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Epidémiologie de l’infection palustre
Au plan épidémiologique, le paludisme est très variable d’une zone géographique à une autre. Cette hétérogénéité dépend de facteurs tels que la répartition des anophèles, leur capacité vectorielle et aussi les caractéristiques biologiques des parasites,…. La place de l’immunité de l’hôte n’est pas en reste dans cette variabilité épidémiologique. Les facteurs environnementaux, la virulence du parasite et les différents traits génétiques de l’hôte confèrent une complexité au paludisme (49).
Répartition du paludisme dans le monde
Le paludisme sévit surtout dans les pays tropicaux notamment en Afrique subsaharienne, en Asie, dans le Pacifique et en Amérique latine. C’est en Afrique intertropicale que la situation de l’infection est la plus préoccupante et la plus difficile à préciser (Figure 1).
P. falciparum est le parasite le plus fréquent en Afrique subsaharienne où il est responsable de 99% des cas. En dehors de l’Afrique, P. vivax prédomine dans la région d’Amérique (64% des cas), et représente plus de 30% des cas en zone méditerranéenne orientale et plus de 40% en Asie du Sud-Est (92) environ 6,8 millions de décès dus au paludisme ont été évités. L’Asie du Sud-Est a enregistré la baisse la plus importante (48%), suivie des régions d’Amériques (22%) et d’Afrique (20%) (92, 93). Entre 2014 et 2016, il a été noté une recrudescence de la maladie en Amérique, en Afrique, en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique Occidental. L’Afrique subsaharienne est la région la plus touchée avec 90% des cas cliniques et 92% des décès (92).
Situation du paludisme au Sénégal
Au Sénégal, le paludisme est qualifié endémique. En effet, l’évolution de la prévalence parasitaire de 2009 à 2015, classe toujours le Sénégal parmi les pays de l’Afrique Sub-saharienne où le paludisme constitue un problème de santé. Toutefois, ce fardeau a connu une régression significative de plus de 50% entre 2009 et 2015. En effet, la prévalence est passée de 3% à 1,2% et la mortalité toutes causes confondues de 72‰ naissances vivantes à 33‰ naissances vivantes chez les moins de 5 ans entre 2009 et 2014. Ces résultats probants ont permis au Sénégal d’atteindre les objectifs de Roll Back Malaria (RBM) en 2015 (69).
Entre 2016 et 2017, une baisse de la mortalité proportionnelle palustre de près de 12%. Cependant, l’incidence a connu une hausse passant de 23,62‰ à 25,94‰. Cette augmentation est localisée dans une partie du pays et peut être imputable à une amélioration du recrutement des cas. Une répartition inégale de la charge du paludisme est toujours constatée. Seules cinq régions (Kolda, Tambacounda, Kédougou, Kaolack, Diourbel) portent l’essentiel de la charge du paludisme. En effet, elles enregistrent près de 88% des cas de paludisme confirmés (348 712 sur 395 706 cas), 63% des cas graves et 72% des décès dus au paludisme (205 sur 284 décès). Ces mêmes régions (Figure 2) ont la plus forte incidence du paludisme et sont les seules sur les quatorze régions à enregistrer une augmentation de l’incidence entre 2016 et 2017. De 2015 à 2017, on note une nette amélioration de l’offre et de l’utilisation des soins. Cette augmentation du recrutement des cas s’est traduite par un accroissement du nombre de malades toutes affections confondues reçus au niveau des formations sanitaires et dans les sites communautaires, 349 540 cas du paludisme en 2016 ont été confirmés contre 395 706 en 2017 avec respectivement 325 et 284 cas des décès. Néanmoins, la morbidité proportionnelle due au paludisme a nettement baissé passant de 4,86% en 2015 à 3,26% en 2017. Cette baisse a aussi concerné la mortalité qui est passée de 2,11% en 2016 à 1,73% en 2017 (68).
Du point de vue entomologique, les principales espèces plasmodiales présentes au Sénégal sont Plasmodium falciparum (99%) et P. malariae (1%). Au cours des six dernières années, la prévalence parasitaire est passée de 5,9% en 2008 à 1,2 % en 2014. Ceci constitue une baisse notable et l’ensemble des zones épidémiologiques sont concernées. Il a été aussi noté que les populations rurales étaient plus exposées à la maladie comparativement aux populations urbaines avec respectivement 1,9% et 0,3% (69).
Cycle biologique du Plasmodium
Les Plasmodium sont des parasites intracellulaires obligatoires des vertébrés, transmis à l’Homme par la piqûre infestante d’un anophèle femelle. Ils changent constamment de taille, de morphologie et d’habitat au cours de leur cycle biologique très complexe, nécessitant l’interaction entre l’hôte vertébré hébergeant la multiplication asexuée (ou schizogonie) et le moustique vecteur chez qui se déroule la reproduction sexuée (ou sporogonie) (52).
Cycle chez l’Homme (schizogonie)
Chez l’Homme le cycle biologique du P. falciparum est lui-même divisé en deux phases: i) la phase hépatique ou pré-érythrocytaire (schizogonie pré-érythrocytaire) : elle correspond à la phase d’incubation, cliniquement asymptomatique ; ii) la phase sanguine ou érythrocytaire (schizogonie érythrocytaire) : (Figure 3) elle correspond à la phase clinique de la maladie (3).
Schizogonie pré-érythrocytaire
Les sporozoïtes inoculés par l’anophèle femelle lors de son repas sanguin restent pendant une trentaine de minutes maximum dans la peau, la lymphe et le sang. Beaucoup sont détruits par les macrophages mais certains parviennent à gagner les hépatocytes. Ils se transforment en schizontes pré-érythrocytaires ou «corps bleus» (formes multi-nucléées) qui, après 7 à 15 jours de maturation, éclatent et libèrent des milliers de mérozoïtes dans le sang. La schizogonie hépatique est unique dans le cycle, la cellule hépatique ne pouvant être infectée que par des sporozoïtes (3). Dans les infections à P. vivax et P. ovale, certains sporozoïtes intra-hépatiques restent quiescent (hypnozoïtes) et sont responsables d’une schizogonie hépatique retardée, qui entraine la libération dans le sang de mérozoïtes plusieurs mois après la piqûre du moustique, expliquant ainsi les reviviscences tardives observées avec ces deux espèces. Les hypnozoïtes n’existent pas dans l’infection à P. falciparum (pas de rechute) et ils n’ont pas été mis en évidence non plus dans l’infection à P. malariae, malgré l’existence de rechutes tardives, ni-semble-t-il pour P. knowlesi (3).
Schizogonie érythrocytaire
Très rapidement les mérozoïtes pénètrent dans les globules rouges. La pénétration du mérozoïte dans l’érythrocyte et sa maturation en trophozoïte puis en schizonte prend 24, 48 ou 72 heures (en fonction de l’espèce) et conduit à la destruction du globule rouge hôte et à la libération de 8 à 32 nouveaux mérozoïtes. Ces mérozoïtes pénètrent dans de nouveaux globules rouges et débutent un nouveau cycle de réplication. Cette partie du cycle correspond à la phase clinique : la parasitémie s’élève, le sujet devient fébrile, c’est l’accès palustre. En l’absence de traitement, tous les parasites évoluent progressivement au même rythme (on dit qu’ils deviennent synchrones), tous les schizontes érythrocytaires arrivent à maturation au même moment, entrainant la destruction d’un grand nombre de globules rouges de manière périodique, toutes les 24 heures (pour P. knowlesi), 48 heures (fièvre tierce de P. falciparum, P. vivax ou P. ovale) (Figure 3) ou toutes les 72 heures (fièvre quarte de P. malariae) (3).
Après un certain nombre de cycles érythrocytaires, certains mérozoïtes subissent une maturation, accompagnée d’une différenciation sexuée : ils se transforment en gamétocytes à potentiel mâle ou femelle, qui vont rester en circulation dans le sang pendant 10 à 15 jours (3). Le moustique sera infecté par ces gamétocytes au moment d’un repas sanguin sur un hôte infecté.
Cycle chez le moustique
Il est encore appelé sporogonie. Les gamétocytes ingérés par le moustique lors d’un repas sanguin sur un sujet infecté, se transforment en gamètes mâles et femelles qui fusionnent en un oeuf libre, mobile appelé ookinète. Cet ookinète quitte la lumière du tube digestif, se fixe ensuite à la paroi externe de l’estomac et se transforme en oocyste. Les cellules parasitaires se multiplient à l’intérieur de cet oocyste, produisant des centaines de sporozoïtes qui migrent ensuite vers les glandes salivaires du moustique. Ces sporozoïtes sont les formes infectantes prêtes à être inoculées avec la salive du moustique, lors d’un repas sanguin sur un hôte vertébré (3).
La durée du développement sporogonique des Plasmodium varie en fonction des conditions climatiques : entre 9 et 20 jours pour P. falciparum (entre, respectivement, 30°C et 20°C), un peu plus rapide pour P. vivax à températures équivalentes, plus long pour P. malariae (3).
Pathologie de l’infection à Plasmodium falciparum
Les signes cliniques du paludisme sont extrêmement divers et vont du simple portage asymptomatique aux manifestations graves telles que le coma, l’anémie sévère, l’insuffisance rénale aiguë ou l’oedème pulmonaire pouvant même entraîner la mort. Il existe donc toute une échelle de symptômes et les critères permettant de classer les accès en accès simple ou grave, semblent varier selon les praticiens. Cette symptomatologie dépend de la virulence du parasite, du niveau d’immunité acquise par le malade et de divers facteurs génétiques.
Accès palustre simple
Les principaux symptômes cliniques de l’accès palustre simple sont : la fièvre, les frissons et sueurs, céphalées, vomissements, diarrhée, l’anémie, la jaunisse et souvent la splénomégalie. Lors de l’éclatement des GRp, le pigment malarique appelé hémozoïne est libéré. Il agit sur le centre bulbaire de la thermorégulation provoquant ainsi la fièvre, surtout lorsque la parasitémie a atteint un certain seuil (73).
Au cours des accès de primo invasion, le cycle érythrocytaire est généralement non synchronisé ; la fièvre prend alors une allure continue ou irrégulière selon la parasitémie. Lorsque chez le malade, les cycles endo-érythrocytaires de Plasmodium se synchronisent progressivement, la libération des pigments malariques est régulièrement répétée, ce phénomène confère ainsi à l’accès palustre sa périodicité.
On peut distinguer au cours de l’accès palustre, trois phases symptomatiques distinctes. D’abord une sensation de froid qui dure une quinzaine de minutes, suivie d’une montée de la température jusqu’à plus de 40°C, phase qui dure plusieurs heures et pouvant être accompagnée de vomissements, de convulsions et d’une chute de la tension artérielle. La dernière période est caractérisée par une hypersudation et une baisse de la température (29).
Ces symptômes du paludisme commencent à se prononcer à partir du stade intra-érythrocytaire du cycle de développement du parasite. La fièvre, lors de l’accès simple survient au moment de la lyse des hématies qui libère les mérozoïtes, l’hémozoïne et d’autres antigènes parasitaires. La fièvre serait également due à des cytokines libérées par les macrophages et les cellules endothéliales de l’hôte (2). Toute une série de cytokines peuvent avoir un effet pyrogène, telles que l’IL-1, l’IL-6 et le TNF-α dont le lien avec la fièvre a été le mieux établi. Ces cytokines se comportent comme des pyrogènes endogènes en stimulant les centres thermorégulateurs hypothalamiques(43, 54).
