Couplage des mesures électrochimiques, acoustiques et thermiques

Cas particulier : lithium – ion capacitor (LiC)

Les systèmes hybrides entre batteries lithium ion et supercapacités aussi appelés lithium-ion capacitor (ou LiC) sont des systèmes de stockage très particuliers (voir Figure 5) qui combinent une électrode négative à base graphite (stockage électrochimique de type faradique) et une électrode positive à base de carbone à grande surface spécifique (stockage électrostatique non faradique) [35,36]. La différence avec un accumulateur lithium ion réside donc principalement dans son électrode positive à la surface de laquelle auront lieu des mécanismes d’adsorptions-désorptions (chimisorption) des ions lithium. Les cellules LiC permettent des charges/décharges plus rapides que les accumulateurs électrochimiques et des densités d’énergie supérieures à celle des supercapacités. Les variations devolume ne peuvent avoir lieu que dans l’électrode négative à base de graphite.

Propagation des ondes acoustique dans les matériaux et hypothèses

L’objet de ce travail est de contribuer au développement d’une méthode de caractérisation des batteries en fonctionnement basée sur l’étude de la propagation des ondes acoustiques à travers les matériaux qui les constituent. Dans cette partie nous présentons les principes de base du transport des ondes acoustiques à travers des milieux denses et des matériaux poreux.

Acoustique dans les milieux isotropes

Considérons tout d’abord la propagation d’ondes élastiques dans des milieux homogènes isotropes et infinis. Un milieu est qualifié d’élastique quand il se déforme sous l’effet d’une sollicitation et lorsqu’il reprend son état initial à la fin de la sollicitation. En considérant que la propagation de l’onde s’effectue sans perte d’énergie on choisit de négliger les phénomènes dissipatifs comme la viscosité ou la conduction thermique.
Une onde sonore consiste en une mise en mouvement de proche en proche des composants du milieu de propagation (compressible et élastique). Les ondes sonores sont qualifiées d’ondes de pression quand elles sont purement longitudinales (propagation normale avec un front d’onde perpendiculaire à la direction de propagation) et qu’elles nécessitent un milieu matériel pour se propager (pas de son dans le vide), voir Figure 6.

Acoustique dans les milieux poreux

Les batteries sont composées de matériaux denses (séparateur, collecteurs de courant) mais les électrodes en elles-mêmes sont poreuses, ce qui permet à l’électrolyte d’accéder à plus de surface spécifique.
L’atténuation acoustique est le résultat de deux phénomènes :
• L’absorption qui est une forme de perte d’énergie par frottements, sous forme de chaleur.
• La diffusion qui est la perte d’énergie lorsqu’une partie des ondes est déviée dans d’autres directions par la structure.
Dans le cas de propagation acoustique dans des matériaux de batterie il est important de ne pas négliger les phénomènes d’atténuation car la structure poreuse induit des pertes d’énergie.

Modèle de Biot à structure élastique

Les travaux de référence sur la propagation acoustique dans les milieux poreux sont ceux de Biot [40,41] développés à partir des années 1950. Ces travaux permettent d’obtenir le coefficient d’absorption d’un milieu poreux saturé en fluide (gaz ou liquide).
Un des éléments clefs de son travail est d’avoir montré la coexistence de trois ondes, deux longitudinales (ou de compression) et une transversale (ou de cisaillement). On appelle généralement P1 et P2 respectivement les ondes rapides et lentes de compression, l’onde de cisaillement elle sera appelée onde S. Cette théorie nécessite d’avoir des conditions d’écoulement de Poiseuille (écoulement laminaire) qui peut se vérifier si la fréquence du système calculée par avec ? la viscosité dynamique de l’électrolyte et d le diamètre du pore, est inférieure à cette limite.
Les travaux de Jocker et Smeulders [42] complètent les travaux de Biot en cherchant à déterminer les coefficients de transmission et réflexion sur des systèmes multicouches et leurs influences sur les paramètres de Biot. La prise en compte de ces phénomènes de transmission et réflexion pourrait amener à développer un modèle qui prenne en compte l’atténuation par diffusion.

Méthodes de caractérisation acoustique

Lorsqu’on génère un signal acoustique à la surface d’une structure, les ondes sonores interagissent avec le milieu en le traversant. Les propriétés du signal acoustique sont ainsi modifiées.
Dans le cas particulier d’un accumulateur électrochimique, on distingue différents éléments, ceux qui :
• ne subissent pas de modification lors des charges/décharges: emballage, collecteur de courant, séparateur, électrolyte ;
• subissent des modifications réversibles liées à l’insertion et la désinsertion des ions lithium (électrode positive, électrode négative et les interfaces avec les éléments précédents).
Le développement des méthodes acoustiques appliquées aux batteries vise à répondre à des enjeux majeurs pour leur gestion et leur étude. En effet, peu de techniques de caractérisations présentent la possibilité de mesurer des grandeurs physiques relatives aux matériaux de batteries en cours de fonctionnement.
L’objet de cette partie est de faire un état des développements récents utilisant ces techniques d’interrogation acoustique. Une sélection de travaux d’importance sur le sujet est présentée pour comparer les approches de différentes équipes pour l’étude des batteries lithium-ion.
L’interrogation acoustique est utilisée pour essayer de répondre à des problématiques importantes comme la gestion de l’état de charge et de l’état de santé et/ou plus fondamentales pour améliorer la compréhension du fonctionnement des accumulateurs.

Estimation de l’état de charge

De nombreuses études et brevets déposés proposent d’utiliser la technique d’interrogation acoustique pour estimer l’état de charge d’une batterie et ainsi améliorer sa gestion par le BMS (Battery Management System).
Les équipes de recherche de l’université de Princeton autour de Daniel Steingart, Andrew Hsieh et Shaurjo Biswas ont travaillé sur le développement de techniques de détermination de l’état de charge [30,46–48] à partir de la propagation de signaux ultrasonores très courts (impulsion de courant) à haute fréquence (2,25 MHz). Leurs travaux ont permis de mettre en évidence une évolution significative et répétable du temps de vol du signal acoustique (l’intervalle de temps entre émission et réception de l’onde acoustique) et de la variation d’amplitude du signal transmis avec l’état de charge de la batterie. Un exemple de résultats obtenus est présenté en Figure 7. Au cours de la charge, le temps de vol (ToF : Time of Flight) diminue, puis ré-augmente pendant la décharge. La célérité des ondes acoustique au sein des matériaux évolue donc notablement et de manière très répétable avec l’état de charge.

Conclusions

Ce chapitre fait le point sur les principes permettant d’utiliser des techniques d’interrogation acoustique et ses utilisations actuelles pour le suivi des batteries. Les méthodes sont variées car il existe plusieurs supports de propagation pour les ondes (matériaux actifs, électrolyte seul, ondes de surface). Les conditions d’essais peuvent aussi avoir des conséquences sur les résultats obtenus.
Sur la base d’une partie de ces travaux scientifiques, plusieurs entreprises ont développé et commercialisent des dispositifs qui permettent l’étude des batteries par les méthodes basées sur la propagation acoustique. La société américaine « Feasible, Inc.», issue du laboratoire de l’Université de Princeton dirigée par Daniel A. Steingart [30,46–48,70] qui a fait l’objet de plusieurs brevets [71 77], propose un dispositif du nom d’EchoStat qui permet d’étudier les batteries en fonctionnement. C’est également ce que propose la société américaine Titan Advanced Energy Solutions grâce à son système IonView f . Enfin, la société allemande Safion GmbH ga développé une solution sur la base des travaux de Alexander Gitis et Dirk Uwe Sauer de RWTH Aachen University [58,71] sur les mesures par ondes de surface ultrasonores.
La majorité des méthodes se basent sur la mesure du paramètre temps de vol, l’exploitation de celuici montre des résultats intéressants pour les indicateurs recherchés (état de charge : SoC ou état de santé : SoH). Les méthodes employées ne s’attardent pas ou peu à d’autres paramètres caractéristiques telles que l’atténuation du signal par exemple.

Analyse des signaux acoustiques transmis

Les formes d’onde des signaux émis et reçus se présentent sous la forme de données de tension en fonction du temps dont on peut extraire différents paramètres temporels et fréquentiels qui seraient pertinents pour l’analyse. La Figure 24 présente un exemple de signal acoustique transmis et de sa densité spectrale de puissance (DSP) calculée.

Méthodes de caractérisation des batteries (hors acoustique)

Les méthodes électrochimiques et thermiques qui sont mises en œuvre dans ces travaux sont présentées dans cette partie.

