Contribution a l’etude du debit de filtration glomerulaire (dfg) au cours du diabete

Le diabète constitue un véritable problème de santé publique. C’est un « tueur silencieux ».Il tue non pas de lui-même mais par les complications qu’il entraîne au fur et à mesure de son évolution. Les complications qui découlent du diabète sont nombreuses, diverses et variées. Nous en retiendrons deux qui nous intéressent essentiellement : la microangiopathie et la macroangiopathie.

Parmi les complications microangiopathiques on note la néphropathie. Celle-ci se traduit par une modification histologique de la membrane glomérulaire rénale caractérisée par la présence d’albumine dans les urines. Toutefois, l’albumine peut être présente à des concentrations si faibles, qu’elle ne pourrait être détectée par les méthodes utilisées en routine (bandelettes réactives ou techniques colorimétriques). Ces taux d’albumine définissent la micro ou la pauci-albuminurie. Marqueur de la néphropathie diabétique débutante réversible avec un bon contrôle glycémique, la microalbuminurie au même titre que les triglycérides, le cholestérol et ses différentes fractions sériques constitue également chez le sujet diabétique un marqueur de risque cardiovasculaire.

A côté de la microalbuminurie le débit de filtration glomérulaire est aussi un marqueur de la néphropathie au cours du diabète. Le débit de filtration glomérulaire est défini par la quantité de sang qui traverse le glomérule par unité de temps. C’est par ailleurs la clairance d’une substance plasmatique filtrée au niveau du glomérule et totalement excrétée dans les urines sans avoir au préalable été réabsorbée ou sécrétée le long du tubule rénal. Le débit de filtration glomérulaire est déterminé par :

-la clairance rénale de certaines substances exogènes comme des polysaccharides (inuline, sinistrine…) ou des substances radioactives (EDTA51Cr, DTPA99Tc…). Ce sont les méthodes de référence mais elles sont coûteuses et de mise en œuvre très lourde.
-la clairance rénale de certaines substances endogènes comme la créatinine… Cette méthode n’est pas coûteuse et elle est facile à mettre en œuvre. Elle nécessite un dosage de la créatinine non seulement dans le sérum mais aussi dans les urines. Etant donné que le recueil des urines pour la détermination de la clairance rénale de la créatinine pose beaucoup de problèmes, des formules ont été élaborées pour estimer le débit filtration glomérulaire. Il s’agit notamment de la formule de Cockroft et Gault, de la formule du MDRD (Modification of Diet in Renal Disease) qui a été par la suite modifiée. Face aux limites de la formule duMDRD simplifiée, celle du CKD EPI (Chronic Kidney Disease – EPIdemiology) a été récemment conçue.

Fort de ces constats, il semble pertinent d’identifier, parmi les formules de Cockroft et Gault, du MDRD simplifiée et du CKD-EPI, la mieux adaptée pour estimer le débit de filtration glomérulaire chez les sujets diabétiques de type 1 et de type 2. Il serait également intéressant de rechercher les interrelations qui existeraient entre le débit de filtration glomérulaire d’une part avec les marqueurs du contrôle glycémique (glycémie, HbA1c) et d’autre part avec les marqueurs biochimiques classiques du risque cardiovasculaire (triglycérides, cholestérol et ses différentes fractions). Les résultats obtenus pourraient sans doute aider à diagnostiquer et à prévenir la survenue des complications rénales et cardiovasculaires chez les sujets atteints de diabète.

Définition et critères diagnostiques du diabète 

Définition du diabète

Le diabète sucré est un groupe de maladies métaboliques caractérisées par une hyperglycémie chronique qui résulte d’un défaut de la sécrétion de l’insuline ou d’une anomalie de l’action de l’insuline sur ses cellules cibles ou encore de ces deux anomalies associées. Cette hyperglycémie chronique se traduit sur le plan clinique par l’apparition de symptômes cardinaux du diabète à type de polyurie, polydipsie, amaigrissement et quelques fois de polyphagie et de troubles de la vision [5].

Critères diagnostiques du diabète 

Chez un sujet dont l’homéostasie glucidique est normale, la glycémie veineuse à jeun d’au moins 8 heures se situe entre 0,70 et 1,10 g/l et l’hyperglycémie veineuse après 2 heures à la suite d’une charge orale d’au plus 75 g de glucose (HGPO-2h) doit être inférieure à 1,40 g/l. Le diagnostic de diabète est basé sur la glycémie à jeun et l’HGPO-2h. En effet, le diagnostic de diabète est retenu :
-lorsque, chez un sujet, la glycémie à jeun, sur deux jours consécutifs, reste supérieure ou égale à 1,26 g/l.
-lorsque, chez un sujet présentant des signes cliniques cardinaux du diabète, à un moment quelconque de la journée, la glycémie est supérieure ou égale à 2g/l.
-lorsque, chez un sujet, la glycémie à jeun est comprise entre 1,10 g/l et 1,26 g/l et l’HGPO2h est supérieure ou égale à 2 g/l.

D’autres anomalies de la régulation de l’homéostasie glucidique sont également définies. Elles précèdent le plus souvent l’apparition du diabète. Il s’agit notamment de l’hyperglycémie modérée à jeun et de l’intolérance au glucose. Dans l’hyperglycémie modérée à jeun, la glycémie à jeun est comprise entre 1,10 g/l et 1,26 g/l. Dans l’intolérance au glucose, l’HGPO- 2h est comprise entre 1,40 g/l et 2 g/l. Les valeurs seuil de 1,26 g/l pour la glycémie à jeun et de 2 g/l pour l’HGPO-2h sont retenues car elles correspondent aux valeurs de la glycémie à partir desquelles la rétinopathie apparait le plus souvent chez les sujets diabétiques. A ces valeurs de glycémie s’associent des valeurs d’HbA1c qui permettent d’adopter, des critères diagnostiques du diabète, en sus des critères mentionnés ci-dessus. Ainsi, lorsque les résultats de la glycémie à jeun de même que de l’HbA1c sont simultanément disponibles, le diagnostic du diabète est retenu si :
– la glycémie à jeun est supérieure ou égale à 1,26 g/l et l’HbA1c supérieure ou égale à 6,5%
– la glycémie à jeun pour une première fois est supérieure ou égale à 1,26 g/l tandis que l’HbA1c est inférieure à 6,5% et que pour une seconde fois la glycémie à jeun est supérieure ou égale à 1,26 g/l même si l’HbA1c reste inférieure à 6,5%.
– la glycémie à jeun pour une première fois est inférieure à 1,26 g/l alors que l’HbA1c est supérieure ou égale à 6,5% et que pour une seconde fois la glycémie à jeun est inférieure à 1,26 g/l mais que l’HbA1c reste supérieure à 6,5%.

Rôle de l’insuline dans l’homéostasie glucidique

Au cours d’un repas, le glucose présent dans la lumière intestinale induit la sécrétion du GLP-1(Glucagon-like peptide 1) par les cellules L du jéjunum, de l’iléon et du côlon. Avec les acides gras libres, le glucose provoque aussi la sécrétion du GIP (Glucose-dependent Insulinotropic Polypeptide) par les cellules K du duodénum. Par la production de ces incrétines (GIP, GLP-1), l’appareil digestif annonce à l’organisme l’absorption de glucose. Les cellules β du pancréas se préparent en conséquence en augmentant la biosynthèse et la sécrétion de l’insuline; ce qui doit permettre l’atténuation de la vague d’hyperglycémie postprandiale. Dans le processus d’installation du DT2, la réponse pancréatique à la stimulation des incrétines est abolie .

