Contribution à la réflexion sur les apprentissages formels et informels dans un environnement plurilingue et pluriculturel

Deux raisons principales se trouvent à l’origine du choix de ce sujet de recherche. D’un côté, l’évolution de mes parcours personnel et professionnel d’apprentissage des langues vivantes et, de l’autre côté, la recherche menée au sein de mon travail du master. Tout d’abord, il faut mentionner le caractère multiculturel et plurilingue de la société dans laquelle j’ai grandi. À la frontière avec la Serbie et la Hongrie, le Banat, ma région natale, a bénéficié de multiples contacts avec les langues étrangères, échanges justifiés surtout par les conditions historiques, économiques et sociales. Plus précisément, les langues de contact les plus représentatives qui font partie du répertoire linguistique des Banatais sont le serbe, le hongrois, l’allemand, le bulgare ou l’ukrainien.

Par « langues de contact » j’entends les langues des pays voisins et qui sont utilisées dans des échanges sociaux et économiques par les citoyens roumains. Le roumain est ma langue maternelle, la langue officielle du pays et la langue de la majorité de la population dans le Banat. La mondialisation et la situation économique et politique du pays ont favorisé ces 23 dernières années l’arrivée des entrepreneurs étrangers. La prééminence de l’anglais dans les échanges économiques a modifié le paysage plurilingue en favorisant l’usage de l’anglais. En ce qui me concerne, j’ai eu un parcours d’apprentissage langagier « complexe », intégrant les langues pratiquées dans le contexte familial et les langues apprises dans le contexte scolaire et universitaire. L’analyse de mon portfolio des langues met en avant les langues suivantes: j’ai été en contact avec le roumain, langue acquise dans l’environnement informel initial et ultérieurement dans l’environnement formel, le roumain, le serbe et l’allemand à partir de mon enfance (langues et cultures véhiculées dans l’univers familier), l’anglais et le français à l’école, dans l’environnement formel, ensuite j’ai ajouté l’espagnol et le néerlandais pendant mes années à l’université et l’italien dans un contexte étranger et informel lors de mon séjour en France. En tant qu’étudiante en France, j’ai suivi des parcours universitaires de formation centrés sur la didactique du français langue étrangère (FLE), littérature et culture britanniques et didactiques des langues, anglais de spécialité. Ce retour sur mon répertoire linguistique met en évidence au delà de sa pluralité, la diversité des contextes d’apprentissage dans lequel il a émergé, environnement informel pour le roumain, le serbe et l’allemand au cours de mon enfance et pour l’italien, environnement formel pour le roumain, l’anglais et le français. Cette réflexion m’a conduite à m’interroger sur les effets de chacun de ces environnements d’apprentissage sur les répertoires langagiers des apprenants plurilingues.

Les effets de la situation géographique et de l’évolution historique et politique de la Roumanie sur le répertoire linguistique des citoyens roumains 

Depuis une vingtaine d’années, après la chute du communisme, la Roumanie connaît des changements politiques, économiques, sociaux et culturels qui ont des conséquences majeures et multiples sur le système d’enseignement, ainsi que sur les politiques linguistiques du pays. Il faut tout d’abord préciser qu’une rupture radicale avec le système d’enseignement précédent, en vigueur avant 1989, n’était pas possible. Aujourd’hui, il existe encore de nombreuses traces des méthodes d’enseignement des langues remontant à l’époque communiste qui cohabitent avec des tentatives de réformes ayant pour objectif de s’aligner sur les politiques éducatives européennes, compte tenu de l’adhésion de la Roumanie à l’Union Européenne – le 1er janvier 2007.

