Introduction aux puissances pulsées
L’appellation « puissances pulsées » (sous entendu électriques) est un terme générique qui recouvre de nombreux aspects dont nous ne traiterons qu’une petite partie dans ce travail. On peut considérer que les puissances pulsées sont une technique qui utilise des décharges électriques pour concentrer, dans des temps très courts, de l’énergie électrique stockée préalablement. Deux premiers aspects résultent de cette pseudo définition :
• l’aspect génération des puissances pulsées,
• l’aspect utilisation.
Les problèmes liés à la génération des puissances pulsées sont multiples et de grande actualité mais nous ne les développerons pas ici, bien que ce soit une des préoccupations essentielles du laboratoire [LAC 96, RIV 97, PEC 01]. Les puissances pulsées peuvent être obtenues avec de forts courants et/ou de fortes tensions. Il existe, notamment pour les forts courants, toute une gamme de générateurs réalisés, le plus souvent, à partir de semiconducteurs de puissance (thyristors, IGBT, GTO…). Le domaine des hautes tensions est moins classique mais on trouve, néanmoins, un certain nombre d’architectures permettant de générer de tels signaux : transformateurs à lignes, de Tesla, générateurs de Marx… Le problème essentiel de ces générateurs réside, le plus souvent, dans les performances des commutateurs qui y sont associés : ce sont eux qui conditionnent les performances du générateur par « compression » du temps de restitution de l’énergie électrique stockée conduisant à l’amplification en puissance souhaitée. En effet, le commutateur idéal, susceptible de transmettre une centaine de kilo ampères sous des tensions atteignant la centaine de kilovolts avec des fronts rapides de montée de l’impulsion, suffisamment répétitif et présentant un jitter faible, n’existe actuellement pas. On travaille donc sur la base de compromis imposés par l’application considérée.
Les domaines d’applications des puissances pulsées sont également multiples ; on peut les classer en trois grandes catégories :
• les applications dans le domaine des lasers, des rayons X et des microondes (laser mega-joule, synchroton soleil, radars, brouilleurs …),
• les applications pour des moyens d’essais spécifiques (tests foudre, CEM, lanceurs électriques…),
• les applications civiles « tout public » : dépollution, traitement de surface, recyclage, magnétoformage, …
C’est ce dernier type d’applications que nous allons détailler puisque le sujet de cette thèse en fait partie. D’un point de vue tout à fait général, l’injection très brutale d’énergie électrique dans des milieux crée des phases de déséquilibre des propriétés physiques, biologiques ou chimiques qui peuvent présenter des caractéristiques très intéressantes. En effet, les décharges électriques peuvent produire, très soudainement, des effets thermiques, des effets photoniques, des effets de chocs ou faire apparaître des radicaux libres qui rendent les milieux très réactifs. Les applications civiles qui en découlent sont multiples, par exemple en ce qui concerne la dépollution :
• traitement des gaz : NOx, SOx, gaz d’échappement de moteurs classiques ou diesel, dépoussiérage de fumées, …,
• traitement des liquides : débactérisation, pasteurisation à froid, extraction de composés cellulaires, floculation de boues, …,
• traitement des solides : séparation puis concassage de déchets, réduction en poudre de produits, écroutage de béton, frittage de céramiques…
Champs électriques pulsés en agro-alimentaire
La demande actuelle des consommateurs s’oriente, de plus en plus, vers des produits alimentaires ayant les caractéristiques suivantes :
• produits aussi proches que possible des produits frais,
• produits rapides à préparer,
• durée de conservation relativement longue.
Pour répondre à cette préoccupation, les industriels du secteur utilisent actuellement, principalement, des procédés thermiques, dont les inconvénients sont connus et significatifs :
• dégradation des propriétés sensorielles,
• perte de certaines propriétés nutritionnelles,
• altération irréversible de la fonctionnalité de certaines molécules.
Ces inconvénients entraînent des différences qualitatives importantes entre les produits frais et les produits conservables. En réponse à cette antinomie entre qualité et conservabilité, apparaissent actuellement des traitements alternatifs non thermiques. Il s’agit, essentiellement, de techniques mettant en jeu des hautes pressions, de la lumière pulsée (principalement de l’ultraviolet) ou des champs électriques pulsés. Ces nouvelles technologies font aujourd’hui l’objet de nombreuses recherches, à la fois fondamentales et appliquées. Parmi ces technologies, seules émergeront celles répondant aux souhaits des consommateurs et présentant les caractéristiques suivantes :
• souplesse d’utilisation (facilité de mise en œuvre, capacité à traiter différents produits …),
• coûts d’investissement et d’exploitation raisonnables,
• sécurité et reproductibilité du traitement.
Parmi ces techniques, celles mettant en jeu les champs électriques pulsés font partie des préocupations du LGE et nous allons en développer quelques aspects. La technique des champs électriques pulsés (« Pulsed Electric Fields » ou PEF) semble répondre de manière satisfaisante, et à un coût raisonnable, aux besoins évoqués précédemment. Les principales applications concernent l’extraction de métabolites ou de composés cellulaires (pigments, jus, …) et la réduction de la contamination bactérienne pour augmenter la durée de vie des denrées alimentaires.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1. AU SUJET DES PUISSANCES PULSÉES
1.1. INTRODUCTION AUX PUISSANCES PULSÉES
1.2. LA TECHNOLOGIE DES PUISSANCES PULSÉES
1.3. CHAMPS ÉLECTRIQUES PULSÉS EN AGRO-ALIMENTAIRE
1.3.1. INTRODUCTION
1.3.2. PRINCIPE DE L’ÉLECTROPORATION
1.3.3. EFFETS DES CHAMPS ÉLECTRIQUES PULSÉS SUR LES CELLULES BIOLOGIQUES
1.3.3.1. Bactéries sous forme végétative
1.3.3.2. Spores
1.3.3.3. Cellules végétales ou animales
1.3.4. APPLICATIONS INDUSTRIELLES DES CHAMPS ÉLECTRIQUES PULSÉS
1.3.4.1. Extraction de composés cellulaires
a. Extraction de pigments
b. Extraction de jus
1.3.4.2. Traitement de préservation des denrées alimentaires
a. Destruction de la flore naturelle du lait frais
b. Destruction des bactéries pathogènes
1.3.4.3. Applications diverses
1.4. TRAITEMENT PAR EFFET COURONNE ET PAR ÉLECTROFILTRES
1.4.1. INTRODUCTION
1.4.1.1. L’effet couronne
1.4.1.2. Les impulsions de Trichel
1.4.2. LES FILTRES ÉLECTROSTATIQUES
1.4.2.1. Principe des filtres électrostatiques (électrofiltres)
1.4.2.2. Description du phénomène électrostatique
1.4.2.3. Applications relatives aux électrofiltres
a. Le projet IRIS du CEA
b. Filtres à particules
1.4.3. TRAITEMENT PAR DÉCHARGES COURONNES
1.4.3.1. Dépollution des effluents gazeux par décharges couronnes
a. Position du problème
b. Principe du traitement des gaz par décharges couronnes
c. Applications des décharges couronnes dans les gaz
1.4.3.2. Traitement des liquides par décharges électriques
a. Principe
b. Applications
1.5. TRAITEMENT PAR ONDE DE CHOC…
1.5.1. DESTRUCTION ET SÉPARATION DE MATIÈRE PAR LA MÉTHODE PBT
1.5.1.1. Motivations
1.5.1.2. Principe délocalisé
1.5.1.3. Principe localisé
1.5.2. APPLICATIONS DIVERSES
1.5.2.1. Pulvérisation de matériaux par les méthodes directe ou indirecte (EDPou EHDP)
1.5.2.2. Réduction de minéraux par la méthode directe ou EDP
1.5.2.3. Ecroûtage de matériaux par les méthodes EHDP ou EDP
1.5.2.4. Traitement des eaux par la méthode PBT
1.6. CONCLUSION DU CHAPITRE
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES DISPOSITIFS EXPÉRIMENTAUX
2.1. MISE EN PLACE DU DÉMONSTRATEUR INDUSTRIEL
2.1.1. GÉNÉRALITÉS ET CONTRAINTES
2.1.2. FARADISATION ET INSONORISATION
2.1.3. CONDENSATEURS ET ALIMENTATION
2.1.4. CUVE D’ESSAIS ET ÉLECTRODES DE DÉCHARGE
2.1.5. MESURES DE TENSION ET DE COURANT
2.1.5.1. Mesures de tension
a. Diviseur résistif
b. Diviseur capacitif
c. Diviseur compensé
2.1.5.2. Mesures de courant
2.1.6. SÉCURITÉ DU DÉMONSTRATEUR
2.1.7. AUTOMATISATION DU DÉMONSTRATEUR
2.1.7.1. Principe retenu
2.1.7.2. Mise en œuvre de l’automatisation
a. Partie commande
b. Processus à commander
c. Chronologie d’une séquence type
2.2. DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL DU BANC À FAIBLE ÉNERGIE
2.2.1. MONTAGE EXPÉRIMENTAL
2.2.2. GÉNÉRATEURS HAUTE TENSION
2.2.3. MESURES ÉLECTRIQUES
2.2.3.1. Mesures de tension
2.2.3.2. Mesures de courant
2.2.3.3. Mesures de température
2.2.4. MESURES OPTIQUES
2.2.4.1. Lumière directe
a. Les photomultiplicateurs
b. Le convertisseur d’images
2.2.4.2. Lumière indirecte : le strioscope
a. Principe de fonctionnement
b. Le strioscope du LGE
2.3. CONCLUSION DU CHAPITRE
CHAPITRE 3. ÉTUDE DE LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS L’EAU
3.1. PRÉSENTATION DU PROBLÈME
3.2. CONFIGURATION DES ESSAIS
3.2.1. DISPOSITIF EXPERIMENTAL
3.2.2. DÉCLENCHEMENT ET SYNCHRONISATION
3.3. DÉCHARGES SUBSONIQUES
3.3.1. PREMIÈRE APPROCHE
3.3.2. ETUDE DÉTAILLÉE DE LA CHRONOLOGIE EN POSITIF
3.3.2.1. Les enregistrements strioscopiques
3.3.2.2. Etude de l’apparition des bulles et de la lumière
3.3.2.3. Analyse d’un claquage
3.3.2.4. Analyse complète d’une tenue
3.3.2.5. Etude de la décharge lors d’une tenue, en lumière émise
3.3.2.6. Analyse de la phase post-arc
3.3.3. ÉTUDE ÉLECTROTECHNIQUE
3.3.3.1. Mesures du courant
3.3.3.2. Définition du paramètre U50
3.3.3.3. Reproductibilité des mesures de U50
a. Influence de la température q sur U 50
b. Influence de la conductivité s sur U 50
c. Influence de la hauteur d’eau h sur U 50
3.3.3.4. Étude de U50
a. Influence de la pression P sur U 50
b. Influence de l’homogénéité du champ électrique sur U 50
3.4. DÉCHARGES SUPERSONIQUES
3.4.1. INTRODUCTION
3.4.2. CONFIGURATION DES ESSAIS
3.4.3. PHÉNOMÉNOLOGIE
3.4.3.1. Première approche
3.4.3.2. Développement de la décharge
a. Propagation de la décharge dans l’eau du robinet
b. Propagation de la décharge dans l’eau distillée
c. Analyse complète d’une tenue
3.4.4. COMPARAISON ENTRE LE MODE SUBSONIQUE ET LE MODE SUPERSONIQUE
3.4.4.1. Transition entre le mode subsonique et supersonique
a. Fonctionnement en surtension
b. Etude de la transition
3.4.4.2. Initiation des décharges supersoniques
3.4.4.3. Influence des gaz occlus
3.4.4.4. Influence de la pression
3.4.4.5. Discussion et conclusion
CONCLUSION
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