GaN et composés nitrures: généralités
Structure cristalline
Les matériaux III-N peuvent cristalliser en deux structures différentes, la structure cubique zinc-blende et la structure wurtzite hexagonale. La dernière est thermodynamiquement la plus stable, elle est la structure cristalline la plus commune et appartient au groupe d’espace P63mc.
La structure wurtzite hexagonale, constituée de deux sous-réseaux d’atomes: un sous-réseau d’atomes du groupe III et un sous-réseau d’atomes d’azote. Dans une structure hexagonale idéale, les deux sous-réseaux sont distants de 3c/8 dans la direction de l’axe de l’hexagone, c étant le paramètre de maille perpendiculaire au plan de base hexagonal. En réalité, la structure hexagonale des composés nitrures n’est pas « idéale » et les atomes des deux sous-réseaux sont décalés de leurs positions théoriques au centre du tétraèdre dans un cristal wurtzite. Ainsi, dans le cas du GaN, la distance entre le réseau d’atome Ga et le réseau d’atome N s’écarte de la valeur 3c/8 et est noté « u ». Il en résulte que les barycentres des charges positives et négatives ne coïncident pas, ce qui est à l’origine d’une polarisation spontanée dans ce matériau. Nous verrons plus loin l’effet de cette polarisation sur les propriétés optiques des structures à base de GaN.
La base de la cellule est définie par deux vecteurs égaux et coplanaires dans le plan basal a1 et a2 qui forment 120° entre eux, un troisième vecteur a3 peut être introduit dans le but de rendre compte de la symétrie du plan basal et est défini par a3=-(a1+a2) . Finalement, la structure est définie par un quatrième vecteur c perpendiculaire à la base.
Les plans cristallins et les directions cristallines des semi-conducteurs wurtzite III-N sont définis par les indices de Miller-Bravais (h k i l). Un plan (hkil) coupe les axes du réseau hexagonal en 1/h, 1/k ect… Ainsi, le plan « c » est défini comme le plan (0001). La direction qui correspond à celle de l’axe c et qui porte la polarisation spontanée, est dite direction polaire.
Toute croissance selon l’axe c est dite polaire. Par convention on définit la direction positive le long de l’axe c (+c) comme celle qui va de l’atome III vers l’atome N . La croissance qui se fait selon la direction +c conduit à un cristal de polarité III. Par suite dans le cas opposé (-c) , plan (000-1), le cristal est dit de polarité N. Comme nous le verrons plus loin, cette polarité affecte fortement les propriétés des hétérostructures, la morphologie de surface ainsi que la stabilité thermique et chimique de la surface.
Les plans (h k i 0) qui sont perpendiculaires au plan c, sont définis comme étant des plans non-polaires et la croissance selon les directions associées est dite croissance non polaire. De plus, les plans orientés avec un angle intermédiaire entre le plan polaire et non polaire sont appelés plans semi polaires.
structure de bande des composés nitrures
Les semi-conducteurs à base des nitrures d’éléments III présentent une variété de gaps directs, beaucoup plus étalée que pour les semi-conducteurs composés classiques III-V ou IIVI (phosphures, séléniures, arséniures, sulfures…). Les énergies de gap sont pour l’InN de 0.7eV, 3.4 eV pour le GaN et 6.1eV pour l’AlN (à température ambiante) ce qui permet, à travers des alliages ternaires comme l’AlGaN et l’InGaN, et possiblement quaternaires (GaAlInN) de couvrir un très large spectre de longueurs d’onde allant de l’infrarouge (1.8 µm) à l’UV-C (200nm) en passant par toute la gamme visible .
L’énergie de la bande interdite des semi-conducteurs varie sous l’effet des contraintes. Ces contraintes sont souvent présentes lors de l’épitaxie successive de couches désaccordées en paramètre de maille. La contrainte élastique causée par la différence des paramètres de maille entre le substrat et la couche épitaxiée a comme conséquence un décalage significatif dans l’énergie de la bande interdite pour les alliages III-V . Le sens de décalage et de la partition des niveaux d’énergie dépend évidemment du type de contrainte (tension vs. compression) .