Le paysage linguistique de la Roumanie se caractérise par une diversité atypique, dans le sens où la distribution des langues varie sur le territoire du pays, en fonction des spécificités historiques et géographiques des régions concernées. Même si les minorités nationales représentent à présent environ 11,4% de la population du pays, la diversité linguistique et la répartition territoriale posent un certain nombre de problèmes. Cette distribution inégale des langues a des effets sur leur apprentissage au niveau des régions. En ce qui concerne l’anglais, l’apprentissage scolaire est uniforme au niveau national mais il comporte des particularités en fonction du répertoire linguistique de la région où il se développe. Autrement dit, l’apprentissage de l’anglais dépend du statut des autres langues dans un environnement donné. Par exemple, dans le centre du pays, dans les départements où le hongrois est la langue maternelle de la majorité de la population, l’anglais devient la troisième langue vivante, après la langue maternelle et la langue officielle, à savoir le roumain. Dans les régions où le roumain est la langue maternelle de tous les habitants, l’anglais est la deuxième langue apprise. Pour résumer, on peut dire que les élèves apprennent l’anglais au cours de leur scolarité obligatoire dans l’environnement formel, mais, en ce qui concerne l’apprentissage informel de la langue, il est étroitement lié aux statuts des autres langues. L’engagement des élèves dans l’apprentissage informel de l’anglais dépend ainsi de leurs perceptions de l’importance et de l’utilité de la langue.

Il est nécessaire de préciser les liens entre cette région et le gouvernement central roumain. Du point de vue politique, l’Union du Banat avec la Roumanie a été faite à l’occasion du Grand Regroupement de Alba-Iulia le 1er décembre 1918. Les démarches administratives se sont déroulées avec des retards et des obstacles à cause de l’occupation serbe et française. Une année plus tard, l’entrée de l’armée roumaine à Timişoara, le 3 août 1919, finalise l’union avec le grand pays. La grande région du Banat a été repartie entre la Roumanie, le royaume des serbes, des croates et des slovènes : environ 2/3 revenait à la Roumanie et 1/3 au royaume serbe. À partir de la grande Union, le Banat se conformera aux politiques administratives de la Roumanie absolument dans tous les domaines.

L’étude du contexte linguistique dans lequel s’inscrit ma réflexion suppose un certain nombre de clarifications terminologique liées à la constitution roumaine. Le terme « langue officielle » apparaît dans l’article 13 de la Constitution roumaine: «En Roumanie, la langue officielle est la langue roumaine. » À ma connaissance, le terme de « langue nationale » n’est pas utilisé en droit roumain. Cette omission pourrait être expliquée par le fait que les concepts de « nationalité » et de « citoyenneté » y sont distincts. On comprend par citoyenneté « le lien et l’appartenance d’une personne physique à l’Etat roumain » (article 1 de la loi sur la citoyenneté, loi 21 du 1er mars 1991 tandis que, la nationalité est liée à l’origine ethnique. En droit roumain, la question de la protection des langues est inclue dans la problématique du statut juridique des personnes appartenant aux minorités nationales. Par conséquent, la terminologie de la Constitution et de la législation roumaine est révélatrice puisqu’elle établit une distinction entre les termes de « langue maternelle » des personnes appartenant à des minorités nationales et de « langues des minorités nationales ». Dans le premier cas, on se réfère aux individus pour lesquels la langue maternelle n’est pas le roumain mais une autre langue tandis que le deuxième cas regroupe la totalité des langues des minorités nationales reconnues par l’État roumain, avec des statuts précisés dans les documents officiels, et qui sont des langues faisant partie du répertoire langagier d’une région. Compte tenu du fait que la notion de langue maternelle est opératoire dans de nombreux contextes, il faut préciser ici que ce n’est pas le cas de la Roumanie.

Le cas de la région du Banat 

Les implications de la situation géographique sur les évolutions linguistiques et culturelles de la région 

En raison de sa situation géographique, le Banat est une région qui par sa position de carrefour a été propice aux contacts et aux échanges diversifiés, économiques, politiques, culturels et linguistiques qui s’y sont déroulés au cours du passé. Dans le passé, la position géographique du Banat a favorisé les échanges économiques compte tenu du fait qu’il est placé aux carrefours des routes commerciales des Balkans, tout en bénéficiant de la protection militaire de l’Empire des Habsbourg. La description de Bocşan rend compte de la situation géographique du Banat au XVIIe ou XVIIe siècle et de ses effets sur le répertoire linguistique de ses habitants:

Situé le long de la principale voie fluviale de l’Europe, à une époque où l’expansion continentale s’oriente vers l’Est, [le Banat] a assuré la communication ininterrompue des autres territoires de l’Empire avec l’Europe Centrale, il a perpétué des liens d’ancienne date avec le monde des Balkans et les territoires roumains du Danube. Des considérations géopolitiques et des raisons de politique intérieure de la monarchie ont joué en faveur de l’octroi d’un statut juridique à part pour le Banat, devenu, dès 1718, domaine de la couronne des Habsbourg, jouissant de différents privilèges ; cela aura une influence considérable sur l’histoire de la province au XVIIIe siècle, lorsque va commencer l’expansion vers l’Est. (Bocşan, 1986 : 8-9) .

Les coordonnées géographiques désignaient un espace avec des frontières naturelles (les rivières Mures-Tisza et le Danube) situé à l’est de la chaîne des montagnes les Carpates, à partir de la rivière Mureş jusqu’à ce qu’elle croise la Danube. C’est seulement à partir de 1716, après la fin de la domination ottomane et l’instauration des Habsbourg que cette région ressemble à sa forme d’aujourd’hui. Cette position géographique privilégiée et les frontières avec des peuples divers favorisaient également des contacts à des niveaux diversifiés avec les populations voisines. Tout en gardant des relations avec les roumains des autres provinces, les Banatais ont ainsi expérimenté l’altérité grâce aux échanges linguistiques et culturels avec les Serbes, les Hongrois et les Allemands. Néanmoins, ces échanges ont été développés surtout par l’intermédiaire des activités économiques qui se développaient sur la voie fluviale, comme la citation ci-dessus le souligne. C’est ainsi que la vie économique dynamique et prospère de la région a imprimé un rythme intense aux rencontres linguistiques, partielles ou totales. Travailler ensemble dans des communautés mixtes du point de vue linguistique a certainement renforcé le contact entre ces langues-cultures. Le besoin de communiquer pour prendre des décisions avec des personnes qui ne partageaient pas nécessairement la même langue a conduit progressivement au développement des compétences linguistiques diversifiées. D’autre part, une situation informelle, comme le voisinage a encouragé le transfert lexical des éléments communicationnels courants tels les salutations ou du vocabulaire de la vie quotidienne, nom de fruits ou légumes, activités, etc.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I – CADRE CONTEXTUEL
INTRODUCTION : LES EFFETS DE LA SITUATION GEOGRAPHIQUE ET DE L’EVOLUTION HISTORIQUE ET POLITIQUE DE LA ROUMANIE SUR LE REPERTOIRE LINGUISTIQUE DES CITOYENS ROUMAINS
LE CAS DE LA REGION DU BANAT
LES POLITIQUES LINGUISTIQUES EN ROUMANIE ET LEUR ECHO DANS LA REGION DU BANAT
CHAPITRE II – CADRE THEORIQUE
LA PLACE ET LE ROLE DE L’APPRENTISSAGE INFORMEL A LA LUMIERE DES THEORIES SOCIALES DE L’EDUCATION
LES APPORTS DES THEORIES DE L’EMERGENCE A LA CARACTERISATION DE L’APPRENTISSAGE FORMEL, INFORMEL ET NON-FORMEL
LES LIENS ENTRE LA THEORIE DES COMMUNAUTES DE PRATIQUE ET L’APPROCHE ECOLOGIQUE
DU SENTIMENT D’EFFICACITE PERSONNELLE DANS UNE APPROCHE ECOLOGIQUE DE L’APPRENTISSAGE DE L’ANGLAIS
CONCLUSIONS DU CADRE THEORIQUE
CHAPITRE III-CADRE METHODOLOGIQUE. ANALYSE ET DISCUSSION DES RÉSULTATS
CADRE METHODOLOGIQUE
ANALYSE DES RESULTATS DE LA RECHERCHE
ANALYSE ET DISCUSSION DES DONNEES
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE THEMATIQUE
BIBLIOGRAPHIE ALPHABETIQUE
SITOGRAPHIE
TABLE DES ANNEXES
ANNEXES

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