GÉNÉRALITÉS
Définition
Le LES est une maladie auto-immune, non spécifique d’organe, d’étiologie inconnue. Cette affection multi-système conduit à des expressions cliniques différentes d’un sujet à l’autre évoluant en poussées entrecoupées de rémissions multiples. La NL est l’une des manifestations les plus communes du LES mais aussi l’une des plus sévères. Le tableau clinique est souvent pléomorphe et peut se développer sous forme d’anomalies isolées au sédiment urinaire ou, à l’inverse, sous forme d’un syndrome néphritique ou néphrotique symptomatique, avec risque d’évolution vers une IRCT.
Epidémiologie
La prévalence du lupus est de 30 à 40 cas pour 100 000 personnes en Europe, et varie en fonction des ethnies, jusqu’à 200 cas pour 100 000 personnes dans les populations noires. La population touchée classiquement par cette maladie est la femme jeune dans la tranche d’âge de 20-40 ans [16,17]. L’atteinte rénale concerne 30 à 70% des patients atteints de LES, cette grande variabilité est expliquée par la proportion des différentes ethnies au sein des populations étudiées [8,18]. Dans une analyse rétrospective récente [19], il apparaît que la NL est plus fréquente dans les populations asiatiques (70%) que hispaniques et noires (40–50%) ou caucasiennes (20%). Au Sénégal, selon l’étude de Niang et al. [20] et celle de Ka et al. [21], la prévalence de la NL était respectivement 56,8% et 72%, et elle représente 13,7% de l’ensemble des glomérulopathies [5].
Critères diagnostiques du lupus systémique
Critères du SLICC 2012
Le diagnostic de LES repose sur des critères cliniques et immunologiques, définis par les critères du SLICC (systemic lupus international collaborating clinics) publiés en 2012, qui ont remplacé la classification de l’ACR (american college of rheumatology) révisée en 1997. Ainsi, le diagnostic de LES peut être posé en présence de quatre critères, dont au moins un critère clinique et un critère immunologique. Le diagnostic peut également être retenu en cas d’atteinte rénale isolée, si une glomérulonéphrite (GN) est observée à la ponction biopsie rénale (PBR), en présence d’une sérologie positive : anticorps antinucléaires (AAN) ou anticorps anti-ADN natif [22,23].
Critères de classification du SLICC pour le LES
Critères cliniques
1- Lupus cutané aigu ou subaigu
2- Lupus cutané chronique
3- Lésion muqueuse orale ou nasale
4- Alopécie non cicatricielle
5- Synovites ou douleur de 2 articulations
6- Sérite : Pleurésie, Péricardite.
7- Protéinurie > 0,5 g/24 h ou hématurie.
8- Atteinte neurologique
9- Anémie hémolytique.
10- Thrombopénie
11- Leucopénie ou lymphopénie
Critères immunologiques
1- AAN
2- Anticorps anti-ADN natif
3- Anti-Sm
4-Anticorps antiphospholipides :
– Anticoagulant circulant
– Sérologie syphilitique
faussement positive
– Anticorps anticardiolipine
– Anticorps anti β2glycoprotéine1
(β2GP1)
5- Complément abaissé
6- Test de Coombs direct positif
– Critères cliniques en détail :
1- Lupus cutané aigu ou subaigu : rash malaire, lupus bulleux, nécrolyse épidermique toxique, rash maculo-papuleux, rash dans le cadre d’une photosensibilité, lésion psoriasiforme, lésion annulaire polycyclique.
2- Lupus cutané chronique : rash discoïde, lésion verruqueuse, panniculite lupique, lupus tumidus, lupus engelure, lésion type lichen plan.
3- Lésion muqueuse orale ou nasale : palais, bouche, langue ou nez.
4- Alopécie non cicatricielle : Lésion diffuse avec des cheveux cassés visibles.
5- Synovites de 2 articulations ou douleur de 2 articulations avec dérouillage matinal.
6- Sérite : Pleurésie, Péricardite.
7- Atteinte rénale : protéinurie > 0,5 g/24 h ou hématurie.
