La baisse inéluctable des énergies fossiles et la prise en considération de plus en plus importante des risques liés à l‟émission de gaz a effet de serre sur le climat et à la pollution due aux gaz résiduels issus de la combustion des hydrocarbures et leurs conséquences sur la santé, induisent dans le monde un effort important pour développer la production d‟énergie alternative et réduire la consommation énergétique par les utilisateurs. Cet effort nécessite ainsi un usage rationnel de l‟énergie en améliorant les rendements énergétiques, par exemple, des systèmes de propulsion des véhicules hybrides et électriques.
Dans les domaines tels que le ferroviaire et l‟automobile, cette énergie transite par des modules de puissance à semi-conducteurs qui présentent d‟excellentes propriétés électriques. Depuis la découverte et l‟exploitation des composants à semi-conducteurs qui est considérée comme le début réel de l‟électronique de puissance dans les années 1λ50, la miniaturisation des systèmes électroniques à hautes performances n‟a eu de cesse de régir l‟évolution des modules dans l‟électronique de puissance. Cette tendance s‟accélère encore avec une exigence toujours plus forte en termes d‟intégration, de réduction de masse et de volume des convertisseurs d‟électronique de puissance. Cette intégration toujours plus poussée de l‟électronique de puissance induit une augmentation des densités de puissance dissipée et une plus grande difficulté de gestion de la thermique de ces convertisseurs fortement intégrés. Ces contraintes peuvent être contournées dès lors que les composants à semi-conducteur de puissance peuvent travailler à température plus élevée.
Les convertisseurs d‟électronique de puissance, et en tout premier lieu les composants et modules de puissance à semi-conducteur peuvent être soumis à de sévères contraintes environnementales, et notamment thermique. La température ambiante peut atteindre 120°C dans des applications automobiles et jusqu‟à 200°C en avionique avec de très fortes amplitudes de variation (jusqu‟à -50°C environ dans le pire des cas pour l‟aéronautique par exemple et de l‟ordre de -40°C pour l‟automobile. Les puces de puissance, sources de pertes voient leurs températures évoluer en fonction de l‟évolution de la température ambiante, mais aussi des cycles de fonctionnement liés aux profils de mission de chaque application. Les variations de température qui résultent de ces différentes contraintes sont responsables des principaux modes de défaillance et limites d‟utilisation des composants à semiconducteur. Les défaillances sont ainsi majoritairement d‟origine thermomécanique et résultent des différences de coefficients de dilatation thermique des différents matériaux utilisés dans ces assemblages.
La plupart des dégradations constatées se traduisent par une augmentation de la température, au sein du module de puissance, mais principalement et surtout au niveau de la puce ou de son environnement proche. Par exemple les dégradations proches des zones actives peuvent être liées (dégradation de la métallisation ou levée des fils de bonding) à la focalisation des lignes de courant qui entrainent l‟apparition de points chauds. L‟élévation locale de température qui en découle peut alors être responsable de phénomènes de second claquage ou d‟emballement thermique. Dans ce contexte, le recours à des outils de simulation s‟avère indispensable pour suivre et analyser le déroulement de ces processus de dégradation, mais aussi pour comprendre l‟effet de ces dégradations sur le comportement électrothermique des composants à semi-conducteurs.
Etat de l’art sur la technologie des modules MOSFET de puissance
Ces dernières années la technologie des modules de puissance n‟a cessé de se développer. En particulier, l’utilisation croissante des composants de puissance dans les domaines de l‟’automobile et de l’aéronautique demande une réduction de poids, d’encombrement et de coût, ce qui induit un besoin d‟intégration fort des dispositifs de puissance. D’autre part, ces dispositifs sont soumis à de fortes contraintes thermiques liées d‟une part à l‟environnement ambiant et dont les variations de température sont responsables de cyclage passif. L‟environnement ambiant peut imposer des températures élevées de l‟ordre de 120°C pour l’automobile ou encore 200°C en avionique. Ils sont également soumis à des variations cycliques de température de forte amplitude, dues aux pertes mises en jeu, et qui se traduisent par du cyclage actif. Ces cyclages (passif et actif) engendrent des contraintes thermomécaniques qui sont à l’origine des principales dégradations affectant les différents matériaux constituant le module de puissance, notamment les interfaces entre ces différents matériaux.
Structure des composants et modules de puissance
Les composants de puissance en silicium intègrent une ou plusieurs puces réalisant une fonction de conversion d’énergie électrique au sein d’un assemblage (convertisseurs statiques intégré à base de transistors MOS (Métal-Oxyde-Semi-conducteur) de puissance ou d‟IGBT (Insulated Gate Bipolar Transistor). Ils se différencient de leurs homologues dits de « signal » par la nécessité de supporter des tensions élevées et de conduire des courants importants. De plus, des contraintes d‟utilisation ou de montage leur sont spécifiques : celles-ci sont d‟ordre thermique, mécanique, et connectique, ou encore liée à leur encapsulation. Par ailleurs les composants de puissance sont généralement classés en composants unipolaires, comme le MOSFET, la diode Schottky, . . . (Figure I. 1.a) dans lesquels un seul type de porteurs circule dans le composant, et en composants bipolaires dans lesquels les deux types de porteurs circulent, comme dans la diode PN, le transistor bipolaire ou l‟IGBT (Figure I. 1.b). Chacun de ces types de composants présente des avantages et des inconvénients. L‟avantage des composants unipolaires est lié aux faibles pertes en commutation dont ils sont le siège et dans un fonctionnement possible en hautes fréquences. Leurs inconvénients sont liés à l‟augmentation de la résistance passante spécifique et, par là même, aux pertes en conduction avec l‟augmentation de la tenue en tension recherchée.