Formes graves du paludisme
Elles sont souvent dues à P. falciparum. Les personnes vivant dans des zones d’endémie palustre sont constamment exposées aux infections palustres et dans la majorité des cas, ces infections restent asymptomatiques. Seule une minorité des cas évolue vers le paludisme symptomatique et très peu d’entre eux deviennent graves (91).
Il existe plusieurs formes graves du paludisme à P. falciparum. L’anémie sévère et le neuropaludisme sont les complications majeures du paludisme à P. falciparum (3) mais il existe également d’autres complications, telles que l’hypoglycémie, la thrombopénie, l’insuffisance rénale, l’insuffisance hépatique ou même l’oedème pulmonaire pouvant apparaître isolément ou en combinaison (50, 57). L’incidence de ces pathologies graves est variable suivant l’âge des patients et le niveau d’endémicité palustre.
Anémie palustre
L’anémie sévère est l’une des complications les plus connues de l’accès palustre et elle reste une cause importante de morbidité et de mortalité. Dans les régions hyper-endémiques, elle est beaucoup plus fréquente que l’accès cérébral et se note surtout chez les enfants (38, 63). Les signes évocateurs comprennent une pâleur importante des muqueuses en particulier de la langue, des paumes des mains et des plantes des pieds (28).
La pathogénèse de l’anémie palustre à P. falciparum est multifactorielle. Cependant l’infection à P. falciparum contribue directement à cette manifestation grave. La perte des GR constitue un mécanisme important de l’anémie dans les infections aiguës à P. falciparum chez les sujets naïfs (51). Les troubles d’érythropoïèse souvent observés au cours des infections aiguës à P. falciparum jouent un rôle mineur dans l’anémie palustre (82). Il a été rapporté que même un arrêt complet d’érythropoïèse n’entraîne que 1% de perte des GR totaux de l’organisme par jour (79). Cependant, l’inhibition de l’érythropoïèse semble jouer un rôle prépondérant dans l’anémie en cas de portage prolongé à faible parasitémie (18). L’hypersplénisme et l’hémolyse induite par les anticorps sont considérés comme les principaux mécanismes de l’anémie chez les patients infectés par P. falciparum dans le contexte particulier de la splénomégalie palustre hyper-immune (18, 53).
Neuropaludisme
Le neuropaludisme ou paludisme cérébral est la complication la plus sévère de l’infection par P. falciparum, seule espèce plasmodiale capable de le provoquer (10, 59). Le terme neuropaludisme (accès pernicieux) regroupe toutes les manifestations neurologiques conséquence de l’atteinte cérébrale au cours de l’accès palustre : troubles de la conscience, prostration et convulsions (3). C’est un syndrome fréquemment mortel même si les soins médicaux sont administrés dans de très bonnes conditions et le taux de létalité est de l’ordre de 15 à 30% (37, 90). Chez les survivants, des séquelles neurologiques existeraient dans plus de 10% des cas surtout chez les enfants africains (40, 59) mais, la fréquence de ces séquelles est controversée (61). Cette complication résulte d’un processus pathologique complexe.
Physiopathologie du paludisme grave
Malgré de nombreux travaux récents fondamentaux et expérimentaux, son caractère complexe et plurifactoriel. Les principaux mécanismes impliquent l’hôte et le parasite dans des interactions nombreuses et souvent synergiques. Les principaux mécanismes impliqués sont, la séquestration des hématies parasitées, les cytokines pro-inflammatoires et les mécanismes immunitaires (84).
La séquestration des hématies parasitées
La séquestration des hématies parasitées (GRp) au sein des capillaires cérébraux est le mécanisme prépondérant du neuropaludisme. On peut schématiquement la décomposer en plusieurs mécanismes : la cytoadhérence, la formation de rosettes, la formation d’amas plaquettaires et l’auto agglutination. La cytoadhérence correspond à l’adhérence des GRp aux cellules endothéliales. La capacité des GRp à lier des hématies non parasitées conduit à la formation de rosettes (rosetting) tandis que la capacité des GRp à lier les plaquettes via les récepteurs CD36 ou la sélectine P conduit à la formation d’amas plaquettaires. L’auto-agglutination correspond à l’adhérence entre plusieurs hématies parasitées, phénomène secondaire et probablement favorisé par les plaquettes (46, 84). Les rosettes comme les amas plaquettaires ne sont pas retrouvés dans la circulation sanguine et restent donc séquestrés (46).
La cytoadhérence a lieu principalement dans les capillaires de la microcirculation profonde notamment cérébrale. Au niveau moléculaire, la cytoadhérence implique de multiples interactions entre les ligands de l’hématie et les ligands de l’endothélium (22, 46).
L’intensité de la séquestration est au moins en partie corrélée avec la gravité du paludisme. Les amas d’hématies parasitées ou non, par cytoadhérence, rosetting et auto-agglutination, réduisent le flux sanguin au niveau des micro-vaisseaux profonds, principalement cérébraux (figure 4). Ce phénomène d’altération du flux est aggravé par la réduction de la déformabilité des GRp (26). Au final, les GRp séquestrées dans les capillaires profonds, agglutinant des hématies saines et des plaquettes, se trouvent protégées pour progresser dans le cycle parasitaire, mais aussi pour produire et stimuler une variété de molécules bioactives qui participent au processus pathologique (84). La séquestration n’explique pas à elle seule la physiopathologie du neuropaludisme, mais elle est étroitement associée à la réponse immunitaire (89).
Rôle physiopathologique des cytokines
La réponse immunitaire contre les agents infectieux est principalement initiée par l’interaction entre les PAMP et les récepteurs cellulaires de l’hôte. Beaucoup d’études impliquent la principale toxine de P. falciparum, le glycosylphosphatidylinositol (GPI), en tant que PAMP du parasite. Le GPI purifié induit l’expression de nombreux gènes impliqués dans la pathogenèse du paludisme, par exemple les gènes qui codent pour les cytokines pro-inflammatoires, comme le TNF-α, IL-1 et différentes molécules d’adhésion qui sont exprimées à la surface de l’endothélium (77). Ce dernier mécanisme illustre bien la synergie entre réaction humorale et cytoadhérence (39). Le rôle des cytokines dans la pathogénie n’est pas connu avec précision. Le TNF-α est la cytokine pro-inflammatoire la plus étudiée. La sécrétion de TNF-α, cytokine pyrogène essentiellement produite par les macrophages activés, serait secondaire à la rupture paroxystique des schizontes qui libèrent les mérozoïtes, expliquant ainsi les importantes variations des taux circulants de cette cytokine. Le TNF-α est surexprimé près des zones de séquestration intense ; il augmente l’expression d’ICAM-1 à la surface des cellules endothéliales, favorisant ainsi la cytoadhérence des GRp (78). Au stade précoce de la maladie, le TNF-α pourrait jouer un rôle protecteur, alors qu’il jouerait le rôle inverse au stade tardif (70). Il est aussi impliqué dans la régulation de la transmission sympathique ; il stimule la synthèse de l’oxyde nitrique (NO), et pourrait participer ainsi aux symptômes du neuropaludisme (84).
Réponse immunitaire acquise
De nombreux travaux en zone d’endémie palustre ont démontré que l’induction de l’immunité antipaludique adaptative nécessite une longue exposition. Elle se met en place progressivement avec l’âge et les expositions répétées (27).
Réponse à médiation cellulaire
La réponse immunitaire à médiation cellulaire induite par l’infection à P. falciparum peut protéger à la fois, contre les stades de développement pré-érythrocytaires et contre les stades érythrocytaires du parasite (83).