8- Atteinte neurologique : épilepsie, psychose, mono-névrite, myélite, neuropathie périphérique, état confusionnel aigu.
9- Anémie hémolytique.
10- Leucopénie : Leucocytes < 4 000/mm3 ou lymphocytes < 1 000/mm3.
11- Thrombopénie < 100 000/mm3.
– Critères immunologiques en détail
1- AAN > norme du laboratoire
2- Anticorps anti-ADN double brin > norme du laboratoire
3- Anti-Sm
4-Anticorps antiphospholipides :
– Présence d’un anticoagulant circulant
– Sérologie syphilitique faussement positive (VDRL positif, TPHA négatif)
– Anticorps anticardiolipine (IgA, IgG, or IgM) à un titre moyen ou fort
– Anticorps anti- ß2GP1 (IgA, IgG, or IgM)
5- Complément abaissé (C3, C4, ou CH50)
6- Test de Coombs direct positif
Critères ACR / EULAR 2019
Les nouveaux critères ACR / EULAR (european league against rheumatism) de 2019 (tableau II) offrent une sensibilité plus élevée que l’ACR 1997 et une spécificité plus élevée que les critères SLICC 2012. Dans cette classification la positivité des AAN est considérée comme un critère d’entrée, et nécessite un titre AAN supérieur à 1:80 sur cellules Hep2 (human epithelial cell line type 2); et au moins un critère clinique doit être présent pour permettre la classification. La présence d’un total supérieur ou égal à 10 permet d’affirmer l’existence d’un LES avec une sensibilité de 96% et une spécificité de 93% [24,25]. Par ailleurs, une PBR montrant une NL de classe III ou IV, en présence d’un AAN positif, est suffisante pour retenir le diagnostic de LES.
La néphropathie lupique
Manifestations cliniquo-biologiques de la néphropathie lupique
La plupart des anomalies rénales apparaissent dans les 6 à 36 mois qui suivent le diagnostic du LES [26]. Dans 3 à 6% des cas, l’atteinte rénale précède les autres manifestations de plusieurs années, et dans plus d’un tiers des cas, elle apparaît après le diagnostic du LES. Une NL est souvent soupçonnée au cours de l’évolution et/ou une élévation de la créatininémie. D’où la nécessité d’une surveillance rigoureuse dans le suivi de la maladie, qui est indispensable à la recherche des signes d’atteinte rénale ; elle repose sur un dosage régulier de la créatininémie, ratio protéinurie/créatininurie (RPC) sur échantillon et/ou protéinurie des 24 heures, une étude du sédiment urinaire à la recherche d’hématurie, d’une leucocyturie et de cylindres urinaires (hématiques et/ou granuleux) [16,27]. La protéinurie est la manifestation la plus fréquente de la NL, réalisant un syndrome néphrotique (≥ 3 g/24 heures) dans 45 à 65% des cas. Une hématurie microscopique est notée dans près de 80% des NL avec présence de cylindres hématiques prouvant l’origine rénale de l’hématurie microscopique. L’insuffisance rénale (IR) peut être présente à la phase initiale de la maladie mais peut survenir dans les années qui suivent chez environ 30% des patients lupiques [28].