Caractérisation électrochimique

Charge et décharge galvanostatique ou potentiostatique

Les courants de charges et de décharges galvanostatique sont définis en régimes, noté C/n où C est la capacité de la cellule en Ah et n est le nombre d’heure théorique de la charge ou de la décharge. En fonction de leurs caractéristiques physiques (matériaux d’électrodes, dimensionnement des collecteurs de courant, résistance interne) les cellules peuvent admettre des régimes de fonctionnement très différents. Ainsi, une cellule LMO-LTO de 20 Ah pourra être chargée à des régimes allant de C à 10 C, ce qui correspond à des courants compris entre 20 et 200 A. Une cellule NMC-G de 23 Ah devra être chargée à des régimes compris entre C/5 et 2 C ce qui correspond à des courants de 4,6 à 46 A.
Le protocole de charge classique d’une cellule lithium ion consiste à réaliser une charge à courant constant puis à tension constante appelée « CC-CV » (Constant Current – Constant Voltage). La charge à courant constant est définie en ampère ou en régime. Elle doit s’arrêter lorsque la tension de cellule atteint une tension consigne VLim-charge donnée par la fiche technique du fournisseur. Après l’étape à courant constant, une charge à tension constante permet de compléter la charge. La charge à tension constante consiste à imposer une tension à VLim-charge pendant une durée définie par la fiche technique ou jusqu’à atteindre un courant défini en régime, toujours donné par le constructeur. La Figure 26
montre un exemple de fin de décharge suivie d’un protocole de charge en CC-CV sur la cellule NMC-G.
La fin de charge à tension constante est importante afin de s’approcher le plus possible de l’état totalement chargé de la cellule, défini par le constructeur par VLim charge. En effet, lors de la charge à courant constant la tension mesurée aux bornes de la cellule n’est pas seulement fonction de l’état de charge mais aussi de la résistance. La tension mesurée en fin de charge galvanostatiquelorsque le courant est coupé va diminuer pour se stabiliser autour d’une valeur d’équilibre « U OCV » de la façon suivante :

Spectroscopie d’impédance électrochimique (galvanostatique ou potentiostatique)

La spectroscopie d’impédance électrochimique (EIS) est une technique de caractérisation permettant de distinguer différentes contributions : résistive, capacitive, voire inductive d’un système électrochimique. On parle soit de spectroscopie d’impédance électrochimique galvanostatique (G.E.I.S.) ou potentiostatique (P.E.I.S.). Ce type de technique permet de se placer dans des conditions de quasi-stationnarité, qui sont différentes des conditions de pseudo-stationnarité car, dans le cas de cette technique, les grandeurs oscillent autour d’une valeur d’équilibre.
La technique consiste à appliquer au système électrochimique un signal électrique sinusoïdal et d’en mesurer la réponse. Par exemple pour la G.E.I.S., une consigne en courant sinusoïdal est appliquée autour d’une valeur de courant constant (zéro ampère) et la réponse en tension est analysée. La tension mesurée aux bornes du système oscille alors de manière sinusoïdale à la même fréquence que la consigne. La fonction de transfert entre courant-appliqué et tension mesurée permet de calculer l’impédance électrochimique du système qui est sous la forme. Où |Z|est le module d’impédance et ? le déphasage.
Une erreur que l’on retrouve classiquement lors d’une mesure expérimentale est d’oublier de vérifier la validité des hypothèses qui font qu’au cours d’un essai, une variable peut servir à caractériser l’état d’un système. Dans le cas présent, les mesures sont exploitables pour l’interprétation, si la variable (tension) respecte deux hypothèses essentielles : la linéarité et l’invariabilité dans le temps. La Figure 29 illustre les résultats obtenus à différentes fréquences et différentes intensités de courant en consigne pour la cellule LMO – LTO à 0 % d’état de charge.

Détermination de la fonction de transfert du capteur de flux de chaleur

Le capteur de flux génère une tension proportionnelle au flux de chaleur échangé entre la batterie et son environnement sur la surface du capteur. Cette tension (en µV) doit donc être converti en puissance thermique (W).
Pour cela, le protocole suivant a été utilisé :
• Enregistrement de la tension et du courant au niveau de la batterie et du signal du capteur de flux (noté Fth en µV) en fonction du temps au cours d’un cycle complet de charge et de – décharge ;
• Correction de la ligne de base du capteur de flux. Lorsque la cellule est stabilisée à courant nul et dans des conditions isothermes, le signal du capteur de flux est également stabilisé, autour d’une valeur moyenne non nulle. La correction de la ligne de base consiste à soustraire le signal enregistré à cette valeur pour définir une valeur de signal de capteur corrigée, notée Fth* en µV (voir Figure 32)

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Table des matières
Introduction générale
Lexique
Chapitre 1 : État de l’art
1. Propriétés des batteries à ion lithium
1.1. Généralités
1.2. Matériaux et propriétés d’électrodes
1.2.1. Les technologies d’électrodes positives
1.2.2. Les technologies d’électrodes négatives
1.3. Cas particulier : lithium – ion capacitor (LiC)
2. Propagation des ondes acoustique dans les matériaux et hypothèses
2.1. Acoustique dans les milieux isotropes
2.2. Acoustique dans les milieux isotropes multicouches : Modèle de Thomson Haskell
2.3. Acoustique dans les milieux poreux
2.3.1. Modèle de Biot à structure élastique
2.3.2. Les modèles de propagation dans les milieux poreux
3. Méthodes de caractérisation acoustique
3.1. Estimation de l’état de charge
3.2. Estimation de l’état de santé
3.3. Formation des batteries
3.4. Les autres applications de méthodes acoustiques par transmission pour les batteries
4. Conclusions
Références du chapitre 1
Chapitre 2 : Partie expérimentale 
1. Présentation du matériel utilisé
1.1. Choix des batteries considérées au cours de ce travail
1.2. Banc de test et instrumentations des batteries
1.3. Génération et enregistrement des signaux acoustiques
1.4. Analyse des signaux acoustiques transmis
2. Méthodes de caractérisation des batteries (hors acoustique)
2.1. Caractérisation électrochimique
2.1.1. Charge et décharge galvanostatique ou potentiostatique
2.1.2. Voltampérométrie cyclique
2.1.3. Spectroscopie d’impédance électrochimique (galvanostatique ou potentiostatique)
2.2. Analyse thermique
2.2.1. Mesures de flux de chaleur
2.2.2. Détermination de la fonction de transfert du capteur de flux de chaleur
2.2.3. Quantification de la chaleur réversible des réactions : la contribution entropique .
3. Conclusions
Références du chapitre 2
Chapitre 3 : Développement de la méthode acoustique 
1. Méthodes proposées pour l’analyse acoustique
1.1. Étude paramétrique : influence des principales caractéristiques du signal sonde
1.1.1. Forme d’onde du signal reçu et définition du régime stationnaire
1.1.2. Influence de la fréquence sur le signal transmis
1.1.3. Influence de l’amplitude du signal sonde sur le signal transmis
1.1.4. Influence de la durée du signal sonde
1.1.5. Influence de la température sur le signal transmis
1.1.6. Influence du positionnement du transducteur acoustique
1.2. Méthodologie proposé pour choisir la fréquence de travail
1.3. Traitement des données
1.3.1. Signal transmis temporel
1.3.2. Dérivée en tension du signal transmis
2. Étude en balayage en fréquence
3. Spectroscopie d’impédance acoustique
3.1. Spectroscopie d’impédance électrochimique
3.2. Principe de la spectroscopie d’impédance acoustique
3.3. Exploitation des résultats
4. Conclusions
Chapitre 4 : Couplage des mesures électrochimiques, acoustiques et thermiques
1. Résultats obtenus sur la cellule NMC-graphite
1.1. Détermination de la fréquence du signal acoustique
1.2. Évolution du signal acoustique transmis au cours du fonctionnement des batteries
1.2.1. Évolution de la tension, et des paramètres acoustiques avec l’état de charge
1.2.1.1. Identification des pics redox, utilisation de la représentation en capacité incrémentale
1.2.1.2. Identification des pics redox, mesures par voltampérométrie cyclique
1.2.2. Influence du courant sur les mesures acoustiques
1.2.2.1. Étude à courant constant
1.2.2.2. Influence de la vitesse de balayage en tension en voltampérométrie cyclique
1.2.2.3. Conclusions sur l’influence du courant sur les mesures acoustiques
1.2.3. Influence de la température
1.3. Conclusion relative aux essais sur la cellule NMC – Graphite
2. Cas d’une cellule avec électrode négative LTO
2.1. Détermination de la fréquence du signal acoustique
2.2. Évolution du signal acoustique au cours de cyclage
2.2.1. Évolution de la tension, et des paramètres acoustiques avec l’état de charge
2.2.1.1. Identification des pics redox, utilisation de la représentation en capacité incrémentale
2.2.1.2. Identification des pics redox, mesures par voltampérométrie cyclique
2.2.2. Influence du courant sur les mesures acoustiques
2.2.3. Influence de la température
2.3. Conclusion relative aux essais sur la cellule LMO – LTO
3. Cas d’une cellule avec électrode positive en carbone
3.1. Détermination de la fréquence du signal acoustique
3.2. Évolution du signal acoustique au cours de cyclage
3.2.1. Influence de l’état de charge sur les mesures acoustiques
3.2.2. Influence de l’intensité du courant sur les mesures acoustiques
3.2.3. Influence de la température sur les mesures acoustiques
3.3. Conclusions relative aux essais sur la cellule LiC
Références du chapitre 4
Conclusion générale 
ANNEXES
Détermination de la constante de temps de diffusion de la chaleur et correction du flux de chaleur
Résumé
Abstract 

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