Cryoconservation embryonnaire et le transfert d’embryon congelé

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Cryoconservation embryonnaire et le transfert d’embryon congelé

Afin de palier au problème d’embryons surnuméraires obtenus après un cycle de FIV+/-ICSI, des techniques de cryoconservation d’embryons humains se sont développées. L’amélioration des techniques de vitrification embryonnaire et la meilleure survie des embryons après réchauffement permettent actuellement de réaliser plusieurs cycles de transferts d’embryons à partir d’un seul cycle de stimulation ovarienne, augmentant ainsi les chances de grossesse par cycle de stimulation. Il existe d’autres avantages à la vitrification embryonnaire comme favoriser le transfert d’embryon unique et ainsi limiter le risque de grossesses multiples plus à risque de complications obstétricales (5).
Cette technique permet également de différer le transfert d’embryon quand celui-ci n’est pas possible en frais pour des raisons médicales telles que la découverte en cours de traitement d’une pathologie endométriale (polype, myome intracavitaire), d’une élévation de progestéronémie ou d’un Syndrome d’Hyperstimulation Ovarienne (SHO). L’ensemble de la cohorte est alors vitrifié : c’est la technique du Freeze all. Le SHO est une complication iatrogénique de la stimulation multi-folliculaire réalisée en vue d’une FIV. Il s’agit d’une maladie systémique, où il existe une augmentation de la perméabilité vasculaire à l’origine d’échanges hydriques entre l’espace intravasculaire et des troisièmes secteurs (cavités péritonéales et thoracique), à l’origine d’une hémoconcentration pouvant dans les cas les plus graves être à l’origine de syndrome de détresse respiratoire aigüe ou de thromboses (6). Ce phénomène étant en cas de grossesse auto-entretenu par la sécrétion endogène d’HCG, les équipes d’AMP réalisent un Freeze-all, pour réaliser un TEC ultérieurement une fois la patiente rétablie, ce qui de fait augmente le recours à la vitrification embryonnaire (7).
Selon l’ESHRE (European Society Reproduction and Embryology) le nombre de TEC a augmenté de manière exponentielle pour atteindre en 2016, 30,5%, soit une augmentation de 1,3% par rapport à l’année précédente. Environ la moitié de tous les cycles européens étudiés sur cette période étaient des TEC. Aux USA la situation était encore plus parlante, le CDC (Centers for Disease Control and prevention) décrivait une augmentation passant de quasiment aucun TEC en 2007 à 65 840 en 2016, représentant 25% de tous les cycles de FIV±ICSI aux USA (4). La littérature n’a pas montré de différence significative concernant le taux de naissances vivantes après transfert embryonnaire frais (TEF) ou TEC (8).
Certains paramètres pourraient influencer les chances de grossesses issues d’une FIV±ICSI. Parmi eux, certains sont modifiables comme l’activité physique, la consommation de café, d’alcool ou encore de tabac (9). Étudier leur impact est essentiel pour sensibiliser au mieux les couples en projet de conception et ainsi maximiser leurs chances de conception.

Le tabagisme : un enjeu de santé publique

La consommation de tabac est un problème de santé publique, il s’agit d’une des causes majeures de mortalité prématurée (par cancer ou accidents cardio-vasculaires). En France, le tabagisme est la première cause de mortalité évitable, avec plus de 75000 décès estimés en 2015 (10). C’est également un des facteurs de risque principal de survenue de diabète, maladies cardiovasculaires et maladies chroniques respiratoires.

Tabac et grossesse

L’effet néfaste de la cigarette au niveau obstétrical est bien établi. Il a été démontré que les femmes fumant pendant la grossesse s’exposaient à un risque accru de grossesse extra-utérines (GEU) risque multiplié par 15, et de fausses couches (risque multiplié par 2) (11). Cette augmentation de risque s’explique par une altération de l’implantation embryonnaire dont les mécanismes impliqués sont complexes. Il s’agirait notamment d’un défaut de maturation de l’endomètre, et d’une altération de l’angiogenèse physiologique entrainant une perturbation de l’invasion trophoblastique et du développement placentaire (12). Le tabac serait également à l’origine d’un risque accru de vaginose favorisant la survenue de fausses couches (13). Fumer pendant la grossesse est également un facteur de risque de placenta praevia (implantation du placenta dans la partie basse de l’utérus, au-dessus de l’ouverture du col plutôt que dans la partie haute de l’utérus, pouvant être à l’origine de saignements au cours de la grossesse conduisant à des naissances prématurées (14,15), de retards de croissance in utéro (induisant de faibles poids de naissance), de prématurité par rupture prématurée des membranes, d’hématome rétroplacentaire (14) et d’une augmentation de la mortalité infantile et périnatale (11). Enfin, la consommation de plus de 10 cigarettes par jour pendant la grossesse engendrerait chez l’homme ayant été exposé in utero une diminution de la qualité spermatique à l’âge adulte, et donc une diminution de la fertilité spontanée (13).

Tabac et fertilité spontanée

La fumée de cigarette contient environ 4000 substances chimiques, dont plusieurs présentent des effets toxiques, notamment des propriétés mutagènes et cancérigènes. Les substances toxiques présentes dans la fumée de cigarette comprennent des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), tels que le benzoapyrène (BaP), des nitrosamines, des métaux lourds (cadmium), des alcaloïdes (nicotine et son principal métabolite, la cotinine) et des amines aromatiques. En raison des différentes propriétés et cibles de ces composés chimiques, la consommation de tabac semble exercer des effets délétères sur l’ensemble du système reproducteur de la femme (16). Il a été montré que la fumée de cigarette pouvaient chez les femmes exposées présenter un effet délétère sur la stéroïdogenèse (16,17) la folliculogenèse (16,18), mais également l’implantation embryonnaire (19). Les effets toxiques de la fumée de cigarette sur la fonction des trompes (diminution de la motilité) et de l’endomètre (16,20) ont également été documentés.
En ce qui concerne la fertilité spontanée, les fumeuses sont deux fois plus nombreuses que les non fumeuses à souffrir d’infertilité (à noter une réversibilité de cet effet après arrêt de la consommation de tabac), avec un délai moyen de conception deux fois plus long chez les femmes fumant plus de 15 cigarettes par jour (21). Le tabac induit une diminution de la réserve ovarienne avec une diminution de l’AMH par perte folliculaire plus rapide, à l’origine d’une ménopause plus précoce de 1 à 4 ans chez les fumeuses (22). Chez l’homme la cigarette provoque une altération des paramètres spermatiques par diminution de la densité, de la mobilité, et du nombre de spermatozoïdes. Il a également été démontré que le tabac engendrait une fragmentation de l’ADN spermatique (23) source de trouble de la fertilité.

Tabac et l’Assistance Médicale à la procréation

De nombreuses études ont analysé l’impact du tabac en FIV±ICSI, et ont retrouvé des résultats contradictoires. En effet plusieurs publications ont conclu qu’une exposition à la fumée de cigarette pourrait altérer les résultats en FIV (19, 20, 22, 24-27). Au contraire d’autres études n’ont pas rapporté cet impact négatif (17, 28-30). La majorité de ces études ont été réalisées sur des TEF. Récemment, l’étude danoise de J.LyngsØ et al a analysé à la fois des TEF et des TEC, mais aucune étude à ce jour ne s’est intéressée spécifiquement à l’impact du tabac sur les résultats en FIV spécifiquement après TEC. Pourtant comme nous l’avons vu précédemment leur nombre est en pleine expansion et représente l’avenir de l’AMP.
La majorité des patientes engagées dans un protocole d’AMP est disposée à modifier son style de vie dans le but de maximiser ses chances de grossesse. Il est donc fondamental d’approfondir les connaissances sur les facteurs pronostiques et d’informer les couples pour qu’ils soient conscients des changements possibles à opérer pour optimiser leur prise en charge.
L’objectif de cette étude était donc de déterminer l’effet du tabagisme de la femme sur les taux de naissances vivantes après transfert de blastocystes congelés.

Matériels et Méthodes

Cette étude de cohorte rétrospective a été menée du 1er janvier 2012 au 1er mars 2020, dans le service de Médecine de la Reproduction du Centre Hospitalier Universitaire de Nantes, où tous les cycles consécutifs de transferts de blastocystes autologues congelés ont été inclus. L’ensemble des données a été collectée de manière anonyme à partir de la base de données locale Medifirst déclarée à la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés).

Population étudiée

Ont été incluses l’ensemble des femmes bénéficiant d’un ou plusieurs cycles artificiels de transferts autologues de blastocystes congelés, obtenus après un protocole de FIV avec ou sans ICSI, dont l’âge au moment de la congélation était compris entre 18 et 43 ans.
Ont été exclus de cette étude : les cycles de dons d’ovocytes, les TEC réalisés lors de cycles naturels ou stimulés, les transferts réalisés à J2 ou J3, les cycles annulés avant le transfert, les cycles de Diagnostic Pré-implantatoire. Les patientes présentant des facteurs de risques évidents de fausses couches récurrentes tels que des facteurs génétiques, des anomalies utérines (synéchies, malformations utérines congénitales ou syndrome du diéthylstilbestrol induit) ou un syndrome des antiphospholipides ont également été exclues.

Protocole du transfert d’embryons congelés

Tous les transferts ont été effectués au décours d’un cycle artificiel obtenu par traitement hormonal de substitution. Les patientes ont bénéficié initialement d’une substitution oestrogénique soit par voie orale (6mg par jour en 3 prises), soit par voie percutanée (2 patchs de 75μg tous les 3 jours). Une échographie pelvienne a été réalisée par voie endovaginale entre le 12e et le 14e jour de traitement. Une mesure d’endomètre excédant 6 mm d’épaisseur ainsi qu’un aspect en triple feuillet permettaient de programmer le transfert de blastocyste. Associée au traitement oestrogénique, la progestérone vaginale micronisée (400mg par jour) était débutée 6 jours avant le transfert. Les doses étaient ensuite augmentées après le transfert à savoir 8 mg par jour d’œstrogènes (ou 3 patchs tous les 3 jours) et 800mg par jour de progestérone micronisée. Un dosage des BetaHCG était réalisé 11 jours après le transfert. En cas de résultat positif, une échographie était réalisée à 8 semaines d’aménorrhées, et le traitement hormonal de substitution poursuivi jusqu’à l’échographie du 1er trimestre (soit environ 12 semaines d’aménorrhées).
Les 1ères étapes permettaient de mettre en évidence l’existence d’une grossesse biologique : suite à l’implantation de l’embryon dans l’endomètre, les betaHCG sanguins devenaient positifs. Si le développement embryonnaire se produisait correctement, les betaHCG continuaient leur croissance et l’échographie réalisée aux alentours de 8 semaines d’aménorrhée permettait de mettre en évidence une grossesse clinique : c’est à dire la présence d’un ou plusieurs embryons avec une activité cardiaque. Si la grossesse se poursuivait correctement elle aboutissait à une naissance vivante.

Vitrification des blastocystes, décongélation et transfert d’embryons

La majorité des blastocystes de bonne qualité (MEDIUM) ou de qualité supérieure (TOP) selon la classification Gardner et Schoolcraft (basée sur un score alphanumérique déterminé au 5e jour de culture) (figure 1) (31) ont été congelés en utilisant le kit VitBlast® (Vitrolife®, Goteborg, Suède) selon les instructions du fabricant, préférentiellement au 5e jour de développement (et plus rarement au 6e jour). C’est-à-dire les Blastocystes ≥B2 au jour 5 avec le trophectoderme A ou B, et ≥B4BB au jour 6. Des blastocystes de très faible qualité (BAD) ont également été congelés (blastocyste expansé avec trophectoderme et / ou masse cellulaire interne de classe C).
La décongélation a été réalisée avec le kit WarmBlast® (Vitrolife®) selon les instructions du fabricant 18 heures avant le transfert pour les embryons congelés au jour 5 et 3 heures avant le transfert pour les embryons congelés au jour 6. Un ou deux blastocystes étaient transférés. La détermination du nombre d’embryons transféré était d’abord basée sur les antécédents de grossesse : avec de manière systématique un transfert unique de blastocyste chez les femmes ayant déjà accouché. Le rang du cycle de FIV et / ou le nombre de blastocystes précédemment transférés, et les antécédents médicaux ont également été pris en compte. Enfin, l’âge de la femme a également été intégré dans le processus de prise de décision, le transfert d’un seul blastocyste étant fortement conseillé chez les femmes de moins de 35 ans. Ceci dans le but de diminuer le nombre de grossesse gémellaires, source de complications obstétricales.

