Convergence et divergence entre les parties prenantes
Une combinaison d’approches
Tel que suggéré par Teitelbaum et al. (2006), nous avons décidé de combiner les méthodes quantitatives et qualitatives puisque nous avions à intervenir à la fois avec une population et des individus. Bien que les méthodes quantitatives et qualitatives soient souvent abordées de manière opposée, idéologiquement et méthodologiquement, elles sont complémentaires en raison de leurs avantages respectifs (Gilles et Maranda, 1994). Les méthodes qualitatives permettent d’acquérir une richesse d’informations, ce qui facilite la compréhension (Beckley et al., 1999). Il existe diverses méthodes d’enquêtes qualitatives, mais dans le contexte de l’étude de cas, l’entrevue individuelle et le groupe de discussion étaient préférables. La technique de l’entrevue permet de faire interagir le chercheur et le répondant, ce qui permet d’approfondir la compréhension des réponses (Gauthier, 2003). Le groupe de discussion se différencie des autres techniques en raison de l’interaction qu’il crée entre les participants générant de l’information inattendue qui aurait été autrement inaccessible (Duchesne et Haegel, 2005). En effet, la synergie qui se crée permet aux membres du groupe de réagir aux interventions de chacun et d’introduire des éléments n’ayant pas été anticipés par l’équipe de recherche (Stewart et Shamdasani, 1990). Il s’agit d’un bon outil pour investiguer sur des thématiques qui ne sont pas communes à tous, tels que l’aménagement forestier et les valeurs qui y sont rattachées (Yelle, 2012).
Quant aux techniques d’enquête quantitatives, le sondage ou les questionnaires comprenant des échelles d’attitude ou de jugement sont les outils les plus souvent utilisés dans les enquêtes sociales (Beckley et al., 1999). Les enquêtes téléphoniques et postales ont longtemps été utilisées pour sonder l’opinion et les habitudes de citoyens à des échelles nationales ou plus locales (Smyth et al., 2010). Depuis le début des années 1990, l’utilisation des sondages Internet a gagné en popularité, notamment en raison de leurs faibles coûts de réalisation et de rapides changements culturels et technologiques (Dillman et al., 2008). Les méthodes quantitatives sont préférables lorsqu’on vise à définir une population au moyen d’un échantillon, comme dans le cas des enquêtes réalisée à une échelle régionale ou nationale (McFarlane et Boxall, 2000a). Rappelons que dans le cadre de cette étude, nous utilisons les termes valeurs et attentes afin d’englober l’expression « valeurs, attitudes et croyances » (traduction de l’anglais) dont plusieurs études font l’utilisation (Beckley, 1999; Moyer et al., 2010; Whittaker et al., 2006).
Cette terminologie s’inscrit dans le cadre conceptuel de la hiérarchie cognitive. Cette théorie soutient que les valeurs sont des idées culturelles reflétant les objectifs transcendant des situations ou des problématiques (Rokeach, 1973). Elles établissent un standard permettant d’évaluer les décisions et de comprendre les comportements d’un individu ou d’une société (Dietz et al. 2005; Rokeach 1973). Autrement dit, les croyances générales ou bien les valeurs forestières influencent les attitudes plus précises telles que les attentes par rapport à la gestion forestière (McFarlane et Boxall, 2000b). Si « les valeurs représentent les convictions fondamentales d’un individu; elles sont relativement peu susceptibles de changer et jouent un rôle important dans la vie de l’individu et dans les choix qu’il fait », une attente est une forte croyance quant à l’occurrence éventuelle d’un événement ou d’une situation (Mendelsohn et Brent, 2001 dans Roy, 2008).
Parties prenantes
L’identification des parties prenantes impliquées dans le territoire d’étude a structuré nos choix méthodologiques. Une approche fondée sur la nature des parties prenantes est d’autant plus intéressante qu’elle permet de mieux circonscrire la dynamique entre les groupes sociaux, et les relations politiques et économiques qui existent entre eux (Beckley et al., 1999). Dans un contexte de gestion d’une forêt publique comme le sont les terres du domaine de l’État, l’enquête auprès de l’ensemble de la communauté est incontournable, puisque l’objet des décisions est un bien commun. La définition du public n’est certes pas simple. La notion de communauté a été abordée dans de nombreuses études sociales portant sur l’opinion publique en matière de gestion forestière au Canada (Blake et al., 1997; McFarlane et Boxall 2000a; McFarlane et Boxall 2000b dans Tindall, 2003). Certaines de ces études la définissent selon une notion de proximité géographique (Marc, 1996; B.C. Ministry of Forests Forest Development Section Forest Practices Branch, 1997 dans Tindall 2003). Tindall propose trois dimensions du concept de communauté : 1) le partage d’un territoire; 2) l’identité collective; 3) l’intégration structurelle « structural integration » (Wellman, 1979; Wellman et Berkowitz, 1988; Wellman, 1988 dans Tindall, 2003). Cela étant dit, comme la gestion du territoire à l’étude est déléguée à la MRC de La Côte-de-Beaupré, la communauté de référence pour laquelle les décideurs municipaux sont redevables a servi pour à définir notre première partie prenante, soit la population des municipalités composant cette MRC.
