Les forêts humides de Madagascar sont connues pour leur richesse en espèces fauniques (Andreone, 1996) surtout en herpétofaune (Andreone et al., 2008). Au niveau de ces forêts, de nombreuses espèces d’amphibiens et de reptiles ont une aire de distribution restreinte notamment sur les hautes montagnes comme Andringitra, Ankaratra, Tsaratanana et Montagne d’Ambre (Raselimanana, 2008 ; Raselimanana et al., 2009 ; Townsend et al., 2009 ; Vences et al., 2009 ; Vieites et al., 2009 ; Köhler et al., 2010).
Le Parc National de la Montagne d’Ambre (PNMA) a été le premier parc créé dans la grande île en 1958. Elle présente des variabilités sur le plan géologique, géomorphologique, pédologique et climatique permettant l’installation de nombreuses espèces uniques à cette aire protégée (Morris & Hawkins, 1998 ; Glaw & Vences, 2007 ; Ratsoavina et al., 2011). Ces dernières décennies, beaucoup de chercheurs travaillant sur les amphibiens et les reptiles ont déjà mené des études au niveau du PNMA (Ramanantsoa, 1974 ; Raxworthy & Nussbaum, 1994, 2006 ; D’Cruze et al., 2008 ; Glaw et al., 2009 ; Ratsoavina et al., 2011 ; Prötzel et al., 2015). Ces études ont montré l’importance de cette zone en termes de biodiversité herpétofaunique.
GENERALITES
Parmi les groupes de vertébrés à Madagascar, les reptiles atteignent un taux d’endémicité spécifique très élevé (Raxworthy, 2008). La grande île est un centre de diversité spécifique des caméléons (Brygoo, 1971 ; 1978) incluant approximativement 40% des espèces connues dans le monde. Les caméléons de l’île sont répartis dans 4 genres : Brookesia et Palleon ou caméléons nains avec respectivement 30 espèces et 2 espèces, Calumma avec 37 espèces et Furcifer ou les vrais caméléons avec 20 espèces (Glaw et al., 2013 ; Uetz et al., 2018). Ces groupes d’animaux sont essentiellement restreints dans les écosystèmes forestiers humides de l’Est et dans les forêts sèches caducifoliées de la partie occidentale de l’ile (Raselimanana & Rakotomalala, 2003).
Le genre Calumma a connu un essor taxinomique remarquable grâce à diverses études phylogénétiques durant le 21ème siècle. Ces études ont conduit à l’identification de plusieurs nouvelles espèces du genre telles que les espèces du groupe C. brevicorne (Raxworthy & Nussbaum 2006) ou la découverte de C. vohibola dans le groupe nasutum (Gehring et al., 2011) ou encore la découverte de C. roaloko du complexe C. boettgeri (Prötzel et al., 2018). Effectivement en 1997, Böhme a rapporté que le genre n’était composé que de 19 espèces seulement. Pourtant ces quinze dernières années, plus de 10 nouvelles espèces ont été décrites (Tilbury, 2014) dont cinq autres dernièrement nommées par Prötzel et ces collaborateurs ( 2017, 2018).
Les espèces du genre Calumma sont totalement endémiques de la grande île (Townsend et al., 2011). Elles sont reparties dans le Nord et l’Est de Madagascar et sont associées à des forêts humides (Andreone et al., 2005). Aucune des espèces de Calumma n’a été connue dans les forêts sèches occidentales (Jesu et al., 1999). Toutefois, il existe quelques espèces qui fréquentent des milieux jusqu’à 2 800 m d’altitude (Raxworthy & Nussbaum, 1994).
Cette étude sur la contribution à la bio-écologie est focalisée sur les deux espèces de moyenne et de grande taille du PNMA à savoir Calumma amber et C. ambreense. Calumma amber appartient au groupe de C. brevicorne où elle a été longtemps enregistrée comme telle dans des différents ouvrages (Brygoo, 1971, 1978 ; Raxworthy & Nussbaum, 1994). Puis, elle a été nommée C. amber du fait de la localité et de la coloration jaune au niveau de la tête des individus mâles ainsi que d’autre caractère spécifique (Raxworthy & Nussbaum, 2006).
Tandis que la deuxième, C. ambreense a été décrite pour la première fois par Ramanantsoa en 1974. Elle a été considérée longtemps comme une sous-espèce de C. oshaughnessyi. Puis, elle a été renommée par Glaw et Vences (2007) en raison de certaine particularité qui la distingue des autres espèces. Les deux espèces sont endémiques dans le PNMA.
PRESENTATION DU MILIEU D’ETUDE ET DES ESPECES ETUDIEES
Présentation du milieu d’étude
Situation géographique
Cette étude a été réalisée dans le PNMA, dans la partie Nord de Madagascar, à environ 47 km de la ville de Diego- Suarez et à 7 km au Sud de Joffreville. Le massif est compris entre 12°31’ et 12°44’ de latitude Sud et 49°03’ et 49°13’ de longitude Est. Auparavant, il est nommé PN et RS Forêt d’Ambre mais actuellement PN sous le n° décret 2015-776 du 28 Avril 2015. Il couvre une superficie de 23 010 ha (MNP, consulté le 19 Octobre 2018).
Climat
L’extrême Nord de Madagascar est soumis à un climat tropical sec caractérisé par un hiver froid, sec et venteux, et un été chaud et humide (Donque, 1975). Cependant, la Montagne d’Ambre présente un microclimat de type tropical humide avec une précipitation moyenne annuelle de 2 378 mm dans les zones situées aux environ de 1 000 m à 1 200 m d’altitude (Donque, 1975). Sur le versant Est, la pluviométrie augmente en moyenne de 292,5 mm par tranche de 100 m d’altitude. En périphérie, les stations météorologiques enregistrent un minimum de 1 500 mm de pluie/ an (Rossi & Rossi, 1998). A 1 000 m d’altitude, juillet est le plus frais (17,6 ºC) et février est le plus chaud (21 ºC). La présente étude a été effectuée lors de la saison humide où la précipitation est assez forte et une accentuation du vent (Période du cyclone).
Hydrologie
La Montagne d’Ambre joue un rôle de château d’eau pour toutes les zones périphériques. Elle est vitale pour les moyens de subsistance de la population se trouvant entre Anivorano-Nord et la baie de Diego-Suarez. Le massif présente en tous six lacs de cratère, 32 cours d’eaux permanents et 36 cours d’eaux saisonniers. Parmi les 68 cours d’eaux, les plus importants sont Besokatra, Saharenana, Irodo, Antomboka, Andranofanjava, Sandrapiana, Andongoza et Andohan’Ankarana (Chaperon et al., 1993).
Géologie et géomorphologie
La Montagne d’Ambre est un massif volcanique de surrection qui s’était formé environ 14 millions d’années en Pliocène (Goodman et al., 1996 ; Battistini, 1965, 1996). C’est le plus grand et le plus ancien volcan de Madagascar (Brenon, 1972). De ce fait, la totalité des formations de la Montagne d’Ambre reposent sur un substrat basaltique d’origine volcanique (Besairie, 1965). Le massif présente une topographie dyssymétrique de l’Est à l’Ouest. La barrière Nord- Sud mesurant 30 km, divise en deux le relief de cette région : la façade Ouest est très abrupte, avec une pente de 16% formée par un relief tourmenté, tandis que le versant Est est peu accidenté avec une inclinaison moyenne de 5% (Barat, 1958). L’altitude varie de 600 m à l’Ouest du côté de Masorobe- Bemanevika jusqu’à 1 475 m au sommet d’Ambre (Rakotonandrasana, 1997) dont la majorité des crêtes dépasse 1 000 m.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. GENERALITES
II. PRESENTATION DU MILIEU D’ETUDE ET DES ESPECES ETUDIEES
II.1. Présentation du milieu d’étude
II.1.1. Situation géographique
II.1.2. Climat
II.1.3. Hydrologie
II.1.4. Géologie et géomorphologie
II.1.5. Faune
II.1.6. Flore
II.2. Matériels biologiques
II.2.1. Positions systématiques
II.2.2. Calumma amber Raxworthy et Nussbaum, 2006
II.2.3. Calumma ambreense (Ramanantsoa, 1974)
III. METHODOLOGIE
III.1. Choix des sites et de la période d’étude
III.2. Collecte des données
III.2.1. Observation nocturne
III.2.2. Etude biométrique
III.3. Traitement des données et analyse statistiques
III.3.1. Evaluation de la structure de la population
III.3.2. Etude de la distribution altitudinale chez les deux espèces
III.3.3. Analyse des paramètres morphométriques
III.3.4. Analyse de la préférence en termes de perchoir
IV. RESULTATS ET INTERPRETATIONS
IV.1. Structure des populations de C. amber et de C. ambreense
IV.1.1. Nombre d’individus recensés par site d’inventaire
IV.1.2. Classe d’âges
IV.1.3. Sex-ratio
IV.2. Distribution altitudinale
IV.3. Variation morphométrique chez Calumma amber et chez Calumma ambreense
IV.3.1. Variation des variables morphométriques suivant l’altitude
IV.3.2. Variation morphométrique suivant le sexe
IV.3.3. Variation de la masse corporelle suivant l’altitude
IV.4. Préférence en termes de perchoir
IV.4.1. Type de perchoir
IV.4.2. Hauteur du perchoir
IV.4.3. Type de plante utilisé comme perchoir
V. DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES