Les corps étrangers des voies respiratoires inférieures sont des corps solides exogènes passés accidentellement par inhalation dans le larynx, la trachée ou les bronches. L’inhalation de corps étranger est un accident fréquent chez l’enfant, mais rare chez l’adulte. Elle peut mettre immédiatement en jeu le pronostic vital ou être à l’origine de séquelles graves. Le syndrome de pénétration, très évocateur, qui en est son principal mode de révélation, permet de poser un diagnostic précoce, et ainsi débuter un traitement. Cependant, ce syndrome peut manquer ou être méconnu pendant des années, responsable d’un retard diagnostique et d’une symptomatologie moins manifeste. Chez l’adulte, des études rétrospectives ont suggéré que les principales causes sont la diminution de la vigilance, due à un état d’ivresse, une prise de sédatifs, une anesthésie générale, un traumatisme ou un handicap physique, un terrain de psychopathie, les émotions brutales au cours des repas et certaines professions (couturiers, cordonniers, menuisiers…). Chez le sujet âgé, on note une prédisposition particulière aux fausses routes pendant le sommeil surtout à cause de la diminution du reflexe tussigène et de la déglutition en rapport soit avec la sénescence, soit avec des maladies neurologiques ou neuromusculaires (sclérose latérale amyotrophique, maladie d´Alzheimer, maladie de Parkinson, AVC), soit avec certaines prescriptions médicamenteuses (anticholinergiques, antipsychotiques ou anxiolytiques). Aussi la tachypnée, associée à des conditions médicales communes à ce groupe d´âge, a montré une modification de la coordination entre la déglutition et la respiration. L’origine dentaire est aussi souvent incriminée (plombage, prothèses et chicots dentaires…) .
La nature des CE inhalés dépend énormément des habitudes socioculturelles (alimentaires, vestimentaires) et éducatives des populations étudiées [2]. De nos jours, le développement des techniques endoscopiques, combiné aux progrès de l’anesthésie, ont amélioré les conditions d’extraction de ces CE. Malgré ces progrès remarquables, la problématique que pose cet accident reste, dans les pays en voie de développement, sa prise en charge aux plans diagnostique et thérapeutique, car il se pose dans nos pays, le problème de l’insuffisance du plateau technique et des services spécialisés, notamment dans les régions les plus reculées [3]. Peu d’études portant sur l’inhalation de CE dans les VRI chez l’adulte ont été réalisées jusque-là, justifiant tout l’intérêt, que la présente étude suscite dans les milieux avertis. Il sera ainsi procédé, à une revue rétrospective descriptive de cette pathologie au niveau de la clinique ORL Lamine Sine Diop du CHU de Fann. L’objectif ainsi visé, est de montrer le caractère rare et exceptionnel de la présence de CE des VRI chez l’adulte.
HISTORIQUE
Au fil des années, plusieurs médecins précurseurs ont décrit différentes techniques et plusieurs matériels d’endoscopie. Cependant, c’est à l’école allemande que revient le mérite de la pratique princeps de l’endoscopie laryngotrachéo-bronchique vers la fin du XVIIIᵉ siècle. Les avancées majeures ont été apportées surtout par Gustav Kilian (1860-1921), fréquemment appelé « le père de la bronchoscopie » avec une amélioration du matériel et le développement mondial de la bronchoscopie rigide. Ainsi, Kilian réalise la première endoscopie moderne le 30 Mai 1897 à l’aide d’un œsophagoscope. Il extrait un fragment d’os enclavé dans la bronche souche droite d’un patient après avoir anesthésié le larynx avec une solution de cocaïne. En 1905, Chevalier-Jackson, oto-rhino-laryngologiste américain, a créé un bronchoscope rigide avec une extrémité distale éclairante pour le traitement des complications bronchiques de la tuberculose. Il donne ainsi la codification de la conduite à tenir face à un corps étranger bronchique. Vaneicken rapporte en 1908, une mortalité encore importante (13%), mais elle va rapidement baisser puisqu’elle est de 2% en 1938. L’utilisation des optiques grossissantes en 1940 a ouvert la voie à l’endoscopie moderne, inaugurée par Mounier-Kuhn [4].