Dopage dans les composés nitrures
Un semi-conducteur dopé est un semi-conducteur qui contient des impuretés incorporées dans sa structure cristalline. Ces impuretés peuvent être des impuretés nonintentionnelles dues au faible contrôle durant la croissance du semi conducteur, ou bien elles sont ajoutées intentionnellement pour obtenir plus de porteurs libres par génération thermique pour ainsi contrôler la conductivité électrique du semi-conducteur. On associe à ces impuretés intentionnelles ou non intentionnelles un ou des niveaux d’énergie dans la bande interdite du semi conducteur. Un semi-conducteur est dit intrinsèque, s’il ne contient aucune de ces impuretés, donc s’il n’y a aucun niveau d’énergie correspondant dans la bande interdite. Autrement dit, dans un semi-conducteur intrinsèque, la seule façon de créer des électrons libres consiste à les exciter thermiquement depuis la bande de valence vers la bande de conduction, laissant alors des trous dans la bande de valence. Au contraire, dans les semi-conducteurs dopés, les trous et les électrons sont excités thermiquement à partir des atomes étrangers agissant comme des impuretés. La facilité avec laquelle les porteurs sont émis est représentée par l’énergie d’activation, i.e. la distance entre le niveau dans la bande associée à l’impureté et la bande de conduction (pour les électrons) ou la bande de valence (pour les trous). On parlera alors de niveaux superficiels ou profonds selon la valeur de cette énergie d’activation.
Pour les semi-conducteurs III-N, notamment le GaN, généralement le dopage p se fait en ajoutant un atome étranger du groupe II pour qu’il se substitue à un des atomes formant le semi-conducteur. Cet atome étranger (impureté) se comporte alors comme un accepteur, puisqu’il peut, selon la configuration qu’il adopte dans le réseau cristallin, capturer un ou plusieurs électrons de la bande de valence (ou en d’autres termes donner un ou plusieurs trous à la bande de valence) sous conditions d’excitation thermique ou d’excitation externe . Le matériau est dit dopé de type p. L’accepteur de loin le plus utilisé est le Mg, mais son énergie d’activation reste importante (de l’ordre de 160meV) .
D’autre part, pour un dopage de type n, un atome, généralement du groupe VI, remplace un atome du semi-conducteur. Cet atome possède, selon la configuration qu’il adopte dans le réseau cristallin un ou des électrons supplémentaires, qui peuvent, suite à l’excitation thermique ou externe, donner un ou plusieurs électrons à la bande de conduction. Les atomes de Si, qui sont a priori amphotères (colonne IV), s’ils sont positionnés sur des sites Ga sont les principaux dopants utilisés pour la formation des nitrures III-N de type n . Leur énergie d’activation est faible, i.e. de l’ordre de 20meV.
Défauts cristallins dans le GaN
Les semi-conducteurs III-N ont une structure périodique et les positions des atomes sont déterminées par la symétrie du crystal et les paramètres de maille. Cependant, quand le GaN est épitaxié, plusieurs types de défauts peuvent intervenir dus aux conditions de croissance elles-mêmes (défauts ponctuels et fautes d’empilement) ou aux contraintes lorsque la croissance a lieu sur un substrat diffèrent (dislocations par exemple dans le cas de l’hétéroepitaxie) comme le saphir (Al2O3) et le silicium (Si). De façon générale, ces défauts cristallins sont des imperfections de la périodicité de la séquence atomique. Ces défauts sont classés en 3 catégories : défauts de dimension zéro, i.e. les défauts ponctuels, défauts à une dimension : les dislocations, et défauts à 2 dimensions : les fautes d’empilements (en particulier les « Basal Stacking Faults »). Pour la réalisation d’hétérostructures et la fabrication des LEDs et LDs efficaces, une très bonne qualité des couches GaN est indispensable. Un des objectifs de cette thèse est d’améliorer la qualité du GaN semi polaire et d’y réduire la densité de défauts et de dislocations présentes dans la couche. Ceci nous amène donc à décrire ci dessous les différents types de défauts rencontrés dans les cristaux et principalement dans les composés à base GaN.
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Table des matières
CHAPITRE I : INTRODUCTION
CHAPITRE II : GAN SEMI-POLAIRE : ETAT DES LIEUX ET OBJECTIFS DE LA THESE
II-1- GAN ET COMPOSES NITRURES: GENERALITES
II-1- 1 Structure cristalline
II-1-2 structure de bande des composés nitrures
II-1-3 : Dopage dans les composés nitrures
II-1-4 : Défauts cristallins dans le GaN
– Défauts ponctuels
– Dislocations
– fautes d’empilements
II-1-5 : Polarisation et effet Stark quantique confiné
II-2 : GAN SEMI POLAIRE
II-2 -1 : Avantages et intérêts de l’orientation semi polaire
– Réduction de l’effet Stark confiné quantique
– Incorporation d’Indium
– Efficiency droop
– Croissance de couches métamorphiques
– Dopage des couches GaN semi polaires
II-2-2 : Etat de l’art des LEDs semi polaires
II-2-3 : quel substrat pour la croissance épitaxiale de GaN semi polaire ?
– GaN semi polaire par homoépitaxie
– GaN semi polaire par heteroepitaxy
CONCLUSIONS
CHAPITRE III : CROISSANCE HETEROEPITAXIALE DE GAN SEMI-POLAIRE ET REDUCTION DE LA DENSITE DES DEFAUTS
III-1 : LES DEFIS DE LA CROISSANCE HETEROEPITAXIALE DE GAN SEMI-POLAIRE
III-2- EFFET DES DISLOCATIONS SUR LES DISPOSITIFS III-N
III-3 – METHODES DE REDUCTION DES DEFAUTS DANS LES COUCHES DE NITRURES SEMI POLAIRES
III-3-1 : methodes appliquées à des substrats planaires
– Couches AlN intercalaires
– Masques nano-poreux
– Croissance épitaxiale latérale (Epitaxial Lateral Overgrowth, ELO)
– Croissance latérale asymétrique (AS-ELO)
III-3-2 : methodes appliquées à des substrats structurés : réduction de l’empreinte du substrat : croissance localisée selon c
– Croissance sur des substrats de saphir structurés
– Blocage par chevauchement des cristaux
– Structuration de saphir à grande période
– Blocage par une couche SiN
III-4 : CARACTERISATION DES MORPHOLOGIES DE SURFACE ET DES DEFAUTS
III-4-1 : Microscope électronique à balayage (MEB)
III-4-2 : Diffraction de rayons X (DRX)
III-4-3 : Cathodoluminescence (CL)
III-4-4 : Photoluminescence (PL)
III-5: CROISSANCE DE NITRURES SEMI POLAIRES : ETAT DE L’ART
CONCLUSIONS
CHAPITRE IV : CROISSANCE DE GAN SEMI POLAIRE (10-11) SUR DES SUBSTRATS SOI (SILICON ON INSULATOR) STRUCTURES
IV-1- EQUIPEMENT DE CROISSANCE : METAL ORGANIC VAPOR PHASE EPITAXY
IV-2 : LE SUBSTRAT SOI (SILICON ON INSULATOR) POUR LA CROISSANCE SEMI POLAIRE
IV-2-1 : choix de l’orientation du Si
IV-2-2 : du substrat Si massif au SOI (silicon on insulator)
IV-2-3 : Fabrication du SOI spécifique
IV-3 : STRUCTURATION DES SUBSTRATS SOI
IV-4 : CROISSANCE SELECTIVE DU GAN (10-11) SUR SOI
IV-4 -1 Rappel sur les paramètres de croissance de GaN (10-11) sur Si massif
IV-4-2 : Dépôt incliné de SiO2 avant le dépôt AlN
– Etude de l’épaisseur de la couche AlN
– Etude de la température de dépôt d’AlN
– Influence de la technique de dépôt AlN
– Influence du flux de TMG
– Comparaison avec la croissance sur des grandes facettes
IV-4-3 : Dépôt incliné de SiO2 après le dépôt AlN
– Croissance de GaN (1-101)
– Analyse des défauts
– Contraintes
– Elimination du meltback etching
IV-4-3 : Amélioration de la qualité de la couche et problèmes rencontrés
CONCLUSION
CHAPITRE V : ASPECT RATIO TRAPPING (ART) ET INGANMETAMORPHIQUES/GAN/SOI
CHAPITRE VI : CONCLUSION