Les cellules T CD4+ ou Th et les T CD8+ ou CTL interviennent dans l’immunité anti-palustre. Il est actuellement bien établi que ces cellules T CD4+ et T CD8+ reconnaissent des peptides antigéniques du Plasmodium présentés via les molécules du CMH exprimées à la surface des hépatocytes infectés (35, 36). Les lymphocytes T CD4+ peuvent par le biais des cytokines activer les CTL contre les hépatocytes infectés. Ils sont essentiels à la protection contre les formes asexuées sanguines du Plasmodium aussi bien chez l’homme que chez la souris.
Les études chez l’homme et les souris indiquent également que les cellules T CD4+ et CD8+ sont importantes pour la protection contre le paludisme (45, 80). Les observations cliniques suggèrent que la durée de l’immunité protectrice dépend de la persistance de l’exposition à l’antigène. La fonction des cellules T régulatrices dans l’infection palustre n’a pas été totalement explorée, bien que les études chez les souris et chez l’homme indiquent que les cellules T régulatrices sont activées pendant la réponse à l’infection palustre et régule négativement la fonction effectrice des cellules T. La déplétion des cellules T régulatrices chez la souris in-vivo augmente l’immunité contre le paludisme (8).
Réponses humorales
Chez les populations des régions où le paludisme est endémique, l’infection palustre induit des fortes réponses immunes humorales. La plupart des réponses humorales sont T-dépendantes nécessitant ainsi une interaction entre les cellules B et les cellules T CD4+. Beaucoup d’études ont recherché les rôles spécifiques des différentes sous-classes d’IgG dans l’acquisition de l’immunité anti-palustre.
Des différences substantielles dans la distribution des sous-classes d’IgG ont été rapportées entre les individus prémunis et ceux n’ayant pas de prémunition contre le paludisme. Les IgG1 et IgG3 ayant une propriété de cytophilie, sont apparues prédominantes chez les individus protégés suggérant ainsi leur rôle clé dans la prémunition contre le paludisme clinique (30, 85). Il a été par la suite montré que les taux d’IgG3 spécifiques au parasite étaient positivement corrélés à une prémunition contre les cas de paludisme contrairement au taux d’IgG totales spécifiques du parasite (4). L’efficacité des IgG cytophiles (IgG1 et IgG3) dans la protection contre le paludisme s’expliquerait par leur habilité à se fixer sur des cellules phagocytaires comme les monocytes portant leurs récepteurs. Les IgG1 et IgG3 induiraient ainsi une inhibition cellulaire de la croissance des parasites en opsonisant les GRp (13, 32, 41).
Le rôle des anticorps particulièrement les IgG, dans la protection contre l’infection palustre a été démontré par les expériences de transfert passif de plasma provenant d’individus vivant en zone d’endémie à des personnes naïves non exposées (12, 19, 74). Chez les résidents des zones endémiques, l’infection palustre induit la production des immunoglobulines spécifiques et polyclonales. Ces anticorps sont produits par les cellules lymphocytaires B. Au cours de l’infection palustre, les Ac produits sont constitués essentiellement par des IgM et IgG, mais aussi d’autres types comme les IgE et IgA. Le rôle protecteur des IgM dans le cas du paludisme reste à être élucidé. De même, aucune fonction spécifique antipaludique n’a été attribuée aux IgA (48).
Les infections palustres chez l’homme aussi bien que chez les animaux ont été associées à des concentrations élevées d’IgE totale et IgE anti-malarique. L’élévation d’IgE apparait être associée à la gravité du paludisme (66).
Les anticorps agissent par divers mécanismes : (i) inhibition de l’invasion des hépatocytes par les sporozoïtes; (ii) inhibition de l’invasion des érythrocytes par les mérozoïtes ; (iii) inhibition de la croissance intra-érythrocytaire du parasite ; (iv) la clairance des érythrocytes infectés par ADCI (12, 14, 86).
