours pour P. falciparum, environ trois semaines pour P. vivax et P. ovale, plus pour P. malariae.
La phase sanguine ou phase intra-รฉrythrocytaire correspond ร la phase clinique de lโinfection. Elle dรฉbute lors de la libรฉration des mรฉrozoรฏtes intra-hรฉpatiques dans la circulation sanguine. Ces formes parasitaires pรฉnรฉtrer dans le globule rouge et se diffรฉrencient en trophozoรฏtes. Elles sโy multiplient par reproduction asexuรฉe ou schizogonie, pour se transformer en schizonte multinuclรฉรฉ. Arrivรฉ ร maturitรฉ, la membrane du globule rouge parasitรฉ par un schizonte mรปr se rompt et des mรฉrozoรฏtes vont รชtre libรฉrรฉs. Ils vont ร nouveau parasiter des hรฉmaties saines pour perpรฉtuer ainsi le cycle intra-รฉrythrocytaire.
Lors de ce dรฉveloppement intra-รฉrythrocytaire par mitoses successives, le parasite se nourrit du contenu du globule rouge, modifie la paroi de celui-ci en y insรฉrant des protรฉines parasitaires. Le parasite dรฉgrade lโhรฉmoglobine sous forme de cristaux inertes appelรฉs hรฉmozoรฏne. Ce cycle asexuรฉ est de 48 heures pour P. falciparum, P. vivax et P. ovale, 72 heures pour P. malariae et 24 heures pour P. knowlesi.
Dans des conditions encore mal connues, certaines trophozoรฏtes asexuรฉes se diffรฉrencient en gamรฉtocytes mรขle ou femelle. Ce sont les formes sexuรฉes non rรฉplicatives du parasite, qui seront ingรฉrรฉes par le moustique femelle vecteur lors dโun repas sanguin chez un hรดte infectรฉ. (3).
Cycle chez le moustique
Les gamรฉtocytes ingรฉrรฉs par le moustique lors dโun repas sanguin sur un sujet infectรฉ, vont initier une reproduction sexuรฉe en se transformant en gamรจtes mรขles et femelles qui fusionnent en un ลuf libre, mobile appelรฉ ookinรจte. Cet ookinรจte quitte la lumiรจre du tube digestif, se fixe ensuite ร la paroi externe de lโestomac et se transforme en oocyste. Les cellules parasitaires se multiplient ร lโintรฉrieur de cet oocyste, produisant des centaines de sporozoรฏtes qui migrent ensuite vers les glandes salivaires du moustique. Ces sporozoรฏtes sont les formes infectantes prรชtes ร รชtre inoculรฉes avec la salive du moustique, lors dโun repas sanguin sur un hรดte vertรฉbrรฉ (2).
PATHOLOGIE DE LโINFECTION PALUSTRE
Les signes cliniques du paludisme sont extrรชmement divers et vont du simple portage asymptomatique aux manifestations graves telles que le coma, lโanรฉmie sรฉvรจre, lโinsuffisance rรฉnale aiguรซ ou lโลdรจme pulmonaire pouvant entraรฎner la mort. Il existe donc toute une รฉchelle de symptรดmes et les critรจres permettant de classer les accรจs en accรจs simple ou grave, semblent varier selon les praticiens. Cette symptomatologie dรฉpend de la virulence du parasite, du niveau dโimmunitรฉ acquise par le malade et de divers facteurs gรฉnรฉtiques. Ces signes sont observรฉs aprรจs une phase dโincubation est asymptomatique. Elle correspond au dรฉlai entre la piqรปre infectante et les premiers symptรดmes. Ceux-ci apparaissent au dรฉbut de la phase de lyse รฉrythrocytaire qui peut intervenir dans un intervalle allant de sept jours ร plusieurs mois (11).
Accรจs palustre simple
Lโaccรจs palustre non aggravรฉ est caractรฉrisรฉ par une symptomatologie peu spรฉcifique. Initialement, le sujet infectรฉ prรฉsente une asthรฉnie et une fiรจvre fluctuante รฉvoluant par pics. Aprรจs quelques jours dโรฉvolution, la fiรจvre devient intermittente. Une succession frissons/ fiรจvre/sueur se met en place sur une dizaine dโheures. Elle se rรฉpรจte tous les jours pour P. knowlesi, tous les deux jours pour P. falciparum, P. vivax et P. ovale, et tous les trois jours pour P. malariae. Cependant, cette pรฉriodicitรฉ nโest pas toujours aussi rรฉguliรจre. Il sโy associe de maniรจre variable des cรฉphalรฉes, des courbatures et une symptomatologie digestive (douleurs, nausรฉes, vomissements, diarrhรฉes). Une splรฉnomรฉgalie liรฉe ร une sรฉquestration splรฉnique des รฉrythrocytes infectรฉs et sains apparaรฎt secondairement. Un ictรจre cutanรฉ-conjonctival peut dรฉcouler de lโhรฉmolyse. Chez lโenfant, lโhรฉpatomรฉgalie est classique. Ce tableau clinique est aspรฉcifique. Le diagnostic est en premier lieu รฉvoquรฉ dans un contexte รฉpidรฉmique ; en zone dโendรฉmie, lโaccรจs palustre est la premiรจre cause de fiรจvre.