Discussion

Dans cette étude, nous n’avons pas observé de relation significative entre le tabagisme de la femme et le taux de naissance vivante après transfert de blastocyste congelé. Ceci est également le cas pour les différentes étapes que nous avons étudiées via la conception des modèles 1 à 4, c’est à dire que nous n’avons pas noté de différence significative concernant l’obtention de grossesse biologique puis clinique en fonction du statut tabagique de la femme.
Actuellement la majorité des études réalisées sur l’impact du tabac en FIV ont été réalisées après TEF et rapporte des résultats controversés. Les données concernant les TEC sont très restreintes malgré une activité en croissance constante. Notre étude est ainsi originale puisqu’elle s’intéresse spécifiquement aux TEC. L’objectif de la méta-analyses de Waylen et al, réalisée sur 21 études uniquement en TEF, était de comparer les résultats en AMP chez des femmes fumeuses versus non fumeuses. Elle retrouvait un taux significativement plus bas de naissances vivantes par cycle de transfert embryonnaire (OR 0,54, 95% CI 0,30-0,99) en cas de tabagisme. Cette analyse rapportait également un taux significativement plus bas de grossesses cliniques par transfert (OR 0,56, 95% CI 0,43-0,73), et un taux plus élevé de fausses couches (OR 2,65, 95% CI 1,33-5,30). Cependant aucun impact sur le taux d’ovocytes fécondés n’était retrouvé (25). Nos résultats sont en concordance avec ceux d’une étude récente de J.LyngsØ et al, réalisée sur 1708 cycles comportant à la fois des TEF et des TEC (28). A noter toutefois que l’ensemble de ces études a été réalisé après transfert d’embryon à un stade précoce (J2 ou J3), alors que nous nous sommes exclusivement intéressés aux résultats après transfert de blastocyste (J5 ou 6). In vivo l’embryon se développe dans la trompe de Fallope jusqu’au 3e jour puis migre jusqu’à la cavité utérine où il arrive au stade de blastocyste et pourra s’implanter autour de J6 post fécondation. L’auto-sélection des embryons se fait via l’activation du génome embryonnaire à J3, et permet le passage au stade de blastocyste. Ainsi un transfert au stade de blastocyste permet de maximiser les chances de grossesses versus un transfert à J2 et J3 et par la même occasion de diminuer le nombre de transfert potentiel permettant l’obtention d’une grossesse (32). Cela diminue également le nombre de congélation embryonnaire effectué et l’espace de stockage nécessaire. C’est la stratégie qui a été adoptée au CHU de Nantes.
Les fumeuses actives dans notre étude représentaient moins de 22 % de nos patientes. Le Baromètre Santé retrouve un tabagisme chez 24% des femmes de 18 à 75 ans en France en 2017 (33). De même, d’après l’Enquête nationale périnatale (ENP) de 2016 sur 13 333 femmes françaises, 30% des femmes interrogées au cours de leur séjour en suite de couches déclaraient fumer de manière active avant de début leur grossesse (34). Notre taux de fumeuses actives était donc inférieur à celui de la population générale. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que les patientes prises en charge dans un parcours de PMA aient possiblement plus conscience des méfaits du tabac sur leurs chances de grossesse. A noter toutefois qu’il s’agit de taux déclaratifs donc probablement sous-estimés.
Concernant le statut tabagique du conjoint, il existe une différence significative dans nos 2 groupes : la proportion de conjoints fumeurs est plus importante dans le groupe « patiente fumeuse », ce qui était attendu car il est fréquent que les 2 membres du couple soient consommateurs de tabac. Ensuite nous pouvons noter une proportion plus importante d’infertilité primaire ou primo secondaire dans le groupe des patientes fumeuses. Or la littérature semble rapporter une diminution de la fertilité spontanée liée au tabac. En effet, la méta-analyse de Augood et al, portant sur l’association entre infertilité et tabagisme, sur 9 études de cohortes, a démontré qu’il existait un risque d’infertilité multiplié par 1,42 (1,27-1,42) en cas de tabagisme féminin (35). Enfin l’âge et l’IMC des conjoints est différents dans nos 2 groupes mais la différence est minime : 1 an en ce qui concerne l’âge et moins d’un point d’IMC ce qui n’est pas pertinent du point de vue clinique et n’est donc probablement pas à prendre en considération.
Cette étude via le modèle n°2 nous a également permis de dégager des hypothèses secondaires. Ne s’agissant pas de notre critère principal, il n’est pas possible de conclure à ce sujet, mais cela représente des pistes intéressantes d’études futures. Ainsi, la probabilité d’obtenir une grossesse clinique lorsqu’une grossesse biologique était observée, était impactée par l’obésité du conjoint. Le poids à l’instar du tabac est un facteur environnemental modifiable sur lequel les patients peuvent influer pour améliorer leurs chances de procréation. Notre étude suggère que l’obésité masculine diminuerait les chances de naissances vivantes après TEC. Une revue de la littérature publiée en 2018 et incluant 14000 cycles d’AMP concluait également dans ce sens, en suggérant qu’une augmentation de l’IMC chez l’Homme était associée à une diminution significative des taux de grossesses cliniques et de naissances vivantes par cycles de FIV+/-ICSI. (36) Au contraire, dans l’étude de Capeloutou et al, publiée la même année, il n’a pas été montré d’impact de l’IMC de l’homme sur les taux de réussite en FIV+/ICSI avec dons d’ovocytes vitrifiés (37). Les résultats d’études réalisées étant controversés et s’agissant d’un problème de santé publique il serait intéressant de s’intéresser plus spécifiquement à ce sujet dans de futurs travaux.
Le design de notre étude n’avait pas pour objectif de comprendre la physiopathologie d’un éventuel impact du tabac sur les chances de grossesse, mais dans la littérature des arguments ont été apportés et peuvent être discutés.
Les études réalisées en médecine de la reproduction, ont montré que le tabac était responsable d’un clivage plus tardif des embryons engendrant une qualité embryonnaire médiocre chez les fumeuses. Cet impact négatif sur le développement précoce des embryons serait à l’origine de moins bon résultats en FIV (38,39). Comme évoqué précédemment notre étude a porté exclusivement sur du transfert de blastocyste.
De nombreuses études s’accordent sur le fait qu’il existe une relation positive entre la qualité embryonnaire et les taux de grossesses obtenues après FIV (26,40,41). Deux paramètres principaux sont impliqués : la vitesse de clivage et le taux de fragmentation (41). En ce qui concerne les TEC, les embryons de bonne qualité avant congélation ont de meilleures chances de supporter le processus de congélation/décongélation et offrent donc de meilleures chances de grossesse en comparaison aux embryons de moins bonne qualité (42). Les chances de grossesses après transfert d’embryons de bonne qualité semblent être identiques entre TEF et TEC (41). Nous pouvons donc supposer que dans notre étude, les embryons de mauvaise qualité (issus de patientes fumeuses) au stade J2 ne sont pas parvenu jusqu’au stade de blastocyste et explique donc en partie notre absence de différence significative retrouvée.
La cigarette jouerait également un rôle délétère sur la qualité de l’endomètre, paramètre non négligeable pour la nidation embryonnaire, et de fait très important à prendre en compte lors d’un TEC. Certains auteurs ont rapporté des taux d’implantation et de grossesse plus faibles chez les fumeuses subissant des cycles de FIV, alors que la qualité embryonnaire était similaire dans les groupes fumeuses et non fumeuse (24), ce qui suggère que la réceptivité utérine peut être impactée négativement par la consommation de tabac. Cette hypothèse a été par la suite confirmée dans une analyse de 785 cycles de TEF réalisés après dons d’ovocytes effectués entre 2002 et 2005 en Espagne, et qui montrait que les fumeuses (consommant plus de 10 cigarettes par jour) ayant reçu des ovocytes d’une donneuse non fumeuse avaient des taux de grossesse inférieurs à ceux des receveuses non-fumeuses (aucune différence significative n’a été retrouvée entre les non fumeuses et les receveuses fumant mois de 10 cigarettes par jour). Les embryons étant de qualité similaire dans les deux groupes cela suggère un rôle néfaste du tabac sur l’endomètre (43). Cette altération de la qualité endométriale peut s’expliquer d’une part par une diminution de la concentration plasmatique en œstrogène chez les patientes fumeuses et d’autre part par un effet toxique direct des Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques, responsable d’une altération de l’adhésion trophoblastique (45). Plusieurs publications ont en outre montré une diminution significative de l’épaisseur de l’endomètre chez les patientes fumeuses (20,26). La muqueuse utérine joue un rôle majeur dans le processus d’implantation de l’embryon : en première partie de cycle menstruel, l’endomètre s’épaissit afin de permettre la nidation d’un potentiel embryon. Afin d’optimiser les chances de grossesses après TEC ou TEF, de nombreuses études se sont intéressées à l’épaisseur de l’endomètre. D’après le modèle 2 de notre étude, le taux de grossesse après TEC serait corrélé de manière positive à l’épaisseur de l’endomètre. Jusqu’à récemment il était communément admis qu’un endomètre inférieur à 6- 8mm n’était pas de bon pronostic concernant les chances de grossesse après TEC ou TEF (46,47) et que les patientes ayant un endomètre >9mm avaient de meilleures chances de grossesses cliniques et de naissances vivantes (46). Cependant des études plus récentes n’ont pas montré d’association linéaire entre l’épaisseur de l’endomètre et le taux de naissance vivante après TEC ou TEF (48,49). Ces études préconisent plutôt qu’une mesure de l’endomètre (pour laquelle les moyens permettant de l’épaissir sont limités), de s’intéresser à son aspect, à savoir qu’un aspect en triple feuillet (3 lignes hyperéchogènes délimitant 2 zones hypo-échogènes) serait de meilleur pronostic concernant les chances de grossesse. (50,51)
La 1ère force de notre étude était son effectif puisqu’elle a été réalisée sur 1934 cycles de transferts autologues d’embryons congelés. Sa seconde était son homogénéité, obtenue d’une part grâce à sa conception monocentrique, et d’autre part grâce aux protocoles standardisés. En effet, les procédures de cryoconservation et de décongélation suivaient des protocoles prédéfinis. Ainsi la préparation des TEC était homogène, les transferts uniquement au stade blastocyste et le suivi était effectué par les mêmes professionnels de santé expérimentés. Enfin, nous avions peu de données manquantes.
Notre étude présentait toutefois des limites. La première est l’aspect déclaratif du tabagisme des femmes suivies, pouvant être responsable d’une sous déclaration et donc d’une sous-estimation du nombre de fumeuses. Afin d’obtenir des taux plus représentatifs de la réalité, il serait intéressant d’avoir recours à des analyses de CO expiré afin d’estimer au plus proche de la réalité le nombre de fumeuses ainsi que leur consommation quotidienne, cela permettrait la réalisation d’une étude plus approfondie.
Le tabagisme du conjoint pourrait également avoir un impact sur les résultats en FIV + /- ICSI. Zitzmann et al, rapporte plus d’échec lors de FIV avec ICSI chez les patientes dont le conjoint est fumeur en comparaison à celles dont le conjoint ne fume pas (OR 2,95) (49). Nous l’avons en partie étudié dans notre étude par le biais de la variable tabagisme passif. Cependant, il s’agit de faits déclaratifs également. Enfin le recueil de données a été réalisé de manière rétrospective, nous exposant un risque de biais de sélection.

Conclusion

Notre étude n’a pas mis en évidence d’impact du tabac sur le taux de naissances vivantes obtenues après 1934 transferts de blastocystes congelés. A également été rapporté une absence d’association du tabagisme féminin avec les différentes étapes clés de la FIV à savoir l’obtention d’une grossesse biologique, puis clinique. Cependant le statut tabagique de la patiente et de son conjoint ont été obtenus de manière déclarative pouvant être à l’origine d’une sous-estimation du nombre de fumeuses. Il serait intéressant de poursuivre cette étude en objectivant la consommation de tabac de manière plus fiable, comme par le biais d’une mesure de la cotinurie ou de l’analyse du monoxyde de carbone expiré.

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Table des matières

Liste des abréviations
I) Introduction
1) Généralités
2) Cryoconservation embryonnaire et le transfert d’embryon congelé
3) Le tabagisme : un enjeu de santé publique
3.1) Tabac et grossesse
3.2) Tabac et fertilité spontanée
3.3) Tabac et l’Assistance Médicale à la procréation
II) Matériels et Méthodes
1. Population étudiée
2. Protocole du transfert d’embryons congelés
3. Vitrification des blastocystes, décongélation et transfert d’embryons
4. Analyses statistiques
III) Résultats
1) Flow chart
2) Caractéristiques démographiques
3) Caractéristiques des cycles
4) Issues des cycles
5) Corrélation des issues avec le statut tabagique des patientes
5.1) Modèle 1
5.2) Modèle 2
5.3) Modèle 3
5.4) Modèle 4
IV) Discussion
V) Conclusion
Bibliographie

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