En ce qui concerne les composants bipolaires, les avantages et les inconvénients sont inverses par rapport aux composants unipolaires : ils présentent de faibles pertes en conduction mais de grandes pertes en commutation et cela d‟autant plus que la tension de claquage est élevée.
Un module de puissance intègre ces puces et il est constitué d‟un empilement de différents matériaux (conducteurs, semi-conducteurs et isolants) packagé dans un boitier. Parmi elles, on trouve :
❖ Une puce en silicium : qui représente l‟élément actif du composant, et qui est le transistor utilisé comme interrupteur. Sur la puce est déposée une couche de métallisation qui assure la distribution des courants dans les cellules élémentaires, l’inhibition du déclenchement de composants parasites (transistor bipolaire pour les MOSFET et thyristor pour les IGBT) et le câblage des fils de bonding.
❖ Un substrat isolant : il s‟agit d‟une céramique (généralement en Al2O3 ou AlN) métallisée sur les deux faces avec du cuivre suivant un procédé de type DCB (Direct Copper Bonded) [SCH03]. Le substrat DCB assure l‟isolation électrique et le transfert thermique entre la puce et le support.
❖ Une semelle en cuivre : qui assure le maintien mécanique de l‟ensemble et fait office de diffuseur thermique afin d‟étaler le flux de chaleur avec le refroidisseur.
❖ Des brasures : qui relient mécaniquement et électriquement la puce au substrat DCB et mécaniquement le substrat DCB à la semelle.
❖ Des fils de bonding : (en aluminium d‟un diamètre allant de 200 a 500ȝm) qui assurent l‟amenée des courants sur la puce et sur les plages de cuivre sur la partie supérieure du DCB.
❖ Un boitier et un gel en silicon : qui servent à la protection.
❖ Des connecteurs de puissance et de signal : qui véhiculent les signaux de commande des transistors et les courants de puissance.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
Chapitre I Etat de l’art sur la technologie des modules MOSFET de puissance
I.1 Introduction
I.2 Structure des composants et modules de puissance
I.3 Rappel sur les MOSFETs de puissance
I.3. 1 La structure MOS
I.3. 2 Comportement statique
I.3.2. 1 Etat bloqué
I.3.2. 2 Etat passant
I.3. 3 Comportement dynamique
I.3.3. 1 Capacités parasites
I.3.3. 2 Éléments inductifs
I.3.3. 3 Diode intrinsèque
I.3. 4 Transistor à super-jonction CoolMOS
I.3.4. 1 Présentation
I.3.4. 2 Avantages et inconvénients des transistors COOLMOS
I.3. 5 Influence de la température sur les caractéristiques d‟un MOSFET
I.3.5. 1 Mobilité des porteurs
I.3.5. 2 Concentration intrinsèque
I.3.5. 3 Résistance à l‟état passant « RDSon »
I.3.5. 4 Tension d‟avalanche
I.3.5. 5 Tension de seuil et transconductance
I. 4 Analyse thermique des composants de puissance
I.4. 1 Différents modes de transfert de la chaleur
I.4. 2 Résistance thermique
I.4. 3 Équivalence entre grandeurs électriques et grandeurs thermiques
I. 5 Phénomènes électrothermiques en électronique de puissance
I.5. 1 Couplage électrothermique dans les composants de puissance
I.5. 2 Conséquences des effets électrothermiques
I.5. 3 Constantes de temps électriques et thermiques
I. 6 Défaillance des modules MOSFETs et IGBTs
I.6. 1 Contraintes thermiques imposées aux composants de puissance
I.6. 2 Les différents modes de défaillance
I.6.2. 1 Fractures et levées des fils de bonding
I.6.2. 2 Fissurations dans la brasure
I.6.2. 3 Fractures dans la céramique
I.6.2. 4 Dégradations (reconstruction) de la couche de métallisation
I.6. 3 Indicateurs de vieillissement pour le diagnostic de composants à semi-conducteur de puissance
I.6.3. 1 Chute de tension à l’état passant
I.6.3. 2 Résistance de la métallisation (RAL)
I.6.3. 3 Résistance thermique
I. 7 Conclusion
Chapitre II : Modélisation électrothermique 2D distribuée
II. 1 Introduction
II. 2 Modélisation électrothermique 2D distribuée
II.2. 1 Méthodes de modélisation électrothermique
II.2.1. 1 Méthode directe
II.2.1. 2 Méthode de relaxation
II.2. 2 Exemples de modèles électrothermiques existants
II. 3 Présentation du modèle électrothermique 2D réalisé
II.3.1 Présentation du composant utilisé comme support pour l‟étude
II.3. 2 Discrétisation de la puce
II.3. 3 Modèle thermique
II.3.3. 1 Géométrie