En 1966 Shigeto Jkeda (Tokyo, Japon) a présenté le premier fibroscope flexible au 9ème Congrès International sur les Maladies du Thorax, organisé à Copenhague. Au cours des années 1970, l’utilisation du bronchoscope rigide disparait progressivement pour l’exploration de l’arbre trachéo-bronchique au profit de la fibroscopie souple. Cependant, l’endoscopie rigide reste la référence pour les prises en charge interventionnelles. Mais l’anesthésie locale n’est plus utilisée actuellement car inconfortable pour l’opérateur et surtout peu sécurisée pour le patient car majorant les risques traumatiques.
À partir des années 1980, l’endoscopie évolue avec l’arrivée de la vidéoendoscopie, des endoscopes à usage unique, du matériel de traitement laser et des procédés mécaniques tels que les prothèses endotrachéales ou les ballonnets [4]. Au Sénégal, la prise en charge des CE des VRI en ORL a commencé dans les années 1980 avec le professeur El Hadj Malick DIOP .
RAPPELS ANATOMIQUES
ANATOMIE ENDOSCOPIQUE
Le larynx
Cette étude peut être effectuée lors d’un examen clinique par laryngoscopie indirecte ou chez un patient sous anesthésie générale par laryngo-trachéoscopie directe. Elle est conditionnée par la membrane élastique du larynx, qui est une charpente fibro-élastique, de siège sous muqueux, formée par une membrane élastique comprenant deux parties : le cône élastique et le cône vestibulaire. Le tube laryngé est subdivisé en trois parties :
– L’étage supra-glottique : Elle est la partie du larynx située au-dessus du plan des cordes vocales. Il comprend la margelle laryngée (épiglotte, replis ary-épiglottiques, aryténoïdes), les bandes ventriculaires et les ventricules [6]. L’épiglotte est recouverte d’une muqueuse fine. Sa partie inférieure, ou pied de l’épiglotte, vient s’insérer juste au-dessus de la commissure antérieure de l’étage glottique. Les bandes ventriculaires, sont des structures allongées parallèlement au plan des cordes vocales. Le ventricule est une cavité paire et symétrique, située entre l’épaisseur de la bande ventriculaire en haut, et le plan de la corde vocale en bas.
– L’étage glottique : Elle est l’espace, compris entre le bord libre des deux plis vocaux en avant et des processus vocaux des cartilages aryténoïdes en arrière. Il est constitué par les cordes vocales, la commissure antérieure, et la commissure postérieure. À l’état normal, les cordes vocales prennent la forme de deux cordons blancs tendus en avant entre l’angle rentrant du cartilage thyroïde, et en arrière au niveau de l’apophyse vocale à la base du cartilage aryténoïde.
La commissure antérieure, correspond à la zone d’insertion antérieure des cordes vocales. La commissure postérieure ou glotte cartilagineuse est représentée par les deux apophyses vocales des cartilages aryténoïdes, elle est recouverte par une muqueuse fine.
– L’étage sous-glottique : Il s’agit de la continuité de la muqueuse à la face inférieure de la corde vocale qui s’étend jusqu’au bord supérieur du cartilage cricoïde. Il a la forme d’un cône à base inférieure qui se prolonge par la trachée cervicale.
La trachée
En endoscopie, la trachée se présente comme un tube cylindrique aplati sur sa face postérieure, de 12 cm de long et de 2,5 cm de large environ chez l’adulte avec une série de saillies transversales, correspondant aux anneaux trachéaux [9]. La muqueuse trachéale, a une coloration blanc rosée sur ses parois antérolatérales avec des bandes plus claires qui correspondent aux saillies cartilagineuses des anneaux. Sur la paroi postérieure, la coloration est plus foncée. La contraction des muscles trachéaux fait apparaître des plis muqueux longitudinaux : Ce sont les plis de Zuclerkandel. Un certain nombre d’empreintes endoluminales est noté : la dépression du tronc artériel brachiocéphalique en avant et l’empreinte pulsatile sur le flanc gauche de la crosse aortique, déviant la trachée vers la droite .
La carène, sagittale, mince et luisante, de couleur ivoire marque la bifurcation trachéale et la naissance des bronches principales divergentes asymétriques. La bronche principale droite semble continuer l’axe trachéal.
Les bronches
Chaque bronche souche, va se subdiviser en bronches lobaires, qui se subdivisent en bronches segmentaires, qui vont à leur tour donner les bronches sous-segmentaires. L’arbre bronchique droit donne 3 branches principales qui correspondent à chaque lobe. La lobaire supérieure, se détache très rapidement sur le versant antéro-externe de la bronche souche, à environ 1 à 2 cm de la carène. La bronche souche devient alors, le tronc intermédiaire sur environ 3 cm et donne naissance à la lobaire moyenne sur sa face antéro-interne, et à la lobaire inférieure qui continue son axe. L’arbre bronchique gauche est constitué de la bronche souche sur 4 à 5 cm qui se divise en lobaire supérieure et lobaire inférieure qui poursuit son axe. L’arbre trachéobronchique est revêtu d’une muqueuse pâle et nacrée [9]. L’exploration endoscopique des branches de subdivision bronchique n’est possible qu’avec le bronchoscope souple.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1 HISTORIQUE
2 RAPPELS ANATOMIQUES
2.1 ANATOMIE ENDOSCOPIQUE
2.1.1 Le larynx
2.1.2 La trachée
2.1.3 Les bronches
3 RAPPELS PHYSIOPATHOLOGIQUES
3.1 RAPPELS PHYSIOLOGIQUES
3.1.1 Physiologie du larynx
3.1.2 Physiologie de la trachée
3.1.3 Physiologie des bronches
3.2 PHYSIOPATHOLOGIE
4 DIAGNOSTIQUE
4.1 DIAGNOSTIC POSITIF
4.1.1 Symptomatologie Clinique
4.1.2 Examens Paracliniques
4.1.2.1 Radiographie
4.1.2.2 Scanner
4.1.2.3 Endoscopie
4.2 DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
5 TRAITEMENT
5.1 BUTS
5.2 MOYENS
5.2.1 Manœuvre de Heimlich
5.2.2 Moyens Médicaux
5.2.3 Moyens Endoscopiques
5.2.3.1 Extraction endoscopique
5.2.3.1.1 Le Matériel endoscopique
5.2.3.1.1.1 Les endoscopes
5.2.3.1.1.2 Les optiques
5.2.3.1.1.3 Les pinces
5.2.3.1.1.4 Autres instruments
5.2.3.1.2 L’équipe d’endoscopie
5.2.3.1.3 L’anesthésie
5.2.3.1.4 Extraction
5.2.3.1.4.1 Position du patient et de l’opérateur
5.2.3.1.4.2 Extraction proprement dite
5.2.3.1.5 Complications de l’endoscopie
5.2.4 Moyens Chirurgicaux
5.2.4.1 La trachéotomie
5.2.4.2 La thoracotomie
5.3 INDICATIONS
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
1 CADRE D’ETUDE
2 PATIENTS ET METHODES
2.1 Type et Période d’Étude
2.2 Population étudiée
2.3 Critères d’inclusion et de non inclusion
2.4 Collecte des données et paramètres étudiés
3 OBSERVATIONS
3.1 Observation 1
3.2 Observation 2
3.3 Observation 3
3.4 Observation 4
3.5 Observation 5
3.6 Observation 6
3.7 Observation 7
3.8 Observation 8
3.9 Observation 9
3.10 Observation 10
4 DISCUSSION
4.1 ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES
4.1.1 Âge
4.1.2 Nature et Type des CE
4.2 ASPECTS CLINIQUES
4.2.1 Délai d’Admission
4.2.2 Circonstances de découverte
4.2.3 Examen Physique
4.3 ASPECTS PARACLINIQUES
4.4 SIÈGE DU CE
4.5 ASPECTS THÉRAPEUTIQUES
4.5.1 Endoscopie
4.5.2 Trachéotomie
4.5.3 Thoracotomie
4.6 MORTALITE
4.7 PREVENTION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE