Contexte et généralités: reconquête des fronts d’eau

 Contexte et généralités : Reconquête des fronts d’eau

« Plusieurs initiatives récentes ayant comme cadre un front fluvial, témoignent d’un véritable « retour » de la ville contemporaine vers l’eau. Les fronts de fleuve urbains, longtemps délaissés ou sous-utilisés, deviennent aujourd’hui des nouveaux lieux de référence dans la ville: nettoyés, réaménagés, débarrassés des fonctions subalternes qui les occupaient plus au moins officiellement, revendiquent de nouveau la place qui leur avait été refusée par les évolutions urbaines de la seconde moitié du XXe siècle. Ils deviennent ainsi une nouvelle destination urbaine, des espaces de convivialité, d’échanges, de rencontres… mais aussi des espaces disputés par différentes fonctions souvent antinomiques. » Maria Gravari-Barbas

Le sujet, d’actualité, est en effet à l’origine d’une bibliographie très abondante, en France comme à l’étranger. Peu nombreuses sont aujourd’hui les villes situées au bord de l’eau, portuaires ou non, qui ne soient engagées dans un processus, modeste ou ambitieux, de « revitalisation » de leurs berges. « Où que l’on se trouve, il suffit de se promener au bord de l’eau pour percevoir la mutation, ou la reconversion dont fait l’objet cette frange d’espace entre ville et fleuve » Le phénomène, plutôt récent en France, n’est pas nouveau. Il a en effet émergé dès les années 1950 dans les villes portuaires nord-américaines, les villes de Boston et de Baltimore constituant les exemples historiques de cette reconversion, aujourd’hui quasi-universelle, de ce que l’on appelle communément les « waterfronts ». La bibliographie consacrée aux villes portuaires, maritimes ou fluviales, constitue de ce fait la littérature fondatrice en matière de « reconquête » des fronts d’eau urbains et notamment la thèse de Maria Gravari Barbas. C’est elle que, par conséquent, l’on envisagera en premier, tout en gardant à l’esprit les problématiques liées à la «revalorisation » contemporaine ville/fleuve.

Il est donc question dans cette première partie, de comprendre quels sont les enjeux (généralisation et naissance du concept, acteurs, limites), de comprendre la/les fonctions de cette nouvelle « waterfront attitude », ainsi que le rôle majeur que le fleuve représente pour la ville. Cela nous permettra d’en étudier l’exemple de trois cas français, afin de vérifier nos hypothèses de départ et surtout d’avoir une meilleure compréhension de la situation française en terme de « revalorisation » des fronts fluviaux.

Quels enjeux en terme de réaménagement et de redécouverte des fronts d’eau 

Il s’agit ici de comprendre ce phénomène récent apparu tout d’abord en Amérique puis en Europe Occidentale. En ces termes, comment le processus est né, quelles sont les limites et surtout quelles en sont les acteurs ?

Vers une tendance globale, la « waterfront attitude »

On assiste à un réel bouleversement qui s’esquisse en divers points du monde, en rapport avec le développement des politiques de l’environnement et le souci de la qualité de la vie. L’émergence de sensibilités nouvelles et la forte demande sociale en espaces publics et en espaces de loisirs en ville remettent le fleuve au centre de tous les intérêts. Ce retournement vers le fleuve qui offre des espaces libres et un horizon dégagé, semble en effet correspondre à un besoin de nature ou plutôt à l’idée que l’on s’en fait. Les villes fluviales redécouvrent leurs bords d’eau auxquels elles avaient dénié toute qualité et leur forte potentialité pour le renouvellement de l’image de la ville. Les nombreux exemples de revalorisation de fronts d’eau entrepris dans le monde entier avec l’aménagement d’espaces de loisirs et de culture, de commerce, de bureaux et de logements, ont un effet de boule de neige, révélant aux citadins le plaisir de vivre près de l’eau. En Europe, l’entreprise probablement la plus importante et la plus médiatisée est l’aménagement des bords de la Tamise à Londres, engagée au début des années 1980 avec la reconquête progressive des docklands à l’est de la vieille cité.

De nouveaux rapports fleuve-ville apparaissent et deviennent un enjeu important notamment par une « revendication essentielle pour les populations urbaines ». «Dans l’ensemble des projets de front d’eau qui marquent les années 1980 et 1990, on trouve cette grande problématique du « retour », notamment avec des grands projets urbains sur des espaces linéaires (le long de fleuve ou de rivière): les Docklands londoniens, les fronts d’Anvers, de Hambourg, de Rotterdam, de Lisbonne, de Séville, de Glasgow… » s’appuyant sur la redéfinition du rapport entre la ville et son fleuve, visant à requalifier de manière structurante des grandes portions de l’espace urbain. De nombreuses friches industrialo-portuaires situées en front de fleuve viennent constituer bien souvent les dernières grandes réserves foncières dans la ville. On peut citer comme projets-phares : les Confluences à Lyon, le réaménagement de Boulogne-Billancourt et de l’Ile Séguin.

Les limites de cette reconquête, vers des conflits sociaux, économiques ou spatiaux ?

De nombreux projets sont à l’origine de conflits importants: si l’ensemble des acteurs locaux, associations et citoyens cherchent à « réintroduire » le fleuve dans la ville6 et dans les pratiques de ses habitants, les approches, les représentations et le but recherché ne sont pas toujours les mêmes selon la position du protagoniste. Les deux exemples qui suivent, montre je pense, une partie de ces conflits. On assiste souvent à des conflits de représentations et d’intérêts des acteurs locaux mais aussi de fonction de l’espace, comme le dit Naud sur la vision contrastée de Montréal et Québec présenté ci-dessous. On assiste à des tensions sur des espaces de nouveau convoités. Des fonctions entrent en conflit qu’elles soient productives et portuaires, de consommation, ludiques ou récréatives. Les projets pionniers en matière de reconquête des fronts d’eau et notamment ceux qui ont vu le jour dans les années 1970 et 1980 sur la côte Est des Etats-Unis ont été pendant longtemps à l’origine d’une image caricaturale de l’American Waterfront (Gravari-Barbas, 1998). Pour exemples: (Underground Atlanta à Atlanta, St Antony Main à Minneapolis, The Terminal à Cincinati, The WestEnd Marketplace à Dallas, Jacksonville Landing à Jacksonville, le Riverwalk à Nouvelle Orléans, le South Street Seaport à New York, sont tous des projets de la Compagnie Rouse créés pendant les années 1970 et 1980. Chacun de ces exemples montre une limite de ce modèle de développement en terme de fréquentation et de rentabilité commerciale.

« Afin d’illustrer ces propos, prenons pour exemple Québec et son fleuve le SaintLaurent où un certain concept américain de Waterfront s’interpose désormais entre la ville historique de Québec et le fleuve Saint Laurent, la disparition progressive de l’espace public riverain de qualité a provoqué une baisse graduelle de la fréquentation du littoral urbain (Naud, 2000). Il en résulte que, quand on demande aux visiteurs de Québec de préciser « les éléments les plus caractéristiques et les plus intéressants de la région de Québec », la catégorie «fleuve » obtient un score qui oscille entre 0 et 0,7 % (en comparaison l’aspect historique de la ville s’affiche à 50-60 %) des éléments les plus intéressants pour les visiteurs. La capitale du Québec ne profite pas de la présence du fleuve au niveau des attraits tels que perçus par les visiteurs, comme si la ville ne possédait ni fleuve ni rivages. On peut ainsi conclure que certains aménagements fluviaux, non seulement n’ont pas consolidé la présence du fleuve dans la ville, mais l’ont au contraire affaibli. » (GRAVARIBARBAS, 2004, P36) Cet exemple montre alors une mauvaise réappropriation du fleuve dans la ville. Pour avoir moi même visiter la ville de Québec, il est effectivement difficile d’avoir une lecture clair du réaménagement des bords de fleuve. La place n’est ni donné aux riverains et encore moins aux touristes. Aucun aménagement n’est fait au sens d’une réappropriation par la population de ce lieu. Cet espace est plutôt dédié à l’économie. On retrouve un conflit d’ordre spatial et économique. C’est la représentation du fleuve comme valeur marchande versus fleuve comme ressource collective.

Autre exemple, celui de l’Ile de Nantes, dont nous parlerons en seconde partie. Ce fut le projet phare du retour vers la Loire, auquel tenait tant la municipalité du maire JeanMarc Ayrault. Nantes est une des premières villes européennes à mener une politique urbaine tournée vers l’eau. Néanmoins, certaines critiques sont émises quant à l’approbation de la réussite de l’île de Nantes par la municipalité, espace qui devait être au début une Cité Internationale des Affaires. En effet, plusieurs associations réunies en collectif ont oeuvré après la fermeture des chantiers navals pour que l’aménagement de l’Île de Nantes tienne compte du passé particulier de la ville. Aujourd’hui on reproche à la municipalité de tenir « un discours axé sur un retour vers le fleuve, sans pour autant mener assez de projets liés à cet objectif : les aménagements des quais de Loire demeurent discontinus, le commerce fluvial n’est pas soutenu ».

Les conflits sont donc principalement politiques en terme de conflits d’intérêts et spatiaux avec pour l’exemple de Québec un « échec » de la réappropriation de ses berges.

Qui est au centre de ces requalifications ? Auteurs et acteurs de ces nouveaux espaces

Il est évident que cette question est en lien direct avec la nature des acteurs qui mettent en place ces projets de requalification des fronts fluviaux. Il est montré que les promoteurs et les agences immobilières ont été les premiers à exploiter ce filon. Par le biais de cette reconquête, cette « ruée vers l’eau » se traduit souvent par une réelle flambée des prix et un processus de gentrification, souvent mal contrôlé.

Prenons dans ce cas pour exemple la ville de Chicago. C’est l’exemple même d’un processus de gentrification mal contrôlé avec une réduction notoire de l’espace de front de fleuves accessible au public. Les projets de reconquête de la rivière, souvent impulsés par des associations motivées par la sauvegarde du fleuve et des vestiges industrialoportuaires qui jalonnent son parcours dans la ville, ont été déviés et ont prioritairement servi à la création de plus values.

Dans l’évaluation des projets de requalification, la question des acteurs est donc essentielle. Qui donne part à l’impulsion du redéveloppement? Qui met en place les projets et qui est-ce qui les contrôle? Qui est-ce qui en profite? De quelle manière se fait la régulation entre public et privé? Quelle est, finalement, la marge de participation des citoyens? (GRAVARI-BARBAS, 2004, P36). Il s’avère que les acteurs locaux s’emploient à utiliser le fleuve comme un outil essentiel de la planification urbaine.

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Table des matières

Introduction
I/ Contexte et généralités: reconquête des fronts d’eau
Chapitre 1 : Quels enjeux en terme de réaménagement et de redécouverte des fronts d’eau
1) Vers une tendance globale, la « waterfront attitude »
2) Les limites de cette reconquête, vers des conflits sociaux, économiques ou
spatiaux ?
3) Qui est au centre de ces requalifications ? Auteurs et acteurs de ces nouveaux
espaces
4) Le lien ville/fleuve, une difficile « soudure »
Chapitre 2 : De la symbolique du fleuve vers un espace investi de nouveaux sens
1) L’intégration du rôle symbolique
2) Le fleuve patrimoine
3) Une nouvelle fonction des fronts d’eau : une ambiance festive
Chapitre 3 : Le fleuve, élément structurant et « reflet d’images urbaines »
1) Paysage fluvial : Thématique urbaine largement diffusée
2) Le fleuve, un élément structurant
Chapitre 4: Un « nouvel art » d’exprimer l’espace public par l’aménagement
II/ Vers un lien entre la ville et son fleuve ?
Chapitre 1 : Présentation des cas d’étude.
1) La ville de Nantes et la Loire, une histoire.
Nantes et son île : L’île Saint-Anne.
2) Bordeaux et ses quais, une histoire forte.
3) Lyon, vers une réappropriation du Rhône et de la Saône
Chapitre 2 : L’émergence politique, un appui dans la reconquête fluvial
1) Nantes et sa politique centrée sur l’ouverture vers Loire.
2) Lyon : Vers une reconquête de ses berges ?
3) Bordeaux, vers un discours sur un nouveau lien entre la ville et son fleuve ?
Synthèse Chapitre 2
Chapitre 3 : Des projets d’aménagement et événements culturels, sources d’un
retour vers le fleuve ?
1) Un aménagement au service du loisir, de la culture et d’un retour vers le fleuve
Synthèse Chapitre 3, Partie 1 et Chapitre 1
2) Des événements marqueurs d’un retour au fleuve
Conclusion générale

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