Microstructure de l’alliage A356
Microstructure de base
Les alliages d’aluminium de fonderie ont une structure dendritique . En effet, les cristaux solides se forment sur les bords du moule (plus froid que le centre) et se développent vers le centre. Comme la solubilité du silicium dans l’aluminium décroît avec la température, la teneur en silicium de ces cristaux solides est plus faible que celle de l’eutectique autour. Le silicium se trouve rejeté vers la surface des cristaux et contribue à abaisser la température de solidification de l’eutectique dans cette zone par effet de surfusion (Barlas, 2004). Cette surfusion entraîne une solidification plus lente de l’eutectique car il y a plus de chaleur à évacuer. Cependant, si un germe de cristal solide arrive à percer la couche d’eutectique, il va pouvoir croitre rapidement car il sera dans un état thermodynamique favorable et faible en silicium. La croissance des germes de cristaux solides se fait alors en dendrite plutôt que de façon sphérique car le germe est instable (Angeloni, 2011). L’espace entre les bras des dendrites, appelé DAS (Dendrite Arm Spacing) ou SDAS (Secondary Dendrite Arm Spacing),varie entre une dizaine et une centaine de micromètres, dépendamment de la vitesse de refroidissement, alors que la taille de grain est de l’ordre du millimètre (Barlas, 2004). L’eutectique va alors se solidifier sous forme de lamelles dans l’espace interdendritique, zone riche en silicium. Il y a précipitation sous forme de plaquettes d’une phase d’aluminium presque pure (phase α) accompagnée d’une zone où le silicium en solution est drainé (phase β) (Barlas et al., 2002).
Modification de l’alliage A356 par ajouts d’éléments
On rencontre très souvent dans la littérature l’alliage A356 modifié au strontium ou au sodium . Ces deux éléments ont pour effet de modifier la structure eutectique naturellement lamellaire en eutectique globulaire (Liao, Ding et Sun, 2002) : les particules de silicium sont plus sphériques avec la présence de strontium ou sodium . On parle aussi de sphéroïdisation des particules de silicium. Cet effet se traduit par un usinage plus facile de l’alliage et une augmentation de la limite d’élasticité. D’autres éléments sont fréquemment ajoutés à la composition initiale de l’alliage A356. Le titane est un élément favorisant le raffinement des dendrites. Le manganèse peut également être ajouté dans l’optique d’augmenter la résistance de l’alliage à 300 °C (Farkoosh et Pekguleryuz, 2013) tout comme le nickel qui augmente la limite de la résistance en fatigue de 20 %. Le molybdène est aussi un ajout fait dans le but d’améliorer les propriétés de l’alliage à 300 °C.
Tous les éléments ne sont pas bénéfiques pour l’alliage, certains éléments sont des impuretés néfastes pour le comportement de l’alliage. Parmi ces éléments, le fer et le chrome fragilisent l’alliage car ils forment des composés intermétalliques durs et fragiles. À partir de ces composés, l’amorçage de fissure est plus facile dans l’alliage (Barlas, 2004). Le plomb peut annuler l’effet du strontium s’il est présent à plus de 0,05 % dans l’alliage. Le bore a le même effet, quel que soit sa concentration (Nogita et Dahle, 2003).
Les éléments présents se regroupent lors de la solidification de l’alliage pour former des précipités cohérents ou non avec la matrice.
Traitements thermiques
Pour modifier la résistance mécanique ou la dureté de l’alliage A356, il est possible de réaliser différents traitements thermiques (Boyer et Gall, 1991) :
La mise en solution ou homogénéisation. Ce traitement permet la mise en solution solide de certains éléments d’alliages pour avoir une composition chimique uniforme. Lors de ce traitement, il peut y avoir des dissolutions de phases ou des modifications.
La trempe est effectuée après l’homogénéisation et consiste en un refroidissement plus ou moins rapide, dépendamment de la technique utilisée, de l’alliage pour figer l’état obtenu sans passer par un changement de phase.
Le revenu ou vieillissement est effectué après une trempe pour relaxer les contraintes internes qui ont été introduites par le choc thermique subi par l’alliage. Ces traitements thermiques permettent de modifier la dureté ou le comportement mécanique de l’alliage.
Fatigue, fluage et interaction fatigue fluage pour l’alliage A356
La fatigue des culasses de moteur diesel est liée aux cycles start/stop des véhicules et non pas aux explosions du cycle moteur (Thalmair et al., 2006). Pour une durée de vie de 10 ans, on estime que les culasses subissent 7000 cycles démarrage-utilisation-arrêt mais avec l’implantation des systèmes start/stop dans les véhicules, ce chiffre augmente considérablement dépendamment du type de conduite de chaque utilisateur.