En revanche, dans les pays hors zone dโendรฉmie, la spรฉcificitรฉ du tableau clinique peut conduire ร un retard de diagnostic (11).
Formes palustres graves
Classiquement, lโaccรจs pernicieux palustre se dรฉfinit depuis Alphonse Laveran comme une ยซ forme suraiguรซ de paludisme ร P. falciparum susceptible de tuer rapidement le malade en 36-72 heures si un traitement spรฉcifique nโest pas rapidement et correctement instituรฉยป. Les auteurs anglo-saxons ont longtemps utilisรฉ le terme de cรฉrรฉbral malaria ou neuropaludisme qui, pour les auteurs franรงais, nโรฉtait en fait quโune forme clinique de lโaccรจs pernicieux. ร ces deux appellations, il faut aujourdโhui prรฉfรฉrer celle de paludisme grave, vรฉritable syndrome de dysfonction multi-viscรฉrale pouvant conduire au dรฉcรจs malgrรฉ un traitement รฉtiologique bien conduit (47).
La symptomatologie et la physiopathologie des accรจs sรฉvรจres restent encore trรจs complexes et de nombreuses dรฉfinitions ont รฉtรฉ รฉmises pour une meilleure prise en charge des malades. LโOMS a dรฉfini le paludisme grave comme la prรฉsence de formes asexuรฉes de P. falciparum dans le sang, associรฉe ร un ou plusieurs critรจres cliniques ou biologiques (Tableaux I et II) (1).
Lโanรฉmie est constante dans le paludisme. Elle a tendance ร sโaggraver durant lโรฉvolution, du fait de lโhรฉmolyse persistante et de la fragilisation des hรฉmaties (48). Une anรฉmie grave avec รฉtat de choc et insuffisance rรฉnale aiguรซ doit faire rechercher une hรฉmolyse aiguรซ intravasculaire, rรฉalisant la classique fiรจvre bilieuse hรฉmoglobinurique chez des sujets prenant une prophylaxie irrรฉguliรจre par la quinine. Certaines hรฉmolyses aiguรซs ont รฉgalement รฉtรฉ dรฉcrites avec lโhalofantrine (47).
ASPECTS IMMUNOLOGIQUES DE LโINFECTION PALUSTRE
Lโinfection par le Plasmodium engendre une rรฉponse immunitaire chez lโhรดte. Il sโagit dโune rรฉponse concernant aussi bien le systรจme immunitaire non spรฉcifique que les composants et mรฉcanismes de lโimmunitรฉ adaptative. Cette rรฉponse est aussi dรฉpendante de plusieurs facteurs environnementaux. Les deux types dโimmunitรฉ sont complรฉmentaires.
Notion de prรฉmunition
La prรฉmunition a รฉtรฉ dรฉcrite pour la premiรจre fois par Sergent et al. en 1924. Elle correspond ร une situation oรน le maintien dโune inoculation parasitaire minimale est une condition indispensable pour une protection contre une infection ultรฉrieure. Cette pression minimale peut correspondre ร la survie pendant une longue durรฉe dโune population parasitaire chez lโhรดte ou ร lโexposition permanente ร des nouvelles infections.
En zone dโendรฉmie lโimmunitรฉ contre le paludisme se dรฉveloppe avec lโรขge et lโexposition. Cette immunitรฉ dite de prรฉmunition est protectrice contre les accรจs mais elle est non stรฉrilisante. Dans les rรฉgions de transmission intense du paludisme, cette immunitรฉ se dรฉveloppe plus rapidement (33). Cette prรฉmunition permet une protection clinique contre le dรฉveloppement des formes graves de la maladie et maintient la parasitรฉmie ร un faible niveau permettant le portage asymptomatique (49). Cette immunitรฉ sโinstaure rapidement contre les formes graves mais plus lentement contre les accรจs simples. En plus de son acquisition lente, son maintien nรฉcessite des piqรปres infectantes rรฉguliรจres (12). A cela sโajoute une spรฉcificitรฉ dโespรจce ; il nโexiste pas dโimmunitรฉ croisรฉe entre les diffรฉrentes espรจces plasmodiales, ni une spรฉcificitรฉ de stade (13).
Rรฉponse immunitaire innรฉe
Il sโagit de mรฉcanismes cellulaires et humoraux non spรฉcifiques du parasite et ils sont partiellement connus. Des รฉtudes rรฉcentes dans des systรจmes non parasitaires ont permis de dรฉmontrer quโune famille de protรฉines codรฉes par la lignรฉe germinale : les TLRs (Toll Like Receptors), serait importante pour la dรฉfense innรฉe de lโhรดte (28). Ce sont des rรฉcepteurs appartenant au groupe des PRR (Pattern Recognition Receptor) et prรฉsent surtout ร la surface des cellules de lโimmunitรฉ innรฉe et reconnaissant des ligands exprimรฉs ร la surface des pathogรจnes. Chez les mammifรจres, lโactivation des macrophages par lโintermรฉdiaire de ces TLRs entraine lโinduction de gรจnes effecteurs qui contrรดlent et initient les dรฉfenses immunitaires innรฉes contre un grand nombre de pathogรจnes (7). Bien quโil nโy ait pas encore, ร ce jour, de recherches considรฉrables sur le rรดle des TLRs dans les infections parasitaires, il est probable que ce systรจme soit dโรฉgale importance dans la dรฉfense innรฉe contre P falciparum avec le systรจme classique initialement dรฉcrit.
Toutefois, les neutrophiles, les phagocytes, les mononuclรฉes et les cellules ยซ tueuses naturelles ยป ou NK, jouent un rรดle prรฉpondรฉrant dans les dรฉfenses innรฉes observรฉes au cours des infections palustres. Les cellules NK augmentent particuliรจrement en nombre et sont capables de dรฉtruire in vitro les globules rouges parasitรฉs par P. falciparum(29, 38). En outre, une รฉtude antรฉrieure a montrรฉ que les cellules NK localisรฉes au niveau hรฉpatique sont capables de dรฉtruire les hรฉpatocytes parasitรฉs par des sporozoรฏtes (46).
Les cellules NK stimulent aussi la production dโIFN-ฮณ qui active le macrophage conduisant ainsi ร la lyse des cellules parasitรฉes (33).
Rรฉponse immunitaire acquise
Elle repose sur lโintervention des lymphocytes T et B qui sont spรฉcifiquement dirigรฉs contre le parasite. Cette rรฉponse immunitaire adaptative se divise en deux composantes essentielles lโimmunitรฉ ร mรฉdiation cellulaire et lโimmunitรฉ humorale.
Lโimmunitรฉ ร mรฉdiation cellulaire a รฉtรฉ mise en รฉvidence ร la suite dโun transfert adoptif de ses cellules en absence de rรฉponse humorale dรฉtectable. Elle est surtout lโลuvre des cellules TCD4+ et TCD8+ spรฉcifiques au parasite et protรฉgerait lโhรดte contre les stades hรฉpatocytaires et รฉrythrocytaires car les parasites y sont intracellulaires et difficilement accessibles par les anticorps. Les lymphocytes TCD4 sont classรฉs en plusieurs sous-groupes qui agissent diffรฉremment selon le type de cytokines produites. Les cellules Th1 produisent des cytokines pro-inflammatoires telles que lโIFN-ฮณ et lโIL-2 intervenant dans la rรฉponse cytotoxique alors que les Th2 produisent des cytokines anti-inflammatoires comme IL-4 et IL-13 qui rรฉgulent la rรฉponse humorale (57). Une forte prolifรฉration cellulaire TCD4+ et TCD8+ liรฉe ร une rรฉponse cytokinique Th1 (IFN-ฮณ et IL2) a รฉtรฉ retrouvรฉe associรฉe ร la protection contre le paludisme, indรฉpendamment de la production dโanticorps (45, 51).
La rรฉponse humorale repose surtout sur lโintervention des cellules B qui aprรจs stimulation antigรฉnique puis diffรฉrenciation en plasmocytes, produisent les Ac. Le rรดle des anticorps dans lโimmunitรฉ anti palustre, bien รฉtudiรฉ, est dรฉmontrรฉ.
Les Ac peuvent bloquer lโinvasion des hรฉpatocytes. En effet, les fragments Fab dโAc monoclonaux spรฉcifiques des sรฉquences rรฉpรฉtรฉes de la CSP inhibent lโinfectivitรฉ des sporozoรฏtes in vivo et in vitro. Les Ac protecteurs sont principalement de type IgG1 et IgG3. Ils peuvent activer le complรฉment et induire une lyse des sporozoรฏtes libres dans le sang. Les IgG1 et IgG3 spรฉcifiques peuvent se fixer sur leurs rรฉcepteurs prรฉsents ร la surface de cellules comme les neutrophiles et monocyte-macrophages pour entraรฎner la lyse des sporozoรฏtes par ADCI ou par phagocytose (39). Les IgG2 et IgG4 seraient non protecteurs et des รฉtudes ont montrรฉ quโil existe une relation entre les taux dโIgG non cytophiles et la gravitรฉ de la maladie (52). Les sporozoรฏtes de P. falciparum et de P. vivax semblent activer le complรฉment par la voie classique via des complexes immuns. Les Ac spรฉcifiques des protรฉines de surface des gamรฉtocytes de P. falciparum ingรฉrรฉs par le moustique peuvent empรชcher la fertilisation des gamรจtes et le dรฉveloppement de lโoocyste (19, 31).