Anatomo-pathologie de la néphropathie lupique
La PBR est un examen incontournable dans le diagnostic histologique de la NL. Elle doit être réalisée devant toute suspicion d’atteinte rénale au cours du LES. Cependant ses indications constituent actuellement un sujet de controverse. En effet, six lignes directrices, pour la gestion de la NL, ont été publiées par l’ACR [29], l’EULAR/ERA-EDTA (European Dialysis and Transplant Association) [30], le KDIGO (Kidney disease improving global outcomes) [31], le GEAS (Systemic autoimmune disease group) [32], le DWP (Dutch Working Party on Systemic Lupus Erythematosus) [32], le CARRA (Childhood Arthritis and Rheumatology Research Alliance) [32]. Selon ces six lignes directrices, les indications de la PBR sont la diminution persistante ou inexplicable de la FR, la présence d’une protéinurie et un sédiment urinaire actif. Cependant il y a une différence entre ces lignes directrices, en effet pour la plupart la protéinurie doit être ≥ 0.5g/24h, pour l’ACR la protéinurie doit être ≥ 1g/24h si isolée ou ≥ 0.5g/24h si associée à une hématurie. Selon le GEAS, un sédiment urinaire actif est suffisant pour justifier une PBR ; et d’autres considèrent qu’il doit être associé à une protéinurie [32]. Sa réalisation nécessite l’arrêt des antiagrégants plaquettaires et des antiinflammatoires non stéroïdiens, interférents avec l’hémostase primaire ; le contrôle des tests de coagulation et de la tension artérielle ; l’élimination d’une infection urinaire ; l’élimination d’anomalies morphologiques sur l’échographie rénale.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. GÉNÉRALITÉS
I.1. Définition
I.2. Epidémiologie
I.3. Critères diagnostiques du lupus érythémateux systémique
I.3.1. Critères du SLICC 2012
I.3.2. Critères ACR / EULAR 2019
I.4. La néphropathie lupique
I.4.1. Manifestations cliniquo-biologiques de la néphropathie lupique
I.4.2. Anatomo-pathologie de la néphropathie lupique
I.5. Traitement de la néphropathie lupique
I.5.1. Objectifs
I.5.2. Moyens
I.5.3. Indications
I.6. Pronostic
II. COMPLICATIONS INFECTIEUSES
II.1. Définition
II.2. Epidémiologie
II.3. Facteurs favorisants les infections au cours de la NL
II.1.1. Rôle de la maladie lupique
II.1.2. Rôle des corticoïdes et des immunosuppresseurs
II.2. Type d’infection observée selon le germe
II.2.1. Infections bactériennes
II.2.2. Infections virale
II.2.3. Infections fongiques
II.2.4. Infections parasitaires
II.3. Marqueurs biologiques de l’infection
II.4. Traitement des complications infectieuses
II.4.1. Traitement préventif
II.4.2. Traitement curatif
DEUXIEME PARTIE
I. MATERIELS ET METHODES
I.1. Cadre d’étude
I.2. Type et période d’étude
I.3. Population d’étude
I.4. Recueil des données
I.5. Définition des paramètres opérationnels
I.6. Analyse statistique
II. RÉSULTATS
II.1. Diagramme de flux des patients
II.2. Résultats descriptifs
II.2.1. Description de la population d’étude
II.2.1.1. Caractéristiques des patients
II.2.1.2. Bilan biologique à l’admission
II.2.1.3. Classes histologiques de la néphropathie lupique
II.2.1.4. Traitement de la néphropathie lupique
II.2.1.5. Evolution de la néphropathie lupique
II.2.2. Description des infections
II.2.2.1. Nombre d’infections
II.2.2.2. Incidence des infections
II.2.2.3. Délai de survenue des épisodes infectieux
II.2.2.4. Sites des infections
II.2.2.5. Familles de micro-organismes
II.2.2.6. Germes responsables
II.2.2.7. Hospitalisation
II.2.2.8. Traitement des infections
II.2.2.9. Evolution des infections
II.2.3. Statut de la population d’étude à la date de point
II.3. Résultats analytiques
II.3.1. Analyses univariées
II.3.2. Analyse multivariée
III. DISCUSSION
III.1. Caractéristiques des patients
III.1.1. Durée du suivi
III.1.2. Age
III.1.3. Genre
III.1.4. Antécédent de Lupus
III.1.5. Bilan biologique
III.1.6. Classes histologiques
III.1.7. Traitement de la néphropathie lupique
III.1.8. Evolution de la néphropathie lupique
III.2. Description des infections
II.2.1. Nombre d’infection
II.2.2. Incidence des infections
II.2.3. Délai des infections
II.2.4. Sites des infections
II.2.5. Familles de micro-organismes
II.2.6. Germes responsables
II.2.7. Hospitalisation
II.2.8. Evolution des infections
II.3. Mortalité
II.4. Facteurs de risque de survenue de l’infection
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE