Contrôle et mise en forme des fronts de phase et d’énergie d’impulsions brèves ultra-intenses

Le Laser X

   La physique des lasers émettant dans la gamme de longueur d’onde X-UV est une science relativement récente puisque la première démonstration expérimentale date de 1985 [2.1]. La structure d’un laser X pompé par laser possède de nombreuses spécificités vis-à-vis des autres systèmes lasers. Il se trouve notamment qu’aucun d’entre eux ne fonctionne avec une cavité, en raison de la trop faible durée de l’inversion de population (typiquement inférieure à 200 ps). Ce qui est particulièrement spécifique aux lasers X est la nature du milieu amplificateur qui est un plasma d’ions multichargés. Dans le cas qui nous intéresse, le plasma est produit par la focalisation en ligne d’un laser de forte puissance (de l’ordre du térawatt) sur une cible solide. Le plasma est produit quasi-instantanément puis est chauffé par absorption du laser par les électrons libres. Durant et après l’interaction avec le laser incident, le plasma s’ionise par collisions entre les électrons libres et les ions le constituant (d’où l’emploi du néologisme « collisionnel » pour qualifier ce type de laser X). De manière très simplifiée, le schéma collisionnel peut-être décrit comme un laser à trois niveaux (figure I2a). Le fondamental sert de réservoir. Le niveau supérieur est peuplé à partir du fondamental par collisions entre les électrons libres du plasma et les ions dits lasants, tandis que la désexcitation radiative vers le fondamental est interdite : ce niveau est métastable. Le niveau inférieur se désexcite vers le fondamental par une transition dipolaire électrique permise garantissant qu’il se vide plus vite que le niveau supérieur.

Configurations de pompage du milieu amplificateur

   Environ 500 ps après la création de la colonne de plasma, les conditions sont réunies pour procéder à l’inversion de population. L’impulsion brève du pompage hybride emprunte alors le même système de focalisation que l’impulsion longue afin de déposer l’énergie nécessaire sur toute la longueur de la colonne, c’est-à-dire le long de la ligne focale. Considérons l’une des extrémités de la colonne de plasma (figure I2a). Dans un premier temps une radiation X est générée par émission spontanée distribuée de manière isotrope dans l’espace. Puis, seuls les photons X se propageant colinéairement au milieu à gain sont amplifiés par émission stimulée, permettant ainsi d’obtenir une émission laser X intense unidirectionnelle.

Le système de focalisation

   Comme précisé au chapitre précédent, l’obtention d’un gain élevé sur une grande distance impose la création d’un plasma allongé ; typiquement 100 µm par 1 à 2 cm. Il convient donc de focaliser le laser sur une ligne ayant ces caractéristiques géométriques pour créer la colonne de plasma (cf. chapitre I2). Ce type de focalisation peut être introduit par un système optique présentant de l’astigmatisme. Ce cas se présente dès que l’axe du système focalisant n’est pas parallèle à la direction du faisceau incident. Le système le plus simple pour focaliser un faisceau ultra-intense tel que celui délivré par la chaîne 100 TW du LULI est un miroir parabolique. L’astigmatisme peut donc, a priori, être obtenu en inclinant l’axe de la parabole par rapport au faisceau incident. Cependant cette solution ne peut être retenue en raison des autres aberrations géométriques (notamment aberration sphérique et coma) limitant sérieusement la focalisation sur une ligne. C’est pourquoi le système de focalisation retenu repose sur l’utilisation couplée d’un miroir parabolique et d’un miroir sphérique (figure I3a) [3.1] [3.2]. Un tel système optique constitué uniquement de miroirs est dit catoptrique. Notons qu’un système dioptrique (n’utilisant que des optiques en transmission) est à proscrire lorsqu’il s’agit de focaliser des impulsions intenses. En effet, les qualités spatiales et temporelles de celles-ci se dégradent lors de la traversée des matériaux constituant ces lentilles. Ce phénomène est expliqué dans la seconde partie de ce mémoire. La figure I3a représente une coupe du système de focalisation dans un plan P qualifié de tangentiel car il inclut les rayons tangentiels du faisceau incident qui se focalisent sur le point focal tangentiel Ft de ce système générant de l’astigmatisme. Ces rayons sont repérés par leur abscisse x ; trois d’entre eux sont représentés : le rayon central (x = 0) et les rayons tangentiels extrêmes (x = ± 43,5 mm ; le diamètre du faisceau étant pris égal à 87 mm).

Obtention d’un réseau équivalent à l’aide d’un compresseur à réseaux

   Il vient donc d’être démontré que les impulsions inhomogènes recherchées peuvent être engendrées à l’aide d’un disperseur optique tel qu’un réseau ou un prisme. Lorsque la dimension du faisceau polychromatique est grande devant l’élargissement dû à la dispersion angulaire, l’impulsion se propage dans la direction de la fréquence moyenne et son amplitude subit un retard transverse créant ainsi l’impulsion inhomogène recherchée. Cependant la localisation du réseau n’est pas quelconque. En effet la propagation après ce disperseur est accompagnée d’un étirement temporel de l’impulsion. Le faisceau focalisé ne sera bien comprimé temporellement que si l’image du disperseur (c’est-à-dire de plan de compression) à travers le système optique de focalisation est confondue avec la ligne focale sagittale (cf. figure I3a). Les paramètres du réseau dispersif sont alors totalement imposés par la géométrie du système de focalisation. Cette technique a été utilisée notamment au Rutherford Appleton Laboratory [1.16]. Le flux en sortie de la chaîne CPA de ce laboratoire étant trop important, le réseau additionnel était localisé au milieu de la chaîne amplificatrice, rendant son imagerie encore moins souple. Par ailleurs, la dispersion angulaire spectrale de l’impulsion inhomogène ainsi créée a nécessité un élargissement des trous de filtrage spatial (cf. § II41) de la chaîne diminuant ainsi l’efficacité des filtres spatiaux. Une autre technique offrant plus de souplesse apparaît donc souhaitable.

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Table des matières

Première Partie Génération et mise en forme d’impulsions inhomogènes
I.1 INTRODUCTION 
I.2 LE LASER X 
I.2.1 Introduction 
I.2.2 Le milieu amplificateur 
I.2.3 Configurations de pompage du milieu amplificateur 
I.2.3.1 Pompage transverse par impulsion homogène
I.2.3.2 Pompage incliné par impulsion homogène
I.2.3.3 Pompage transverse par impulsion inhomogène
I.3 LE SYSTEME DE FOCALISATION 
I.4 GENERATION D’UNE ONDE INHOMOGENE 
I.4.1 Introduction 
I.4.2 Action d’un réseau sur une onde plane et sur un paquet d’ondes planes 
I.4.2.1 Effet dispersif d’un réseau
I.4.2.2 Interprétation des différents termes
I.4.2.3 Plans équi-amplitudes et plan de compression d’une impulsion diffractée par un réseau de diffraction
I.4.3 Obtention d’un réseau équivalent à l’aide d’un compresseur à réseaux 
I.4.3.1 Déphasage introduit par le compresseur à réseaux
I.4.3.2 Equations des surfaces équi-amplitudes
I.4.3.3 Comportement du paquet d’ondes formant l’impulsion inhomogène
I.4.3.4 Equation du plan de compression (réseau équivalent)
I.4.3.5 Durée de l’impulsion
I.4.3.6 Validité du modèle
I.5 L’EXPERIENCE LASER X
I.5.1 Introduction 
I.5.2 Le schéma expérimental 
I.5.3 Configuration expérimentale du compresseur
I.5.3.1 Choix de l’angle de l’impulsion inhomogène
I.5.3.2 Plan de meilleure compression
I.6 CONCLUSION
Références de la première parti
Seconde Partie Contrôle et mise en forme de la phase spatiale d’impulsions brèves ultra-intenses
II.1 INTRODUCTION 
II.2 PRESENTATION DE LA CHAINE 100 TW DU LULI 
II.3 MESURE DE LA PHASE 
II.3.1 Introduction
II.3.2 Contraintes liées aux impulsions femtosecondes
II.3.2.1 Différence de chemin optique et achromaticité
II.3.2.2 Dynamique et résolution de mesure
II.3.3 Les senseurs de phase
II.3.3.1 Le Hartmann-Shack
II.3.3.1.1 Principe
II.3.3.1.2 Avantages et limitations
II.3.3.2 Le Hartmann à matrice active
II.3.3.3 L’interférométrie « à référence »
II.3.3.3.1 Principe
II.3.3.3.2 Exemple appliqué à une impulsion TW-fs
II.3.3.3.3 Avantages et limitations
II.3.3.4 Interférométrie à décalage
II.3.3.4.1 Principe
II.3.3.4.2 Exemple: la lame de shearing
II.3.3.4.3 Avantages et limitations
II.3.4 L’interféromètre à décalage tri-latéral
II.3.4.1 Introduction
II.3.4.2 Modélisation de l’interférogramme
II.3.4.3 Spectre de l’interférogramme
II.3.4.4 L’algorithme
II.3.4.5 Le réseau de diffraction
II.3.4.6 La sélection des ordres
II.3.4.6.1 Limitation de la bande spectrale utile
II.3.4.6.2 Limitation de la dynamique longitudinale par filtrage spatial
II.3.4.6.3 Grandissement et échantillonnage
II.3.4.7 Le capteur CCD
II.3.4.8 Calibration
II.3.4.9 Mode opératoire
II.3.4.9.1 Mesure en mode relatif
II.3.4.9.2 Mesure en mode absolu
II.3.5 Distorsions de phase sur les chaînes CPA
II.3.5.1 Introduction
II.3.5.2 Distorsions de phase d’origine thermique
II.3.5.2.1 Introduction
II.3.5.2.2 Distorsions thermiques sur le laser T3 du CUOS
II.3.5.2.3 Distorsions d’origine thermique sur la chaîne 100 TW du LULI
II.3.5.3 Autofocalisation d’un faisceau intense
II.3.5.3.1 Introduction
II.3.5.3.2 Mesure de l’indice non linéaire du verre avec l’IDTLA
II.3.5.3.3 Distorsions de phase d’un laser TW utilisant le saphir dopé au titane
II.3.5.4 Distorsions de phase statiques
II.4 MISE EN FORME DE LA PHASE 
II.4.1 Le filtrage spatial
II.4.2 Les miroirs déformables
II.4.3 Les modulateurs à cristaux liquides
II.4.3.1 Les modulateurs à adressage électrique
II.4.3.2 Les modulateurs à adressage optique
II.4.4 Adressage optique par modulation d’éclairement
II.5 LA BOUCLE D’ASSERVISSEMENT 
II.5.1 Aspect temporel de la commande
II.5.2 Aspect spatial de la commande
II.5.3 Validation de la technique de correction
II.5.4 Correction de la surface d’onde de la chaîne 100 TW du LULI
II.6 CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES 
Références de la seconde partie

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