Particularitรฉs au sein du couple Mรจre/enfant
La rรฉponse innรฉe se mobilise dรจs le dรฉbut de lโinfection et les effets de lโimmunitรฉ adaptative sont ressentis au bout de 7 ร 15 jours suivant lโinfection. Cette immunitรฉ acquise dรฉpend des espรจces parasitaires mais aussi des stades de dรฉveloppement du parasite ainsi que de la rรฉpรฉtition de lโexposition (26, 58).
Dans les rรฉgions oรน le paludisme est endรฉmique avec une transmission annuelle stable, les enfants nรฉs de mรจres semi-immunes seraient protรฉgรฉs par les anticorps maternels contre la maladie durant leurs six premiers mois de vie. En effet, il a รฉtรฉ largement dรฉcrit que de tels enfants seraient protรฉgรฉs contre lโinfection palustre dโune part par la prรฉsence dโune hรฉmoglobine fลtale nรฉfaste ร la croissance intra-รฉrythrocytaire du parasite et dโautres parts par les IgG anti-Plasmodium dโorigine maternelle, en zone de forte endรฉmicitรฉ palustre. Aprรจs le sixiรจme mois de sa vie, on observe chez lโenfant une augmentation de la sensibilitรฉ au paludisme (26). En zone de forte endรฉmicitรฉ, lโacquisition dโune immunitรฉ semi protectrice contre le paludisme par la mรจre expliquerait ce phรฉnomรจne de transferts dโimmunitรฉ ร lโenfant qui entre autres bรฉnรฉficierait des immunoglobulines contenues dans le lait maternel selon certains auteurs, jusquโร un รขge avancรฉ (23). Ainsi lโenfant acquiert avec lโรขge une immunitรฉ protectrice encore appelรฉe prรฉmunition (26, 56).
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPEL BIBLIOGRAPHIQUE
I – DEFINITION ET HISTORIQUE
I-1- Dรฉfinition
I-2- Historique
II – EPIDEMIOLOGIE DE LโINFECTION PALUSTRE
II-1 Rรฉpartition du paludisme dans le monde
II-2- Situation du paludisme au Sรฉnรฉgal
III-BIOLOGIE DU PLASMODIUM
III-1- Agents pathogรจnes
III-2 Vecteurs
III-3- Cycle biologique du Plasmodium
III-3-1- Cycle chez l’homme
III-3-2- Cycle chez le moustique
IV – PATHOLOGIE DE LโINFECTION PALUSTRE
IV-1- Accรจs palustre simple
IV-2 – Formes palustres graves
.V- ASPECTS IMMUNOLOGIQUES DE LโINFECTION PALUSTRE
V-1- Notion de prรฉmunition
V-2- Rรฉponse immunitaire innรฉe
V-3- Rรฉponse immunitaire acquise
V-4- Particularitรฉs au sein du couple Mรจre/enfant
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
I โ OBJECTIFS
II – MATERIELS ET METHODES
II-1 – Type et pรฉriode dโรฉtude
II-2 – Recrutement et critรจres de sรฉlection des patients
II-3- Recueil des donnรฉes clinico-biologiques
II-4- Matรฉriels
II-4-1- Equipements de laboratoire et petits matรฉriels
II-4-2- Tampons et rรฉactifs chimiques
II.4.3 Matรฉriel biologique
II.5. Mรฉthodes
II -5-1 โ Technique de dosage des anticorps
II -5-2 โ Analyses statistiques des rรฉsultats
III โ RESULTATS
III.1. Caractรฉristiques de la population dโรฉtude
III-1-1- Caractรฉristiques gรฉnรฉrales
III-1-2 Donnรฉes hรฉmato-parasitologiques de la population dโรฉtude
III.2. Analyse des rรฉponses anticorps entre les diffรฉrents antigรจnes testรฉs
III.3. Analyse des rรฉponses anticorps chez les enfants
III.3.1 Comparaison entre les enfants malades et les enfants contrรดles
III.3.2 Relation entre les taux dโanticorps et lโรขge chez les enfants
III.3.3 Influence de lโรขge et de lโinfection sur les taux dโanticorps
III.4. Profils des rรฉponses anticorps chez les couples mรจres/enfants
III.4.1 Comparaison des taux dโanticorps entre les mรจres et les enfants
III.4.2 Relation entre les taux dโanticorps des mรจres et des enfants
IV- DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES
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