Sondage de la communauté
En juin 2013, 11 000 invitations présentant les objectifs généraux de l’étude et invitant la communauté de la MRC à visiter le site web du sondage (Eval&Go, 2014) ont été envoyées par le biais des publisacs. Selon les statistiques de Publisac (Publisac, 2014), 83% de la population québécoise consultent ce média à raison d’une ou plusieurs fois par semaine. Entre juin et octobre 2013, 73 citoyens ont participé au sondage en ligne (tableau 1). La marge d’erreur du sondage est de 9,5% pour un niveau de confiance de 90%. En raison de cette marge d’erreur, une prudence sera de mise pour l’interprétation des résultats. Dans l’échantillon obtenu, plus de 25% des répondants font partie du groupe d’âge 25-44 ans. D’ailleurs, selon le portrait socio-économiques disponible sur le site web de la MRC de La Côte-de-Beaupré, dont les données datent de 2006, 28,77% de la population se situent en 35 et 44 ans (MRC de La Côte-de-Beaupré, 2015). Sur la plan de la scolarisation, l’échantillon du sondage est composé à 32,88% de répondants ayant complété des études collégiales alors que moins de 20% de la population de la MRC a atteint ce niveau de scolarité. Les diplômes d’école de métiers représentent près de 25% de la population, mais ne constituaient malheureusement pas un choix de réponse dans notre sondage. Il est intéressant d’observer que près de 15% de la population de la MRC est sans diplôme, alors qu’aucun répondant ne se retrouve dans cette catégorie.
Le sondage a été développé afin de connaître les valeurs forestières des répondants et leurs attentes vis-à-vis du développement du TNO Sault-au-Cochon (Annexe 1). Le sondage portait sur différentes thématiques, mais nous nous sommes attardés sur uniquement trois d’entre elles : l’imaginaire forestier, les valeurs forestières et les attentes des répondants vis-à-vis du développement du TNO Sault-au-Cochon. Ces derniers devaient d’abord exprimer la représentation qu’ils se font de la forêt en sélectionnant divers éléments de réponse inspirés de l’enquête de Roy (2008). Les répondants devaient classer par ordre d’importance six catégories de valeurs forestières : 1) économiques, 2) environnementales et écologiques, 3) spirituelle et traditionnelles, 4) récréative, 5) éducationnelles et 6) esthétiques. Ces catégories proviennent d’une sélection des valeurs les plus utilisées dans diverses études (Lee et Kant 2006; Tindall 2003; Manning et al. 1999; Bengston et al. 1999). En cela, nous avons suivi l’exemple des travaux de Roy (2008). Afin de connaître les attentes des répondants, ces derniers devaient sélectionner des types de développements potentiels. Par exemple, un secteur de chasse et pêche, une zone de conservation, un site de villégiature, etc. Finalement, les répondants devaient inscrire leur groupe d’âge, leur niveau de scolarité, leur lieu de résidence et leur niveau de connaissance quant à la foresterie de manière générale.
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Table des matières
Résumé
Table des matières
Liste des tableaux
Liste des figures
Remerciements
Introduction
Foresterie communautaire
Acquisition de connaissances sur les valeurs forestières et les attentes
Approche de recherche
Méthodologie
Territoire d’étude
Cadre méthodologique
Résultats
La population générale
Les utilisateurs
Les gestionnaires
Convergence et divergence entre les parties prenantes
Discussion
Conclusion
Bibliographie
Annexe 1: Sondage
Annexe 2 : Dendrogramme résultant de l’analyse de regroupement
Annexe 3 : Catégorisation du contenu (groupe de discussion)
Annexe 4 : Catégorisation du contenu (entrevues individuelles)
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