En période postprandiale, le glucose, à un taux élevé dans le plasma (portal), diffuse à travers la membrane plasmique et se retrouve dans le compartiment intracellulaire de la cellule β des ilots de Langerhans du pancréas. Cette diffusion du glucose est facilitée par une perméase exprimée principalement sur la membrane plasmique des cellules β du pancréas et des hépatocytes où elle contribue à l’équilibre du taux de glucose entre le compartiment extracellulaire et le compartiment intracellulaire. Cette perméase est appelée transporteur GLUT2. Elle est spécifique au glucose, non  insulinodépendante, avec une faible affinité, d’où son intervention seulement en période post-prandiale lorsque la glycémie (portale) est élevée [26]. Dans la cellule β du pancréas, le glucose est phosphorylé en glucose-6-phosphate en présence d’ATP par l’hexokinase. Cette phosphorylation, en soustrayant le glucose dès son entrée dans la cellule, maintient un gradient de concentration entre les compartiments extraet intra-cellulaires favorable à son entrée dans la cellule ; en plus, la molécule de glucose-6- phosphate chargée négativement au niveau de son groupement phosphoryle ne peut plus retraverser la membrane plasmique [26]. Cette réaction de phosphorylation du glucose est la première réaction dans la voie glycolytique d’Embden-Meyerhoff. C’est une réaction limitante de la glycolyse. Cette voie glycolytique avec le cycle tricarboxylique de Krebs produit de l’énergie sous forme d’ATP qui inhibe le canal potassique ATP-dépendant. Il s’en suit une dépolarisation de la membrane plasmique de la cellule β du pancréas ; ce qui provoque une ouverture des canaux calciques de la membrane plasmique et une entrée massive du calcium dans le compartiment intracellulaire, entraînant la libération de l’insuline dans le sang par exocytose des granules de sécrétion d’insuline [26, 38, 135]. Pour qu’une surproduction d’ATP ne bloque pas la sécrétion d’insuline, une protéine découple autant que de besoin l’expulsion du proton de la production d’ATP. La protéine découplante (UCP-2 : UnCoupling Protein type 2) est exprimée sur la membrane mitochondriale des cellules β du pancréas. Le fonctionnement inadéquat de cette UCP-2 est impliqué dans le mécanisme moléculaire du DT2 [38].

L’insuline, synthétisée et libérée dans le sang en réponse à un stimulus exercé principalement par un taux élevé de glucose dans le sang portal et accessoirement par des incrétines (GIP, GLP-1), par des acides aminés (leucine, arginine), par une augmentation de la kaliémie dans le compartiment extracellulaire, par un afflux du calcium intracellulaire, exerce son activité principalement au niveau du foie, des muscles et du tissu adipeux [38]. La fixation de l’insuline à des récepteurs spécifiques de la membrane plasmique d’une cellule cible déclenche une cascade d’évènements intracellulaires. Les récepteurs possèdent une affinité spécifique pour l’insuline ; il existe un seuil d’action et un effet de saturation des sites. Le nombre de récepteurs varie en fonction de la structure cellulaire considérée et des conditions physiologiques et pathologiques. L’affinité pour l’insuline est telle qu’elle ne nécessite pas la saturation de l’ensemble des récepteurs pour une activité maximale. L’activation de la voie signalétique persiste même si l’insuline se détache de son récepteur [135].

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Table des matières

INTRODUCTION
I. Définition et critères diagnostiques du diabète
I-1. Définition du diabète
I-2. Critères diagnostiques du diabète
II. Rôle de l’insuline dans l’homéostasie glucidique
III. Métabolisme des lipoprotéines
III-1. Chylomicrons
III-2. VLDL
III-3. LDL
III-4. HDL
IV. Définition, caractéristiques et physiopathologie du diabète de type 1
IV-1. Diabète de type 1 auto-immun
IV-2. Diabète de type 1 idiopathique
IV-3. Physiopathologie
IV-5. Profil lipidique du diabète de type 1
V. Définition, caractéristiques et physiopathologie du diabète de type 2
V-1. Définition et caractéristiques
V-2. Insulinorésistance
V-3. Dyslipidémie associée à l’insulinorésistance
VI. Physiopathologie des complications macrovasculaires au cours du diabète
VI-1. Rôle de l’hyperglycémie
VI-2. Rôle de la dyslipidémie
VI-3. Rôle de la microalbuminurie
VII. Caractéristiques et physiopathologie de la néphropathie diabétique
VII-1. Caractéristiques
VII-2. Physiopathologie
VII-3. Rôle de l’hyperglycémie chronique
VII-4. Rôle des dyslipidémies
VII-5. Rôle de la microalbuminurie
VII-6. Rôle du débit de filtration glomérulaire dans le dépistage de la néphropathie diabétique
VIII. Paramètres biologiques étudiés dans la prise en charge du diabète et de ses complications
VIII-1. Glycémie à jeun
VIII-2. Hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) après 2 heures
VIII-3. Hémoglobine glyquée (HbA1c)
VIII-4. Lipides et lipoprotéines
VIII-5. Créatinine
VIII-6. Urée
VIII-7. Acide urique
CONCLUSION

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