II.3.3. 2 Formulation et localisation des pertes
II.3.3. 3 Conditions aux limites
II.3.3. 4 Résolution du modèle thermique
II.3. 4 Modèle électrique de la puce
II.3.4. 1 Equations du courant dans la puce
II.3.4. 2 Discrétisation de la puce
II.3.4. 3 Formulation du modèle électrique de la puce
II.3.4. 4 Paramètres électriques du modèle
II.3. 5 Modèle du circuit
II.3.5. 1 Modélisation en régime de commutation
II.3.5. 2 Modélisation en régime de conduction
II.3.5. 3 Modélisation en régime de court-circuit
II.3.5.4 Simulation du transistor en mode de commutation sans couplage électrothermique
II.3. 6 Couplage électrothermique
II.3.6. 1 Principe du couplage électrothermique
II.3.6. 2 Prise en compte des couplages électrothermiques
II. 4 Résultats des simulations électrothermiques
II.4. 1 Validation du modèle thermique
II.4.1. 1 Conditions aux limites
II.4.1. 2 Maillage de la structure simulée sous COMSOL Multiphysics
II.4.1. 3 Maillage de la structure simulée sous CAST3M
II.4.1. 4 Comparaison des résultats
II.4. 2 Régime de conduction
II.4. 3 Régime de court-circuit
II. 5 Simulation d’un état vieilli de la métallisation d’aluminium
II.5. 1 Régime établi de conduction
II.5. 2 Régime de court-circuit
II.5. 3 Comparaisons entre les résultats à l’état neuf et à l’état vieilli
II.5. 4 Conclusion sur les résultats de simulation pour une puce à l’état vieilli
II. 6 Validation du modèle électrothermique
II. 7 Conclusion
Chapitre III : Mesure et estimation de la réponse transitoire en température des puces et effet du vieillissement.
III. 1Introduction
III. 2 Mesure directe de la température d’une puce à l’aide d’une caméra IR
III.2. 1 Introduction générale sur la thermographie infrarouge
III.2. 2 Loi fondamentale du rayonnement thermique
II.2.2. 1 Luminance
II.2.2. 2 Emissivité
III.2. 3 Thermographie infrarouge pour les tests non-destructifs
III.2. 4 Mesures par thermographie infrarouge
III.2.4. 1 Chaîne radiométrique et principe de fonctionnement d‟une caméra IR
III.2.4. 2 Banc expérimental
III.2.4. 3 Temps d‟intégration
III.2. 5 Mise en œuvre d‟une méthodologie pour mesure rapide à l‟aide d‟une caméra IR
III.2.5. 1 Principe d‟acquisition de la caméra
III.2.5. 2 Méthodologie adoptée pour la mesure de la température en régime de court-circuit
III.2. 6 Techniques de traitement des images thermiques issues de la caméra IR
III.2.6. 1 Problèmes inverses
III.2.6. 2 Méthodes de déconvolution utilisées dans cette thèse
III.2. 7 Application des méthodes pseudo-inverse et de Wiener sur les résultats simulés et les résultats expérimentaux
III.2.7. 1 Simulations thermiques réalisées à l‟aide du logiciel COMSOL Multiphysics
III.2.7. 2 Application des méthodes pseudo-inverse et Wiener sur les résultats simulés
III.2.7. 3 Application de la méthode Wiener sur des résultats expérimentaux
III.2. 8 Conclusion
III. 3 Calcul de la température de jonction d’un module de puissance en connaissant la réponse impulsionnelle (RI) du système
III.3. 1 Problématique
III.3. 2 Méthode DSF (Décomposition en Série de Fourier)
III.3.2. 1 Calcul de la réponse impulsionnelle en utilisant les résultats obtenus en simulation thermique
III.3.2. 2 Calcul de la sortie du système en utilisant la fonction de transfert estimée
III.3.2. 3 Analyse des résultats des simulations
III. 4 Méthode par extraction de paramètres RC
III.4. 1 Définition des réseaux RC
III.4.1. 1 Réseau de Foster
III.4.1. 2 Réseau de Cauer
III.4. 2 Identification des paramètres RC
III.4.2. 1 Identification des paramètres RC du réseau Foster
III.4.2. 2 Illustration n°1 μ Identification à partir d‟une réponse obtenue par un modèle éléments finis d‟un assemblage simplifié [OUS13]
III.4.2. 2.1 Fonction cumulative
III.4.2. 2.2 Fonction différentielle
III.4.2. 3 Illustration n°2 : Identification à partir d‟une réponse obtenue par un modèle éléments finis d‟un assemblage d‟un module de puissance intégrant dans puces COOLMOSTM 600V
III.4. 3 Etude simulée du vieillissement d‟un module de puissance
III.4.3. 1 Effet du vieillissement de la brasure puce/DCB
III.4.3. 2 Effet du vieillissement de la brasure DCB/semelle
III.4.3. 3 Conclusion sur la partie vieillissement
III. 5 Conclusion
CONCLUSION GENERALE