De nombreuses études réalisées in vitro ont démontré que des cellules effectrices comme les monocytes/macrophages ou les neutrophiles, étaient capables, en association avec les IgG spécifiques, d’éliminer les stades sanguins du parasite ou d’inhiber leur prolifération. En effet, les monocytes de souris, de singes et des humains sont capables de phagocyter et d’éliminer les mérozoïtes et les GRp en présence de sérums de personnes immunes ou d’IgG purifiées à partir de ces sérums (32, 60).
Ce nouveau mécanisme nommé ADCI se distingue de l’ADCC par le fait qu’il n’induit pas uniquement la lyse des GRp, mais aussi une inhibition de la croissance du parasite, partiellement réversible lorsque ceux-ci sont remis en culture sans monocytes, ni IgG (Figure 6). Par la suite, d’autres études ont démontré que l’ADCI avait pour cible principale des antigènes du mérozoïte (12, 14, 64).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : Rappels sur le paludisme
I- Définition et historique
I-1- Définition
I-2- Historique
II- Epidémiologie de l’infection palustre
II-1- Répartition du paludisme dans le monde
II-2- Situation du paludisme au Sénégal
III- Hôtes et biologie du Plasmodium
III-1- Agent pathogène
III-2- Vecteurs
III-3- Cycle biologique du Plasmodium
III-3-1- Cycle chez l’Homme (schizogonie)
III-3-2- Cycle chez le moustique
IV- Pathologie de l’infection à Plasmodium falciparum
IV-1- Accès palustre simple
IV-2- Formes graves du paludisme
IV-2-1- Anémie palustre
IV-2-2- Neuropaludisme
IV-3- Physiopathologie du paludisme grave
IV-3-1- La séquestration des hématies parasitées
IV-3-2- Rôle physiopathologique des cytokines
V- Immunité antipalustre
V-1- Notion de prémunition
V-2- Réponse immunitaire innée
V-3- Réponse immunitaire acquise
V-3-1- Réponse à médiation cellulaire
V-3-2- Réponses humorales
VI- Candidats vaccins anti-palustres: cas des MSP
DEUXIEME PARTIE : Travaux personnels
I – Objectifs de l’étude
Objectif général :
Objectifs spécifiques :
II- Matériel et Méthodes
II-1- Site, cadre et population d’étude
II-2- Matériel
II-2-1- Matériel du Laboratoire
II-2-2-Tampons et réactifs chimiques
II-2-3- Matériel biologique
II-2- Méthodologie
II-2-1 Dosage des anticorps par ELISA
II-2- 2- Analyses statistiques
III- Résultats
III-1- Caractéristiques de la population d’étude
III-1-1- Données générales de la population d’étude
III-1-2- Caractéristiques biologiques de la population d’étude
III-2- Comparaison des niveaux des taux d’Anticorps suivant les années
III-3- Relation entre les taux des IgG anti-MSP4p20 et des IgG anti-MSP4p40
III-3-1- Analyse sur la population globale
III-3-2- Analyse suivant l’année de recrutement
III-4- Analyse des réponses IgG anti-MSP4 suivant l’âge
III-4-1- Comparaison des niveaux de réponses en IgG entre les adultes et les enfants
III-4-2 Corrélation globale entre les taux d’anticorps anti-MSP4 et l’âge des patients suivant les années
III-4-3 Corrélation entre les taux d’anticorps anti-MSP4 et l’âge chez les enfants
III-4-4- Corrélation entre les taux d’IgG anti-MSP4 et l’âge chez les adultes
III-5- Evaluation de réponses IgG anti-MSP4 suivant les formes cliniques et le sexe
III-5-1- Comparaison des niveaux de réponses IgG anti-MSP4 suivant les formes cliniques
III-5-2- Comparaison des niveaux de réponses IgG anti-MSP4 suivant le sexe
III-5-3- Corrélations entre taux d’anticorps et données biologiques des patients
IV – Discussion
Conclusion et perspectives
Références
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