Phénomène de fatigue
Selon la norme ASTM (ASTM, 2005), la fatigue est un procédé progressif de changement structural permanent et localisé ayant lieu dans un matériau soumis à des variations de contraintes et de déformations pouvant aboutir à des fissures après un nombre suffisant de fluctuations. En fatigue, une pièce peut rompre avec une contrainte inférieure à la contrainte de rupture connue en statique. Le mécanisme de fatigue peut être décomposé en trois parties : l’amorçage de fissures, la propagation puis la rupture finale.
Mécanisme de rupture dans l’alliage A356 :L’amorçage de fissures, intervient le plus souvent au niveau d’un pore situé proche de la surface (Lados, Apelian et Major, 2006). La propagation a lieu de façon interdendritique dans un premier temps, dans la matrice et le long des interfaces silicium-matrice (Lados, Apelian et Major, 2006). Les particules de silicium sont plus dures et dans un premier temps, elles agissent alors comme obstacles à la propagation. Dans un deuxième temps, la propagation se fait de façon intradendritique. Pour finir, lorsque la fissure est longue, elle se propage de nouveau de façon interdendritique mais les particules de silicium sont cette fois fracturées et non plus contournées (Lados, Apelian et Major, 2006). Comme pour tous les matériaux, l’amorçage et la rupture finale dépendent de la charge appliquée: plus celle-ci est élevée, plus la rupture intervient tôt. En revanche, l’A356 ne présente pas de limite d’endurance.
Phénomène de fluage
Le fluage est un phénomène d’endommagement mis en évidence au début du XXème siècle par les travaux Philips puis Andrade (1905 et 1910-1914). À contrainte constante et pour une température donnée, la déformation augmente progressivement au cours du temps et de façon plastique pour aller jusqu’à la rupture. Plus la température est élevée, plus le phénomène est amplifié. Pour les métaux, le fluage est considéré comme important si la température d’essai est supérieure à 0,4 fois la température de fusion (Saint-Antonin, 1999). Dans le cas de l’A356, la température de fusion est de 655 °C donc le fluage est important dès 260 °C.
Trois stades sont généralement distingués pour un essai de fluage : après la mise à contrainte constante du matériau, une première augmentation de la déformation est observée. C’est le fluage primaire. S’en suit un stade où la déformation n’évolue presque pas.
Cette phase est appelée fluage secondaire. Enfin, une troisième phase, appelée fluage tertiaire, est observée durant laquelle la déformation augmente rapidement pour aller jusqu’à la rupture. En d’autres termes, le fluage primaire correspond à une diminution de la vitesse de déformation, traduction d’une augmentation de la résistance du matériau. Le stade de fluage secondaire correspond lui à la période où la vitesse de déformation est constante tandis que le fluage tertiaire voit la vitesse de déformation augmenter jusqu’à la rupture.
Interaction fatigue-fluage
Jusqu’à présent, les phénomènes de fatigue et de fluage ainsi que leurs effets sur la microstructure ont été présentés séparément. Mais dans le cas des culasses de moteur diesel, l’alliage A356 subit simultanément de la fatigue et du fluage. La littérature ne présente que peu de travaux ayant parlé de l’interaction entre la fatigue et le fluage (Garat, 2007), et l’effet sur la microstructure n’est pas expliqué, ce qui amène aux questions suivantes :
Est-ce que solliciter l’alliage en fatigue puis en fluage revient à solliciter l’alliage en fatigue avec un temps de maintien?
Est-ce que faire des tests en fatigue suivis d’un maintien à 300 °C revient à faire de la fatigue à 300 °C?
Ajout de cuivre et de molybdène dans l’alliage A356
Plus récemment, de nouveaux ajouts ont été suggérés pour l’utilisation de l’alliage A356 pour les culasses de moteur diesel (Garat, 2007). Les travaux réalisés par Garat préconisent l’utilisation d’un alliage résistant en fatigue et d’ajouter des éléments permettant soit d’augmenter la ductilité de l’alliage, soit d’augmenter la résistance au fluage à 300 °C. Dans cette optique, il est proposé d’ajouter du cuivre ou du molybdène à l’alliage pour augmenter sa résistance mécanique et sa résistance au fluage.
Ajout de cuivre
Une solution proposée est d’ajouter 0,5 % de cuivre (Garat, 2007) à l’alliage A356 : jusqu’à 250 °C, les contraintes d’écoulement et limite à rupture sont plus importantes que pour l’A356 sans ajout mais elles sont les mêmes à 300 °C car la phase Al-Si-Cu-Mg responsable du durcissement structural est dissoute à cette température (Garat, 2007).
Ajout de molybdène
Pour augmenter la résistance au fluage à haute température sans modifier la ductilité de l’alliage, l’introduction de dispersoïdes stables thermiquement est proposée par Farkoosh (Farkoosh, Grant Chen et Pekguleryuz, 2014). Pour les alliages corroyés, le scandium, le zirconium et le chrome sont de bons candidats pour former des dispersoïdes mais pour les alliages de fonderie au silicium, leur effet est négligeable (Farkoosh, Grant Chen et Pekguleryuz, 2014). Le molybdène est un élément qui peut former des dispersoïdes stables dans les alliages Al-Si car il diffuse très peu. Il a été montré (Farkoosh, Grant Chen et Pekguleryuz, 2014) qu’avec la présence de molybdène dans l’alliage, les propriétés en fluage de l’alliage augmentent : la vitesse de déformation lors du stade II du fluage est beaucoup plus faible et le temps à rupture est plus important. Si l’ajout de molybdène dans l’alliage A356 permet d’obtenir une meilleure résistance au fluage, l’effet du molybdène sur la fatigue n’a pas été étudié.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE
1.1 Mise en contexte
1.2 Présentation de l’alliage A356
1.2.1 Propriétés générales
1.2.2 Microstructure de l’alliage A356
1.2.2.1 Microstructure de base
1.2.2.2 Modification de l’alliage A356 par ajouts d’éléments
1.2.3 Traitements thermiques
1.2.4 Effet de la température sur les propriétés mécaniques de l’alliage
1.2.4.1 Déformations thermiques
1.2.4.2 Module d’élasticité et limite d’écoulement
1.3 Fatigue, fluage et interaction fatigue fluage pour l’alliage A356
1.3.1 Phénomène de fatigue
1.3.1.1 Mécanisme de rupture dans l’alliage A356
1.3.1.2 Influence de l’espace interdendritique
1.3.1.3 Effet des défauts de coulée et des oxydes
1.3.1.4 Effet du strontium sur la durée de vie
1.3.2 Phénomène de fluage
1.3.2.1 Mécanismes de fluage
1.3.2.2 Réduction de la vitesse de fluage
1.3.3 Ajout de cuivre et de molybdène dans l’alliage A356
1.3.3.1 Ajout de cuivre
1.3.3.2 Ajout de molybdène
1.3.4 Interaction fatigue-fluage
1.4 Bilan de cette revue et objectif de l’étude
CHAPITRE 2 DÉMARCHE EXPÉRIMENTALE
2.1 Objectifs des tests
2.2 Choix des éléments constituant le banc d’essai
2.2.1 Éprouvettes
2.2.1.1 Géométrie
2.2.1.2 Matériau
2.2.1.3 Fabrication des éprouvettes
2.2.2 Cadre
2.2.2.1 Solution retenue
2.2.2.2 Matériau et fabrication
2.2.3 Solution de chauffage et de refroidissement
2.2.3.1 Chauffage
2.2.3.2 Refroidissement
2.2.3.3 Maintien de la température maximale
2.2.3.4 Contrôle du chauffage et du refroidissement
2.2.4 Suivi du déplacement et obtention des déformations
2.2.4.1 Obtention des images
2.2.4.2 Corrélation d’images sous OpenDic
2.2.4.3 Obtention des déplacements et déformations
2.3 Protocole expérimental
2.4 Tests réalisés
CHAPITRE 3 RÉSULTATS ET ANALYSES
3.1 Dépouillement des résultats
3.1.1 Durée des cycles
3.1.2 Traitement pour les images
3.2 Durée des cycles
3.3 Suivi ponctuel de cycles pour un test de 3000 cycles
3.3.1 Comparaison des évolutions de la température et des déformations
3.3.2 Évolution des déformations au cours du temps
3.4 Déformations sur 500 cycles
3.4.1 Résultats par éprouvettes
3.4.1.1 Éprouvette n°1 (A356+0,5Cu+0,15Mo+Sr sans vieillissement)
3.4.1.2 Éprouvette n°2 (A356+0,5Cu+0,15Mo+Sr avec vieillissement)
3.4.1.3 Éprouvette n°3 (A356+0,5Cu+Sr avec vieillissement)
3.4.2 Effet du vieillissement et du molybdène
3.4.2.1 Effet du Vieillissement
3.4.2.2 Effet du Molybdène
3.5 Bilan de l’étude expérimentale
CHAPITRE 4 SIMULATION NUMÉRIQUE
4.1 Géométrie et données matériaux
4.1.1 Géométrie
4.1.2 Propriétés des matériaux
4.1.3 Définition des contacts
4.2 Conditions thermiques et mécaniques
4.2.1 Conditions thermiques
4.2.2 Conditions mécaniques
4.3 Maillage et convergence
4.4 Résultats
4.4.1 Température
4.4.1.1 Chauffage
4.4.1.2 Maintien à 300 °C
4.4.2 Déformations
4.4.3 Contraintes de Von Mises et normales
4.4.4 Effet des jeux
4.5 Bilan de la simulation numérique
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
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